Depuis des années, la succession dynastique est instaurée en Afrique comme au Gabon, au Togo et au Tchad où elle vient d’être consacrée. Ce qui s’est fait au Togo et au Gabon et officialisé au Tchad, c’est la succession du père par le fils. Personne ne semble pouvoir s’y opposer. Ce schéma risque de faire tache d’huile dans les autres pays du continent. D’autant que la clémence voire la complaisance de la “communauté internationale” à l’égard de ces “monarchies républicaines” a coûté à cette dernière le peu de crédibilité qui lui restait.
Conséquence: le processus est en marche forcée en Guinée Équatoriale, au Congo-Brazzaville, en Ouganda et au Rwanda.
Indices et procédés
Le processus de monarchisation des républiques utilise les mêmes méthodes et les indices qui le révèlent sont invariables.
D’abord la présidence à vie de celui qui est au pouvoir est formellement actée. Ceci se fait notamment par le tripatouillage des Constitutions pour y exclure la limitation des mandats. Ou alors en y insérant la clause ridicule de remise des compteurs à zéro à la fin des échéances. Le cas le plus caricatural en la matière est celui du Rwanda. Ainsi, Paul Kagame, “après une transition de neuf ans (1994-2003) et trois mandats de sept ans chacun (2003-2024), il pourra se représenter pour deux nouveaux mandats de cinq ans et ainsi de suite jusqu’à sa mort” !(Constitution du Rwanda de 2015).
Les indices de cette monarchisation des républiques bananières apparaissent aux yeux de tous, le moment venu. Il y a notamment la montée en puissance et la préparation des fils désignés comme dauphins.
Mais les choix (ou le manque de choix) des monarques régnants, d’un, parmi leurs descendants à imposer pour lui succéder, ne sont pas toujours judicieux et des fois connaissent des ratés. Florilège !
Cas de la monarchie en Ouganda de Yoweri Kaguta Museveni.
Yoweri Kaguta Museveni, qui règne sur l’Ouganda depuis 1986, soit pendant 36 ans et qui est actuellement âgé de 80 ans, commence à imposer à l’opinion son fils unique Muhoozi Kainerugaba qu’il a longuement préparé comme son dauphin.
Muhoozi Kainerugaba est en effet à 48 ans, et depuis plusieurs années, Lieutenant Général et Commandant en Chef de l’Armée de Terre de l’Ouganda. Et depuis peu, il vient d’être nomme “Généralissime” et donc l’équivalent du Commandant en Chef Suprême des Armées qu’est son père Museveni.
Mais qui est le vrai homme Muhoozi Kainerugaba si l’on analyse ses sorties dans les réseaux sociaux dans lesquels il se répand sans réserve ni retenue depuis quelques mois?
Pour nous il est:
Un enfant gâté qui se croit en même de remplacer son père avant le temps, même pour les décisions réservées au Chef de l’Etat : annoncer sa retraite de l’armée à 48 ans avant de dire qu’il l’annule lui-même!
Un enfant gâté et nul en politique qui confond les relations familiales avec les relations entre états : “Kagame est mon oncle donc ses opposants sont les ennemis de l’Ouganda et doivent être pourchassés”!
Un enfant gâté et un général politiquement nul qui embarrasse les ministres du gouvernement de son père dont il n’est pas le supérieur hiérarchique et même pas collègue : ministre des Affaires étrangères pour les relations de l’Ouganda avec la RDC ou le Rwanda;
Un enfant gâté et toxicomane donc dangereux pour l’Ouganda qui fait des déclarations irresponsables susceptibles d’embraser non seulement l’Ouganda mais aussi toute la région du genre:
Les hima-tutsi du Rwanda et de l’Ouganda sont supérieurs aux autres ethnies et donc doivent les dominer partout en Afrique;
Uhuru Kenyatta est bête pour ne pas avoir brigué un troisième mandat interdit par la Constitution du Kenya;
Lui, Général Muhoozi avec son armée peut prendre Nairobi à moins de 2 semaines. Il cherche seulement dans quel quartier de Nairobi il installerait son Quartier Général;
Enfin, un enfant gâté et dangereux qui gêne et compromet son papa pourtant rompu dans l’art de jouer un double jeu dans la géopolitique mondiale; selon Muhoozi, l’Ouganda soutient la Russie dans son offensive en Ukraine alors que le gouvernement de son père déclare être neutre. Toujours selon lui, l’Ouganda soutient le TPLF du Tigré contre l’Ethiopie, alors que son papa déclare le contraire…
Quand viendra le moment de remplacer son père à la tête de l’Ouganda, puisque c’est à cela qu’il est préparé, il sera pire en pitreries, bouffonneries et autres gaffes… que Idi Amin Dada.
Pour le Rwanda, quid de Ivan Cyomoro et Ian Kagame?
C’est à présent officiel, Kagame est président à vie, de fait. A seulement 65 ans d’âge dont 28 au trône du Rwanda, il vient en effet de déclarer qu’après d’autres 20 années à la tête du Rwanda, il verra comment y être remplacé d’après ses déclarations sur RFI et FR 24. Mais ceci était un secret de polichinelle car depuis une décennie, après la confirmation formelle et légale (amendements successifs de la Constitution de 2003) du régime monarchique qu’il a réinstauré au Rwanda en 1994, il a commencé à préparer un probable successeur parmi ses 3 fils et sa fille.
Préparation de ses fils pour lui succéder
Il a d’abord, comme il se doit, envoyé son fis Ivan Cyomoro à l’Académie militaire de West Point (United States Military Academy at West Point, couramment abrégé en « USMA » ou « West Point »). Après une année, Ivan Cyomoro ne pouvant plus supporter la rigueur de la discipline dans cette prestigieuse académie militaire malgré les aménagements faits pour lui comme “fils de Chef d’état”, il a déserté au grand dam de son père. Il a par contre trouvé mieux d’aller mener la dolce vita dans un quartier chic de Beverly Hills situé dans le sud-ouest de Los Angeles. Beverly Hills, c’est du glamour à l’état pur, des villas, des stars de cinéma et du monde de la musique… Ainsi, il y a acheté à prix comptant une villa à 10 millions de dollars dans lequel il attend sa possible montée au trône du Rwanda.
Contrarié par l’ainé de ses fils, Kagame va alors miser sur son fils cadet Ian en l’envoyant à l’Académie royale militaire de Sandhurst (Royal Military Academy Sandhurst ou RMA Sandhurst) au Royaume Uni. Apparemment tout va pour le mieux car Ian Kagame vient d’être nomme Sous-Lieutenant.
Apparemment donc, le prince héritier au trône du Rwanda n’est pas encore formellement désigné. D’autant plus que les détenteurs du code ésotérique à la cour de Kagame peuvent toujours désigner sa fille ainée Ange qui, depuis quelques années, est déjà dans les rouages du royaume. En effet, elle est, selon tous les observateurs, la vraie Cheffe du Gouvernement. Car avec le titre officiel de “Conseillère à la Présidence”, elle est à la base de toute nomination, mutation ou destitution de hauts fonctionnaires, sans oublier que c’est elle qui supervise la communication de son père et du gouvernement.
Ainsi donc, après le règne d’un demi-siècle d’un père quasi illettréé venu d’Ouganda qu’est Paul Kagame, les rwandais seront encore soumis sous le joug d’un enfant gâté qui régnera sur eux. Tout cela par la volonté des puissances anglo-saxonnes en complicité avec leurs alliés ou plutôt leurs obligés de l’Europe décadente comme la France d’un certain Macron. La question qui reste posée est celle de savoir où le peuple rwandais puisera des énergies pour se libérer de ce joug aussi moyenâgeux que méprisant bien plus que le colonialisme par l’Occident aux XIXè et XXè siècles.
En conclusion générale
En cette année 2022, les dictateurs, potentats et autres monarques absolus auto-proclamés d’Afrique ont le vent en poupe et se frottent les mains. Ils peuvent tout se permettre sans risque que ce qui est présentée comme la “communauté internationale” (en réalité l’Occident mené par les Etats Unis) ne les dénonce et encore moins les sanctionne.
En effet, cet Occident a complétement perdu toute crédibilité aux yeux des peuples africains à cause de leur ”deux poids, deux mesures”: Comment s’acharner à harceler et sanctionner les régimes populaires et démocratiques comme le Zimbabwe, le Burundi, ou la RDC agressée mais qui crie dans le désert et reste même sous embargo des armes…et en même temps choyer et ériger en modèle des dictatures sanguinaires dans les pays sur lesquels ils règnent mais aussi fauteurs de troubles et déstabilisateurs et pillards des pays voisins. L’illustration la plus criante et scandaleuse est celle du régime d’Apartheid au Rwanda du tutsi Paul Kagame. S’ajoute le fait que le même Occident est actuellement occupé à isoler et au mieux à humilier et soumettre la Russie. L’Occident ne peut donc pas prendre le risque de jeter certains pays africains dans les bras de la Russie en les critiquant.
Mais dans ces calculs politiciens, cyniques et mesquins, l’Occident devrait intégrer dans l’équation le fait que certains peuples africains qui souffrent n’ont rien à foutre avec les arrangements géopolitiques. Ainsi, les rwandais, qui croupissent depuis 28 ans sous le joug de Paul Kagame, souhaiteraient qu’il parte et disparaisse pour de bon, même si cela signifierait (à tort) la main mise de la Russie sur leur pays. A choisir entre Putin qui resterait en Russie et Kagame venu d’Ouganda en conquérant, pour un vrai rwandais raisonnable, le choix est clair!
Hélas!, les effets de cette situation ne pourraient commencer à se faire sentir qu’après deux ou trois décennies, le temps géo-politico-stratégique. C’est seulement après ce délais que sautera aux yeux du citoyen lambda le nouveau “désordre mondial made in USA” qui est entrain d’être imposé pour succéder à celui qui était en cours depuis 1989 à la fin de la Guerre Froide avec la chute du Mur de Berlin.
Source: Echos d’Afrique
Photo: Paul Kagame et sa fille Ange avec Barack Obama et son épouse, lors de leur visite à la Maison Blanche le 5 août 2014.