Y AURA-T-IL UNE FIN AU DRAME RWANDAIS ?

 

 

LA JUSTICE,
LA PAIX,
LA RECONCILIATION,
LA DEMOCRATIE,
LE DEVELOPPEMENT,
OU EN EST LE RWANDA EN 2001 ?

 

 

 

TABLES DES Matières

 

Y AURA-T-IL UNE FIN AU DRAME RWANDAIS ? *

Abréviations *

INTRODUCTION *

Ont collaboré à la rédaction de ce témoignage *

Rédaction finale *

1 LA SITUATION POLITIQUE AU RWANDA *

1.1 L'ACCORD DE PAIX D'ARUSHA: LA GRANDE DESILLUSION. *

1.2 LA DEMOCRATIE *

1.2.1 Le FPR se mue en parti-Etat *

1.2.2 La privatisation du pouvoir *

1.2.3 L'instauration d'un état policier *

1.2.4 La politisation de l'administrative politique *

1.2.5 Une démocratie sans partis politiques *

1.2.6 Une mascarade électorale *

1.2.7 La négation des ethnies *

1.2.8 Les atteintes à la liberté d'expression *

2 LES VIOLATIONS DES DROITS DE L'HOMME PAR LE FPR DES 1990 à 2001 *

2.1 LES CRIMES CONTRE L'HUMANITE *

2.1.1 Les massacres des populations *

2.1.2 Les poursuites et arrestations arbitraires *

2.1.3 Les disparitions *

2.2 PRISON *

2.2.1 Les conditions de détention *

2.2.2 Des enfants incarcérés *

2.3 LES CACHOTS *

3 LA JUSTICE *

3.1 DES LOIS TAILLÉES SUR MESURE *

3.1.1 Introduction *

3.1.2 Une magistrature ethniquement « pure » *

3.1.3 Une culture de la peine de mort *

3.1.4 Une justice minée par l'immixtion du FPR *

3.1.5 Une justice corrompue *

3.1.6 La "présomption de culpabilité" *

3.1.7 Une justice minée par la délation *

3.2 LE GACACA *

3.2.1 L'historique *

3.2.2 Le GACACA : Loi taillée sur mesure *

3.2.3 Le GACACA et les présumés criminels du FPR *

3.2.4 Le retour à la juridiction traditionnelle et le droit à la justice *

3.3 JUSTICE ET RÉCONCILIATION NATIONALE *

3.3.1 Une justice au service d'une seule ethnie *

3.3.2 Les syndicats de délateurs *

3.3.3 Exclusion comme système de gouvernement *

3.3.4 La corruption, le squattage et le pillage du pays. *

3.4 LE TRIBUNAL PÉNAL INTERNATIONAL POUR LE RWANDA (TPIR) *

3.4.1 Les missions du TPIR *

3.4.2 Dysfonctionnement du TPIR *

3.4.3 Le TPIR instrument de réconciliation ? *

4 LA SITUATION SOCIO-ÉCONOMIQUE. *

4.1 LA DESTRUCTION DÉLIBÉRÉE DES FORÊTS ET DES CULTURES: *

4.2 LES INTEMPÉRIES DE SÉCHERESSE: *

4.3 LE DÉVELOPPEMENT DU MILIEU URBAIN ET LA MARGINALISATION DU MILIEU RURAL *

4.4 LE PILLAGE ÉCONOMIQUE EN RDC. *

4.4.1 Les taxes. *

4.4.2 Le pillage des ressources du sous-sol. *

4.4.3 L'occupation des biens et des terres congolais. *

4.5 LE REGROUPEMENT FORCE *

4.5.1 Les camps de concentration *

4.5.2 La villagisation forcée (Imidugudu). *

4.5.3 Le squattage des biens et expropriations *

4.5.4 Les camps de rééducation et le climat de terreur *

4.6 LES PIECES D'IDENTITE *

4.7 LA SANTE DE LA POPULATION *

4.8 LA SCOLARISATION *

5 SECURITE *

5.1 L'APR, UNE ARMEE CONTRE LA POPULATION *

5.2 LE COUT DE L'ARMEE *

5.3 LES INSTRUMENTS DE REPRESSION *

5.3.1 La DMI : Directorate of Military Intelligence *

5.3.2 LDF Local Defense Force *

6 L'AIDE FINANCIERE AU RWANDA *

6.1 UNE AIDE AUX PAYS EN GUERRE *

6.2 UNE ATTITUDE BIENVEILLANTE DES BAILLEURS DE FONDS *

CONCLUSION *

1. Dans le domaine de la démocratie *

2. Au niveau de la Justice *

3. Au niveau du TPIR *

4. Au niveau du respect des droits de l'homme *

5. Au niveau de l'armée *

6. La réconciliation *

7. L 'aide au développement. *

 

Abréviations

AFDL Alliance des Forces Démocratiques de Libération du Congo

APCR Association pour la Promotion de la Culture Rwandaise

APR Armée Patriotique Rwandaise

ARI Agence Rwandaise d'Information

ARP Agence Rwandaise de Presse

BM Banque Mondiale

CDR Coalition pour la Défense de la République

CLIIR Collectif pour la Lutte contre l'Impunité et l'Injustice au Rwanda

CND Conseil National de Développement

CNRS Centre National de Recherches Scientifiques

CRDDR Comité pour le Respect des Droits de l'homme et la Démocratie au Rwanda

DMI Directorate of Military Intelligence

FAO Food and Agriculture Organisation of the United Nations,
Organisation des Nations Unies pour l'agriculture

FAR Forces Armées Rwandaises

FIDH Fédération Internationale des Droits de l'Homme

FMI Fonds Monétaire International

FPR Front Patriotique Rwandais

GIEP Groupe International d'Eminentes Personnalités (créé par l'OUA)

GTBE Gouvernement de Transition à Base Elargie

GTZ Geselschaft für Technische Zusamenarbeitung

HCR Haut Commissariat des Réfugiés des Nations Unies

HRW Human Rights Watch

ICTR International Criminal Tribunal for Rwanda

IRIN Integrated Regional Information Network
United Nations Office for the Coordination of Humanitarian Affairs

LDF Local Defense Forces

MDR Mouvement Démocratique Républicain

MDR PARMEHUTU Mouvement Démocrate Républicain Parmehutu

MINUAR Mission des Nations Unies pour le Rwanda

MRND Mouvement Révolutionnaire National pour le Développement

MSF Médecins Sans Frontières

ONG Organisations Non Gouvernementales

ONU Organisation de Nations Unies

OPJDR Organisation for Peace, Justice and Development in Rwanda

OUA Organisation de l'Unité Africaine

PAM Programme Alimentaire Mondial

PDC Parti Démocrate Chrétien

PDI Parti Démocrate Islamique

PL Parti Libéral

PNUD Programme des Nations Unies pour le Développement

PSD Parti social Démocrate

RDC République Démocratique du Congo

RDR Rassemblement pour le Retour des Réfugiés et de la Démocratie au Rwanda
Rally for the Return of Refugees and Democracy in Rwanda

RPA Rwandan Patriotic Army

RPF Rwandan Patriotic Front

RTLM Radio Télévision Libre des Mille-collines

TPIR Tribunal Pénal International pour le Rwanda

UDPR Union Démocratique du Peuple Rwandais

UNICEF United Nations Children's Fund
Fonds des Nations Unies pour l'Enfance

INTRODUCTION

Depuis plus de dix ans, le Rwanda vit une tragédie sans pareil dans l'histoire de ce pays.

En effet, le premier octobre 1990, des soldats du Front Patriotique Rwandais (FPR) vivant jusque-là en Uganda, ont attaqué le Rwanda et l'ont fait entrer dans un cycle de violence sans précédent. Cycle d'atrocités qui a endeuillé des milliers de familles, qui a entraîné une crise économique aux conséquences désastreuses pour la population, et qui a causé la destruction des infrastructures socio-sanitaires mettant ainsi la population survivante dans un dénuement total.

Le soutien logistique, politique et médiatique dont a bénéficié le FPR lui a permis de mener une guerre de soit disant « libération » et, au bout du compte, cette « libération » s'est muée en massacres, en exode des populations, en viols, en pillages et en destruction des biens :

Le régime démocratique tant promis est devenu un système politico-financier basé sur le favoritisme, le clanisme et l'ethnisme.

La « bonne gouvernance »: la gestion du pays se résume au pillage des biens de l'Etat par un groupe de militaires qui s'est déclaré au-dessus de la loi

L'Etat de droit, argument justifiant l'invasion, a été remplacé par un régime de répression sans égal en Afrique.

Les droits de l'homme : la violation des droits de l'homme est devenue une pratique quotidienne depuis 1990, dépassant de loin celle du régime précédent que le FPR était sensé combattre.

En effet, l'article 51 et 76 du Protocole additionnel de Génève du 12 août 1949 relatif à la protection de la population civile impose la protection des enfants et des femmes. L'article 35 stipule :

« dans tout conflit armé, le droit des parties en conflit de choisir des méthodes, ou moyens de guerre n'est pas illimité. Il est interdit d'employer des armes, des projectiles et des matières ainsi que des méthodes de guerre de nature à causer des maux superflus ».

En plus, l'article 57 relatif aux précautions dans l'attaque du protocole I aux Convention de Genève du 12 Août 1949 stipule :

« les opérations militaires doivent être conduites en veillant constamment à épargner la population civile, les personnes civiles et les biens de caractère civil ».

Ces articles ont été violés constamment par le FPR au Rwanda et actuellement en République démocratique du Congo. Les agresseurs se livrent à l'extermination des populations civiles dans le pays ou les territoires occupés avec une méthode de « nettoyage », terme utilisé par eux et qui mène tout droit à des crimes contre l'humanité, dans les régions vidées de leurs populations locales, les occupants déploient les populations tutsi venant d'autres pays ou laissent les collines sans occupants pour en faire des pâturages.

Le FPR ayant été le premier à parler d'épuration ethnique, comment qualifie-t-il cette pratique de guerre qui décime des familles entières ? Comment la Communauté internationale peut-elle justifier les manœuvres criminelles du FPR ? Peut-elle continuer à ignorer les représentants de la société civile interne et de la diaspora congolaise, burundaise et rwandaise qui revendiquent protection de la population et le respect de leurs droits ? Jusqu'à quand les témoins de ces crimes se tairont-ils ? Y-a-t-il des peuples qui n'ont pas droit à la justice ? Qui se reconnaît le droit de décréter cette injustice ?

L'analyse qui suit voudrait présenter la situation au Rwanda au cours des premiers mois de ce siècle (2001). Son souci est de montrer que la Justice, la Démocratie, la Paix, et la Réconciliation, constituent des conditions indispensables pour redonner l'espoir à tous les Rwandais.

Force est de constater au demeurant que le régime en place est loin de créer les conditions susceptibles d'améliorer la situation en s'engageant dans un projet de société capable d'amorcer résolument une véritable reconstruction du pays.

Ce document a été réalisé avec le soutien et la collaboration de :

Au Pays Bas :

 

 

 

 

CODAC
De Leeuwerik 43
2761 SB ZEVENHUIZEN
Mr Lin MUYIZERE

PRO-JUSTITIA RWANDA
Postbus 720
3000 AS ROTTERDAM
Mr Mathias MUNYANDAMUTSA

URAHO
Lange Spruit 19
2291 KZ WATERINGEN
Mme Spéciose NYIRANKURIZA

En Autriche :

 

 

 

 

OPJA
Organisation pour la Promotion de la Jeunesse Africaine
Lorenz Mandl-Gasse 33/1/2
A - 1160 VIENNE

En Allemagne :

 

 

 

 

Association Culturelle germano-rwandaise
Akagera Rhein e.V.
Postfach 37 23
D - 90018 NÜRNBERG
www.puk.de/akagera-rhein
Dr. Jean-Paul RWASAMANZI

En Espagne :

 

 

 

 

Fondation s'Olivar
Estellencs (Majorque)
Tél 34 97 161 85 93
olivar@pangea.org
Mr Joan CARRERO

Inshuti
Amis des Peuples Rwanda Burundi et Congo
Manresa (Catalogne)
Tél 34 93 832 01 62
casbar@wanadoo.es
Mr Joan CASÒLIVA

En Italie :

 

 

 

 

Rete "Pace per il Congo"
c/o Associazione Solidarietà - Muungano
Strada Cavestro 14/A
43030 VICOMERO (PARMA)
Tél : 0039 0521 314263
Fax : 0039 0521 314269
muungano@libero.it
Mme Teresina CAFFI

Au Canada :

 

 

 

CRC
Pierre C. Nkinamubanzi
Aylmer, Qc J9H 5P3
Tél:(819) 682 6250

Bernard Bizimana
St Eustache, Qc J7P 4B2
Tél: (450) 974 2981

En Belgique :

 

 

 

asbl AVICA vzw
Assistance aux Victimes des Conflits en Afrique Centrale
BP 107 ; 1080 MOLENBEEK 5
avica@wanadoo.be

COSAR
Collectif du 6 avril 1994 Rwanda
Tel : 0479/91 24 31  02/538.45.29 
ryumugabe24@hotmail.com  
Mr Adrien KALIHUNGU

vzw FEDA asbl:
Fondation Espoir D'afrique
Rue Volta 4 /bte7
1050 BRUXELLES
fondationfeda@infonie.be Mr Emmanuel NDAGIJIMANA

vzw SOFRADIE asbl
Rue de l'Escaut 95 - 97
1080 BRUXELLES
Fax : + 0032 2 428 86 69

 

vzw SOS RWANDA-BURUNDI asbl
Rue Paul Pastur 31
B 6230 BUZET
Tél./fax : + 0032 71 84 59 31
sos.rwabuco@skynet.be
Mme Martine SYOEN
Mr Christiaan DE BEULE

 

Synthèse finale terminée à Buzet (Belgique), le 4 avril 2001.

 

1. LA SITUATION POLITIQUE AU RWANDA

L'Accord de paix d'Arusha signé le 4 août 1993 entre le Gouvernement rwandais et le FPR avait constitué la base d'une gestion politique du pays et d'une vraie réconciliation nationale. Cet accord fut le fruit d'âpres négociations soutenues par les grandes puissances, à savoir les USA, la France, l'Allemagne et la Belgique, sous le haut patronage de l'ONU et de l'OUA. Les pays voisins du Rwanda (Congo, Kenya, Burundi, Tanzanie, Uganda) étaient également présents lors de la signature de cet Accord.

1.1. L'ACCORD DE PAIX D'ARUSHA: LA GRANDE DESILLUSION.

Cet accord mettait d'une part fin, à la guerre et d'autre part jetait les bases d'un Etat de droit. L'Accord consacrait le retour des réfugiés tutsi, l'instauration de l'Etat de droit, l'avènement de la démocratie, la «bonne gouvernance» au Rwanda, la promotion d'une gestion plus saine et plus équitable du patrimoine national.

Faisaient partie intégrante de l'Accord de Paix :

Cet accord prévoyait en outre la mise en place d'un Gouvernement de Transition à Base Elargie (GTBE) et d'une Assemblée Nationale de Transition dans un délai ne dépassant pas 37 jours, suivi d'élections générales dans les deux ans.

D'emblée, il apparaissait que cet Accord de paix n'était, dans le chef du FPR, qu'une ruse pour parvenir à son objectif premier qui était la prise de tout le pouvoir par les armes, fût-ce au prix d'un bain de sang. Dans ce but, le FPR n'a jamais cessé ses préparatifs en vue de poursuivre la guerre.

Plusieurs faits le prouvent:

A mesure que le FPR préparait l'imminence de la guerre, des brigades formées militairement et idéologiquement étaient dispersées sur toutes les collines du pays. A la veille du 06 avril 1994, ces infiltrés étaient particulièrement nombreux dans la ville de Kigali. Des observateurs avertis estiment leur nombre à 4000.

- Des camions escortés par la MINUAR déversaient dans la Ville de Kigali des militaires du FPR ramenés de leur quartier général de MULINDI. Ils partaient sous prétexte de chercher de l'eau et des vivres pour le bataillon du FPR cantonné dans les bâtiments du Parlement rwandais (Conseil National de Développement : CND). Jean Pierre MUGABE, un ancien officier de renseignements du FPR le dit en ces termes :

« Toutes les fois que les camions de l'APR se rendaient à Mulindi pour charger le bois de chauffage et d'autres approvisionnements destinés aux militaires basés au CND à Kigali, des armes et des munitions faisaient partie de la cargaison. Les armes et munitions étaient démontées pour être remontées une fois arrivées à Kigali.... »2.

Des sources de plus en plus convergentes s'accordent pour affirmer que les missiles qui ont descendu l'avion présidentiel ont été transportés dans la capitale grâce à ces convois.

- A Mulindi, les troupes du FPR avaient reçu comme consigne de leur chef, Paul KAGAME, de se tenir prêts pour la bataille finale.

Jean Pierre Mugabe témoigne encore sur l'état d'esprit du FPR envers cet Accord : 

«Pendant et après la signature des Accords d'Arusha par les belligérants, l'Armée Patriotique Rwandaise (APR) mettait la dernière main aux préparatifs de la bataille finale. Après la signature, Paul Kagame a visité toutes les unités de l'armée les exhortant à n'accorder aucune importance à ces accords. Il leur déclarait : 'Tenez-vous prêts avec vos armes à portée de main ; n'ayez pas confiance dans les accords d'Arusha' »3.

Parallèlement, le FPR intensifiait la campagne d'intoxication médiatique pour diaboliser le régime en place et dresser les partis de l'opposition et la population l'un contre l'autre.

C'est dans ce climat politique de fin 1993, début 1994, que le FPR a fait assassiner différents leaders politiques, notamment : Emmanuel GAPYSI (Membre du Bureau politique du MDR et Président du MDR à Gikongoro); Félicien GATABAZI (Ministre des Travaux publics et Secrétaire Exécutif du PSD); Martin BUCYANA (Président de la CDR); Fidèle RWAMBUKA, Député du MRND).

Dans la même période, les populations des zones tampons occupées par le FPR étaient systématiquement « purifiées » des éléments supposés hostiles au FPR : les intellectuels, les commerçants, les responsables des secteurs et des cellules, ainsi que les bourgmestres. Ces massacres ont été suivis par l'assassinat du Président Habyarimana.

Un autre ancien officier du FPR, actuellement en exil, Christophe HAKIZABERA, révèle :

« La première réunion de planification de l'assassinat du Président HABYARIMANA s'est tenue à KABARE dans les locaux de l'Evêché sous les auspices de l'Evêque HARERIMANA. Plus tard, des réunions de ce genre se tiendront à MBARARA dans la résidence du Général major SALIM SALEH, demi-frère du président Ugandais Yoweri Kaguta MUSEVENI, puis on sait pertinemment que la décision de tuer le Président HABYARIMANA a été prise à Bobo-Dioulasso au Burkina Faso en mars 1994 et que le major KAGAME a participé à cette réunion »4.

Le Président HABYARIMANA fut effectivement assassiné au retour du Sommet de Dar-es-Salaam le 6 avril 1994. Pour JP MUGABE :

« Ce sommet était un piège tendu pour emporter HABYARIMANA, permettant ainsi à KAGAME de prendre le pouvoir »5.

Cet assassinat et ses conséquences tragiques ont donné au FPR et à Paul KAGAME l'occasion attendue pour enterrer définitivement l'Accord de Paix d'Arusha et prendre le pouvoir par la force.

Le premier article de cet accord stipulait : "Il est mis fin à la guerre entre le FPR et le Gouvernement rwandais". Dès la reprise des hostilités le 06 avril au matin, l'Accord d'Arusha était violé et vidé d'office de sa substance.

Les faits parlent d'eux-mêmes:

L'attentat du 06 avril 1994 et la reprise de la guerre constituaient déjà une violation flagrante de l'Accord de Paix d'Arusha. La Communauté internationale y a assisté dans l'indifférence, sans la dénoncer et ni tenter de faire arrêter les massacres.

Lors de la mise en place du « Gouvernement d'union nationale » le 18 juillet 1994, le FPR s'est arrogé le droit de modifier l'Accord d'Arusha selon ses intérêts. En effet

Par une habile campagne d'intoxication au gré des circonstances, le FPR manipule cet accord mort-né auquel il recourt quand il en tire avantage.

1.2. LA DEMOCRATIE

Le peuple rwandais ne se fait plus d'illusion sur les idéaux de démocratie, d'Etat de droit, de réconciliation nationale et de respect des libertés publiques prônées par l'Accord d'Arusha.

1.2.1. Le FPR se mue en parti-Etat

La promotion des valeurs démocratiques n'est pas dans l'intérêt du FPR. Ainsi a-t-il tout mis en œuvre pour s'assurer le contrôle de tous les pouvoirs au mépris des principes élémentaires de la démocratie. Les leaders des partis politiques, les intellectuels ou hommes d'affaires sont assassinés ou contraints de choisir entre la soumission inconditionnelle au FPR et l'exil.

Selon Alype NKUDIYAREMYE, ancien magistrat sous le régime du FPR :

« Tous les partis politiques, excepté le FPR, n'ont aucun droit de se rassembler ou de convoquer leurs congrès, sous le fallacieux prétexte de l'unité et la réconciliation nationale. Les présidents de tous les partis, imposés à ces mêmes partis par le FPR car étant trop falots pour s'exprimer librement ou étant d'obédience FPR, ont souscrit au mois d'avril 1999, à un engagement de se laisser guider dans leur idéologie par le secrétaire général du FPR, Charles MULIGANDE »6 .

Tout le pouvoir est entre les mains de l'homme fort de Kigali. En 1994, il s'est érigé Vice-Président (poste non prévu dans l'Accord de Paix d'Arusha), et Ministre de la Défense nationale. Ce premier poste, qui n'est régi par aucun texte de l'Accord d'Arusha, couplé à celui de chef des armées, lui permet d'exercer des pouvoirs illimités et incontrôlés. Ainsi, ce cumul de pouvoirs a permis à Paul Kagame :

Le poste de Vice-Président qu'il occupait n'a pas été pourvu jusqu'à présent. Selon un témoin oculaire, lors d'une conférence de presse consécutive à sa prestation de serment comme président de la République le 22 avril 2000, un journaliste a demandé à Paul KAGAME s'il comptait nommer un Vice-Président. Celui-ci a répondu « Vice-Président wo kumara iki ? », littéralement « un Vice-Président pour quoi faire ? ». Il y a lieu de croire que le poste de Vice-Président était une nécessité car il fallait un Tutsi, membre du FPR pour contrôler le Président Hutu, qui n'a jamais été qu'une marionnette, un « Hutu de service ».

1.2.2. La privatisation du pouvoir

Un groupe d'anciens réfugiés, proches de Paul KAGAME, a tout mis en œuvre pour concentrer le pouvoir aux mains d'un cercle restreint du FPR. Un groupe d'observateurs, qui suit régulièrement ce qui se passe au Rwanda, souligne :

«  Le nouvel AKAZU tout autant que le précédent, se livre, au pillage des biens de l'Etat, au détournement de l'aide internationale, en y ajoutant les bénéfices tirés de la privatisation des sociétés publiques. Politiciens, militaires, hommes d'affaires liés à l'AKAZU affichent un train de vie luxueux, investissent au Rwanda dans des opérations rapportant des bénéfices considérables (comme par exemple, la construction des villas à louer aux institutions internationales), tout en exportant le plus gros de leurs gains à l'étranger. Dans de telles conditions, les postes stratégiques sont attribués secrètement, dans le huis-clos des puissants. Mais ses effets sont visibles : promotion et destitution, arrestations, disparitions et fuites à l'étranger d'hommes politiques et aussi d'intellectuels ayant dénoncé ou étant susceptibles de dénoncer le système de corruption et ses bénéficiaires"7

1.2.3. L'instauration d'un état policier

Les responsables à tous les échelons de l'administration territoriale (préfets, bourgmestres, conseillers de secteurs et responsables de cellules) sont choisis pour la plupart parmi les cadres civils et militaires du FPR.

Un réseau para-militaire constitué de groupes armés du FPR, le Local Defence Force est omniprésent dans toutes les cellules.

« En fait, le quadrillage de l'espace public, qui en permet la surveillance étroite, a non seulement été maintenu, mais renforcé par un dispositif paramilitaire : dans chacune des quelque dix mille cellules que compte le Rwanda ont été formés et armés cinq responsables de la "Local Defence Force" censés combattre en cas d'attaque, en réalité, chargés de faire la chasse aux interahamwe infiltrés et à leurs complices. Ces "défenseurs" se comportent de façon plus ou moins tyrannique. Détenteurs d'une arme et légitimés par les autorités, ils oppriment une population paysanne misérable qui ne peut éviter de verser un tribut à ses "protecteurs". »8

Notons que 50.000 personnes armées, dispersées dans la population, sans salaire mais avec autorité sur les sujets peuvent tomber dans des dérives incontrôlables. Cette situation rappelle bien des régimes totalitaires dans l'histoire.

Ces "anges gardiens" ont pour mission "officielle" de lutter contre les infiltrations et protéger la population. La réalité est qu'ils sèment la terreur, et soumettent à la chicote tout élément jugé hostile au FPR ou insoumis.

Dès l'installation du FPR au pouvoir, des camps de rééducation (ingando) ont vu le jour pour un endoctrinement idéologique de type marxiste de la population. Cette idéologie a été élaborée, pour le FPR, par des groupes d'extrême gauche en Europe. Ces camps servent à accueillir des réfugiés rapatriés en particulier des étudiants et des lettrés hutu. Une histoire du Rwanda, révisée à la manière du FPR, leur est enseignée. Le FPR reçoit, notamment de la Banque Mondiale, des fonds pour financer ce programme. Il en profite pour procéder à la formation militaire de la jeunesse.

1.2.4. La politisation de l'administration politique

Vers la fin des années 1970, dans le but de rapprocher le plus possible l'autorité administrative de la population, le pays a été subdivisé en préfectures, en communes, secteurs, cellules et nyumbakumi9. On comptait 11 préfectures (provinces), 153 communes, 900 secteurs, 2000 cellules. Une cellule, étant de 50 à 100 familles, subdivisée en nyumbakumi.

Cette structure pyramidale utilisée pour la mobilisation politique de la population était surtout fonctionnelle dans le développement médico-socio-économique du pays. La stratégie était basée sur les plans communaux de développement, donc axée sur le développement rural. Cette structure, au préalable fortement critiquée par le FPR, n'a pas seulement été maintenue mais renforcée et détournée pour l'instauration d'un état policier.

Depuis 1996 un « comité de sécurité » chargé notamment de « l'information, des migrations, des rondes nocturnes et de la protection des infrastructures de base » a vu le jour. Ce comité de sécurité, fortement imprégné de l'idéologie « IBUKA »10, n'est rien d'autre qu'un instrument de répression et de contrôle de la population. Exemple : tout visiteur doit se faire inscrire dans un registre ad hoc tenu par le nyumbakumi et le chef de cellule, ils sont tenus de signaler cette présence et tout déplacement à l'échelon supérieur.

Dès la prise de pouvoir, le FPR a créé la préfecture UMUTARA et 11 communes dans le Parc naturel de l'AKAGERA. En amenant plus de 600.000 têtes de bétail, en déboisant le parc et en transformant ainsi l'écosystème fragile de cette région aride, le micro climat local en a été bouleversé et la sécheresse s'est installée à partir de cette zone du pays. Le surpâturage a contribué à la prolifération de la fièvre aphteuse qui a fait irruption dans le pays depuis février 200111.

En décembre 2000, le nombre des communes a été réduit à 106 unités dorénavant appelées districts. De nouveaux noms ont été attribués aux communes et à certaines préfectures. Cette mesure est inquiétante dans la situation actuelle du pays où des enquêtes criminelles sont en cours et où celles visant les crimes commis par le FPR doivent encore commencer. Ces changements perturberont l'identification des lieux et donc des crimes qui s'y sont déroulés. Tout ce remue-ménage vise également la destruction des archives de l'état civil des victimes du FPR. La confusion créée mettra une fois de plus les criminels du FPR à l'abri de la justice. Les nouvelles entités administratives rappellent étrangement celles d'avant 1959, mettant ainsi un terme aux aspirations de la population de retrouver les acquis du référendum démocratique de 1961. Ce référendum organisé et supervisé par les Nations Unies avait mis fin au régime féodal.

1.2.5. Une démocratie sans partis politiques

La transition initialement prévue pour 2 ans, a été portée à 5 ans et prolongée de 4 ans par le FPR pour s'assurer seul l'arbitrage du pouvoir. Des militaires du FPR démobilisés et dispersés dans les différents coins du pays ont été présentés comme les seuls candidats aux élections des responsables de cellules et de secteurs. Ces élections se déroulent sous l'œil vigilant de la Local Defence Force (LDF) et de la police communale.

« Mais ces "élections" se sont déroulées de la manière suivante : les candidats n'avaient pas eu le droit de faire une campagne publique, ni de se présenter comme membre d'un parti ; les électeurs devaient se mettre en file indienne derrière le candidat de leur choix. »12

Par ailleurs, les autres partis ou ce qu'il en reste n'ont pas eu le droit ni de présenter leurs candidats ni de faire campagne. Faut-il rappeler que les autorités de Kigali ont opté pour le "no-party democracy" à l'instar de l'Uganda. Seuls les candidats du FPR, nommés dans les cellules et secteurs, éliront des collèges électoraux pour désigner des candidats aux élections communales, législatives et présidentielles. Ce système rappelle étrangement l'élection des membres du conseil supérieur du pays (organe législatif du roi) par des candidats soigneusement triés par des collèges électoraux des chefferies et des sous-chefferies dans les années 1950. Le régime de Kigali affiche dès lors les couleurs d'une république à visage monarchique et totalitaire avec une structure féodale basée sur la concentration du pouvoir dans les mains d'une infime minorité ethnique et clanique.

Est-ce en faveur de cette "démocratie" qu'en septembre 2000 les Etats Unis ont octroyé au gouvernement rwandais 4,5 millions de dollars ?13

1.2.6. Une mascarade électorale

Les élections du 6 mars 2001 ont désigné les conseillers de 106 districts communaux. Ces conseillers associés aux élus de mars 1999 des cellules et des secteurs éliront les maires de districts. Rappelons que les élus des cellules et secteurs ont été élus sur la place publique ou les électeurs, surveillés par le Local Defence Force et la police communale, devaient se mettre à la file indienne derrière le candidat de leur « choix ». Les observations des Organisations de Défense des Droits de l'Homme se passent de commentaires :

« L'organisation de défense des droits de l'homme (Human Rights Watch) a indiqué que dans le scrutin qui a commencé le 6 mars, près de 45 pour cent des sièges n'avaient qu'un seul candidat et qu'il n'y avait pas de candidat pour plus d'une centaine sur les 4650 sièges, selon les statistiques du gouvernement Rwandais.

"Cette élection est faussée dès le départ et ses vices sont plus importants que les irrégularités constatées le jour du scrutin" a indiqué Peter Takirambudde, le Directeur exécutif de la Division Afrique de Human Rights Watch.

"Un scrutin avec un seul candidat n'en est pas un. Dans certaines localités où il n'y a qu'un seul candidat, le scrutin devrait confirmer les choix des autorités", a indiqué l'organisation.

Elle a ajouté que plus de 90 pour cent des personnes en âge de voter se sont inscrites et beaucoup n'ont pas voté. Cependant, certains votants auraient indiqué à Human Rights Watch qu'ils l'ont fait tout simplement parce qu'ils redoutaient des punitions ou des amendes".

Dans certaines localités ou les autorités n'avaient pas de candidats, elles ont contraint les citoyens à se présenter, a indiqué Human Rights Watch qui a ajouté que les autorités auraient découragé certains candidats potentiels trouvés indésirables. Un candidat s'est retiré après avoir reçu la visite de soldats ; un autre après avoir reçu des menaces d'arrestation au téléphone".

"Trois candidats potentiels auraient été arrêtés, un dans l'est et deux dans le centre du pays".

"Des partis politiques ont été interdits de toutes activités électorales mais dans certaines zones, les dirigeants du Front Patriotique Rwandais, le principal parti au gouvernement, ont marqué leur préférence pour un candidat bien déterminé, a ajouté le communiqué. »14

« Autre bizarrerie : au lieu de noircir la case de leur choix, les électeurs doivent y appliquer leur empreinte digitale : on a déjà vu plus confidentiel. »15

Le bourgmestre hutu élu à Gaseke à été écrasé par un camion avec ses 16 supporters. Les circonstances de cet accident ont fait dire aux témoins oculaires qu'il s'agit d'un accident provoqué. Plusieurs incidents de ce genre ou d'intimidation ont été signalés dans l'ensemble du pays.

1.2.7. La négation des ethnies

La théorie de la non-existence d'ethnies est un instrument au service de l'exclusion ethnique dans la vie "politique".

La suppression de la mention ethnique sur les cartes d'identité n'a malheureusement pas contribué à l'intégration de tous les groupes ni dans la gestion du pays, ni dans les organes politiques supposés être la base de la décision politique. Cette mesure n'a pas effacé l'identification ethnique dans la société rwandaise. Au contraire, elle masque une situation d'exclusion systématique qui provoque des frustrations profondes. Il est grand temps de se rendre compte de cette évidence afin d'éliminer des raisons de tensions qui risquent d'atteindre des proportions insurmontables. Le Burundi qui n'a jamais eu la mention ethnique sur la carte d'identité, n'a pas échappé à cette ségrégation ethnique.

Pour J. H. BRADOL et A. GUIBERT :

«Affirmer l'inexistence des identités éthniques devient un moyen de nier le monopole des militaires tutsi sur le pouvoir politique. Dans ce cas le discours politique opposé à l'éthnisme sert à masquer la domination de la société par les représentants autoproclamés de la communauté tutsi »16.

La "tutsification" camouflée dans cette pratique se retrouve à tous les niveaux de l'Etat. L'Assemblée nationale, organe par excellence de la représentativité de la population, en constitue un exemple criant. Elle est issue des accords d'Arusha puis modifiée par le protocole d'accord entre des partis politiques.17 L'analyse de la composition de l'Assemblée nationale18 montre que sur les 72 membres, 39 sont d'origine Tutsi. Le bureau de l'Assemblée est entièrement Tutsi.

La dominance de la minorité tutsi est plus sournoise dans l'exécutif. Malgré l'instabilité et les remaniements ministériels très fréquents, le FPR a su montrer une image apparente d'un partage de pouvoir. Depuis 1994, le pouvoir exécutif n'a jamais été exercé par les gouvernements "à base élargie". Les ministres, non issus du FPR, sont intimidés, menacés et souvent supplantés par des Secrétaires d'Etat qui ont le pouvoir au ministère comme en témoignent des ministres en exil. 19

L'exemple ci-après est très parlant :

« A l'exception du gouvernement qui est la carte internationale du régime, en 1996, la majorité des députés à l'assemblée nationale, quatre des six membres dirigeants de la Cour Suprême, plus de 80% des bourgmestres, la grande majorité des secrétaires généraux, des ministres, des professeurs et des étudiants à l'université, la quasi totalité de l'armée et des services de sûreté de l'Etat sont des tutsi »20

L'Union européenne : "- encourage et soutient les efforts faits par le gouvernement du Rwanda pour favoriser la réconciliation entre tous les Rwandais, y compris par un dialogue avec tous les groupes qui rejettent le recours à la violence, ce dialogue portant notamment sur le partage du pouvoir et la protection des minorités et devant déboucher sur un renforcement des institutions et des processus démocratiques,"21

On est en droit de se demander si le Conseil européen ne devrait pas ajouter un article sur la protection des droits de la majorité à sa position commune.

1.2.8. Les atteintes à la liberté d'expression

La presse a été purgée d'éléments qui étaient soucieux de dire la vérité et jugés de ce fait hostiles au FPR.

Avant la prise du pouvoir par le FPR, le Rwanda comptait plus de 60 publications différentes. Combien en restent-ils maintenant ? La raison de la prise du pouvoir par le FPR n'était-elle pas la libération du peuple ? Que sont devenus tous ces rédacteurs ? Beaucoup ont été condamnés à l'exil, d'autres sont en prison ou ont été éliminés :

De même, la presse privée, comme d'autres moyens de communication est soumise à une censure impitoyable des autorités du FPR.

Quand en 1995, les rares ONG qui avaient osé relater les événements désastreux qui se déroulaient au Rwanda ont été expulsées, il y a eu un vide d'information concernant le pays. C'est à ce moment que fut créé l'Agence Rwandaise de Presse (ARP) qui ne diffusait que l'information favorable au gouvernement ou à l'armée. Ses communiqués étaient, sans vérification, repris comme vérité exclusive par certaines agences de presse internationales. Ce qui a contribué à répandre dans l'opinion internationale des informations fausses ou des demi-vérités.

Plusieurs assassinats et autres atrocités ont été ainsi attribué aux infiltrés par les médias propagandistes. Citons à titre d'exemples :

L'APR a fait croire que ces actes terroristes étaient l'œuvre des infiltrés. Quelques jours plus tard des éléments de preuves de préparation et d'exécution accusant le FPR nous parvenaient. Ces communiqués mensongers n'ont jamais fait l'objet de rectification et ont servi à manipuler l'opinion internationale à des moments très critiques où la réputation du FPR était compromise. Ces étrangers et des milliers de victimes africaines ont payé de leur vie la supercherie du FPR. Celui-ci avait besoin d'accabler des adversaires fantômes pour détourner l'attention de la communauté internationale des crimes qu'il commettait lui-même.

Est-ce que la presse internationale s'est fait berner par facilité, trop contente d'avoir un scoop pour meubler la Une ou est-ce qu'elle a délibérément collaboré à cette politique d'intoxication ? Dans les deux hypothèses, qu'en est-il du respect de ses règles déontologiques ?

Pour brouiller les pistes l'ARP a cédé la place à une agence "privée" ARI (Agence Rwandaise d'Information), dirigée par l'abbé Privat RUTAZIBWA, qui avait rejoint le FPR après son ordination sacerdotale en 1990. Il diffuse des informations propagandistes du régime d'une manière très sournoise.

2. LES VIOLATIONS DES DROITS DE L'HOMME PAR LE FPR DE 1990 à 2001

La guerre lancée par l'armée du FPR a décimé la population rwandaise dans toutes ses composantes. Les actes criminels du FPR ont aussi provoqué l'exode massif des réfugiés d'abord dans leur propre pays (un million de déplacés entassés dans des conditions inhumaines à l'entrée de Kigali à Nyacyonga à partir de 1994 ) ensuite plus de deux millions, seront dispersés à travers différents pays africains et européens.

2.1. LES CRIMES CONTRE L'HUMANITE

Depuis son agression le 1/10/1990 le FPR s'est rendu coupable de crimes de guerre sélectifs dans ce sens qu'il visait la population uniquement HUTU et des TUTSI nantis. Comment qualifier ces crimes ? Certaines ONG ou observateurs étrangers, Serge Desouter, Filip Reytjens, Gérard Prunier, Human Rights Watch, pour ne citer que ceux-là, n'ont pas hésité à designer ces actes inqualifiables de « crimes contre l'humanité ». Qu'attend l'ONU pour faire des investigations sur le FPR en vue d'aider le Rwanda à retrouver la voie de la Paix par la Justice en appliquant les conventions relatives à la déclaration universelles des Droits de l'Homme ratifiées par la plupart des Etats.

Le cauchemar du Rwanda ne commence pas en 1994, mais en 1990. La Commission de l'OUA (Groupe International d'Eminentes Personnalités : GIEP), qui a mené une enquête sur le génocide de 1994 au Rwanda, situe la route vers le génocide entre 1990 et 199324.

Les crimes commis par l'APR vont des massacres des populations civiles aux disparitions en passant par des arrestations arbitraires et la discrimination en ce qui concerne le droit à la santé et la scolarisation.

2.1.1. Les massacres des populations

Dès l'invasion du Rwanda par le FPR, le 1er octobre 1990, des milliers de civils ont été massacrés dans les Préfectures de Byumba et Ruhengeri.

La préfecture de Byumba qui comptait plus de 800.000 habitants recensés en 1991 a vu sa population réduite à moins de 150.000 habitants en avril 1994.

Le 6 avril 1994, l'attentat contre le Président Habyarimana a coûté la vie à 12 autres personnes dont un Président burundais et 3 Français. Cet attentat a été le détonateur des massacres de milliers de civils hutu et tutsi dans tout le pays.

L'attaque du camp de réfugiés de Kibeho en avril 1995 a tué entre 8 000 et 10 000 personnes la plupart était des vieillards, des femmes et des enfants.

En 1996, dans les communes de Kanama (Gisenyi) et Nyakinama (Ruhengeri) plus de 110 personnes ont été tuées

Selon Alison Desforges, 2 000 personnes ont été tuées dans Mukingi (Gitarama) en 1996.

Entre 1996 et 1998 des milliers de réfugiés rentrés de la RDC ont été massacrés au Rwanda. D'autres, au moins 200 000, ont été tués par des « unités spéciales » du FPR qui les ont poursuivi dans les forêts de la RDC. L'organisation Médecins Sans Frontières25 a estimé dans son rapport du 16 mars 1997 que 160 000 réfugiés seraient portés disparus sur un total de 341 550 réfugiés encore présents à l'est du Zaïre. Quelques charniers ont été signalés à Walikale, Musangfe, Hambo, Shabunda, Numbi, Shanje, Cimonga, Miti, Kashusha, Inera et Ngungu, Tingi-Tingi ...

A propos de ces massacres des réfugiés en RDC, Jean Baptise NKURIYINGOMA, ex Directeur de l'ORINFOR sous le régime du FPR, affirme :

«  Il est surtout important de noter que les nombreux charniers dont les images ont été cette fois montrées à la Communauté internationale ne seraient qu'un épisode d'une même tragédie qui depuis octobre 1990, à partir de la préfecture de Byumba ne fait que poursuivre son cours avec quelques moments plus aigüs comme Kibeho, Kanama, Masisi qui par mégarde ont été montré au caméra des médias internationaux ».26

« Lors d'une conférence de presse, le 6 mai 1997 à Bruxelles, Emma BONINO affirme que l'Est du Zaïre "a été transformé en un véritable abattoir au cours des 6 derniers mois" et elle accuse la rébellion d'en être responsable. »27

Selon des témoins, entre 1997-1999 des milliers de Hutu du nord sont morts dans les communes de la Préfecture de Gisenyi : KARAGO, RWERERE, KANAMA, MUTURA, NYAMYUMBA, GICIYE, KIBILIRA pour ne citer que ces cas extrêmes où la population HUTU a été bombardée par des hélicoptères de l'APR pilotés par des mercenaires. D'autres personnes ont été regroupées dans des maisons et brûlées vives.

Dans la Préfecture de Ruhengeri, les communes qui ont été surtout visées sont : KINIGI, KIGOMBE, NYAKINAMA, MUKINGO, GATONDE, NDUSU, NYARUTOVU, NYAMUTERA, NKULI.

Dans ces communes, les commandos du FPR qui ont commis des massacres parlaient de « nettoyage » et les témoins des ces tueries sont nombreux. Dans ces cas, ces commandos avaient déplacé les populations tutsi vers les centres urbains pour massacrer sans hésiter les populations rurales.

Cette stratégie est appliquée au Congo dans les zones contrôlées par l'armée rwandaise. Dans beaucoup de cas, les ONG et les observateurs des N.U. étaient témoins. Ceux qui ont osé témoigné ont été expulsés tout simplement pour violation du silence.

En décembre 1997, environ 7 000 personnes cachées dans la grotte de la commune de Kanama ont été brûlées vives par des grenades et ensuite emmurées.

Les milices du FPR connues sous le nom de « Local Defense Forces (LDF) qui quadrillent le pays ont massacré des milliers des civils sous prétexte qu'ils cachent des infiltrés.

Le 14 décembre 1997 en visite au Rwanda, Madame Mary ROBINSON, Haut Commissaire des Nations Unies pour les droits de l'homme a brisé le silence diplomatique sur la situation du Rwanda. Elle a condamné l'absence de volonté politique de réconciliation, la violation des droits de l'homme, l'augmentation des violences liées aux opérations de l'APR et la concentration du pouvoir.

Entre 1998 et 2000, 1.700.000 personnes, en majorité des civils, sont mortes directement ou indirectement à cause de la guerre d'occupation de l'Est du Congo menée et alimentée principalement par l'armée du FPR.28

Un correspondant de la BBC (British Broadcasting Corporation), affirme avoir vu plusieurs corps charriés par la rivière Akagera le 16 juin 2000.

Dans son rapport publié le 7 février 2000, l'ONG, l' Organisation for Peace, Justice and Development in Rwanda (OPJDR) fait ce constat « Pendant les 6 ans de son pouvoir le Front Patriotique Rwandais (FPR) a systématiquement massacré les civils hutu ». NKIKO NSENGIMANA, un des promoteurs du Projet NOUER en reconsidérant toutes les victimes de la guerre du FPR déclare, « Nous sommes en face d'un cataclysme dans lequel près de 40% de la population rwandaise a péri, soit 3 150 0000 vies humaines sacrifiées à l'autel de l'extrême intolérance qui s'est abattue sur le Rwanda. »29

De nombreux massacres et violations flagrantes des droits de la personne humaine ont eu lieu alors qu'étaient présentes quelques organisations internationales ainsi que des représentations diplomatiques. La plupart d'entre elles sont encore dans le pays. Elles restent muettes malgré toute la documentation à ce sujet et les plaintes des victimes. L'opinion internationale ne retient qu'un seul génocide, celui d'avril 1994. Il apparaît alors que le mot « génocide ne peut être utilisé que par ceux qui ont gagné la guerre »30.

Le silence de la Communauté internationale sur ces massacres ne la rend-t-elle pas complice de la violation des droits des populations, et de la situation dramatique qui menace toute la région ?

2.1.2. Les poursuites et arrestations arbitraires

Pour assujettir le peuple rwandais, le FPR recourt à des manœuvres d'intimidation à l'égard de tout élément perspicace.

Plusieurs catégories de la population sont ciblées :

Depuis l'attaque d'octobre de 1990, contrairement à ses attentes, le FPR a été mal accueilli et même fui par la population suite aux massacres des populations dans les zones conquises. Cette attitude négative de la population envers le FPR a provoqué une répression aveugle à l'encontre des gens influents, à savoir, les leaders naturels, les catéchistes, les chefs de cellule, les conseillers de secteurs, les enseignants, les agents sociaux, les fonctionnaires, les commerçants etc. Ces catégories de personnes, supposées hostiles au FPR, sont toujours les premières cibles et les victimes d'attaques meurtrières.

De retour du Rwanda un témoin a rapporté dans une conférence donnée à Bruxelles le 16 décembre 2000, que sur les collines beaucoup d'enseignants et de cadres locaux, qu'il connaissait, avaient été tués les autres étaient en prison à Gisenyi.

Ce sont ces personnes qui sont le plus près de la population et sont des témoins gênants susceptibles de dénoncer auprès des étrangers les crimes du FPR.

Des hommes d'affaires et toute personne possédant des biens sont poursuivis et chassés de leurs biens considérés comme butin de guerre par les conquérants. Toute tentative de les récupérer est découragée par les syndicats de délateurs (IBUKA) soutenus par les militaires, les autorités du FPR, les milices armées (local defense units) qui ne reculent devant aucun moyen y compris l'emprisonnement et la liquidation physique.

Les ex-militaires, des Forces Armées Rwandaises (FAR) auxquels le FPR avait promis la réintégration dans la nouvelle armée, en application des accords d'Arusha, ont été pour la plupart massacrés ou emprisonnés sous des prétextes divers.

Plusieurs autres ont été contraints à l'exil et sont constamment pourchassés par IBUKA et la DMI. Ainsi par exemple le Col. Rusatira, un des premiers officiers à accepter la réintégration dans l'APR est en exil. Si tôt qu'il a quitté le pays, le FPR l'a mis sur la liste de la première catégorie. Plusieurs de ses compagnons d'armes qu'il a encouragés à le suivre dans l'armée du FPR sont soit en prison, soit portés disparus, soit massacrés.

Les cadres politiques et intellectuels qui ne se soumettent pas au FPR font l'objet de persécutions et de poursuites permanentes. On leur reproche d'avoir travaillé sous la deuxième république et d'avoir soutenu le MRND. Ils sont tous, sans aucune distinction, accusés d'avoir planifié, organisé et perpétré les massacres de 1994. De ce fait ils sont massacrés sans merci. De plus une diabolisation collective se poursuit même en exil et les prive ainsi que les membres de leur famille des droits les plus élémentaires normalement reconnus à tout réfugié politique. En Belgique, en France, en Allemagne, en Suisse certains réfugiés attendent la régularisation de leur statut depuis bientôt sept ans31, sans droits, ni de travailler ni de bénéficier d'une quelconque formation leur permettant une intégration professionnelle dans la société d'accueil.

Parallèlement, ceux qui de près ou de loin ont des liens de parenté avec les cadres de la première république ou ont joué un rôle quelconque pendant ou après l'indépendance sont accusé d'être à l'origine de la chute du pouvoir féodo-monarchique, ancêtre du FPR. Enfants et petits-enfants sont globalement considérés comme coupables. Ainsi, déjà dans les zones tampons, administrées par le FPR entre 1991 et 1993, tous les responsables locaux ayant été membres actifs de l'ancien MDR PARMEHUTU ont été sauvagement massacrés. Ce facteur a constamment servi de prétexte à chaque avancée du FPR sur tout le territoire.

De la même façon, les responsables politiques des différents gouvernements de transition sont accusés indistinctement d'être eux aussi responsables du génocide et à ce titre considérés comme coupables. Même ceux qui, initialement étaient présentés comme "modérés", sont aujourd'hui tombés en disgrâce, harcelés et pourchassés, même en exil.

Au sein du FPR, des clivages latents viennent d'éclater au grand jour. Ils sont le résultat d'une part du favoritisme d'un noyau de militaires et de dignitaires venus de l'Uganda et d'autre part des désaccords avec la politique expansionniste et violente du FPR. La guerre qu'il mène en RDC cause beaucoup de pertes dans les rangs même des militants de première heure.32 De plus en plus accablé par la communauté internationale suite aux révélations et témoignages persistants sur les crimes commis par les responsables du FPR, Paul KAGAME est davantage isolé et ses anciens compagnons de route le fuient en cascade.

Même certains responsables de la redoutable et toute puissante association IBUKA ont choisi l'exil.33

Le 3 septembre 2000, lors d'une réunion avec le secrétaire général du FPR Charles MULIGANDE et sa délégation à Detroit aux Etats Unis, les idéologues fondateurs du FPR ont présenté leur démission. Ceux-ci ont reproché au FPR d'être une organisation corrompue et criminelle. Le professeur Alexandre KIMENYI a en outre publiquement reproché au FPR d'avoir trahi les TUTSI et a exigé son démantèlement.34 Leur désaccord avec la no-party democracy, défendu par le FPR, les a amenés à constituer en mars 2001 un nouveau parti politique aux Etats Unis.35

2.1.3. Les disparitions

Selon le rapport d'Amnesty International du 23 juin 1998, « De nombreux hommes originaires de la région nord - ouest ont été regroupés, puis placés en détention dans des casernes. Certains ont été relâchés, mais d'autres n'ont apparemment pas réapparus. Ainsi l'armée a procédé à des arrestations de ratissage le 3 décembre 1997 dans le secteur de Kimisagara, et 14 décembre dans celui de Gatsata, et le 20 décembre dans celui de Cyahafi, zone urbaine de Kigali. Les victimes étaient visées pour la simple raison qu'elles avaient des papiers d'identité indiquant qu'ils étaient originaires du Nord ».

Entre 1997 et 1998, les contrôles d'identité étaient systématiques. Une politique consistant à incriminer les personnes uniquement en raison de leur ethnie et de leur région d'origine a été à la base des arrestations à grande échelle.

Selon le même rapport, « les auteurs des disparitions sont des soldats de l'APR, aidés de civils tutsi de la région et des autorités locales ».

Les disparitions n'épargnent personne, toutes les catégories de la population sont touchées. Ainsi, selon toujours Amnesty International dans le rapport ci-haut cité :

« Fin Août 1997, 112 militaires (FAR) ont été arrêtés et détenus par l'armée patriotique. Malgré les appels répétés du HCR, il est interdit de leur rendre visite. On ne sait pas ce qu'ils sont devenus ».

En février 1998, plusieurs dizaines de paysans dans la commune de Rubavu (Gisenyi), ont été regroupés par les soldats de l'APR et ont été amenés dans un véhicule militaire à la gendarmerie. Ces paysans n'ont jamais réapparus. On suppose qu'ils sont morts. Des faits similaires ont été signalés dans plusieurs communes du pays notamment à l'occasion des réunions de population organisées à cet effet par les autorités communales où les militaires faissait éruption et triaient la population sur base de listes préétablies.

D'autres personnes disparaissaient dans les lieux de contrôle routier. Aux barrages les passagers sont obligés de descendre des véhicules, doivent se mettre en rang et subissent le contrôle d'identité. Sur des critères non établis certains peuvent continuer, des autres sont arrêtés.

A Kigali les endroits réputés pour ces enlèvements sont :

Dans les Préfectures de Ruhengeri et Gisenyi on peut citer les camps militaires de Muhoza (près de l'aérodrome de Ruhengeri), Mukamira et Bigogwe.

Pour tous les rwandais le terme : « disparu » sans laisser de trace signifie tout simplement « tué » sans témoin. Des témoignages récents font état de nouvelles disparitions.

2.2. PRISON

Les prisons du Rwanda sont surpeuplées : les chiffres officiels parlent de 130 000 prisonniers. Chose étonnante, on a assisté à beaucoup de décès dans ces prisons, mais le chiffre donné reste invariable et a même augmenté. Les prisons se remplissent au fur et à mesure qu'elles se vident, sans compter les détenus gardés dans des lieux non officiels et dont on ne parle pas. Il est rapporté que par semaine plus de 1500 Hutu sont arrêtés et transportés en prison où la mort en emporte la plus grande partie sans qu'aucun dossier judiciaire n'ait été créé.36

2.2.1. Les conditions de détention

Amnesty International dénonce les tristes conditions de détention au Rwanda :

Les entraves mises en place par le pouvoir pour maintenir les personnes innocentes en prison sont décrite par la même organisation comme suit :

« Bien que le gouvernement rwandais ait pris quelques mesures pour régler le nombre considérable de dossiers en attente de jugement, il n'a pas respecté ses engagements de libérer tous les prisonniers contre lesquels, il n'existe aucun élément de preuve ou dont la détention est illégale. Les autorités ont au contraire introduit à plusieurs reprises, en violation flagrante du droit international, des modifications de textes législatifs prolongeant la durée de la détention provisoire ».37

De plus, la nourriture n'est pas garantie aux prisonniers tous les jours. C'est ce que le Rapporteur des Nations Unies pour les droits de l'homme au Rwanda, Monsieur Michel Moussalli, note en ces termes:

"While the number of prisoners in the country had decreased slightly since 1999, lack of resources and the drought of the past year had created a "deplorable situation"...some of those incarcerated for common law crimes went without food for four days, while overcrowding had forced prisoners to be divided into "shifts" for sitting or sleeping. ..."38

Dans tous les cas quelle que soit la distance séparant la prison du domicile du prisonnier, la famille doit le prendre en charge. Des rapports alarmants nous sont parvenus au début de 2001 disant que les prisonniers n'étaient plus nourris suite à la pénurie de bois de chauffe, nécessaire pour la préparation des aliments.39

En août 1998, les Organisations de Droits de l´Homme dénoncent l'envoi de prisonniers en RDC pour servir de chair à canon dans la guerre d'agression que le FPR mène dans ce pays. Depuis 2000 des témoins signalent l'envoi de prisonniers vers les mines exploitées par les militaires du FPR en RDC. A ce sujet l'agence MISNA rapporte :

"One-thousand five-hundred Rwandan prisoners of the Hutu ethnic group have been working since the beginning of January in the Numbi mine, in the area of Kalehe, not far from the town of Nyabibwe (South Kivu, Democratic Republic of Congo)." "Dressed in typical pink Rwandan prison suits, the miners are working guarded by armed Kigali regular soldiers."40

2.2.2. Des enfants incarcérés

Les prisons du RWANDA connaissent un nombre impressionnant d'enfants incarcérés. L'organisation mondiale de l'enfance (UNICEF) parle de plus de 10.000 enfants détenus. "Le Rwanda représente bien sûr l'exemple extrême des souffrances vécues par les jeunes prisonniers », souligne Geert Cappelaere41.

Quelle que soit l'infraction commise, les enfants ne peuvent pas être enfermés avec les adultes. Leur jeune âge exige un encadrement psycho-socio-pédagogique, mesure qui n'a jamais été envisagée dans le cadre du Rwanda.

2.3. LES CACHOTS

Partout dans le pays, dans chaque centre, on compte plusieurs cachots. Les mauvais traitements et les tortures y sont nombreuses. L'exécution de détenus est courante et sans aucune forme de procès, la famille, le plus souvent n'est pas informée.

Les cachots les plus connus et réputés à cause des actes criminels et des disparitions sont par exemple : le cachot de la Brigade militaire de Muhima, le cachot de Nyamirambo et le cachot de Gikondo, tous se trouvant dans la préfecture de la ville de Kigali.

Sur les collines les gens appartenant souvent à l´ ethnie Hutu sont ramassés et arrêtés arbitrairement. Après avoir été brutalisés, roués de coups, soumis à des sévices divers, ils sont jetés dans des cellules de détention dite « cachot », insalubres, sans air, étroites, dans lesquelles les gens sont entassés les uns sur les autres. On peut citer 22 détenus, morts asphyxiés dans un cachot de la Brigade militaire de Muhima, préfecture de la ville de Kigali. Ce cachot contenait 74 personnes entassées au lieu des 10 normalement prévues42.

Plusieurs cas de ce genre ont été maintes fois signalés partout dans le pays par le H.C.R., la Croix Rouge Internationale, les Organisations de Droits de l´homme.

D'autres cachots plus meurtriers encore sont localisés dans les casernes, camps militaires, maisons communales et centres de la sécurité militaire (D.M.I.).

3. LA JUSTICE

3.1. DES LOIS TAILLÉES SUR MESURE

3.1.1. Introduction

Dès la prise du pouvoir en juillet 1994, le FPR a éliminé la plus grande partie de l'élite intellectuelle hutu, soit physiquement, soit moralement, soit idéologiquement ou politiquement. Le FPR a fait procéder également à l'emprisonnement presque systématique de toute l'intelligentsia qu'il trouvait sur son passage, tout cela en fonction de son agenda caché. Les prisons sont bondées depuis.

Pour légaliser ses actes de violations flagrantes des Droits de l'homme, le FPR a fait adopter des lois taillées sur mesure, qui lui permettent de maintenir préventivement les personnes incarcérées en prison. Il a créé pour ce faire un organe législatif', nommé et dominé par ce lui. La plupart des détenus sont emprisonnés depuis 1994, et sans aucun dossier à charge.

Pour commencer les procès, le FPR a tenu d'abord à faire une "épuration ethnique de la magistrature"43 pour s'assurer de sa mainmise sur la justice. C'est cette pratique que l'africaniste Filip REYNTJENS appelle "la tutsisation de la justice"44. Des Hutu qui ont échappé à ce système criminel et qui ont trouvé refuge à l'extérieur ont été mis sur les listes. Celles-ci condamnent avant toute justice. Dans le même ordre d'idées, la justice marche sur des injonctions de l'exécutif et une collaboration existe entre la justice et les syndicats de délateurs dont le plus important est l'association "IBUKA".

Devant les arrestations massives de Hutu, souvent sur simple dénonciation et sans aucun dossier, la communauté internationale venue au secours du nouveau régime a été sidérée de la manière dont le pouvoir traitait sa population par des arrestations arbitraires accompagnées de disparitions et d'assassinats. La situation s'est aggravée dès le retour forcé des réfugiés des camps en 1997. Depuis lors les prisons débordent et les conditions de détention sont effroyables: gangrène des membres inférieurs jusqu'à amputation suite à une position debout très prolongée; mort par suffocation dans des cachots communaux ; sans parler de la torture par la faim . D'autres formes de torture sont monnaie courante :" dans un document adressé à la MINUAR le 17 avril 1995 par les prisonniers de Gitarama, les tortures dénoncées sont : l'Ingoyi, les bastonnades ( au fer à béton, à la crosse de fusils et à la massue), l'arrache de dents, les coups de marteau, l'amputation de certaines parties du corps (pieds, mains, doigts etc. .), implantations d'épingles dans les organes génitaux masculins et ablations sexuelles au couteau chaud, etc ".45

Les quelques personnes libérées sont pour la plupart assassinées ou ré-arrêtées. Ainsi par exemple"en décembre 1997 et en février 1998, plus de 100 prisonniers libérés de la prison où ils croupissaient depuis 1994... ont été tués aussitôt arrivés dans leur commune d'origine à Butare ".46

Ce genre de libération faite pour tromper l'opinion sert en réalité d'occasion pour des arrestations 10 fois plus nombreuses. Pour preuve, l'Association "Avocats sans frontières ", citée par le quotidien belge "Le Soir" du 24 janvier 1998, affirmait qu'il y avait en moyenne 300 libérations et 3.000 nouvelles arrestations enregistrées chaque mois en 1997 "..47

Cette situation de déni élémentaire des droits de l'homme se fait au nom des lois taillées sur mesure difficilement qualifiables dans les normes internationales. Ainsi une loi portant suspension des règles relatives à la détention préventive et mise en liberté provisoire, dispose que ceux qui ont été emprisonnés avant 1997,resteraient en détention jusqu'en 1999. Ce délai expiré, la même loi l'a prolongé jusqu'en 2001. A cette nouvelle date d'expiration, qui dit qu'une nouvelle échéance ne sera pas fixée, puisque cette détention préventive est sans appel.

3.1.2. Une magistrature ethniquement « pure »

Pour ne laisser aucune chance aux Hutu accusés, la justice a été confiée à des éléments tutsi, formés en hâte. Les quelques rares hutu magistrats ou Inspecteurs de la Police Judiciaire ont été soit tués48, soit délibérément emprisonnés.

Pour pérenniser cette justice basée sur des considérations ethniques, le Gouvernement rwandais a même refusé que des magistrats étrangers lui viennent en aide arguant une question de souveraineté qui cache mal une volonté du FPR d'annihiler la population hutu par une mascarade de justice en les assimilant tous à des génocidaires.

3.1.3. Une culture de la peine de mort49

La peine de mort, prohibée par les Conventions internationales, est d'application constante au Rwanda. À ce sujet, le Conseil de la Communauté européenne a déclaré encourager :

"Le gouvernement du Rwanda à faire preuve de la plus grande modération dans les condamnations à la peine de mort et leur exécution, le but étant son abolition totale, et à respecter pleinement ses obligations au titre du pacte international relatif aux droits civils et politiques, ainsi que d'autres garanties internationales concernant la peine de mort.".

Le Rwanda n'a rien entendu de cet appel et continue pourtant de recevoir des aides de cette institution. On peut se demander de quelle façon la Communauté européenne évalue ses propres décisions.

Même récemment des peines de mort ont encore été prononcées à Ruhengeri50 (le tribunal de Première instance du 24 février 2001) comme dans d'autres régions du pays.

André Guichaoua commente ainsi les jugements rendus par le gouvernement de Kigali:

"346 jugements avaient été rendus au 31 décembre 1997 dont 304 pour la seule année 1997. Au 31 mars 1998, un total de 114 condamnations à mort avaient été prononcées et 22 exécutions publiques ont eu lieu le 24 avril 1998 au stade de Kigali où la population avait été massivement conviée."51

La Commission nationale pour la Réconciliation dans son dernier rapport soumis au sommet national sur l'unité et la réconciliation du 18 au 20 octobre 2000, indique que, à la date du 30 novembre 1999, 14,4% des 2.406 personnes jugées ont été condamnées à mort, soit une personne sur 7.52

3.1.4. Une justice minée par l'immixtion du FPR

Lors d'une conférence du mouvement des Monarchistes rwandais à Bruxelles, le 18 mars 2001, l'ex-Major (tutsi) Ntashamaje, a expliqué comment, étant juge à une juridiction militaire chargée de juger l'ex major Ngirabatware (un Hutu des ex-FAR), il a été violemment pris à partie par le Général Kagame lui-même, du fait qu'il avait refusé de cautionner la condamnation du Major Ngirabatware, sur base de fausses accusations.

Cette injonction du FPR sur le judiciaire est monnaie courante et d'autres exemples ne manquent pas. Le substitut Kayihura, chargé de l'instruction du dossier de Froduald Karamira, puis de Monseigneur Misago, a dû s'enfuir pour dénoncer qu'il en avait assez de servir d'instrument pour fabriquer des preuves en vue de faire condamner des gens dans des dossiers politiques. On a ainsi vu à la barre un témoin à décharge dont le parquet disait qu'il avait été assassiné avec la complicité de Monseigneur Misago.

La magistrature au Rwanda est dans l'étau du pouvoir exécutif.

« Au niveau des parquets, les préfets de préfectures croient avoir la compétence de donner des ordres aux procureurs. Les rares procureurs qui ont voulu garder leur indépendance vis à vis des préfets en ont payé les frais. »53

A titre illustratif il y a lieu de citer :

De même tous les Ministres de la justice qui ont tenté de s'élever contre ces pratiques ont été contraints d'abandonner leur poste :

Maintenant que le ministre de la justice, Jean de Dieu Mucyo, est un militaire membre de l'Armée Patriotique Rwandaise, on imagine combien la justice est muselée et criminalisée.

Au niveau des communes les inspecteurs de police judiciaire doivent obéir aux ordres des bourgmestres.

3.1.5. Une justice corrompue

La corruption est devenue chose "normale" au Rwanda. La population connaît les tarifs pour faire libérer quelqu'un, pour faire fixer la date de jugement, pour faire mener l'enquête, et même pour faire condamner quelqu'un. La corruption de la justice est telle qu'elle remonte jusqu'aux instances chargées ordinairement de légiférer. Ainsi, par exemple, un magistrat de la cour d'appel de Kigali, monsieur Augustin Ngendahimana, a reçu 300.000 Frs du député Jean Mbanda54, pour juger en sa faveur une affaire civile, dans laquelle il était impliqué. Des cas similaires sont nombreux dans différentes juridictions.

Par ailleurs certains prisonniers sont libérés après paiement des juges et du personnel de parquet. "Les innocents sont arrêtés et incarcérés et remplacent les coupables qui paient pour leur libération,".55

3.1.6. La "présomption de culpabilité"

Pour que personne n'échappe, une loi consacre l'usage de listes officielles ou sauvages qui désignent avant toute enquête les Hutu "génocidaires". Ces listes constituent des intimidations à caractère politique camouflées en accusations criminelles. Elles condamnent avant le jugement et constituent un raccourci imaginé par le pouvoir pour traquer les Hutu de l'extérieur qui ont pu échapper à la machine à tuer du FPR. Même ceux qui étaient hier des collaborateurs du FPR et qui l'ont quitté, ont été repris sur ces listes une fois sortis du pays. Les cas de Jean BARAHINYURA, ex-Commissaire à la documentation du FPR et le Général Léonidas RUSATIRA, en sont des illustrations éloquentes. Par contre, ceux qui ont accepté le diktat du FPR, qui ont accepté d'en être les instruments de propagande ont été rayés de la liste ou y ont été maintenus, celle-ci devant servir de chantage chaque fois que de besoin. L'association SOS Rwanda-Burundi a fait un travail remarquable sur les listes de délation. Nous y renvoyons toute personne qui serait intéressée par cette analyse56.

3.1.7. Une justice minée par la délation

L'association IBUKA est le syndicat de délateurs le plus organisé. Beaucoup d'autres oeuvrent dans un cadre plus informel. Sous le couvert de défendre et perpétuer la mémoire des victimes du génocide, elle va jusqu'à faire obstruction du fonctionnement de la justice. Cette association incite ses membres à fabriquer des preuves et à rassembler toutes sortes de dénonciations calomnieuses en vue de faire condamner des personnes préalablement désignées. Elle sème la terreur car les personnes qu'elles ciblent n'ont plus aucune chance de s'en sortir. Elles sont condamnées d'office. Celles qu'elle fait emprisonner, sont tuées une fois libérées. Cette organisation étend ses tentacules sur tout le territoire national et à l'étranger. Selon les témoins oculaires, les délateurs sont payés 50.000 FR rwandais par cas, pour fournir de faux témoignages contre des personnes dont on squatte les biens.

L'Association IBUKA est tellement puissante que ses membres vont jusque dans les tribunaux perturber le bon déroulement des procès. Amnesty International, dans son rapport "RWANDA : procès inéquitables, déni de justice " du 08 avril 1997 a fustigé le fait que des gens d'IBUKA se permettent de conspuer, au cours des plaidoiries, les témoins à décharge sans que cela provoque une quelconque réprobation de la part des juges.

IBUKA est en collusion avec le pouvoir en place qui la sollicite à des fins socio-politiques. Ainsi par exemple, ses manifestations sont venues pour forcer le départ des soldats de la Mission des Nations Unies au Rwanda (MINUAR II) en mars 1996. Une année auparavant, elle a été mobilisée lors de l'expulsion en décembre 1995 de 38 Organisations humanitaires. L'objectif était d'éloigner des témoins gênants des massacres de l'Armée Patriotique Rwandaise.

Les extrémistes tutsi Mutagwera Frédéric, l'ex-abbé Privat RUTAZIBWA, Jean Bosco IYAKAREMYE et le docteur KAYIJAHO sont parmi les plus grands idéologues d'IBUKA. Ces deux derniers se sont exilés suite à des divergences internes dans leur organisation. La main mise d'IBUKA sur tous les niveaux de la justice rwandaise reste prépondérante malgré les conflits apparents entre cette association et le pouvoir politique. Dans ces conditions, il est prévisible que les futurs tribunaux GACACA seront totalement dominés par l'esprit et la lettre d'IBUKA.

IBUKA a beaucoup de ramifications à l'extérieur. Celles-ci s'organisent pour traquer tout hutu en exil et fabriquent de faux témoignages notamment pour entraver leurs dossiers de demande d'asile. Ainsi, le CRDDR a tenté de démolir des dossiers de demande d'asile de réfugiés hutu en Belgique en y apportant des preuves qui se sont révélées fausses. En France on a le Collectif Girondin pour le Rwanda ; en Suisse on a ABISHEMA (Organisation des femmes d'origine rwandaise), IBUKA-Mémoire et Justice, Association Rwandaise de Suisse (CORS) et l'Association pour la Promotion de la Culture rwandaise (APCR) .

3.2. LE GACACA

3.2.1. L'historique

Le GACACA est un système judiciaire qui a servi pendant longtemps à la médiation familiale sur la colline au RWANDA et pour des conflits familiaux. Autour des sages de la colline les villageois se rassemblaient pour écouter avec attention les différends (dispute familiale, bagarre, vol, non-restitution de choses empruntées, insultes, injures, calomnies etc...) qui opposaient soit les membres d'une famille soit une famille à une autre. A la fin des différents récits et témoignages, des mesures de rapprochement étaient prises pour réconcilier les protagonistes dans une atmosphère de sagesse et de justice équitable. Malheureusement parfois ces mesures pouvaient être influencées par des pratiques religieuses ou divinatoires qui en diminuait l'objectivité. L'objectif étant le rétablissement de l'harmonie, le maintien de l'entente, de la cohésion et de la paix sociale. Le Roi avait le droit de vie et de mort sur les sujets. L'idée de désigner le coupable et de le punir publiquement n'était pas prépondérante dans l'esprit de GACACA.

Dès 1917, les fautes lourdes comme des crimes d'empoisonnement, d'assassinat ou de vol professionnel dépassaient le cadre de GACACA et devaient être adressés à l'autorité supérieure. Les juridictions indigènes devaient juger les affaires civiles et pénales en se basant sur la coutume et les traditions57. Ce système a continuellement subi des mutations. En 1943, les traditions et coutumes ne devinrent applicables, en matière judiciaire, que si elles n'étaient pas contraires à l'ordre public international58. Dès lors le Gacaca comme tel resta un système extra-judiciaire, un instrument pour régler de petits problèmes au sein des familles.

3.2.2. Le GACACA : Loi taillée sur mesure

La loi sur le Gacaca vise à punir les personnes que la loi organique N° 08/96 du 30 août 1996 range dans les 2e, 3e et 4e catégories, c'est-à-dire les personnes non susceptibles d'être condamnées à la peine de mort59. Les personnes relevant de la première catégorie sont justiciables des juridictions ordinaires qui appliquent les règles de fond et de procédure de droit commun. Dès lors il y a lieu de considérer le Gacaca nouvelle formule comme une juridiction exceptionnelle qui n'a rien à voir avec l'esprit du système GACACA ancien. Cela est d'autant plus vrai que cette loi crée des privilèges de poursuites et de juridiction,60 ce qui signifie qu'il y a des délinquants privilégiés et d'autres qui ne le sont pas. Et cela va se traduire par une justice à deux vitesses.

La catégorisation des criminels n'est pas fondée sur des critères objectifs car il faudra que les juridictions GACACA confectionnent des listes de toutes les personnes qui habitaient les cellules avant 1994, les listes des victimes et la liste de leurs auteurs. Or les gens n'ont pas une formation requise pour apprécier et qualifier les actes qui rentrent dans le cadre des infractions dont la répression incombe aux juridictions GACACA.61

Il n'y a pas non plus de système d'enquête fiable car il n'est prévu nulle part comment on va désigner les criminels. A ce sujet la composition des juridictions GACACA est surprenante. Le seul critère objectif pour en être membre, est celui d'être âgé d'au moins 21 ans. Si nous sommes en l'an 2001, quelqu'un qui a 21 ans actuellement en avait 14 en 1994. Etant donné que beaucoup d'adultes ont été massacrés dans ce pays, il est fort possible que ces juridictions soient composées en majorité de jeunes gens. Comment un enfant de 14 ans peut-il percevoir une situation et s'en faire un jugement objectif ? Sans doute qu'il sera influencé par des discours officiels qui ne reflètent pas nécessairement la vérité. L'idée de sagesse et partant d'objectivité est battue en brèche.

Même pour les plus âgés les critères de sélection sont d'une subjectivité et d'une naïveté enfantine. En effet, sur quels critères peut-on se baser pour déterminer si quelqu'un est intègre, c'est-à-dire une personne satisfaisant aux conditions énumérées par la loi sur le Gacaca, à savoir62:

Non seulement il est difficile de mesurer ces critères dans la culture rwandaise caractérisée encore par des relents de la féodalité et de la peur vu qu'une grande de la population a été fragilisée par une culpabilisation collective. 

D'autres critiques du système GACACA ne manquent pas et cette juridiction ne peut être qu'inopérante. En effet, entre temps la société a évolué, certaines institutions sur lesquelles se basait le GACACA ont disparu ou ont été carrément remplacées par des institutions modernes. Par ailleurs, cette institution GACACA basée sur la famille élargie ou sur le bon voisinage, est fondée sur l'existence des relations sociales normales et ne peut fonctionner dans la société rwandaise actuelle où le tissu social a éclaté. Aussi longtemps que la haine ou la méfiance réciproque divisent les gens, il est impossible de confier le jugement à ce niveau de la structure sociale paralysée par la présence contrariante du Local Defence Forces.

Au lieu de rendre la justice, ce système peut tomber dans les dérives telles que règlement des comptes, convoitise des biens, délations, surtout que seule une catégorie des victimes peut y recourir alors que d'autres victimes sont muselées par le pouvoir en place. La reconnaissance des droits de l'accusé et du plaignant d'organiser leur défense, ne sera pas respectée.

Les tâches juridiques attribuées à GACACA dépassent de loin le concept de conciliation de l'institution traditionnelle. Dans le système du GACACA, le rôle d'accuser et celui de juger se confondent au niveau du village. Aucun suivi ou conseil juridique n'est réalisable ni au niveau des "magistrats" et encore moins au niveau de la défense alors que les crimes que le GACACA devrait juger vont des petits conflits au meurtre63.

La pratique de ce GACACA est une façon de banaliser les crimes qui continuent à ravager la société rwandaise. Un crime qui porte atteinte à la vie d'autrui ne peut être considéré comme un simple différend opposant deux individus ou deux familles.

3.2.3. Le GACACA et les présumés criminels du FPR

Les juges et les avocats sont experts dans l'investigation des crimes, des infractions et des peines applicables à chaque cas. Ces experts du droit ont en général les moyens non seulement intellectuels mais aussi matériels pour découvrir le vrai coupable et pour déterminer la peine à lui infliger. Ils jouissent normalement de l'indépendance vis-à-vis des autorités politiques, administratives et militaires, et ont également le droit et le devoir de juger tout le monde y compris les responsables du pays. Or, le cas du RWANDA démontre que les responsabilités criminelles ne sont pas seulement le fait des populations civiles, elles se retrouvent également dans le chef des autorités politiques, militaires ou administratives. Le régime qui veut aujourd'hui recourir à la juridiction de GACACA ne démontre pas comment un certain nombre de ces responsables en exercice seront jugés étant donné que ce n'est pas le petit paysan dominé qui va les dénoncer.

3.2.4. Le retour à la juridiction traditionnelle et le droit à la justice

Le retour à la juridiction de "GACACA" est une prétention de défi à la modernité, une façon de priver les rwandais des acquis de la modernité dans l'exercice de la justice donc un non-respect du droit inaliénable de la personne humaine et une preuve tangible d'absence de démocratie. Le droit à la justice équitable n'a aucune raison d'être vu sous un angle particulier pour le RWANDA. Les Rwandais ont droit au respect comme les autres humains. Ils ont le droit d'aller de l'avant comme d'autres nations. Au moment où d'autres pays cherchent à améliorer leurs systèmes judiciaires pour une justice plus équitable respectant au maximum le principe des droits de l'homme, on propose pour le RWANDA un système particulier, un système traditionnel du moyen âge ne respectant aucune déontologie judiciaire!. Plusieurs voix se sont élevées contre le système GACACA, en avançant plusieurs arguments à l'appui. Le professeur NTAMPAKA précise :

"Au Rwanda, le système judiciaire traditionnel n'est pas étranger à l'organisation familiale en général. L'évolution de l'organisation socio-culturelle a eu un impact sur les règles applicables et sur les structures de règlement de différends. Comment peut-on aujourd'hui faire cohabiter ces institutions avec les juridictions modernes, peut-être défaillantes, mais mieux organisées et mieux préoccupées des droits individuels que des droits collectifs? Les institutions sur lesquelles la société se basait ont évolué; d'autres ont disparu ou ont été remplacées, comment peut-on sans adaptation réintroduire une institution basée sur une organisation familiale autre?  64;

Ce constat est également relevé par Amnesty International qui déclare que :

« Les personnes qui jugeront ces affaires extrêmement graves et complexes n'auront aucune formation juridique et pourront, dans certains cas, être personnellement intéressées au verdict, ce qui est susceptible de porter atteinte à la compétence, à l'indépendance et à l'impartialité de ces tribunaux » 65;

Malgré ces critiques fondées du système GACACA, des pays, dont la Belgique, ont versé des sommes énormes pour le mettre en place. Il est temps qu'ils se ravisent pour le bien du peuple Rwandais.

3.3. JUSTICE ET RÉCONCILIATION NATIONALE

L'Accord de Paix d'Arusha stipulait qu'il ne peut y avoir de paix durable au Rwanda sans promotion de l'unité et sans réconciliation nationale. A cette fin était prévue une Commission spéciale sur l'Unité et la Réconciliation nationale.

Des préalables avaient été définis : un partage du pouvoir équitable, l'Etat de droit et la justice pour tous et au service de tous

Les autorités du FPR n'ont cessé de mener une campagne médiatique pour sensibiliser la communauté nationale et internationale à collaborer à un projet de réconciliation nationale. Malgré la mise sur pied d'une Commission de réconciliation nationale dotée d'un budget important, force est de constater que 6 ans viennent de s'écouler et que le FPR n'a jamais créé des conditions pour une véritable réconciliation nationale ni même la réconciliation du Rwanda avec l'étranger. Les initiatives prises actuellement par le FPR pour la réconciliation nationale paraissent inappropriées pour rapprocher les communautés rwandaises. En effet, lors du Colloque de réconciliation tenu à Kigali du 18 au 20 octobre 2000, n'ont été invités que des participants désignés par le FPR et qualifiés par lui de "positive forces". Il a exclu ainsi les autres forces vives de la nation tant de l'intérieur que de la diaspora qui ne parlent pas son langage. Selon des témoignages de participants à la réunion, des sujets d'intérêt national, malgré leur importance dans le processus de réconciliation, ont été gardés tabou comme : la justice, la commémoration des victimes de la guerre, l'invasion du Congo par le Rwanda, le partage du pouvoir, la militarisation du pays...

Dans une conférence donnée le 16 décembre 2000, à son retour du colloque sur la réconciliation nationale tenue à Kigali, Bernardin NDASHIMYE a montré comment, ayant suggéré que l'on laisse aussi les Hutu commémorer la mémoire de leurs victimes, la proposition a été rejetée lors de la plénière. Cela donne l'idée de ce qu'est la réconciliation nationale dans l'esprit du FPR.

3.3.1. Une justice au service d'une seule ethnie

Il est impératif de condamner et de réprimer tous les crimes commis au Rwanda depuis 1990. Mais le système judiciaire actuel fortement soutenu par la Communauté internationale tant au niveau national qu'international (le TPIR) consacre la division du peuple rwandais entre une ethnie de bourreaux (les Hutu condamnés globalement), et une ethnie de victimes (les Tutsi seuls auxquels il faut rendre justice)

Depuis 1994, plus de 150 000 présumés coupables pour crimes de génocide croupissent dans les prisons mouroirs sans preuves de culpabilité.

Certains ont été libérés pour servir de chair à canons dans la guerre en RDC. Des groupes de délation servent «d'accusateurs sur demande» et permettent par leurs dénonciations la satisfaction de haines personnelles, l'élimination du concurrent et l'accaparement de ses biens.

Des listes officielles de présumés coupables ont été dressées et remises constamment à jour sans le moindre indice de culpabilité et au mépris des principes élémentaires de procédure judiciaire.

Au sujet de ces listes, Faustin NTEZIRYAYO, ancien Ministre de la justice du FPR souligne :

« Un autre exemple de la violation du principe de la présomption d'innocence est illustrée par des dispositions prévoyant la confection avant jugement de la liste des personnes rangées dans la première catégorie de personnes poursuivies pour crime de génocide et d'autres crimes contre l'humanité commis au Rwanda. Passibles de peine de mort, les personnes inscrites sur cette liste sont considérées comme des planificateurs des crimes ayant agi en position d'autorité à différents niveaux aussi bien politique, militaire qu'au sein de la société civile. La portée juridique de ces dispositions n'est pas claire.

Force est de constater toutefois que la confection de cette liste a plus servi à un agenda politique d'éliminer les personnalités de l'ancien régime considérées comme opposants ou d'autres personnes ayant une certaine influence de la société civile qu'à l'avancement des poursuites en permettant d'identifier les vrais responsables du drame rwandais ».66

Le même Ministre continue :

« Avec l'arrivée au pouvoir du régime en place à Kigali en juillet 1994, plusieurs personnes ont été arrêtées sur simple dénonciation par les autorités militaires et administratives ne possédant aucune qualité légale en matière de détention provisoire et accusées de participation au génocide et autres crimes commis en 1994. Aucune instance judiciaire n'existait alors. » 

A ce même propos, Alipe NKUNDIYAREMYE, ancien président du Conseil d'état et vice président de la Cour suprême sous le régime du FPR décédé en exil en Belgique, déclarait : « Actuellement, tout Hutu est présumé coupable de génocide. Le crime n'est plus d'avoir commis le génocide, mais plutôt c'est d'être né Hutu, c'est pourquoi, tout Hutu intellectuel, tant de l'intérieur que de la diaspora, qui ne veut pas être 'collabo' pour parler le même langage que Kigali, est appelé Interahamwe (génocidaire) ». 67

Alors que les crimes commis pendant la guerre sont imputés collectivement aux Hutu, ceux commis par des membres du FPR depuis 1990 et qui se poursuivent encore aujourd'hui, même dans les pays voisins, sous des prétextes divers, restent impunis avec la complicité silencieuse de la Communauté internationale. Ainsi à ce jour aucune arrestation dans les rangs du FPR n'a été décidée par le TPIR.

A ce sujet des rapports d'Amnesty International, Human Rights Watch et d'autres témoignages ont, preuves à l'appui, signalé que les membres du FPR y compris les plus hauts responsables sont impliqués dans de nombreux crimes de guerre et de massacres des populations civiles dans une totale impunité. Une justice qui consacre l'impunité pour les uns et un châtiment collectif pour les autres peut-elle être un instrument de réconciliation ?

3.3.2. Les syndicats de délateurs

Pour mettre en prison le plus grand nombre possible de Hutu et d'autres personnes dans le collimateur du régime, le FPR a institutionnalisé la délation sous la forme d'un véritable syndicat. Le plus grand de ces syndicats est l'association "IBUKA" Ces syndicats ont le rôle de fabriquer des preuves, soutenir et couvrir les faux témoins à charge.

Comment opèrent-ils et quelle crédibilité ont-ils ?

"Parfois un membre d'un syndicat demande la collaboration de ses associés pour 'livrer' quelqu'un ('gutunga' est le terme utilisé en kinyarwanda) en vue d'un règlement de compte ou avec des visées socio-économiques propres. Souvent ces syndicats sont sollicités par des particuliers qui profitent de la situation pour éliminer leurs adversaires. L'intérêt matériel se cache souvent derrière ces transactions. Des responsables civils ou militaires convoquent de temps à autre les membres de ces syndicats au bureau communal ou au campement militaire, pour "rendre service" dans la constitution de "faux dossiers" qui maintiennent des milliers d'innocents en prison."68

Pour s'attirer le soutien de la Communauté internationale et des bailleurs de fonds, le FPR aussitôt installé à Kigali a exploité le dossier du génocide pour attirer les bailleurs de fonds. Le génocide est utilisé comme arme pour poursuivre la guerre et la chasse aux adversaires où qu'ils soient, même au de-là des frontières rwandaises.

L'exploitation éhontée de ces tragiques évènements se fait sous plusieurs formes :

Des syndicats de délateurs sont omniprésents dans le pays pour dénoncer les « présumés coupables de génocide » (terme en opposition avec le terme juridique « présumés innocents » ) et les opposants au régime.

L'Association IBUKA (souviens - toi) suscite la désolation et la terreur dans la population hutu. Elle s'est érigée en Etat dans l'Etat. Cette association tutsi extrémiste consacre l'exclusion d'une ethnie par l'institutionnalisation d'une vision manichéenne de la société rwandaise divisée entre les victimes et les bourreaux.

Ainsi une commémoration du génocide pendant une semaine a été institutionnalisée. A cette occasion, les Tutsi morts entre avril et juillet 94 sont déterrés et réenterrés dans la dignité. Le Rwanda a été transformé en un vaste chantier de monuments « mémorial du génocide » où les ossements des victimes tutsi sont exposés

Seul le FPR détient le secret et le pouvoir magique de reconnaître l'ethnie des squelettes déterrés après les massacres. Ce moment est propice pour culpabiliser et rappeler constamment à certains ou aux Hutu qu'ils en portent collectivement la responsabilité. Les familles des Hutu massacrés pendant cette période, avant et après 1994, n'ont qu'à porter le deuil des victimes Tutsi et demander pardon. Elles n'ont aucun droit d'évoquer la mémoire des milliers des leurs massacrés par le FPR au Rwanda avant 1994, durant la guerre, dans les camps des réfugiés et dans les forêts du Congo-Zaïre.

Une frange de la population est constamment exhortée à commémorer ses victimes, à dénoncer les « coupables », à infliger aux Hutu un châtiment collectif et leur imposer d'oublier les leurs. Une politique de diabolisation collective d'une ethnie, d'incitation à la haine et à la vengeance ne peut pas conduire à la réconciliation. Peut-on guérir un malade en remuant constamment le couteau dans la plaie ?.

Le FPR est en train d'inventer sa nouvelle version de l'histoire du Rwanda. D'après le FPR, le génocide a été préparé par les colonisateurs et l'Eglise catholique, puis exécuté par les régimes hutu qui ont renversé la monarchie. Ils sont aussi « coupables » d'avoir créé les ethnies au Rwanda,

Le régime féodal soutenu puis lâché au profit de ceux qui ont supporté plus de 400 ans de domination et d'oppression n'a pas toléré la perte de son pouvoir. A son image, le FPR, depuis sa prise de pouvoir a été marqué par des slogans pseudo nationalistes, des attaques ouvertes destinées à réduire au silence et à néant l'autorité morale qu'est l'Eglise et contrer toute ingérence extérieure dans les affaires des Rwandais. Dans tout le pays, tout est mis en œuvre pour s'assurer la nomination d'autorités religieuses acquises à la cause du FPR. Il serait même question de créer une "Eglise Patriotique rwandaise" quasi indépendante de Rome et calquée sur le modèle chinois69.

Ainsi « la Restauration » du pays se fait à huis-clos. Pour conforter cette réécriture de l'histoire rwandaise une campagne de sensibilisation est menée tambour battant par le FPR pour créer des alliances avec des peuples ayant, selon lui, un passé « similaire». Les Juifs d'Israël et les peuples longtemps opprimés d'Afrique du Sud ont chaleureusement été conviés à prêter main forte au FPR.

A titre d'exemple, l'Afrique du Sud est présente par sa coopération militaire (fourniture des armes et formation des militaires), le rachat des sociétés et institutions privatisées (hôpital Roi FAYÇAL à Kigali; Alliance Air Lines , ex-Air Rwanda) et l'octroi des bourses d'études. Israël s'investit dans la construction des monuments commémoratifs du génocide.

3.3.3. L'exclusion comme système de gouvernement

Le FPR a institutionnalisé un modèle de gouvernance oligarchique. Selon Aldo Ajello, Représentant spécial de la Communauté européenne pour la Région des Grands Lacs : « Il y a au Rwanda un groupe de gens qui ont une grande influence sur les affaires de l'Etat. La plus grande partie de ces gens sont des militaires. Ce groupe forme une sorte de cabinet secret fort puissant, ce que les Anglais appellent un 'kitchen cabinet'. Kagame assure la liaison entre ce ' kitchen cabinet' et le gouvernement »70.

Ce « kitchen cabinet » du Président KAGAME ne regroupe que des Tutsi, essentiellement d'origine ugandaise, présents à tous les niveaux de prise de décisions et d'accaparement de richesses.

On reprochait au Président HABYARIMANA et ceux qui l'ont précédé d'avoir exclu des Tutsi. Des analyses objectives et des faits contredisent pourtant cette assertion:

"Leur proportion était plus élevée par rapport à leur poids démographique au niveau du total de l'administration centrale. Dans certains ministères comme ceux de la santé, des finances, du commerce, des transports, de la justice et du plan, leur pourcentage dépassait de cinq points le quota qui aurait dû être le leur dans cadre d'un équilibre strict. Ce quota était de dix points supérieurs dans quatre entreprises publiques sur les dix plus importantes entreprises du pays. En outre les ONG, les emplois des organismes internationaux et de la plupart des ambassades, étaient quasiment comme leur domaine réservé."71

Dans les affaires, cette prépondérance des Tutsi était également remarquable. Ils contrôlaient le pouvoir économique et politique: Valens KAJEGUHAKWA était propriétaire de la société pétrolière ERP, ayant eu longtemps le monopole dans la commercialisation des produits pétroliers et seul fournisseur exclusif du charroi civil et militaire de l'Etat. Il avait la société de transport CORWACO et était actionnaire majoritaire de la Banque Continentale Africaine pour le Rwanda (BACAR). Il a été le grand argentier du FPR.

Bertin MAKUZA était PDG de Rwanda FOAM (l'unique société de fabrique de matelas), Anselme SAKUMI était l'un des plus grands importateurs.

Silas MAJYAMBERE Représentant exclusif de la marque japonaise Nissan et des camions RENAULT, Evariste SISI propriétaire de SIEVA, l'une des plus grandes imprimeries et papeteries du pays. Assinapol RWIGARA financier de la société de fabrique de cigarettes, Antoine SEBERA, Charles SHAMUKIGA, Richard USENGIMANA ...avaient le monopole dans le secteur de construction par les sociétés Un Toit à Toi, Emujeco, Cometar, entreprise SEBERA, ....,

"Il est connu aussi que les grands chantiers étaient la plupart du temps confiés aux entreprises d'opérateurs tutsi (BNR, les immeubles des ministères, ..) et que le plus gros crédit jamais octroyé par le Conseil d'Administration de la banque Rwandaise de développement sous la deuxième République (350.000.000 FRW) l'a été en faveur d'un homme d'affaires tutsi, Mutangana, pour son entreprise Volta Super...".72

André KATABARWA a été longtemps Ministre des travaux publics, directeur de la société étatique ELECTROGAZ ensuite ambassadeur en Italie (entre 1992 -1993) pendant la guerre ; Ruzindana était ambassadeur en Egypte après être son passage comme vice-Recteur de l'Université Nationale du Rwanda.

Le Pére Chrysologue MAHAME était le « confident » du président HABYARIMANA. Entre 1991 et 1994, il a effectué de nombreuses missions « secrètes » en compagnie de Charles SHAMUKIGA auprès du FPR.

Tous ces dignitaires tutsi et bien d'autres, ont toujours bénéficié des faveurs du Régime HABYARIMANA. Ils avaient un réel pouvoir de par leur puissance économique dans le pays.

La politique d'exclusion du FPR se poursuit à l'égard des Hutu qui avaient espéré travailler pour le régime actuellement en place. En témoignent les nombreuses défections de hauts responsables ci-dessous :

Des divergences profondes sont apparues même au sein des rangs du FPR :

Cette liste est loin d'être exhaustive. La purge continue.

Le système du FPR, miné et corrompu, a donc consacré l'exclusion, comme système de gouvernement en interdisant les activités des autres partis politiques, en éliminant progressivement ses opposants ou ceux supposés l'être et en brimant les hommes d'affaires hutu qui se sont vus dépouillés de leurs biens et limités dans l'accès au crédit.

Dans un tel contexte, il est impossible de prôner la réconciliation aussi longtemps que le FPR est le seul maître à bord et qu'il refuse le partage du pouvoir et des biens entre tous.

C'est à juste titre que Aldo AJELLO souligne :

«Il est impossible que les Rwandais commencent à travailler sérieusement au projet politique qui doit suivre la transition. Ce projet, pour se réaliser, a besoin de trois ingrédients : réconciliation nationale, dialogue entre toutes les composantes qui n'ont pas trempé dans le génocide et finalement, partage du pouvoir ».74

3.3.4. La corruption, le squattage et le pillage du pays.

L'élimination progressive des opposants et la monopolisation du pouvoir par une caste de privilégiés du FPR a servi à un autre objectif, celui d'accaparer les postes stratégiques et de s'enrichir à outrance par le pillage, le détournement des fonds publics et des aides extérieures, le squattage des biens meubles et immeubles des Hutu, dans l'impunité la plus totale..

L'ancien Premier ministre P. Céléstin RWIGEMA ayant récemment démissionné et choisi l'exil aux USA met en doute la capacité des dirigeants actuels de promouvoir l'unité et la réconciliation quand eux-mêmes sèment la terreur, la haine et occupent des biens des autres:

«  How can today's RPF promise to Rwandans to achieve Unity and Reconciliation when people have their properties taken away or are forced to share their lands with somebody else without any kind of contracts, as it has been done mainly in prefecture of Kibungo (...)  Some examples on the RPF leaders : General Paul KAGAME, as a leader of RPF and the head of State, has usurped other people's properties all around the country. He took up buildings in GISENYI, in KIGALI, and all over the country and among them, the colonel LAURENT RUTAYISIRE's building in KIMIHURURA (...) Tito RUTAREMARA, RPF brain, since he entered in RWANDA, he illegally occupies properties from RWAMAGANA to KIGALI. Actually, he is occupying Denis NTIRUGIRIMBABAZI's house while receiving accommodation allowances, because of the post he hold ".75

Dans la course à la privatisation la 1ère dame du pays, Madame Janet KAGAME s'est octroyé le site touristique du Kinigi (environs 30 Ha comprenant une grande ferme, plusieurs bâtiments pour l'administration, des maisons d'habitations et un hôtel pour touristes). Le tout a été acquis pour une somme modique de 10 000 000 (dix millions ) de francs rwandais (1 000 000 - un million de francs belges) après leur restauration par le Gouvernement.

3.4. LE TRIBUNAL PÉNAL INTERNATIONAL POUR LE RWANDA (TPIR)

Le TPIR a été créé par le Conseil de Sécurité en vertu du chapitre VII, à la suite des conclusions d'une commission d'experts instituée par le secrétaire général de l'ONU pour enquêter sur les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité commis au Rwanda entre le 1 janvier et le 31 décembre 1994. Le rapport de cette mission concluait en ces termes :

«... il est amplement prouvé que des personnes appartenant à l'une ou l'autre partie du conflit qui s'est déroulé au Rwanda durant la période du 6 avril au 15 juillet 1994, ont commis des violations graves du droit international humanitaire, en particulier de l'article 3 commun aux quatre Conventions de Genève du 12 août 1949 et de plusieurs dispositions du Protocole Additionnel relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux du 8 juin 1977 ( Protocole II ). Il est amplement prouvé que des personnes appartenant à l'une ou l'autre partie du conflit armé ont perpétré des crimes contre l'humanité au Rwanda pendant la période mentionnée ci-dessus. Après un examen approfondi, la Commission d'experts a conclu qu'il existe des preuves accablantes attestant que des actes de génocide ont été commis à l'encontre du groupe tutsi par des éléments hutu agissant de manière concertée, planifiée, systématique et méthodique ».76

En vertu de l'article 29 de la charte de l'ONU ce tribunal en tant que organe judiciaire est indépendant.

3.4.1. Les missions du TPIR

L'une des missions principales du Tribunal Pénal International pour le Rwanda, est de traduire en justice les responsables des crimes commis au Rwanda en 1994 et de lutter contre l'impunité. En effet, le Statut du TPIR stipule, dans son article premier, que celui-ci « est habilité à juger les personnes présumées responsables des violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire du Rwanda et les citoyens rwandais présumés responsables de telles violations commises sur le territoire d'États voisins entre le 01 janvier et le 31 décembre 1994, conformément aux dispositions du présent Statut ».

Dans le cadre de cette mission, le TPIR doit entreprendre non seulement des actions punitives à l'encontre des personnes coupables de crimes relevant de sa compétence, mais il doit aussi mener des actions de lutte contre l'impunité. De l'analyse de la résolution 955 portant création du Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR), il ressort que, pour le Conseil de Sécurité, la lutte contre l'impunité implique, notamment, les actions suivantes :

Les violations graves du droit international humanitaire ont été commises suite à trois événements dramatiques successifs :

Dès lors, le TPIR a l'obligation de veiller à ce que tous les responsables de crimes soient traduits en justice. Aucune restriction ne devrait empêcher le Tribunal de remplir sa fonction de lutte contre l'impunité. Cela d'autant plus que, selon le Rapporteur Spécial, René Degni Segui et les Experts des Nations Unies, auxquels la résolution 955 se réfère, l'impunité aurait été l'un des facteurs ayant favorisé les violations graves du droit international humanitaire au Rwanda.

L'on ne peut pas lutter efficacement contre l'impunité sans traduire en justice, en toute équité, tous ceux qui auraient trempé de près dans le drame rwandais. Le Rapporteur Spécial et les Experts des Nations Unies désignent, certains groupes de personnes soupçonnées, entre autres :

3.4.2. Dysfonctionnement du TPIR

3.4.2.1. Violations constantes des règles établies

Le mépris le plus complet des normes juridiques est une pratique quotidienne du TPIR. Pour justifier des comportements non conformes aux règles juridiques établies, dans certaines décisions, les juges préfèrent travestir les faits en leur donnant une signification autre et une interprétation tendancieuse.

Il y a lieu de croire que les règles de fonctionnement du Tribunal Pénal International pour le Rwanda telles que arrêtées par le Conseil de Sécurité, à savoir le Statut et le Règlement de procédure et de preuve, ont été conçues pour satisfaire des intérêts souvent implicites des initiateurs de la résolution 955 portant création du Tribunal. Ainsi la compétence temporelle (du 1er janvier au 31 décembre 1994 au lieu de commencer en 1990), territoriale (territoire rwandais et pays limitrophes) et personnelle (rwandais pour ce qui concerne les crimes commis dans les pays limitrophes) du TPIR ont été limitées pour exclure certaines catégories de personnes de la compétence du Tribunal. Il ressort de cette construction que les personnes visées sont les Hutu accusés globalement d'avoir conçu, planifié et exécuté les massacres de 1994 et qui s'étaient réfugiés dans les pays limitrophes du Rwanda.

Par ailleurs, le Statut a autorisé les Juges à adapter le Règlement pour le Tribunal de l'ex-Yougoslavie à la situation rwandaise (art.14 du Statut). De ce fait le conseil de Sécurité a conféré aux Juges des compétences normatives normalement réservées à d'autres pouvoirs. Ce qui est navrant c'est que ces Juges se sont crus autorisés à modifier ce Règlement à leur gré et selon des considérations purement subjectives et souvent partisanes.

Dans la plupart des cas les amendements ne sont pas justifiés par l'amélioration de la qualité des règles. Force est de constater qu'il y a une volonté affichée de falsifier les faits qui s'opposent aux décisions qui ne peuvent pas être juridiquement justifiées.

Les Juges ont abusé de ce pouvoir pour limiter à leur plus simple expression les droits des personnes suspectées ou accusées et même pour les violer. C'est ainsi que lors de la série d'amendements du 15 mai 1996, ils ont adopté l'article 40 bis qui confère au Procureur la possibilité de maintenir un suspect en détention pendant 90 jours avant de produire l'acte d'accusation. De plus, interprété littéralement, cet article confère au Procureur le droit de maintenir indéfiniment en détention un suspect si ce dernier n'est pas transféré au Centre de détention des Nations Unies. Cette vision est contraire aux droits de toute personne qui, étant présumée innocente, a le droit d'être informée dans le délai le plus court des accusations portées contre elle (art. 14. 2 du Pacte International relatif aux droits civils et politiques ; art. 20.4,a du Statut du TPIR) et d'être jugée dans le plus court délai (art. 14. 3 du Pacte International relatif aux droits civils et politiques ) ou sans retard excessif (art. 20.4,c du Statut du TPIR).

Les Juges ont aussi profité de ces compétences pour tenter de mettre en place des principes de droit nouveau non reconnus par les systèmes de droit actuels sous prétexte que le droit appliqué au TPIR ne ressort ni du Common Law ni du système romano-germanique, ni du droit international existant. Dans certaines circonstances il est permis aux Juges de ne pas exiger la preuve de ce qu'ils considèrent comme de " notoriété publique" mais d'en dresser le constat judiciaire (art. 94). Le constat judiciaire n'est pas un acte confidentiel. Jusqu'à cette date ils n'ont jamais rendu public un document allant dans ce sens. Qui plus est ils n'ont pas mis en place un mécanisme formel sur la façon dont ce constat judiciaire doit être fait ni quelle sera sa valeur juridique. Pourtant dans l'Affaire SEMANZA les Juges ont surpris la défense en la dissuadant de plaider et en l'invitant d'accepter l'acte d'accusation tel qu'il est sous prétexte que selon leur constat judiciaire l'accusé est criminel. Or, comme l'a déclaré le Représentant de l'Argentine lors de la création du TPIR « Il est clair qu'ayant été institué en tant qu'organe spécial, ce Tribunal n'est pas habilité à établir des normes de droit international ni à légiférer relativement à ce droit, mais à appliquer le droit international existant. » 77. Le fait que les Juges du TPIR s'écartent souvent dans leurs jugements78 des principes de droit existants constitue donc, en soi, un abus de compétence et renforce l'idée selon laquelle les règles régissant ce Tribunal ont été modelées et sont constamment adaptées, non pas pour faire justice, mais pour condamner tous les accusés présentés devant lui, et qui sont en l'occurrence, les membres d'une seule partie au conflit.

Quand on suit de près le déroulement des procès on constate que certains Juges apparaissent comme des accusateurs au lieu de se montrer, ne fut-ce que dans un soucis d'impartialité et d'intégrité, comme étrangers aux affaires en cours et à venir. L'équité et la justice méritent que soient rendus des jugements non arbitraires. Si non recourir à un tel système où le verdict est connu d'office selon le rapport de force devient ridicule.

Il faut noter que le FPR, lui-même, dispose de moyens énormes pour influencer les actions et les décisions du TPIR notamment dans le cadre des enquêtes, de la protection des témoins, des accusés, des magistrats et des avocats. Le fait d'avoir placé un Bureau du Tribunal à Kigali (point 6, Res. 955), en l'occurrence le Bureau du Procureur a donné au Gouvernement du FPR la possibilité d'influer sur le déroulement des enquêtes et de leur donner une orientation partisane. Même les enquêteurs des accusés doivent être choisis avec l'aval du Gouvernement rwandais. Il convient de signaler par ailleurs, que l'article 8 du Statut permet au FPR de refuser de livrer ses hommes au TPIR en arguant le principe de la juridiction concurrente reconnue par le Statut du TPIR. En réalité, le FPR qui est partie en ou du litige, a été institué en juge !

Il est essentiel de signaler enfin que le Tribunal a admis la nomination d'un représentant du Gouvernement rwandais auprès du TPIR malgré les inquiétudes et protestations des accusés79 et de leurs avocats, selon lesquels cette nomination n'était autorisée par aucun texte du Statut ni du Règlement du Tribunal. C'est une ingérence inacceptable du Rwanda dans les affaires du Tribunal80. D'ailleurs, la personne nommée à ce poste, en l'occurrence, M. Martin Ngoga n'a pas caché son intention d'influencer le Tribunal de l'intérieur. Il a été clair à ce sujet, dans ses différentes déclarations aux médias : « J'espère exercer une influence sur le Tribunal en vue d'améliorer sa performance... ».81 « Nous avons pris la décision de ne plus être spectateur mais de rejoindre le Tribunal et d'opérer de l'intérieur... »82.. Cette ingérence n'a pas d'ailleurs tardé à se concrétiser dans le dossier Jean-Bosco Barayagwiza. Le Rwanda s'est servi, entre autres, du statut d'Amicus Curiae obtenu dans des conditions irrégulières (la Défense n'a pas eu la possibilité de faire valoir son opinion avant la décision de la Chambre d'Appel sur ce sujet), pour faire des pressions et des menaces sur la Chambre d'Appel83 afin qu'elle revienne sur sa décision du 3 novembre 1999 portant libération de Jean-Bosco Barayagwiza. Suite à ces pressions et menaces la Chambre d'Appel a révisé, le 31 mars 2000, sa décision pour satisfaire aux exigences du gouvernement rwandais soutenu fermement par le Procureur du TPIR.

3.4.2.2. Interprétation fantaisiste du statut et des règles de procédure

Les Juges du Tribunal Pénal International pour le Rwanda ont, dans plusieurs cas, interprété certains articles du Statut et du Règlement de procédure et de preuve84 d'une manière trop large au détriment de la défense, contrairement au principe selon lequel, en droit pénal, l'interprétation est restrictive.

Relativement au Statut, ces cas concernent notamment : la compétence matérielle du Tribunal (art. 2 à 4) ; la responsabilité personnelle et individuelle (art. 5 et 6); la compétence ratione temporis  du Tribunal et du Procureur (art. 7 et 15); la compétence concurrente  (art. 8); le Règlement du Tribunal (art. 14); l'acte d'accusation  (articles 17 et 18); l'ouverture et la conduite du procès  (article 19); les droits de l'accusé (article 20); la révision (article 25); les langues de travail (article 31).

En ce qui concerne le Règlement, les questions les plus controversées sont les suivantes: définition de l'arrestation (art. 2) ; définition de l'entreprise criminelle (art. 2) ; modification du Règlement (art.6) ; détention en cas d'urgence (art. 40) ; transfert et détention provisoire de suspect (art. 40bis) ; commission d'office de Conseil (art. 45) ; présentation et modification de l'acte d'accusation (art. 47 et art. 50) ; jonctions (art. 48 ; 48 bis et 49) ; comparution initiale de l'accusé (art. 62 et art. 50) ; protection des victimes et des témoins (art. 69 et art. 75) ; exception d'incompétence (art. 72) ; Amicus Curiae (art. 74) ; la preuve (art. 89) ; témoignages (art. 90) ; faux témoignage sous déclaration solennelle (art.91) ; aveu (art. 92 et 62) ; demande d'acquittement (art. 98bis ) et révision (art. 120 et 121).

3.4.2.3. Responsabilité personnelle et individuelle (art. 5 et 6 du Statut)

L'article 5 du Statut stipule que le TPIR est compétent uniquement « à l'égard des personnes physiques ». Et pourtant, dans plusieurs cas, des Chambres du Tribunal du TPIR ont adopté la position du Procureur rendant des accusés responsables de crimes imputables à des institutions du fait de leur appartenance à ces institutions. C'est ainsi que les Juges ont accepté85 ou carrément confirmé86 des actes d'accusation allant dans ce sens.

Les Chambres du Tribunal ont également approuvés, dans plusieurs affaires, que des individus pouvaient être tenus responsables pour des crimes éventuellement commis par des collectivités, des associations, des groupements de personnes ou par des institutions, contrairement au prescrit de l'article 6 du Statut qui réaffirme que le principe de droit selon lequel « la responsabilité pénale est personnelle ». Pourtant, pratiquement tous les actes d'accusation confirmés par les Juges de ce Tribunal imputent aux accusés concernés les crimes dont sont accusés les partis politiques, les associations privées ou les sociétés commerciales dont ils faisaient partie ou dont ils étaient membres fondateurs ou actionnaires. En effet, la preuve de base de la responsabilité de l'accusé concerné n'est pas constituée par les actions ou omissions qui lui sont personnellement reprochées mais par son appartenance à telle ou telle organisation accusée. Cette situation est illustrée par les actes d'accusation de ce qui est appelé le « Groupe des politiciens »87, le « Groupe des militaires »88 ou le « Groupe des médias » 89 . Le reproche principal fait aux politiciens, c'est d'avoir appartenu au « Gouvernement de transition » ou aux partis dits  « extrémistes » ou « power » accusés d'avoir organisé et exécuté le « génocide  » en collaboration avec les militaires et les « miliciens. Les militaires, quant à eux appartiennent aux anciennes « Forces Armées Rwandaises  », vaincues et accusées d'avoir exécuté le « génocide » en concertation avec les « milices Interahamwe ». Les personnes accusées dans le cadre des médias, sont principalement accusées d'avoir notamment commis des crimes par la création ou l'appartenance à ces médias auxquels on impute d'être à l'origine de la diffusion de l' « idéologie extrémiste hutu » et d'avoir incité la population hutu au « génocide » contre les Tutsi.

Le Statut du Tribunal consacre l'égalité des parties au procès. Il est donc supposé que le Procureur et l'accusé, soient égaux devant les Juges. Pourtant la réalité est tout à fait différente. En tant qu'organe du Tribunal, le Procureur collabore étroitement avec les Juges du Tribunal. Il est important de noter que, à ce titre, il participe activement à la création des règles de procédure notamment par des amendements dont une grande partie est initiée par son Bureau, prérogative non reconnue à la Défense. Devant cette juridiction, les droits des accusés devraient être protégés par un système qui ne permette pas aux plus forts, en l'occurrence le Procureur et les Juges, de s'octroyer une compétence d'interprétation sans limite des règles fondamentales. Il faut le reconnaître cette pratique est influencée par le soucis d'obtenir des décisions favorables non pas à l'évolution du droit, mais plutôt à la partie accusatrice pour faire triompher sa vision mais également pour continuer à tromper la vigilance de l'opinion internationale.

3.4.2.4. Absence d'équité de la part du Tribunal

Il est regrettable de constater que les catégories de personnes appartenant au FPR, l'une des parties au conflit rwandais, ou proches de lui, jouissent de l'impunité absolue. En effet, le Procureur du Tribunal semble leur accorder une immunité reconnue en toute illigalité. En effet, depuis la création du Tribunal en 1994 jusqu'à ce jour, le Procureur du TPIR s'est abstenu de poursuivre les personnes appartenant au FPR, alors que de graves présomptions de crimes de génocide et de crimes contre l'humanité pèsent sur eux. Cela traduit une volonté délibérée d'appliquer une justice discriminatoire aboutissant à des procès inéquitables dirigés contre les Hutu présumés collectivement coupables.

Le TPIR favorise l'impunité et l'injustice en refusant obstinément de considérer des rapports et informations mettant en cause le FPR. C'est ainsi que le Secrétaire Général des Nations Unies a mis sous embargo le rapport Gersony qui accuse les responsables du FPR d'avoir commis des massacres systématiques contre des populations d'ethnie Hutu visées comme telles, notamment dans la partie Est du Rwanda, durant les premiers mois de la guerre de 1994. Le rapport de l'enquêteur du Bureau du Procureur, rédigé par M. Michael Hourigan, accusant le FPR d'avoir planifié et exécuté l'attentat contre l'avion du Président Habyarimana a été longuement dissimulé90.

La Présidente du Tribunal a mis sous embargo91 ce rapport dès qu'elle l'a reçu du Secrétaire Général des Nations Unies, alors que des Conseils de la défense avaient souhaité qu'il soit rendu public et mis à la libre disposition des accusés. Ce rapport n'a pu être obtenu qu'à la suite de plusieurs requêtes allant dans ce sens92. Par ailleurs, le Tribunal persiste dans le refus de mener une enquête exhaustive sur l'assassinat du Président Habyarimana, assassinat pourtant considéré par tous comme l'élément qui a déclenché le drame rwandais. Certains Juges tendent même à épouser la thèse du Procureur selon laquelle il n'y aurait pas de lien entre cet assassinat et les massacres politico-ethniques qui l'ont directement suivi93. Le Procureur affirme que cette affaire ne rentre pas dans les compétences du Tribunal94 et qu'il attend les conclusions du juge français, juge indépendant, pour prendre une position à ce sujet95.

3.4.2.5. L'impartialité et indépendance des Juges

L'indépendance et l'objectivité du Tribunal sont les soucis qui ont motivé le choix d'Arusha et non de Kigali comme siège du Tribunal tel que cela apparaît dans le rapport du Secrétaire Général de l'Organisation des Nations Unies. Ce rapport dit ceci:

« Although the international character of the Rwanda Tribunal is a guarantee of the just and fair conduct of the legal process, it is nevertheless necessary to ensure not only the reality but also the appearance of complete impartiality and objectivity in the prosecution of persons responsible for crimes committed by both sides to the conflict. Justice and fairness, therefore, require that trial proceedings be held in a neutral territory»96.

Les Membres du Conseil de Sécurité ont insisté sur l'indépendance et l'impartialité du TPIR au cours de l'examen de la résolution portant sa création97:

« La Nouvelle-Zélande ne pouvait pas appuyer toute proposition qui aurait modifié le caractère international du Tribunal ou qui aurait laissé entendre que le Tribunal pouvait être soumis à une intervention politique rwandaise. » (Déclaration du Représentant de la Nouvelle-Zélande (Keating).

« Tout comme dans le cas du Tribunal pour la Yougoslavie, nous sommes persuadés que l'indépendance du Tribunal International pour le Rwanda est le plus important de ses aspects, signifiant son indépendance vis-à-vis des gouvernements, son indépendance vis-à-vis des tribunaux nationaux et même son indépendance vis-à-vis des Nations Unies elles-mêmes. » (Déclaration du Représentant de l'Espagne Yáñez-Barnuevo).

Par ailleurs, les principes de base de l'indépendance de la justice adoptés par l'Assemblée Générale des Nations Unies par ses résolutions 40/32 du 29 novembre 1985 et 40/46 du 13 décembre 1985, enjoignent « à tous les Gouvernements et aux autres institutions de respecter et observer l'indépendance de la justice ».

Lorsque la Chambre d'Appel a décidé, le 3 novembre 1999, de libérer Jean Bosco Barayagwiza, le Gouvernement du Rwanda a suspendu sa coopération avec le Tribunal en précisant que la reprise de cette coopération ne sera possible que si le Tribunal s'engage à revenir sur sa décision. L'affaire a été largement médiatisée par les soins du Procureur, Madame Carla Del Ponte, qui n'a épargné aucun moyen pour donner satisfaction au gouvernement de Kigali98. Pour l'autoriser de se rendre à Kigali, le Gouvernement Rwandais a exigé d'elle comme préalable, des garanties de revoir de l'arrêt du 3 novembre 1999 portant sur la libération de Mr Barayagwiza. Le Ministre Rwandais de la justice, Jean de Dieu Mucyo a, dans une lettre, déclaré : "Ms Del Ponte would not be welcome unless the Tribunal reversed its decision and went ahead with Mr Barayagwiza trial"99.

C'est ainsi que le Procureur Madame Carla Del Ponte a été amenée à déposer, le 19 novembre 1999, l'intention de déposer une requête en révision de la décision du 3 novembre 1999. Curieusement, c'est le même jour que le Gouvernement Rwandais a déposé une demande de comparaître en qualité d'Amicus Curiae dans le dossier.

Mais malgré cela, le gouvernement rwandais a continué à refuser le visa à Madame Carla Del Ponte100. Le Représentant Spécial du Rwanda au TPIR, M. Martin Ngoga a déclaré, à ce propos ce qui suit: « ...the visa refusal was part of the decision to suspend cooperation with the Tribunal and that Del Ponte's visit was not necessary »101.

Entre-temps, la Chambre d'Appel a décidé de surseoir à l'exécution de l'arrêt du 3 novembre 1999 et de maintenir l'appelant en détention102. Les juges ont ainsi accordé leur soutien au marchandage entre le Procureur et le Gouvernement Rwandais. Madame Carla Del Ponte a alors demandé au Gouvernement de Kigali de prendre en considération les nouveaux développements et de lui octroyer un visa pour qu'elle se rende à son Bureau à Kigali.

Le 28 novembre 1999, elle a annoncé publiquement son opposition à la décision de la Chambre d'Appel de libérer Jean-Bosco Barayagwiza. Elle a assuré les autorités Rwandaises et les « victimes » qu'elle allait tout faire pour obtenir la révision de la décision. Elle a, depuis lors, insisté pour qu'elle soit autorisée de se rendre à Kigali. Elle a déclaré qu'elle profiterait de cette visite pour révéler sa stratégie aux autorités du Rwanda. C'est dans ce contexte qu'elle a décidé de soutenir la demande du Gouvernement Rwandais de comparaître en qualité d'Amicus Curiae. En concluant sa déclaration, la Procureur, Madame Carla Del Ponte, a dit qu' « Elle accorde la plus haute priorité à la révision de la décision de la Chambre d'appel »103. Il ressort clairement de cette déclaration que le Procureur a effectivement marchandé avec le gouvernement Rwandais, offrant la révision de l'arrêt du 3 novembre 1999 portant libération de Jean Bosco Barayagwiza pour l'obtention du visa et l'amélioration du climat de coopération entre le Rwanda et le TPIR. Aucun des procès qui se déroulent à Arusha n'échappe à ce courant.

3.4.2.6. Les accusés sont d'office présumés coupables

Le Statut du Tribunal reconnaît le principe de présomption d'innocence. Dans son article 20.3, il est stipulé que « toute personne accusée est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été établie conformément aux dispositions du présent statut ». Ce principe, universel s'impose erga omnes, particulièrement aux organes du TPIR. Cependant, force est de constater que le Procureur et les Juges du TPIR considèrent les accusés comme des criminels avant leur jugement définitif.

Le Procureur lance des mandats d'arrêts sans mener des investigations sérieuses et approfondies. Il se contente d'inculper des personnes illégalement. L'un des hauts responsables du Bureau du Procureur, l'Avocat Général Yacob Hailé Mariam, a d'ailleurs fait une déclaration sans équivoque allant dans ce sens lors d'une audience au Tribunal : « le Tribunal s'emploiera énergiquement et de façon constante, à poursuivre les Hutu extrémistes... » 104. Et « si ces extrémistes étaient poursuivis et jugés de manière efficace et punis, alors nous pourrions ouvrir la voie à la réconciliation entre les autres hutus et les autres tutsis afin qu'ils puissent vivre en paix. ». « Nous poursuivons tout simplement et nous poursuivrons sans relâche les extrémistes hutus qui sont responsables du génocide. Et c'est après cela que la majorité des Hutu seront exemptés de cette faute et pourront vivre dans la paix avec leurs voisins tutsis»105. Aucune réaction des juges sur ces propos. Ce qui laisse croire que les Juges sont aussi convaincus que les Hutu, en général, sont coupables d'avoir commis des massacres qualifiés de génocide contre les Tutsi. Et on peut se demander pourquoi ils n'ont jamais voulu examiner la question de savoir pourquoi une seule partie au conflit est poursuivie et dans quelles circonstances les massacres ont eu lieu.

3.4.2.7. Entente entre les juges et le parquet

Dans une conférence de presse tenue à Arusha le 13/12/2000, le Procureur a déploré l'incompétence de certains de ses avocats généraux. Ainsi, trois ou quatre d'entre eux devront être remplacés afin d'avoir des avocats généraux dont la qualité rivaliserait avec celle des avocats de la défense. Sur la question suivante : «n'est-il pas ironique ou paradoxal de parler de faiblesse alors que jusqu'à présent on n'a perdu aucun procès» ? Le Procureur a répondu en ces termes : « cela veut dire que nos juges sont très bons parce qu'ils peuvent corriger les erreurs des avocats généraux du Procureur ». Une telle coalition n'ira jamais dans le sens de l'équité et de la justice.

3.4.2.8. L'emprise du Gouvernement de Kigali sur le TPIR

"RWANDA: Minister calls for greater Rwandan role at ICTR.

Justice Minister Jean de Dieu Mucyo is soon to hold discussions with the outgoing and incoming registrars of the International Criminal Tribunal for Rwanda (ICTR) on lawyers' treatment of Rwandan witnesses at the Tribunal in Arusha, northern Tanzania, and the repercussions for witnesses when they return home. The two men, Agwu Ukiwe Okali and Adama Dieng respectively, started a three-day visit to Rwanda on Monday, and were scheduled to meet top government officials, Radio Rwanda reported. Mucyo appealed to the ICTR for Rwandese to be included among the people carrying out investigations for the Tribunal, and suggested that it "should not only carry out prosecutions but also consider compensations", the report said. The minister also suggested that lawyers from the ICTR should handle some of the cases from Rwanda."106 :

Gunnar Willum et Bjørn Willum :

"In a wave of arrests Rwandan officers are now being remanded in custody in connection with accusations of mass killing committed under the Genocide in Rwanda in 1994. Most recently in Denmark, where a 38-year old man has been imprisoned in Skjern (Danish town). But the UN's war crimes tribunal for Rwanda is not impartial, investigators say - the tribunal is being blackmailed by Rwanda's government".107

Les même journalistes continuent :

"Rwanda's Tutsi-dominated government has threatened and blackmailed the UN's international war crimes Tribunal for Rwanda into not investigating and prosecuting massacres of up to 50.000 innocent Hutu civilians, which its members committed during the Genocide in Rwanda in 1994."

3.4.3. Le TPIR instrument de réconciliation ?

Le Tribunal Pénal International pour le Rwanda a été créé avec comme mission principale la réconciliation rwandaise dans le cadre d'une justice équitable pour tous. Qu'en est-il de cette mission après 6 ans de fonctionnement ? Il ne faut pas être grand observateur pour constater que la justice pratiquée par le TPIR est restée à sens unique. En effet, aucun mandat d'arrêt n'a été lancé à l'encontre de responsables du FPR, présumés coupables de massacres des populations civiles. Le TPIR s'obstine dans le refus d'enquêter sur l'attentat contre l'avion des présidents rwandais et burundais le 6 avril 1994. Pourtant cet événement est unanimement considéré comme celui qui a déclenché les tragiques événements qui endeuillent le Rwanda et la sous-région depuis lors.

Le tribunal préfère se cacher derrière des principes d'ordre juridique pour éviter d'incriminer le FPR. Ces mêmes principes sont pourtant bafoués dès qu'il s'agit des accusés. Citons à titre d'exemple quelques cas révoltants :

Il est remarquable de constater que lors des auditions des témoignages un sentimentalisme malveillant prime sur la volonté de démontrer l'implication réelle des accusés avec des faits précis, preuves à l'appui.

Le tribunal s'efforce de garantir l'anonymat des témoins à charge mais il refuse d'assurer des conditions de sécurité aux témoins à décharge. Ces témoins courent pourtant un plus grand risque.108

L'amateurisme et le népotisme de ce tribunal ont été dénoncés dans plusieurs articles du journaliste Bjørn Willum.109

Dans un tel contexte le TPIR a perdu sa crédibilité et n'offre pas les garanties d'une justice équitable aux yeux des Rwandais. Pour mieux réussir sa mission, le TPIR devrait faire preuve de moins de partialité et refuser les pressions politiques tant des acteurs politiques intéressés que du Conseil de Sécurité pour travailler dans l'indépendance et la neutralité absolue.

Les diverses pressions exercées sur le TPIR et sur le Représentant permanent du gouvernement rwandais par les autorités de Kigali rappellent l'adage romain « malheurs aux vaincus ».

4. LA SITUATION SOCIO-ÉCONOMIQUE.

Dans un pays rural à 90 %, c'est plus au niveau des secteurs et communes que chacun participe à la vie communautaire par son travail (agriculture, commerce, ou services). La guerre imposée au Rwanda depuis 1990 et les nombreux massacres de civils qu'elle a occasionnés a brisé le tissu social qui pourtant devait permettre à chacun de se sentir membre de la communauté rwandaise. Cette communauté accuse en outre un déséquilibre démographique important. Dans certaines communes le rapport hommes/femmes est de 30% pour les hommes et 70% pour les femmes, situation qui entraîne de graves conséquences économiques, sociales, psychologiques .... Par exemple, beaucoup d'enfants ou de femmes se retrouvent chefs de ménage avec les responsabilités que cette fonction implique.

Les nouveaux dirigeants du Rwanda ne parviendront pas à créer une dynamique susceptible de développer le pays pour différentes raisons :

L'économie rwandaise est profondément sinistrée. Le gouvernement actuel du Rwanda n'a aucun projet de société viable, que ce soit sur le plan social ou politique, il ne fait que décourager toute bonne volonté ou initiative économique susceptible de redonner de l'espoir à la population. Le régime est corrompu plus que jamais. Son seul souci est celui de promouvoir les intérêts égoïstes d'une poignée de personnes.

Comme le témoignent Rony BRAUMAN, membre de MSF, Stephen SMITH du journal « Libération » et Claude VIDAL du Centre d'Etudes Africaines, le clan de Paul KAGAME a confisqué les biens du peuple dans un réseau complexe apparenté de la mafia:

"En si peu d'années un petit groupe a réussi à constituer au sein du FPR un réseau politico-militaire qui, contrôlant les principales positions de pouvoir, exploite toutes les occasions de corruption... Politiciens, militaires, hommes d'affaires liés à la (nouvelle) AKAZU, affichent un train de vie luxueux, investissent au RWANDA dans des opérations rapportant des bénéfices considérables (comme par exemple la construction des villas à louer aux institutions internationales), tout en exportant le gros de leurs gains à l'étranger. Dans de telles conditions, la lutte au plus haut niveau pour accaparer les postes stratégiques se déroule secrètement, dans les huis clos des puissants."110

A côté des détournements frappant observés par tout le monde, les crimes économiques n'ont pas épargné l'activité agricole qui du nord au sud, de l'ouest à l'est, semble être paralysée. Le résultat est prévisible: la famine est à son comble. En effet le Rwanda est dépourvu de main d'œuvre nationale pour mener l'activité économique. Cette situation est due aux problèmes ci-après:

Outre ce manque de main d'œuvre nationale, le secteur agricole est frappé par des intempérie comme la sécheresse causée entre autres par la déforestation et le surpâturage. A cela s'ajoute la destruction délibérée des cultures par l'armée du FPR à la recherche des soi-disant infiltrés.

4.1. LA DESTRUCTION DÉLIBÉRÉE DES FORÊTS ET DES CULTURES:

Dans sa lutte contre l'ombre des fameux "infiltrés", entre 1997-1998 le gouvernement rwandais a imposé la déforestation et la destruction des cultures qui limitent la visibilité (maïs, sorgho, bananiers, haricots grimpants) sous le prétexte de faire la chasse aux INTERAHAMWE. Pour les cultures vivrières (haricots, pomme de terre, patates douces...), les éleveurs Tutsi avaient reçu l'ordre d'y faire paître leurs troupeaux pour priver la population des ressources alimentaires sous prétexte qu'elle peut nourrir les INTERAHAMWE. Le Nord étant une des régions les plus fertiles du pays, imposer la destruction des récoltes, c'est provoquer la mort lente par la famine pour des milliers de paysans.

Toutes ces violations des droits des personnes visent la marginalisation d'une population déjà traumatisée par les graves séquelles de la guerre. Elles ont en outre fragilisé les chances de réconciliation, découragé la population et détruit les possibilités d'entreprendre tout projet agricole visant le développement.

4.2. LES INTEMPÉRIES, LA SÉCHERESSE:

Aujourd'hui le Rwanda est ravagé par la sécheresse. Celle-ci est due notamment par :

Cette situation est soulignée par l'éditorialiste de la revue Dialogue comme suit :

"Selon l'hebdomadaire catholique KINYAMATEKA(n°1552, mai II 2000) une partie importante du pays notamment le BUGESERA, les préfectures de GIKONGORO, BUTARE et KIBUNGO, meurt de faim. La presse officielle en fait l'écho dans les colonnes du journal IMVAHO NSHYA'n°1333, mai 2000, p.10). Plusieurs raisons sont évoquées: la sécheresse qui dure depuis deux ans, un habitat mal organisé, une forte proportion de personnes inactives parmi les habitants, l'attribution des marais du BUGESERA à une société privée pour la culture des cannes à sucre sans aucune concertation avec les habitants, etc. L'autorité administrative locale tente de minimiser le drame: "je reconnais que la région a faim, mais il n'y a pas plus de 10 personnes mortes de faim", dit le sous-préfet de Kanazi au Bugesera".111

La sécheresse a des conséquences dramatiques pour les populations qui sont en outre l'objet de harcèlement politique dans les camps de concentrations appelés : "imidugudu ou villagisation" :

"The situation was especially bad in villages under the scheme, 'imidugudu' villagisation which contain mainly the poorest households and whose populations do not always have access to arable land, the mission teams reported".112

4.3. LE DÉVELOPPEMENT DU MILIEU URBAIN ET LA MARGINALISATION DU MILIEU RURAL

L'exode rural est un des fléaux parmi les plus dévastateurs en Afrique. Il suffit de voir des villes monstres comme Kinshasa, Nairobi ou Abidjan pour se rendre compte de l'envergure de ce nouveau défi. Le phénomène d'exode rural est suffisamment décrit et trouve son origine surtout dans le manque d'attrait que présente l'arrière-pays aux jeunes dépourvus d'investissements promoteurs d'un mieux-être.

Face à ce problème, différentes stratégies de développement peuvent être envisagées. La Belgique a opté pour un renforcement des efforts vers le milieu urbain. 113 Cette thèse, qui peut se défendre avec des arguments simplistes, est tout à fait contraire aux analyses sérieuses114 qui visent le développement harmonieux des pays115. Dans des pays enclavés, comme le Rwanda et le Burundi, où plus de 90% de la population vit de l'agriculture et qui connaissent de la famine endémique, il est absolument nécessaire d'intensifier le développement rural.

L'investissement dans le développement urbain semble être une volonté politique délibérée d'infliger à la population rurale Hutu une situation de misère. Il ne s'agit pas d'une mesure de freiner l'"exode rural" vers la ville, mais beaucoup plus un facteur qui le favorisera. Le développement urbain prend un aspect inquiétant et désastreux dans le cadre de la situation politique du Rwanda et du Burundi.

On peut sans exagération parler de mesures racistes. En effet, au Burundi l'ethnisation de la ville s'est installée depuis plusieurs décennies. Les villes du Rwanda présentent déjà, elle aussi, le visage de l'exclusion ethnique poussée à l'extrême.

Au-delà de tous ces crimes, le FPR a franchi les frontières du Rwanda pour aller piller le patrimoine congolais et massacrer ses populations, actes qui ont des conséquences néfastes sur la population rwandaise devenue impopulaire chez ses voisins de l'Ouest parce que considérée, dans son ensemble, comme responsable de ces actes.

4.4. LE PILLAGE ÉCONOMIQUE EN RDC.

Le pillage économique du Congo fait l'objet d'une grande littérature développée surtout par la société civile du Kivu. De cette documentation, il ressort que les pays envahisseurs, dont le Rwanda et l'Uganda, pillent tout ce qui y a de la valeur. Ce qui n'est pas pillé est saccagé, subit un vandalisme sans nom. Il est abîmé ou détruit. Pour museler la population, celle-ci est soumise à un régime de taxes exorbitants qui étrangle le petit commerce dans les villages. Le grand commerce et l'industrie ont été accaparé par les hommes inféodés aux chefs de guerre dans la région. Cette exploitation se fait à plusieurs niveaux: les taxes, les pillages des ressources du sous-sol, l'occupation forcée des biens et des terres congolaises, les massacres de la population.

4.4.1. Les taxes.

A l'est du Congo, le pouvoir militaire du FPR a mis en place des structures pouvant prélever les impôts et les taxes pour l'effort de guerre. Un autre scandale à ce sujet consiste dans le fait que les congolais, les ugandais et les rwandais exerçant le même métier d'import-export, ne sont pas soumis à un même régime douanier. L'administration d'occupation applique "la surtaxation des produits importés et exportés par des opérateurs congolais tandis que les opérateurs rwandais et ugandais échappent à cette taxation, car leurs produits entrent et/ou sortent toujours convoyés par les militaires".

4.4.2. Le pillage des ressources du sous-sol.

Les ressources du sous-sol congolais constituent les grands enjeux économiques de cette guerre meurtrière. Cette affirmation est pertinemment démontrée par Pierre BARACYETSE dans son livre intitulé "L'enjeu géopolitique des transnationales minières au Congo"116. L'auteur souligne que "les contrebandiers de l'or et du diamant congolais, se trouvent actuellement à KIGALI et KAMPALA".

4.4.3. L'occupation des terres et des biens congolais.

Fidèle à ses principes machiavéliques, l'armée de KAGAME déloge les congolais de leurs biens et de leurs terres. Dans son document du 14 novembre 2 000, la société civile du KIVU déplore ceci : les Rwandais «pour renforcer leur présence au KIVU, ont procédé dernièrement au déplacement de toute la population Tutsi-Bayura, à peu près 20.000 personnes résidentes dans la zone de Moba, au nord de KATANGA. Ils sont en train de les installer dans la zone d'UVIRA, au grand mépris des populations congolaises qui se voient confisquer leurs terres et leurs champs sont ravagés par les troupeaux de vaches des nouveaux venus".

4.5. LE REGROUPEMENT FORCE

Sous prétexte de désolidariser la population des ''rebelles'', des milliers de paysans ont été déplacés de leur milieu et regroupés dans des sortes de camps de concentration.

4.5.1. Les camps de concentration

Une note d'information du PNUD117 indique que des statistiques datant d'octobre 1998 donnent le nombre de 630.000 personnes déplacées connues dans le Nord du Rwanda dont 342 652 dans la Préfecture de Ruhengeri (Kinigi, Nyamutera et Nyarutovu) et 224 390 dans celle de Gisenyi (Giciye, Rwerere, Mutura, Kanama, Karago). Il s'agit d'une politique délibérée qui a mis la population dans des conditions de vie inhumaines et inacceptables (maladies, famines, enlèvements, disparitions, massacres...). Dans ces sites de regroupement les conditions de vie sont déplorables.

Cette mesure a entraîné des expropriations sans que la population puisse être prise en charge par des organisations humanitaires.

4.5.2. La villagisation forcée (Imidugudu).

Certains paysans ont été placés dans des villages soi-disant pour un impératif sécuritaire et économique, à savoir reprendre les terres aux paysans pour mieux les distribuer.

Quelles que soient les justifications actuelles, cette villagisation est défavorable au développement économique du pays :

L'éloignement des champs des habitations empêche le bon entretien des cultures et la production d'engrais naturels, entraîne une perte de temps pour se rendre à pied dans les champs situés à plus de 5 km de l'habitation,

L'exiguïté et la promiscuité nuisent à la conservation et au stockage des récoltes. Les greniers traditionnels n'existent plus, ce qui conduit à la paupérisation des paysans,

Le mauvais choix d'emplacement de l'habitat regroupé sur des terres fertiles ou loin d'infrastructures économiques de base (eau, électricité, services sanitaires, routes, écoles, commerce ...) découragent la population.

Selon le rapport cité, la population souhaite l'installation par région d'origine (cellule, secteur, haute et basse altitude). Cette pratique favoriserait l'entraide et la solidarité chez les gens qui se connaissent et ayant tissé des relations sociales avant leur déplacement. Cette villagisation désordonnée cadre avec la politique du régime actuelle de faire perdre aux paysans toute référence spatiale.

4.5.3. Le squattage des biens et les expropriations

Des expropriations arbitraires des biens meubles ou immeubles ont eu lieu près des centres urbains (ex : paysannat de Masaka près de Kigali) :

Plusieurs familles ont été dépouillées de leurs parcelles de cultures vivrières sans indemnisation. Ces familles vivent actuellement dans les conditions de pauvreté extrême, car elles ont été dépouillées de leurs ressources alimentaires et agricoles.

Certains ont vu leurs maisons occupées par les nouveaux dirigeants venus de l'étranger. Les Hutu chassés ne peuvent pas revendiquer leurs biens de peur d'être éliminés ou mis en prison, car l'organisation des délateurs a été mise sur pied pour fabriquer des témoignages contre les Hutu qui oseraient réclamer leurs biens. Selon le journal « Ubumwe » N° 62 de décembre 1999, 400 familles de Kanombe ont été ''expropriées'' sans indemnisation et sont sans logis depuis 1994. La garde personnelle de KAGAME y logerait d'autres personnes qui lui paient le loyer. 118

Des groupes de délation servant d'accusateurs sur commande permettent la saisie rapide des biens, l'élimination physique ou l'emprisonnement de leur propriétaire. Ces conditions dans lesquelles est mise la majorité de la population sont traumatisantes et démontrent la violation des droits de l'homme d'une manière flagrante par le pouvoir actuel au Rwanda.

4.5.4. Les camps de rééducation et le climat de terreur

Le pouvoir organise périodiquement des centres d'endoctrinement pour la population. Des fonctionnaires, des étudiants et des soldats y sont emmenés de force. La population Hutu est enfermée dans le concept de criminalisation collective. L'accusation de génocide ou la menace d'accusation est devenue une arme de la politique actuelle mise à la disposition des autorités et de l'ethnie Tutsi qui s'en servent abusivement. Cet endoctrinement maintient la population Hutu dans un climat de peur et d'oppression néfaste à la reconstruction du tissu social.

La terreur est entretenue aussi par le quadrillage des communautés locales par un dispositif paramilitaire.

« Dans chacune de quelques dix mille cellules que compte le Rwanda ont été formés et armés cinq responsables de la ' local défense force' censés combattre en cas d'attaque, en réalité, chargés de faire la chasse aux Interahamwe infiltrés, et leurs complices., ils se comportent de façon plus ou moins tyrannique »119.

De manière régulière ils oppriment une population misérable par les amendes injustifiées, les emprisonnements arbitraires, la bastonnade en invoquant des prétextes plus futiles les uns que les autres.

Toute la société rwandaise est militarisée, même les étudiants admis à l'université passent par les camps (Ingando) où ils reçoivent une éducation plus militaire que civique.

C'est ainsi que certains jeunes sont envoyés au Congo, pour se battre, à l'insu de leurs parents.

Il en est de même des prisonniers libérés sans jugement qu'on envoie se battre en première ligne au Congo. Cette situation risque d'exploser car toutes ces victimes sacrifiées avec la complicité de la communauté internationale dépassent les frontières du Rwanda. La révolte de toutes ces populations méprisées risque de conduire à l'éclatement de la région avec des conséquences incalculables et en tous cas effroyables.

4.6. LES PIECES D'IDENTITE

La mention ethnique est supprimée sur les cartes d'identité. Mais la discrimination ethnique n'a pas disparu pour autant.

En effet, certains réfugiés rapatriés de force en 1996 - 1997 n'ont pas reçu cette pièce d'identité sous divers prétextes. Sans ce document officiel, il leur est impossible de trouver du travail ou de se déplacer sans danger. A chaque contrôle ils sont inquiétés car d'office repérés comme Hutu et maltraités en conséquence. Même ceux qui ont une carte d'identité sont inquiétés car seule la carte de rescapé confère une vraie protection.

Pour rappel, les cartes des rescapés sont données aux seuls Tutsi après aval de l'association IBUKA. Des Hutu échappés aux massacres des soldats du FPR ne sont pas considérés comme des rescapés, mais comme des "génocidaires".

Ces cartes de rescapés donnant droit aux facilités telles que, soins de santé, scolarisation, aide alimentaire, facilités administratives..., excluent une grande catégorie de personnes qui se retrouvent dans la misère à savoir les Hutu expropriés, orphelins, veuves, enfants en âge de scolarisation. Cette mesure discriminatoire aggrave le fossé entre les deux groupes ethniques et annule les efforts de réconciliation à tenter car elle entretient une rancune, une méfiance et une inégalité dans la population. Cette carte consacre la qualité de victime reconnue aux seuls Tutsi et leur donne le droit à la commémoration annuelle de leurs morts. Quant aux autres, il leur est interdit d'exprimer leur deuil, leur douleur ou de commémorer leurs morts. A titre d'exemple il y a lieu de citer le cas de dix religieux dont 3 Evêques massacrés par le FPR en 1994. Pour ces victimes, les autorités en place refusent encore l'autorisation de les inhumer dignement ou de commémorer leur mort. Les massacrés par le FPR, connus des Hutu se comptent par millions depuis la guerre qu'il a déclenchée en 1990. Toutes ces victimes n'ont pas droit au souvenir, ni à la justice.

Cette conspiration du silence que subit la majorité de la population malgré les multiples plaintes de certaines ONG et observateurs des droits de l'homme, hypothèque gravement l'avenir du peuple rwandais.

4.7. LA SANTE DE LA POPULATION

Dans la mesure où tout s'achète y compris les services publics, 90 % de la population est exclue de la couverture médicale. Elle n'a pas les moyens d'acheter des fiches de soins ou des médicaments. Dans certaines communes les centres de santé n'ont pas été reconstruits. Selon Imvaho Nshya N° 1320, page 1, le Président BIZIMUNGU dans son allocution aux cérémonies de prestation de serment des membres du Bureau de l'Assemblée Nationale de Transition a parlé avec insistance du problème de pauvreté et du Sida. Ainsi les témoignages abondent pour relater la dégradation des conditions sanitaires de la population, situation aggravée par la famine qui devient permanente.

Les détournements et la vente illégale des aides en médicaments accentuent la détérioration de la situation sanitaire au Rwanda. Le nouveau système de payement des soins médicaux à l'acte, empêche beaucoup de gens de bénéficier de soins adéquats :

Les femmes accouchent d'avantage à la maison même en cas de complication, car le coût de l'accouchement s'élève en moyenne à 5.000 FRW et une césarienne à 25.000 FRW120. Dans ces conditions, les gens préfèrent s'adresser directement au pharmacien ou au guérisseur traditionnel. Cette situation les expose à de graves accidents. Les pharmacies, considérées comme un commerce lucratif, sont tenues par du personnel non-qualifié, sans déontologie médicale ne respectant pas les normes minimales d'hygiène. Les taux de mortalité, en particulier infantiles et maternelles, sont montés en flèche. Cette situation est davantage dramatique dans le milieu rural.

Tout semble être planifié pour enrichir au maximum les villes et appauvrir les campagnes privées d'investissements susceptibles de développer le milieu rural. Cette politique provoque et accentue la détérioration de la santé de la population et l'expose à des famines permanentes.

4.8. LA SCOLARISATION

La jeunesse est l'avenir de tout pays, mais au Rwanda une grande partie des jeunes est privée de scolarisation. Par exemple, les orphelins ont droit à un enseignement gratuit. Ce droit est reconnu uniquement aux orphelins Tutsi qui ont accès à la carte de rescapé, mais pas aux autres orphelins qui n'ont jamais fait l'objet des statistiques.

Pourtant selon les sources des ONG c'est par milliers qu'on compte ces orphelins qui ne sont pas pris en charge.

L'organisation de l'enseignement laisse à désirer. Ainsi 40 boursiers ont déserté l'école pour rentrer en Uganda car ils ne voulaient pas qu'on leur impose le cours de français.121 Les Hutu qui accèdent aux bourses d'étude sont rares, pendant que les Tutsi ont le choix d'accéder ou non à telle ou telle formation.

« Selon La Nouvelle Relève N° 395 le Président de l'Assemblée Joseph SEBARENZI a autorisé une enquête devant prouver « la responsabilité personnelle éventuelle des anciens ministres dans les détournements sur une période de 5 ans depuis 1994 et déterminer les circonstances de leur mauvaise gestion ». Cela concernait les 4 ministres et le Secrétaire d'Etat qui se sont suivi au Ministère de l'Education, les hauts fonctionnaires, les coordinateurs et directeurs de projets ainsi que quelques entreprises exécutant de marchés dans ce projet ».122

Comme dans d'autres projets l'enrichissement personnel par tous les moyens passent avant l'organisation des services pour la population.

L'aide au Rwanda, quelle qu'elle soit et d'où qu'elle vienne, légitime la violation des droits de l'homme dans ce pays et conforte les dirigeants dans l'impunité. Ils sont donc autorisés à tuer, voler autant qu'ils veulent aussi longtemps que la Communauté internationale fermera les yeux sur leurs crimes.

Dans ses conclusions, concernant une étude au sujet de l'aide européenne et internationale accordée aux pays en guerre contre la RDC, Catherine André écrit :

"Cette politique (d'aide) a des effets pervers tant au niveau politique, donc, mais également au niveau économique et de graves conséquences sociales;

dés lors, alors que l'Union européenne et ses pays membres détiennent un pouvoir important en terme d'aide, l'on peut se demander si leur aide, dans ce cas là, n'est pas une fois de plus complice des violences actuelles et à long terme dans la région des Grands Lacs."123

Les pays de l'Union européenne ne peuvent pas dire qu'ils ignorent ce qui se passe dans la région des Grands Lacs. Qu'attendent-ils pour prendre des mesures contre ces Etats et en faveur des populations.

5. SECURITE

La sécurité est un droit pour tous les rwandais. Elle ne doit pas être prise comme une nécessité pour un régime qui se veut maintenir coûte que coûte contre la volonté de sa population ou pour la sauvegarde des intérêts économiques et géostratégiques des pays étrangers.

Elle doit d'abord être tournée vers les citoyens rwandais et être à leur service. Aujourd'hui tout est là pour prouver le contraire. L'insécurité règne au Rwanda depuis l'avènement du FPR. Des barrières sont dressées ici et là. Des couvre-feu subsistent notamment au Nord du pays. Plutôt que de chercher le remède à cette insécurité, le Régime actuel se refuse à toute analyse sans complaisance de la situation de la sécurité à l'intérieur comme à l'extérieur du pays. Il refuse d'admettre la réalité et de faire son examen de conscience. Sans quoi il constaterait que l'insécurité est le fait de facteurs internes à la société rwandaise.

L'insécurité au Rwanda se caractérise notamment par : la terreur sur les collines comme dans les villes; la déportation et disparitions; les rackets et assassinats ; les massacres à grande échelle ; le harcèlement ethnique ; l' exil pour l'élite de tous ordres ; les réquisitions illégales; l'occupation illégale et illégitime des biens d'autrui.

Cette insécurité endémique date de l'attaque du FPR en octobre 1990 et sa prise de pouvoir par les armes en juillet 1994. Depuis lors, il s'est livré à plusieurs actes barbares et inhumains contre les populations civiles, actes commis surtout par l'Armée Patriotique Rwandaise (APR) et les milices Abakada et les Local Defence Force (LDF).

5.1. L'APR, UNE ARMEE CONTRE LA POPULATION

Loin d'être une Armée nationale, l'APR est une Armée au service de Kagame et du FPR. Elle n'a pas vocation d'être une Armée nationale, parce que le fait d'en faire une Armée patriotique la rattache automatiquement à une formation politique parmi tant d'autres. Ce fait exclu d'office à cette Armée la qualité de nationale et de souveraine, pour n'en faire qu'une machine à tuer sans scrupules et sans ménagement. Que ce soit en Uganda, au Rwanda ou en République Démocratique du Congo (ex-Zaïre), les Inkotanyi se sont illustrés par leurs manières atroces et félines d'éliminer leurs victimes.

Pour l'APR, tuer un Hutu n'est pas passible de jugement, tellement l'acte est banal. L'assassinat de Rwatoro, ex-magistrat à Kibungo est l'exemple par excellence de la façon dont un militaire du FPR considère un Hutu. Nous ne reprendrons pas ici la description des tortures subies par ce magistrat elles sont décrites dans le document référencé ci-dessous124.

Pour faire durer la souffrance, les Inkotanyi utilisent des méthodes originales, éprouvées tout au long de leurs luttes au Mozambique auprès du maquisard Museveni, devenu président de l'Uganda en 1986, avant de les lâcher sur le Rwanda. Leurs instruments favoris de torture ou de massacre sont : l'agafuni (vieille houe avec laquelle on frappe le crâne de la victime) et l'akandooya (méthode de torture les mains et les jambes liés derrière le dos ; la personne meurt par éclatement après des douleurs atroces), l'ablation des organes sexuels, l'empoisonnement dans les prisons, le refus de soins jusqu'à ce que les orteils ou les membres fragilisés tombent d'eux-mêmes125. Selon les mêmes témoignages, les candidats aux massacres de l'APR sont pour la plupart des gens d'une seule et même ethnie: les Hutu126. Le caractère ciblé et systématique ne fait aucun doute. Déjà en 1995, Robert Ménard, Président de Reporters Sans Frontières, n'hésite pas à affirmer que "si on n'a pas affaire à un GENOCIDE RAMPANT AUJOURD'HUI AU RWANDA, on a affaire à des massacres d'une telle ampleur, qu'il est impossible que la communauté internationale ne dise rien"127.

Le massacre de populations civiles par l'APR ne se limite ni au Rwanda, ni à la seule période d'avril-juillet 1994. Depuis l'invasion de 1990 qui n'a pas voulu porter son nom suite à la mauvaise foi et à la complicité de la communauté internationale, des massacres massifs de populations n'ont cessé d'avoir lieu.

Les populations de Byumba et Ruhengeri, puis de Kibungo et Gitarama ont été éliminées massivement.

L'Armée Patriotique Rwandaise (APR) s'est livrée à des ratissages massifs contre tous les opposants d'abord, assimilés aux militants du MRND, contre l'élite ensuite, qu'elle soit intellectuelle, militaire ou économique.

L'APR ne se contente pas de tuer: elle tient aussi à humilier ceux-là même qu'elle qualifie d'interahamwe, sobriquet diabolisé et appliqué indistinctement à tous les Hutu pour les distinguer des Tutsi sans éveiller dans la conscience des Occidentaux la réelle existence des ethnies.

A l'intérieur du pays, les populations civiles innocentes sont prises en otage et sont régulièrement exposées aux massacres par les militaires de l'APR. C'est le cas notamment pour les massacres de Kanama, de Gitarama... Le cas le plus flagrant à l'intérieur du pays fut cependant le massacre de près de 10.000 personnes à Kibeho en avril 1995. Dans un article de 2 pages, consacré à ces massacres dans Kinyamateka, Antoine RWAGAHILIMA n'hésite pas à affirmer que, à Kibeho, d'ineffables horreurs ont remplacé les apparitions - de la Vierge Marie128. Faisant écho aux Rapports des Ligues des Droits de l'Homme comme Africa Watch et FIDH (Fédération Internationale des Droits de l'Homme), Kinyamateka attribue sans hésiter les massacres de civils de Kibeho aux militaires de l'Armée Patriotique Rwandaise (APR).

L'auteur fait remarquer que le démantèlement des camps de l'intérieur depuis Octobre 1994 a toujours fait des victimes, comme à Birambo, Ndaba, Musange. Les camps de Kibeho qui n'étaient gardés que par 200 militaires de la MINUAR furent investis par près de 2.000 militaires de l'APR. Encore une fois, la MINUAR est jugée inefficace, malgré l'élargissement de ses pouvoirs. Le rapport, rédigé en anglais par les délégués d'Africa Watch et FIDH (Alison DES FORGES, Eric GILLET, Ganet FLEISCHMAN et Susan OSNOS) conclut en demandant au gouvernement de désigner une commission neutre chargée de juger les hauts responsables militaires de l'APR engagés dans ces massacres"129. Le pouvoir, qui a toujours couvert ces massacres et leurs auteurs, reconnaît ainsi qu'il était derrière toutes ces atrocités.

5.2. LE COÛT DE L'ARMEE

L'armée du FPR a toujours brillé par sa coloration monoethnique tutsi. Les exceptions ne se sont présentées que lorsqu'il s'avérait nécessaire de montrer fallacieusement à l'opinion internationale que l'Armée était Rwandaise et non "Patriotique".

Le problème a été plus crucial lors de l'invasion de la République Démocratique du Congo. Lors de la seconde invasion de ce pays par les troupes rwandaises, ugandaises et burundaises, les pertes en vies humaines ont été telles que les chefs de l'APR se sont vus obligés d'intégrer les Hutu dans l'APR. Pire, ils ont obligé les prisonniers à s'enrôler dans l'APR.

"A l'inverse de l'Uganda en effet, qui a signé un accord de cessez-le-feu en Libye, le Rwanda refuse toujours de négocier avec le régime Kabila, mais cet engagement lui coûte de plus en plus cher, car les pertes humaines s'alourdissent. Le chef d'Etat-major rwandais, le général Kayumba Nyamwasa, a reconnu que l'armée patriotique rwandaise avait eu au moins 500 morts et blessés depuis son engagement en RDC. Les milieux diplomatiques de Kigali estiment qu'entre 10.000 et 30.000 rwandais se trouvent en territoire congolais; et, selon d'autres sources, des Hutus tirés des prisons auraient été formés et envoyés en première ligne"130.

La guerre menée en RDC a été présentée comme un réflexe de survie d'un régime constamment menacé par d'incursions des rebelles et des anciens éléments des FAR. Cet argument, non fondé, de sécurité des frontières qui permet d'occuper la RDC jusqu'à 1500 km en profondeur, ne peut plus abuser personne, depuis que les deux armées rwandaise et ugandaise alliées dans l'agression de la RDC se sont affrontées et massacrées en se disputant les diamants des mines congolaises.

Cette partie de la RDC regorge des minerais tels que : coltan, cobalt, cuivre, or; diamant, étain, fer, manganèse, uranium, zinc, niobium, tantale .... 131 Les dirigeants des armées mono-ethniques rwandaise, ugandaise et burundaise, étant au service des multinationales minières, ils sont devenus « de grands hommes » exportateurs de minerais, alors que dans leur pays le sous-sol n'est qu'à l'image de la pauvreté de ses populations.

Le pillage des richesses congolaises par ces petits Etats voisins n'est possible qu'avec un déploiement militaire très important. Des rapports d'organismes de défense des droits de l'homme font état de violations systématiques des droits de l'homme dans les territoires occupés. Le rapport sorti en juin 2000 fait état de plus de 1,7 millions132 de personnes qui ont succombé à cause de la guerre dans l'Est de la RDC pour la seule période de août 1998 à juin 2000133. De nombreux enfants en âge de scolarisation sont recrutés et emmenés de force pour servir de chair à canon au Congo. Dans sa déclaration à Genève du 2 avril 2001 devant la commission des Droits de l'homme des Nations Unies, le Rapporteur Spécial des droits de l'homme au Congo, Roberto GARRETON a dénoncé le recrutement des enfants dans les armées. Cette pratique tire son origine dans les armées ugandaises (NRA) et rwandaises (APR)134. Le peuple rwandais menacé par la famine est contraint, malgré lui, de souscrire à l'effort de guerre.

De même des milliers de jeunes prisonniers rwandais sont envoyés dans les mines du Congo pour y travailler dans des conditions abominables, rappelant celles de l'esclavage des temps révolus135. (Rappelons que la plupart des prisonniers n'ont même pas de dossier d'instruction ni d'accusation formelle). Ces derniers temps alors que ces armées pressentent leur retrait imminent du Congo, de plus en plus de prisonniers sont contraints aux travaux forcés.

Dans un tel contexte, le récent colloque de « réconciliation nationale » tenu à KIGALI le 18 octobre 2000 ne peut être qu'un trompe-l'œil destiné à la Communauté internationale et ne reflète pas une volonté réelle de réconciliation nationale. Les autorités de Kigali, passées maîtres dans le mensonge et la manipulation clament la réconciliation dans le seul but d'attirer les fonds internationaux. De fait l'ancien Premier ministre récemment limogé, P.C. Rwigema, ne se fait guère d'illusions à ce sujet, tant que le pays sera quadrillé par des militaires rapaces. «  How can today's RPF promise to Rwandans to achieve Unity and Reconciliation when people have their properties taken away or are forced to share their lands with somebody else without any kind of contracts, as it has been done mainly in prefecture of Kibungo (...)  Some examples on the RPF leaders : General Paul KAGAME, as a leader of RPF and the head of State, has usurped other people's properties all around the country. He took up buildings in GISENYI, in KIGALI, and all over the country and among them, the colonel LAURENT RUTAYISIRE's building in KIMIHURURA (...) Tito RUTAREMARA, RPF brain, since he entered in RWANDA, he illegally occupies properties from RWAMAGANA to KIGALI. Actually, he is occupying Denis NTIRUGIRIMBABAZI's house while receiving accommodation allowances, because of the post he hold"136.

Il est vrai que l'enrichissement des nouveaux occupants du Rwanda ne cesse d'inquiéter plus d'un, spécialement lorsqu'il s'agit de militaires.

"Politiciens, militaires, hommes d'affaires liés à l'AKAZU affichent un train de vie luxueux, investissent au Rwanda dans des opérations rapportant des bénéfices considérables (comme par exemple, la construction des villas à louer aux institutions internationales), tout en exportant le plus gros de leurs gains à l'étranger. Dans de telles conditions, les postes stratégiques sont attribués secrètement, dans le huis-clos des puissants. Mais ses effets sont visibles: promotion et destitution, arrestations, disparitions et fuites à l'étranger d'hommes politiques et aussi d'intellectuels ayant dénoncé ou étant susceptibles de dénoncer le système de corruption et ses bénéficiaires"137.

5.3. LES INSTRUMENTS DE REPRESSION

Les responsables à tous les échelons de l'administration territoriale (préfets, bourgmestres, conseillers de secteurs et responsables de cellules) sont issus des cadres du FPR et des cadres des autres partis cooptés par le FPR ou les anciens militaires FPR démobilisés à cet effet.138

Un réseau para-militaire constitué de groupes armés du FPR, la Local Defence Force est omniprésent dans toutes les cellules. Il s'agit de 50.000 personnes armées, dispersées dans la population, sans salaire mais avec autorité sur les sujets elles peuvent tomber dans des dérives incontrôlables. Cette situation rappelle bien des régimes totalitaires dans l'histoire. Ces "anges gardiens" ont pour mission "officielle" de lutter contre les infiltrations et de protéger la population. La réalité est qu'ils sèment la terreur, et soumettent tout élément jugé hostile au FPR ou lui résistant.

5.3.1. La DMI : Directorate of Military Intelligence

La DMI (Directorate of Military Intelligence) est l'appareil par excellence pour museler toute personne susceptible d'élever la voix contre le système FPR. C'est la DMI qui constitue les dossiers, artificiels pour la plupart et qui orchestre les exécutions à l'intérieur comme à l'extérieur des frontières nationales. C'est la DMI qui a organisé les assassinats et les tentatives d'assassinats tels celui de Seth Sendashonga à Nairobi au Kenya. Elle a organisé les déportations massives de populations à chaque fois que le FPR avançait dans sa conquête du territoire rwandais. Ces déportations de populations permettaient au FPR d'exécuter des populations entières sans laisser de traces, les miraculés étant supposés ne pas pouvoir être localisés au cas où ils en survivraient. Des milliers de personnes furent ainsi déportées de Gitarama à Kibungo et Rwamagana en juin 1994, et beaucoup n'eurent pas le loisir de voir le chemin du retour: ils étaient égorgés et jetés dans les tranchées ou en pâture aux animaux sauvages.

Il n'est pas exagéré de considérer que la DMI (police militaire secrète) a beaucoup de points commun avec la GESTAPO NAZI des années '40. On parle peu de la DMI. Son efficacité et sa cruauté n'ont pas besoin de publicité. L'organisation est tellement redoutée qu'on tremble à l'évocation de son nom dans le pays. La boutade d'un journaliste récemment exilé en Belgique en dit long : "Si vous rencontrez trois hommes au Rwanda, vous pouvez en être sur que parmi eux il y a deux militaires, un policier et un membre du DMI." Ceci prouve l'omniprésence de cette institution meurtrière. Bien entraînées139 et très discrètes, ses unités sont partout opérationnelles.140 On les retrouve au Rwanda, en RDC, au Kenya, en Tanzanie dans la plupart des pays d'Afrique, mais aussi en Europe et en Amérique.

Le quartier général du DMI se trouve sur le sommet de la colline de KIMIHURURA au-dessus de la route vers l'aéroport. Toute personne qu'on amène au quartier général est certaine de ne pas en sortir vivante.

Des témoignages accablants sur ses actions criminelles sont nombreux. Le département s'est spécialisé dans des interrogatoires qui s'achèvent tous par des exécutions souvent accomplies par de jeunes recrues qu'on force ainsi à prouver leur hardiesse ou par des co-détenus auxquels on a promis la clémence en échange. Les meurtres qu'ils ont ainsi commis les rendent complices et ils sont tenus par le secret. Des tortures se font parfois en présence de la famille du détenu pour les mettre sous pression eux aussi. Leur sort sera pourtant identique.

De plusieurs sources nous avons obtenu des témoignages sur des civils transportés par caravanes nocturnes ou en camions pour une destination inconnue. Après on ne retrouve plus leurs traces ni dans les collines, ni dans les prisons.

Le journaliste britannique Nick Gordon rapportait déjà en 1995 l'existence de crématoires dans le nord du parc Akagera. Ces crématoires ont été associés avec les activités de la DMI. De cette période datent aussi les témoignages de l'utilisation de bulldozers près du camp militaire de Gabiro141 (dans le nord du parc Akagera) pour le nettoyage de ces crématoires. Le même journaliste fait état en avril 2000 de l'existence de 5 crématoires au Rwanda et donne des renseignements fort précis sur leur emplacement. Le journal Congolais Le Palmarès142 fait état de transport d'hommes et de cadavres de la région du Kivu vers le Rwanda.

Le réseau de la DMI n'est pas seulement actif au Rwanda mais aussi dans les territoires occupés de la RDC. De nombreux rapports provenant d'associations des droits de l'homme du Kivu relatent les exactions depuis les bombardements des camps de réfugiés en 1996.

La DMI est considérée comme l'auteur de l'attentat contre l'ancien ministre FPR Seth SENDASHONGA143 au Kenya. Il a été abattu en 1998 à Nairobi la semaine avant qu'il aille déposer une déclaration au Tribunal Pénal International à Arusha, Tanzanie. Un scénario semblable avait décidé en 1996 du sort du Major Théoneste LIZINDE, qui avait quitté les rangs du FPR, après avoir servi, pendant plusieurs années, comme alibi multi-ethnique au FPR.

Au Cameroun, tous les indices pointent du doigt la DMI dans l'assassinat sauvage en 1999 de Pasteur MUSABE144. La mort suspecte du journaliste Shinani KABENDERA en Tanzanie doit être perçue dans ce même contexte.145

La DMI circule régulièrement dans les pays occidentaux.146 Au Canada même la DMI semble impliquée dans une intimidation pendant l'hiver 1997-1998 d'un agent de la croix rouge canadienne, qui après une mission au Rwanda avait donné un témoignage peu élogieux lors d'une conférence publique.147

5.3.2. LDF Local Defense Force

La commune est devenue le bastion par excellence de l'insécurité. Car toute la commune est quadrillée par les abakada (cadres), les LDF (Local Defense Force) et la Police Communale. Ces milices sont issues pour la plupart de brigades du FPR infiltrées dans le pays bien avant 1990. Elles avaient été formées militairement et idéologiquement pour constituer une armée de choc lors de l'attaque du FPR en 1994. Il s'agit au moins de 50.000 personnes armées par les autorités, dispersées dans la population, sans parler d'autres catégories de civils à qui le FPR à distribué des armes après un entraînement militaire sélectif (étudiants, hommes d'affaire et agents de l'état... 148)

Depuis la victoire militaire du FPR, les abakada et les LDF sillonnent les collines pour incriminer quiconque a des biens matériels convoités ou représente un danger comme témoin gênant des diverses et nombreuses exactions des agents du FPR. Les cachots communaux servent de prisons à leurs victimes.

Human Rights Watch souligne les exactions de ces milices en ces termes :

« Members of the Local Defence Forces-young people recruited, trained and armed by the government supposedly to defend their communities, killed more than a dozen people and raped and robbed many others in different parts or the country. Nominally under the supervision of local authorities, they in many cases escaped punishment for their abuses.

The government reportedly forcibly recruited men and children for the army and the Local Defense Forces."149

6. L'AIDE FINANCIERE AU RWANDA

6.1. UNE AIDE AUX PAYS EN GUERRE

L'aide financière venant de tous les horizons ne cesse d'affluer au Rwanda sans aucune garantie de parvenir à la population. Cette aide est substantielle comme le soulignait en juillet 1997 Nils Tcheyan, Représentant de la BM pour la région des Grands Lacs : "Au Rwanda les interventions ont été triplées en trois ans, et entre 1997 et 2000, les prêts à ce pays seront environ 130 millions de dollars américains150".

En outre, selon le PNUD le Gouvernement rwandais aurait reçu l'équivalent de 350 millions de $US comme aide officielle en 1998.

Voici un rappel des aides internationales dont le Rwanda a bénéficié depuis la deuxième moitié de 1998 :

Juin 1998 : le FMI approuve une aide à l'ajustement structurel (ESAF) du Rwanda de près de 100 millions de $ US sur 3 ans. Malgré l'augmentation des dépenses militaires du Rwanda au delà des limites convenues, le FMI continue de débourser cette aide après le début de la guerre au Congo. En août 1999 même la deuxième tranche, c'est-à-dire 11 millions de $, a été versée, portant ainsi le total versé à ce moment-là à 16,7 millions de $.

31.03.1999 : La Banque Mondiale a approuvé un « Rwanda Economic Recovery Credit » de 75 millions de $ US, dont 40 millions ont été versés immédiatement.

18.05.1999 : l'UE débloque une aide budgétaire de 68 millions d'Euros (50 millions de $) en faveur du Gouvernement rwandais. L'aide avait été bloquée depuis six mois, lorsque le Rwanda avait envoyé ses troupes se battre au Congo.

10.03.2000 : l'UE a délivré une première tranche de 110 millions d'euros au titre de la reprise du Programme indicatif national, dans le cadre du VIIIème Fond Européen de Développement (FED).

17.06.2000 : 16 millions de $ US ont été prévus dans un accord entre IFAD (Fond International pour le Développement de l'Agriculture) et le Ministre rwandais des Finances. Le projet vise : la bonne gestion de l'administration, un réseau de communications, égouts, réseau hydrique ; encourager la production agricole et de la vaccination des animaux ; des prêts à moyen terme pour faciliter l'accès au monde du travail.151

Le 31 août 2000, le FMI et la banque Mondiale ont accepté de libérer les montants consentis au Gouvernement rwandais à concurrence de 13 millions $ USA pour le FMI et 17 millions $ USA pour la Banque Mondiale152.

Septembre 2000 : Le gouvernement américain a octroyé 4,5 millions de dollars au gouvernement rwandais en faveur de la démocratie, de la justice et des programmes de bonne gouvernance dans le pays, selon un communiqué émanant du ministère des finances cité par l'Agence rwandaise d'information (ARI). Cette somme sera remise par l'Agence Américaine pour le Développement International (USAID). Le communiqué a indiqué qu'un total de 4 millions de dollars a été réuni par le biais d'un programme du gouvernement américain 'Great Lakes Justice Initiative' (GLJI). Le GLJI est un programme spécial lancé en 1998 par le président Bill Clinton pour renforcer les systèmes judiciaires dans les pays de la région des Grands Lacs. L'ARI a fait observer qu'avec cette dernière contribution, le gouvernement américain aura alloué 14 millions de dollars au Rwanda dans le cadre du GLJI153.

Le PNUD, les Pays-Bas et la Suisse ont approuvé des crédits supplémentaires à hauteur de 8.500.000 $ pour les projets soutenant le Parlement, la justice, la fonction publique, la décentralisation et la démocratisation du pays

A tous ces financements, il faut ajouter les aides financières données au gouvernement rwandais par les gouvernements de différents pays. Sans oublier les aides des multinationales pour soutenir l'effort de guerre154.

L'Uganda, un autre agresseur de la RDC a, lui aussi, reçu des aides importantes :

A la mi-décembre 1998, le Club de Paris (avec d'autres) a annoncé la destination de plus de 2 milliards de $ à l'Uganda.

28/08 1999 : le FMI débloque une aide malgré la forte augmentation des dépenses militaires.

Même récemment, en janvier 2001, d'autres promesses d'aide ont été faites à ces deux pays, envahisseurs de la RDC :

« The governments of Rwanda and Uganda were among seven in sub-Saharan Africa to receive supplementary credits from the World Bank on Friday, to help them cope with oil price rises and other losses in their terms of trade. The World Bank approved a total of US $155 million in these supplemental credits to mitigate the impact of unexpected oil price increases and other terms of trade losses which were jeopardising the sustainability of economic reform programmes in the two countries, as well as in Madagascar, Mali, Mauritania, Niger and Zambia. Since the recovery of the Asian economy in 1999-2000, international oil prices doubled, reaching levels of over US $30 per barrel in the middle of last year, a World Bank statement said. The price of key commodity exports had also fallen on the world market, particularly in relation to the cost of oil, it said.

Rwanda, where the cost of petroleum imports was around US $63 million in 2000, compared with US $47 million in 1999, would receive a credit of US $15 million, the press release stated. The rise in oil prices had contributed to "significant inflationary pressures", a phenomenon compounded by the fact that Rwanda is land-locked, it said. An increase in transport costs would affect the mobility of some poor people by reducing their access to economic and social opportunities, it added. A US $25 million credit to Uganda was intended as a rapid response to combined adverse effects of increased oil prices and the declining world price of coffee. The average coffee export price decreased steadily from US $1.38 per kg in October 1999 to US $0.83 per kg in October 2000, which was a serious cause of concern "as Uganda's high economic growth is partly due to high international coffee prices", the World Bank stated".

6.2. UNE ATTITUDE BIENVEILLANTE DES BAILLEURS DE FONDS

Les bailleurs fonds, notamment la Banque Mondiale, qui pourtant ont toujours exigé une gestion transparente des aides reçues et une bonne gouvernance, affichent une attitude pour le moins laxiste et complice envers le régime de Kigali malgré les informations à leur disposition. En effet, l'ex-officier et Député du FPR ayant fait défection en août 2000, a déclaré à « La Libre Belgique » :

"De 1999 à 2000, je faisais partie du "Congo-Desk" du service External Security (sécurité extérieure). En septembre 1999, on m'a envoyé à Kisangani (Congo) pour la mobilisation politico-militaire. C'est dans cette ville que j'ai été discrètement approché par des gens de la Banque Mondiale, qui cherchaient à savoir pourquoi la Belgique déclare l'importation de 30 millions de dollars d'or et pierres précieuses du Rwanda, alors que cette somme n'apparaît pas dans la comptabilité de Kigali".

Il a ajouté : "Ce que je savais c'est que les diamants récoltés au Congo ne sont pas déclarés. Ce dossier était géré par le "Congo Desk" dirigé par le Major Dan Munyuza- qui faisait partie de "l'External security", service de renseignements commandé par le Colonnel Patrick Karegeya. Au sein du "Congo Desk", il y a une section "Production", y travaillent notamment le capitaine Hatari qui s'occupe des diamants, et le capitaine Karuranga Gatete, qui s'occupe des produits lourds (métaux lourds comme le coltan ou la cassitérite; l'huile de palme...)"155.

Cette ''économie criminelle'' est gérée par le biais des sociétés parallèles et non déclarées appartenant au FPR, dont : COTRACO (industrie du bâtiment), TRISTAR (commerce en tout genre) avec 30% de Rwandatel (unique société de télephones cellulaires), RWACOF (commerce et exportation du café), la Banque de commerce pour le développement et l'industrie (BDCI), Rwanda Petroleum, Kigali Petroleum, Transafrica, Nyarutarama View Developers, Golf View developers, KK Security et Intersec, la SONEX au Congo, ... 156.

Ce détournement et ce gaspillage de l'aide internationale sont également perceptibles au niveau de l'aide bilatérale comme en témoignent les quelques interpellations des ministres du FPR faites par les députés en 1999-2000.

CONCLUSION

La situation dans la région des Grands Lacs en général et du Rwanda en particulier suscite de nombreuses inquiétudes et nécessite des mesures urgentes d'assainissement.

La communauté internationale doit entreprendre et encourager des initiatives visant à faire respecter les droits de la personne humaine reconnus par l'article 3 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme : « Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne » et l'article 6 concernant le Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Des pressions sur le régime de terreur doivent être envisagées et appliquées par la Communauté Internationale pour garantir la paix dans la région des Grands Lacs africains :

1. Dans le domaine de la démocratie

Tous les observateurs dénoncent la mainmise de l'idéologie FPR sur toute la vie politique. Il faut alors :

2. Au niveau de la Justice

L'inexistence de l'état de droit ne peut engendrer la justice. Le système actuel au Rwanda consiste à créer, par des organes non démocratiques, des lois qui légitiment l'injustice à l'encontre les uns et l'impunité envers des autres. Pour une justice équitable il faudrait :

3. Au niveau du TPIR

Les missions assignées au TPIR sont : aider au rétablissement de la paix dans la région, enquêter sur les crimes commis au Rwanda et poursuivre les coupables, aider à la réconciliation nationale des Rwandais. A cet effet, ce tribunal doit :

4. Au niveau du respect des droits de l'homme

Tout citoyen rwandais a droit à la vie et à l'exercice de ses droits fondamentaux. Dès lors il faut :

5. Au niveau de l'armée

L'armée du FPR est une structure monoethnique. Au lieu de garantir la sécurité à toute la population, elle constitue un instrument de répression au service du régime actuel.

Il faudrait :

6. La réconciliation

Faute d'une réelle volonté politique, le régime actuel n'a pas pu créer les conditions d'une véritable réconciliation nationale. Il faudrait à cet effet :

7. L 'aide au développement.

NOTES

1. Traduction : « Voici ce qui mettra fin à la dispute » ; cette expression se réfère au Kamarampaka : le référendum organisé par l'ONU le 25 septembre 1961 qui a mis fin à la domination féodale.

2. J.P. MUGABE, Déclaration sur l'attentat contre l'avion dans laquelle les présidents HABYARIMANA du Rwanda et NTARYAMIRA du Burundi trouvèrent la mort le 6 avril 1994.; Washington DC 21 avril 2000.

3. J.B. MUGABE, op.cit.

4. Christophe HAKIZABERA, Lettre adressée à la Commission de l'ONU chargée d'enquêter sur la responsabilité de l'ONU dans le drame rwandais, Cotonou 10 août 1999.

5. Christophe HAKIZABERA, Lettre adressée à la Commission de l'ONU chargée d'enquêter sur la responsabilité de l'ONU dans le drame rwandais, Cotonou 10 août 1999.

6. Alype NKUNDIYAREMYE, Bilan catastrophique de 5 ans du régime FPR, 1999.

7. Rony BRAUMAN, Stephen SMITH et Claudine VIDAL, RWANDA: politique de terreur, privilège d'impunité,

8. Rony Brauman, Staphen Smith et Claudine Vidal, op. cit.

9. terme swahili pour « 10 maisons »

10. Voir aussi : 3.3.2 Les syndicats de délateurs

11. Les premières communes atteintes par la fièvre aphteuse KAGITUMBA et NYAGATARE sont les zones qui ont connus les plus grand affluent de bétail en provenance de l'Uganda. Voir aussi IRIN-CEA Update 1,114 for the Great Lakes (Wednesday 14 February)

12. Rony Brauman, Stephen Smith Claudine Vidal, op. cit.

13. IRIN 25 septembre 2000 : « The US government has disbursed US $4.5 million to the Rwandan government to support democraty, justice and good governance programmes in the country. »

14. Panafrican News Agency (Dakar) 9 mars 2001

15. Véronique KIESEL dans LE SOIR 11-12/03/2001

16. Le temps des assassins et l'espace humanitaire au Rwanda, Kivu 1994-1997, Hérode, p 119.

17. Protocole d'accord entre les forces politiques FPR, MDR, PDC, PDI, PL, PSR et UDPR sur la mise en place des institutions nationales, Kigali, 24 novembre 1994. Ce protocole prévoit l'insertion d'une représentation de l'armée dans l'Assemblée nationale, narguant le principe de la séparation des pouvoirs. Les militaires, même s'ils ne sont que six, permettent au FPR de contrôler majoritairement l'Assemblée nationale.

18. Gouvernements, représentation politique, principaux corps d'état, institutions de la société civile, Rwanda. Organigrammes mis à jour partiellement le 30 mars 2000 sous la responsabilité d'André Guichaoua

19. Faustin Twagiramungu, ancien Premier ministre en témoignait dans une conférence publique à Lausanne le 15 décembre 2000.

20. Filip REYNTJENS, La guerre des Grands Lacs, L'Harmattan, 1999 p 32

21. POSITION COMMUNE, définie par le Conseil européen concernant le Rwanda, Bruxelles 30 mars 1998

22. AfroAmerican Network, 27 novembre 2000

23. Selon des informations recueillies, il aurait été tué pour avoir dénoncé, dans un rapport à ses supérieurs, le détournement de l'aide alimentaire du PAM par l'armée du FPR.

24. GIEP, Rwanda : Le Génocide qu'on aurait pu stopper, mai 2000, Chapitre 7 §7.1 à 7.37.

25. Dialogue N° 198, mai-juin 1997 p.43

26. J.B. NKURIYINGOMA, L'exploitation politique de l'ethnie et ses conséquences sur les populations civiles, Dialogue N° 199 juillet-Août 1997, pp 57 - 58

27. Filip Reijntjens, La guerre des Grands lacs, l'Harmatan 1999 p. 105

28. - International Rescue Committee, juin 2000 - Colette Braeckman, Le Soir, Bruxelles 02 septembre 2000

29. Pour une démocratie de concordance et citoyenne, Projet Nouer, Nouvelle Espérance pour le Rwanda, Lausanne 1998.

30. Message des religieux et religieuses du Sud -Kivu, le 29/10/1999

31. SOS Rwanda-Burundi, SOS Discrimination dans le traitement des dossiers de certains réfugiés rwandais, 02/02/2001.

32. Voir par exemple l'article : "Woman stole the show from Paul KAGAME at the US Institute for Peace", AfroAmerican Network 5 février 2001.

33. Voir aussi : 0

34. The President and Vice President of RPF in USA have resigned and quit the RPF, AfroAmerican Network, Michigan, 9 septembre 2000

35. ARENA (Alliance Rwandaise pour la Restauration de la Nation) est le nom de ce nouveau parti. Son communiquée du 21/03/2001 publié à Washington D.C. présente son comité de coordination : Alexandre KIMENYI (USA), Joseph NGARAMBE (Lille - France), Gratien RUDAKUBANA (Canada), Joseph Kabuye SEBARENZI (USA)

36. Association "Justice et Paix", Cri d'alarme pour les violations des Droits de l'Homme au Rwanda, 1995.

37. Amnesty International du 23 juin 1998.

38. IRIN, 2 novembre 2000

39. Rapport FAO, Voir : 4.1 LA DESTRUCTION DÉLIBÉRÉE DES FORÊTS ET DES CULTURES:

40. Agence MISNA du 19 mars 2001 cité par RDR dans son communiquée N° 7/2001 du 21 mars 2001 et intitulé : THE RDR CONDEMNS THE FORCEFUL RECRUITMENT OF DETAINEES AND MINORS BY THE RWANDAN ARMY FOR ITS OPERATIONS IN CONGO

41. Criminologue et pédagogue de formation, Geert Cappelaere travaille pour l'Unicef. (voir : Patrice Leprince Enfants privés de liberté, droits et réalités. Editions Jeunesse et Droit)

42. Association Juste et paix, 1995: cité dans un document de l´association AKAGERA-RHEIN e.V « Rwanda -4 juillet 1994- 4 juillet 1995- Une Année Noire ».

43. Le terme est emprunté au défenseur des Droits de l'Homme Joseph MATATA.

44. A l'exception du gouvernement qui est la carte de visite internationale du régime en 1996, la majorité des députés à l'Assemblée Nationale, quatre des six membres dirigeant de la cour suprême, plus de 80% des bourgmestres, la grande majorité des secrétaires généraux, des ministres et de professeurs et étudiants à l'université, la quasi-totalité de l'armée et des services de sûreté de l'Etat sont des Tutsi.

45. Eugène NDAHAYO, Rwanda. Le dessous de cartes. L'Harmattan, Paris et Montréal 2000, p. 139

46. idem, p.139

47. Cité par Eugène NDAHAYO, Rwanda. Le dessous de cartes. L'Harmattan, Paris et Montréal 2000, p. 139

48. Le Centre de Lutte contre l'impunité et l'injustice au Rwanda a recensé dans son communiqué d'avril 1997 des cas précis sur tout le pays. Les Parquets de la République, les Tribunaux de 1ère instance, les cours d'appel, rien n'a été épargné. Exemples des assassinats commandités par le pouvoir : Monsieur Vincent Nsanzabaganwa, président du Conseil d' Etat ; Monsieur Gratien Ruhorahoza, Président de Première Instance de Kigali ; Monsieur Bernard Nikuze., Président de Première Instance de Butare. Premier substitut près la Première Instance de Butare La magistrature debout n'a pas été épargnée : Le chef du Parquet de Rushashi, Kigali ; le substitut Floribert Habinshuti est mort dans une embuscade tendue par les hommes armés. Le substitut Jean Baptiste Sibomana a été battu à mort par les militaires. Monsieur Munyansanga, premier substitut du parquet de Kigali, a été assassiné par le pouvoir. La liste est longue si l'on tient compte du nombre considérable d'auxiliaires de la justice assassinés jusque dans les communes. Cette épuration se pratique également par des intimidations diverses : arrestations arbitraires, bastonnades et humiliations publiques etc. Tous ces actes visent à légitimer une injustice devenue ainsi structurelle.

49. POSITION COMMUNE, définie par le Conseil concernant le Rwanda, Bruxelles, 30 mars 1998.

50. "The Ruhengeri court of first instance has sentenced five people to death on charges related to acts of genocide and crimes against humanity in Nkuri and Nyamutera communes, Ruhengeri Prefecture, during the 1994 genocide, Radio Rwanda reported on Saturday. Two other convicts were sentenced to life imprisonment, two to 18 years imprisonment and two to 13 years, while three other accused persons were acquitted, the report stated" IRIN-CEA Update 1,122 for the Great Lakes (Monday 26 February 2001)

51. Gouvernements, représentation politique, principaux corps d'état, institutions de la société civile, Rwanda. Organigrammes mis à jour partiellement le 30 mars 2000 sous la responsabilité d'André Guichaoua

52. DIALOGUE n°219 de Novembre-Décembre 2000, pp.28-29.

53. Dialogue n° 199 de juillet-aout 1997.

54. Dialogue n° 207, novembre-décembre 1998 p. 85

55. Dialogue n° 207, novembre-décembre 1998 p. 91

56. voir : SOS Rwanda-Burundi, S.O.S : Discrimination dans l'étude des dossiers de demandeurs d'asile de la Région des Grands-Lacs.Considérations sur le traitement de certaines demandes introduites par des ressortissants rwandais, janvier 2001, pp. 7-11 Considérations sur le traitement de certaines demandes introduites par des ressortissants rwandais

57. Ordonnance-Loi N° 10 du 28/04/1917, voir Bulletin Officiel du Rwanda-Urundi(BORU), 1924, N°4 Suppl., pp.4 et 5

58. Bulletin Administratif, 1943, p. 1498

59. Art. 2, al. 1

60. Art. 2, al. 3

61. Art. 33,a) et 34, a)

62. Art. 10

63. Dr. Jean GAKWAYA Utilisation erronée de l'institution du Gacaca dans le recherche d'une solution au génocide rwandais. Revue de Droit Africain n° 14, avril 2000 Kinshasa - Bruxelles.

64. Charles NTAMPAKA, LE GACACA DEVENU UNE JUSTICE AUX MAINS DES VICTIMES, est chargé de cours invité aux Universités Catholiques de Louvain (UCL), Chercheur à l'Universitaire Instelling Antwerpen.

65. Amnesty International, Bulletin d'information 075/00, 26 avril 2000. ;

66. Dialogue N° 223 Nov. Déc. 1999

67. Alipe NKUNDIYAREMYE, Bilan catastrophique de 5 ans du régime du FPR, Bruxelles ,1999

68. Joseph Matata, Rwanda : Les syndycats de délateurs, CLIIR, Bruxelles mai 1997.

69. Africa International, n° 326 de juillet/août 1999, p. 28

70. Aldo Ajello - Cavalier de la paix : Quelle politique européenne commune pour l'Afrique Edition GRIP 2000.

71. Eugène Ndahayo, Rwanda. Le dessous des cartes, Paris-Montréal, L'Harmattan 2001, pp. 106-107.

72. Eugène Ndahayo, op.cit., p. 107.

73. Sa famille restait en résidence surveillée à Kigali, ses compagnons de fuite ont été remis aux autorités rwandaises et torturés. (André GUICHAOA)

74. Aldo AJELLO, op cit.

75. P. Céléstin RWIGEMA Réponse à l'invitation au Colloque sur la réconciliation Nationale : " Can today, FPR, and its leaders be able to bring Unity and reconciliation in Rwanda among Rwandans" Washington D.C. 10/10/2000.

76. S/1994/1125, §§146 à 148.

77. Conseil de Securité. 3453è séance - S/PV 3453, mardi 8 novembre 1994: Déclaration du Représentant d'Argentine(Mme Cañas

78. Dans les jugements de Jean-Paul Akayesu et de Jean Kambanda (et dans d'autres), les principes d'interprétation restrictive du droit pénal, de non-rétroactivité d'une loi pénale, de responsabilité personnelle en droit pénale, d'utilisation restrictive de la preuve par ouï-dire, de nécessité de corroboration d'un témoin unique, d'exclusion de témoin dont les capacités mentales ont été affectées, de vérification des fondements d'un aveu, de nécessité de preuves prima facie avant l'admission de chefs d'accusation, etc., ont été ignorés et violés.

79. Lettre collective des détenus du 11 octobre 1999 adresse à la Présidente du TPIR.

80. Lettre de certains Avocats de la défense du 26 octobre 1999 à Monsieur le Greffier du TPIR

81. Agence Hirondelle du 15 octobre 1999

82. Ubutabera No 73 du 25 octobre 1999, p.8

83. Voir audience de la Chambre d'Appel du 22 février 2000 dans l'affaire Jean-Bosco Barayagwiza contre le Procureur, ICTR-97-19-AR72

84. Il y a eu au moins 8 séries d'amendement depuis l'adoption du Règlement.

85. Décision du 13 avril 2000, dans l'affaire le Procureur contre Aloys Ntabakuze et Gratien Kabiligi(ICTR-96-34-I).

86. Décisions du 5 novembre 1999 portant sur l'amendement des actes d'accusation dans l'Affaire le Procureur contre Ferdinand Nahimana,(CTR-96-11-I) et dans l'affaire le Procureur contre Hassan Ngeze, ICTR-97-27-I, ainsi que décision du 11 avril 2000 dans l'affaire le Procureur contre Jean-Bosco Barayagwiza, ICTR-96-19-I.

87. La Requête de jonction déposée par le Procureur dans l'affaire ICTR-98-44-.

88. Décision évoquées ci-avant concernant Aloys Ntabakuze et Gratien Kabiligi

89. Décision évoquées ci-avant concernant Ferdinand Nahimana, Hassan Ngeze et Jean-Bosco Barayagwiza.

90. Des révélations sur ce rapport daté du 1 août 1997, parues dans le journal Canadien National Post, le 1er et le 2 mars 2000, ont permis de lever le voile sur l'existence de ce rapport dont les grandes lignes ont été publiées par ce journal sous la plume de Steven Edwards.

91. Déclaration de Madame Navanethem Pillay, Présidente du TPIR, du 7 avril 2000 - ICTR/INFO-9-2-228STA.FR

92. Certains accusés ont obtenu ce document à la suite de requêtes (Aloys Ntabakuze, Gratien Kabiligi, Ignace Bagilishema). Mais ils doivent l'utiliser uniquement pour leur propre défense.

93. Décision de la Chambre dans l'affaire le Procureur contre Gratien Kabiligi, ICTR 97-34-I : Decision on the Defence Motion seeking supplementary investigation.

94. Déclaration de Madame Carla Del Ponte à la Presse, AFP le 2 juin 2000 ; Lettre des Détenus du TPIR datée du 12 juin 2000 au Secrétaire Général des nations Unies.

95. Conférence de presse tenue à Arusha le 13/12/2000

96. Comprehensive report of the Secretary General on practical arrangements for the effective functioning of the International Tribunal for Rwanda, recommending Arusha as the seat of the Tribunal (42); S/1995/134, 13 February 1995 in The United Nations and Rwanda 1993-1996, p.465, para. 42-43.

97. Conseil de Sécurité, 3453è séance - le 8 novembre 1994, Doc. S/PV 3453

98. "Trying to assuage Rwanda's anger, Ms del Ponte promised earlier this week to travel to Kigali, win back the government's cooperation and improve the work of the Tribunal - World Africa. Thursday, November 11, 1999.

99. World Africa. Thursday, November 11, 1999

100. "Despite the Prosecutor's latest move, Rwanda has said it will not grant her a visa to visit her office in Kigali".- Fondation Hirondelle - Hirondelle News Agency in Arusha. International Criminal Tribunal for Rwanda. News November 21st 1999. ICTR/BARAYAGWIZA.

101. ibidem

102. Ordonnance de la Chambre d'Appel du 25 novembre 1999

103. ICTR/IFO-9-3-0008FR. ARUSHA, le 28 novembre 1999. Déclaration du Procureur.

104. Transcrit de l'audience du 26 mai 1997 dans l'affaire le Procureur contre Joseph Kanyabashi, ICTR-96-15-T, p.37.

105. Ibidem, p60

106. IRIN-CEA Update 1,123 for the Great Lakes (Tuesday 27 February 2001)

107. Journal danois Aktuelt 17 avril 2000

108. Dix témoins à décharges ont été assassinés dans les quinze jours après la déposition au greffe de la liste des témoins à décharge. Voir aussi DMI

109. le journal danois AKTUELT du 17 et du 18 avril 2000

110. Rony BRAUMAN, Stephen Smith et Claude VITAL, op. cit.

111. Charles NTAMPAKA, Dialogue numéro 216.

112. Mission de la FAO dans IRIN 6 novembre 2000

113. Déclaration faite le 25 octobre 2000 par Mr. Jean-Michel Swaelens, porte-parole du Secrétariat d'état à la coopération au développement lors d'un colloque organisé par le CASEAC à Bruxelles.

114. Séminaire sur la réhabilitation, la décentralisation et le développement communal, Commission de l'Union Européenne - GTZ - Coopération Suisse décembre 1993 Akagera Rwanda.

115. Emmanuel Gapyisi, ingénieur rwandais assassiné en 1993 par un commando du FPR, dans son livre Le défi Urbain, décrivait d'un coté le flux monétaire de la campagne et de l'aide internationale vers la ville et de l'autre coté, le filtre posé par la ville sur le retour des biens vers les zones rurales. Il considère ces mécanismes asynchrones comme les raisons premières qui maintiennent le sous-développement.

116. Le livre est trouvable au siège de l'Association SOS Rwanda-Burundi, Rue Pastur 31, 6230 Buzet (Belgique), Tél/fax : 00 32 (0) 71 84 59 31 ou à la Librairie UOPC, Chaussée de Wavre218 1050 Bruxelles.

117. Dialogue N° 207, nov. - déc. 1998, pp. 113 - 114

118. Dialogue N° 207 Novembre - Décembre 1998

119. La Revue ESPRIT, Août/septembre 2000

120. Cette somme est énorme, quand on considère que le salaire journalier d'un ouvrier est de 200 FRW et que le revenu monétaire de la population rurale est bien plus bas que celui des salariés.

121. Discours du Vice-Président et du Ministre de la défense, Général Major Kagame à l'Inauguration de du centre Scolaire « La Colombière » le 11 décembre 1999

122. Dialogue N°214 de Janvier/Février 2000

123. Catherine ANDRE, L'aide européenne et internationale aux pays impliqués dans la guerre en RDC : levier pour la paix ou encouragement à la guerre ? Conférence donnée dans le cadre d'un Séminaire d'analyse et de réflexion organisé par Réseau Européen Congo; Congo : Fini Lusaka ? Vive Lusaka ?, Bruxelles 14 décembre 2000, p.20.

124. SOLIDAIRE-RWANDA/DUFATANYE, Le non-dit sur les massacres au Rwanda, dossier n°1, Bukavu, octobre 1994, p.22.

125. SIBOMANA André in Conférence de RSF du 11 décembre 1995.

126. au Mutara et à Byumba, "la quasi-totalité des victimes est de l'ethnie hutu. Toutefois, l'on recense parmi les victimes de ces massacres des rares cas d'ethnie tutsi, un nombre non négligeable de Hutu burundais et quelques ressortissants zaïrois travaillant à l'époque dans le pays. Une tendance d'extermination des habitants de la Région déjà occupée ou à conquérir". SOLIDAIRE-RWANDA/DUFATANYE, Ibidem, p.16.

127. Stany MUBILIGI, RSF s'insurge contre un génocide rampant au Rwanda, in Rwanda: Points de vue n°11, p.46.

128. RWAGAHILIMA A., I Kibeho, amarorerwa yasimbuye amabonekerwa, in KINYAMATEKA n° 1422 d'Avril II.

129. Stany MUBILIGI, Coup d'œil sur la presse rwandaise in Rwanda: Points de Vue n°9, pp.65-66.

130. Colette BRAECKMAN, Le Rwanda s'enlise dans la guerre au Congo, in LE SOIR

131. Pierre BARACYETSE, L'enjeu géopolitique des transnationales minières en RDC, SOS Rwanda-Burundi, Buzet, décembre 1999.

132. International Rescue Committee

133. Au Rwanda, les victimes de l'APR sont évaluées entre 1,5 et 4 millions. Ainsi par exemple, NKIKO NSENGIMANA parle de 3.5 millions de victimes depuis 1990. A ce titre, l'asbl humanitaire SOS Rwanda-Burundi a sorti en 1998 une liste assez éloquente des présumés criminels du FPR avec leurs principaux chefs d'accusation.

134. Rik De Gendt du Journal DE STANDAARD le rapporte en ces termes : « De inzet van kindsoldaten in de Congolese burgeroorlog is "een methode die door Ugandese en Rwandese legers is ingevoerd" en was tot 1996 in Congo zelf niet gekend." De Standaard 2 avril 2001.

135. Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, Art. 4 : « Nul ne sera tenu en esclavage ni en servitude ; l'esclavage et la traite des esclaves sont interdits sous toutes leurs formes. »

136. P. Célestin RWIGEMA Réponse à l'invitation au Colloque sur la réconciliation Nationale : " Can today, FPR, and its leaders be able to bring Unity and reconciliation in Rwanda among Rwandans" Washington D.C.

137. Rony BRAUMAN, Stephen SMITH (journaliste à Libération) et Claudine VIDAL (CNRS, Centre d'Etudes africaines, RWANDA: politique de terreur, privilège d'impunité,

138. voir « Camps de rééducation et le climat de terreur. »

139. Les services secrets du FPR sont entraînés par des instructeurs américains (au moins deux entre eux sont succombés pendants les attaques des camps des réfugiés au Zaïre en 1996) et par le Mossad israélien. Des programmes spéciaux d'entraînement ont été organisés en Israël même. Tous les passagers de l'avion, abattu début 1998 au-dessus du MASSISI en RDC (zone contrôlée par le Rwanda), étaient des membres des services secrets israéliens. Cet incident laisse soupçonner une grande implication de l'état d'Israël dans l'occupation de l'Est de la RDC. (Ce ci peut être expliqué par l'intérêt pour le secteur de l'or et du diamant)

140. The Rwandan department of military intelligence (DMI) in action in USA. AfroAmerican Network, August 2000

141. Au sujet de ces crématoires du parc national de l'Akagera, le journaliste Stephen Smith de « Libération » écrit le 27/02/1996 : " En s'appuyant sur des listes de victimes et en recoupant des témoignages, " Libération " est en mesure d'avancer que le Front Patriotique Rwandais (FPR), l'ancien mouvement rebelle Tutsi au pouvoir à Kigali depuis juillet 1994, est responsable de 100.000 morts hutu depuis 22 mois ". Il est impératif de prendre ces rapports au sérieux et d'exiger un accès à tous ces lieux pour y effectuer des enquêtes sérieuses et indépendantes.

142. LE PALMARES n°. 1803 Kinshasa 06/04/2000.

143. Cet attentat a eu lieu après que le Colonel Jackson Nziza, actuel tout puissant Directeur de la DMI, fut expulsé du Kenya pour des activités incompatibles avec la fonction de diplomate. C'est son successeur, Francis Mugabo, qui a exécuté le forfait.

144. Pasteur MUSABE avait été Directeur général de la BACAR (Banque Continentale Africaine-Rwanda) avant de s'exiler. Après la victoire du FPR, la société mère luxembourgeoise vendait ses actions pour un franc symbolique à Valens KAJEGUHAKWA, un des grands sponsors financier du FPR. MUSABE est le frère du colonel Théoneste BAGOSORA, accusé par le FPR au TPIR d'actes de génocide. Le Prof Reyntjens déclare devant ce tribunal dans sa déposition du 27 novembre 1997 que Bagosora, au lieu d'être poursuivi devrait être entendu comme témoin principal. Le 9 décembre 2000 disparaissait à Bruxelles Madame Régine MUJAWAMARIYA, la sœur de Musabe et de Bagosora. Sa dépouille à été retrouvée une semaine plus tard mais sa mort datait de 4 jours après sa disparition. On déclare officiellement qu'elle est morte d'intoxication au monoxyde de carbone. Les circonstances de sa mort suscitent de nombreuses questions. (CLIIR Bruxelles, 20 janvier 2001).

145. AfroAmerican Network, 27 novembre 2000

146. La sécurité de l'état belge avait été mis au courrant de la présence de membres de la DMI dans les caves de l'ambassade rwandaise à Bruxelles. AfroAmerican Network .: RPF allegedly setting up hit squads network in USA, August 26,2000

147. Le Canadien avait été suivi longtemps par un véhicule qui l'a percuté pour essayer de lui faire quitter la route. La voiture a été retrouvé dans l'enceinte de l'ambassade canadienne. Ce n'était qu'après intervention du ministère des affaires étrangères du Canada que l'agent de la croix rouge n'a plus été inquiété.

148. voir aussi point 5.3 LES INSTRUMENTS DE REPRESSION

149. Human Rights Watch, 2001 World Report

150. « Avenire », 2/07/1997. Cela malgré le fait que Rwanda et Uganda aient augmenté du 400% leur budget militaire, alors que BM avait établi une diminution de ce budget.

151. Ce projet s'adresse à 51.000 familles de la préfecture rwandaise d'Umutara. Co-bailleurs de fonds : OPEC et gouvernement de Kigali. Un consortium de 5 ong internationales ont exprimé l'intention de participer à l'initiative et de contribuer aux dépenses. (de MISNA du 20 juin)

152. Dialogue, n° 219 Novembre Décembre 2000, p. 103.

153. Source: IRIN 25 septembre 2000. Voici le texte en anglais de la nouvelle : US gives $4.5 million to support democracy The US government has disbursed US $4.5 million to the Rwandan government to support democracy, justice and good governance programmes in the country, the Rwanda News Agency (RNA) quoted a ministry of finance communiqué as saying The money will be processed through the US Agency for International Development (USAI"D). The communiqué said a total of $4 million has been made available through the US government's Great Lakes Justice Initiative (GLJI). GLJI is a special programme launched by President Bill Clinton in 1998 to strengthen justice systems in countries of the Great Lakes region. RNA noted that with this increment, the US government will have made available US $14 million to Rwanda under the GLJI. The communiqué further underscored that the GLJI funds to be made available to Rwanda this year will be used to expand the rule of law and governance activities, with particular emphasis on technical and logistical support to the ministry of justice. It will be used to assist in processing the genocide caseload and to promote long term development of justice sector institutions. The funds are also to be used to support education and conflict mediation activities at the national university of Rwanda; English and Kinyarwanda language reporting on the International Criminal Tribunal for Rwanda (ICTR) and gacaca [traditional justice] trials; local NGOs engaged in promoting awareness of and respect for human rights and the work of the gacaca tribunals. The statement also said that through the agreement with the Rwandan government, the US will continue its support to journalists based in Arusha, Tanzania who are reporting on the work of ICTR."

154. Mr. Pierre Baracyetse, rwandais, ingénieur civil des mines, dans son document de décembre 1999 « L'enjeu géopolitique des Transnationales Minières au Congo », publié par SOS.RWANDA-BURUNDI, affirme : « La guerre du Zaïre (comme celle du Rwanda en 1990) fut présentée comme une guerre interne de libération politique pour destituer le Maréchal Mubutu. L'AMFI apporta un appui financier, militaire et logistique déterminant aux organisations coalisées au sein de l'AFDL. Aujourd'hui les armes, les munitions, les équipements militaires sophistiqués qui ont permis à l'AFDL de remporter la victoire sur les Forces Armées Zaïroises, continuent d'être mis à la disposition du Rwanda, de l'Uganda et du Burundi par la même société AMFI, dans la guerre que ces trois pays mènent au Congo » (p. 19).

155. Libre Belgique du 23-25/12/2000

156. Libre Belgique du 23-25/12/2000