Le dramaturge grec antique Eschyle a fait remarquer que la première victime de la guerre est la Vérité. On le voit aujourd’hui dans les médias hégémoniques qui manipulent l’information par le mensonge et la désinformation, cherchant à imposer une pensée unique et la monoculture des esprits.
La guerre entre la Russie et l’Ukraine n’est pas isolée; certains protagonistes prétendent vouloir la paix, mais ils encouragent le conflit et tentent d’éteindre le feu avec davantage de combustible. Ils envoient des armes à l’Ukraine et appliquent des sanctions économiques contre la Russie. La manipulation de l’information censure la liberté de la presse; nous devons sauver les journalistes, des hommes et des femmes qui risquent leur vie pour rapporter les faits de guerre, mais les responsables des grands médias hégémoniques censurent l’information, ils font partie du système et sont responsables des mensonges.
Je ne peux pas ne pas mentionner Julian Assange, emprisonné dans une prison britannique et faisant l’objet d’une demande d’extradition vers les États-Unis pour avoir rendu publics des documents du Département d’État sur les atrocités commises en Irak et dans le monde. Ils cherchent à faire taire Julian, et à cacher la Vérité et les meurtres de journalistes dans le monde.
Ce n’est pas nouveau, c’est une longue histoire dans la vie de l’humanité, entourée de mensonges, de malentendus et d’oublis intentionnels. Nous avons besoin de la mémoire qui éclaire le présent, et de savoir que la première victime de la guerre est la Vérité.
Pendant la guerre entre l’Irak et les États-Unis, les mensonges de George Bush selon lesquels l’Irak possédait des « armes de destruction massive » ont été diffusés par les États-Unis et leurs alliés, accompagnés d’une vaste campagne des médias hégémoniques du monde entier. En approuvant la politique par leur silence complice, ils ont justifié la guerre.
Le 12 février 1991, Mairead Corrigan Maguire, prix Nobel de la Paix d’Irlande du Nord, m’a appelé pour me rendre en Irak dans le cadre d’une mission humanitaire; en raison du blocus aérien imposé par les USA, nous partirions par voie terrestre d’Amman, en Jordanie, à Bagdad. Nous avons voyagé dans une camionnette avec un chargement symbolique d’eau, qui valait plus que de l’or, car l’eau à Bagdad était contaminée par les radiations des bombes à l’uranium appauvri. L’objectif était de livrer la petite cargaison à l’hôpital pédiatrique. Nous avons été informés de la situation grave que vivaient les médecins en raison du manque de médicaments et d’autres fournitures. La petite délégation composée de Mairead, du père John, un jésuite membre du F.O.R. –Fellowship of Reconciliation– des États-Unis, une journaliste de Grande-Bretagne et moi-même, est arrivée à Bagdad. Nous avons été accueillis dans l’hôtel semi-détruit, manquant de tout, nous nous sommes reposés du voyage épuisant et le lendemain, une femme musulmane nous a expliqué qu’elle avait quitté le refuge pour laver les vêtements de ses enfants, et quand elle est revenue après le bombardement, ses enfants n’étaient plus là, emportés par la mort.
Selon les médias grand public, deux bombes intelligentes ont pénétré par le tuyau de ventilation et ont détruit un bunker militaire.En vérité, ils ont détruit et tué plus de 500 enfants et leurs mères. C’était un refuge, selon Vamveyda, la mère de Veyda. La première bombe a tué de nombreuses personnes, la seconde a fait monter la température à plus de 500 degrés et a tué tout le monde, en faisant éclater les tuyaux. Seules 17 personnes ont survécu. Nous avons dénoncé les faits au niveau international, la réponse a été le silence. Les États-Unis l’ont justifié comme « dommage collatéral » dans toute guerre.
Nous avons accompagné la femme jusqu’au supposé bunker de forme circulaire, au milieu des décombres et des débris du bombardement. Les familles ont apporté des photos des enfants, des dessins, des vêtements, elles ont fait de ce lieu un oratoire. Nous avons accompagné la douleur des personnes présentes et de tout le peuple irakien, nous avons joint nos mains et prié le Dieu de tous les noms et sans nom, dans des langues que nous ne connaissions pas, mais que nous avons comprises avec notre esprit et notre cœur. Nous avons prié pour les âmes des enfants qui ont été privés de vie et d’espoir, nous avons prié Dieu pour que la guerre prenne fin, nous étions en communion avec toute l’humanité. Un homme m’a dit: je ne crois pas en Dieu, je ne sais pas comment prier. Je lui ai répondu: ne t’inquiète pas, Dieu croit en toi, il suffit de se taire pour écouter le silence de Dieu, ce qu’il te dit à toi et à l’humanité.
Dans la situation actuelle de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, nous prions pour qu’ils arrêtent la guerre, nous croyons au pouvoir de la prière et nous demandons que toutes les religions s’unissent pour appeler à la fin de la guerre. La paix n’est pas un cadeau, elle se construit et il faut du courage pour l’atteindre.
Ce n’est pas en sanctionnant la Russie que le conflit sera résolu. Les États-Unis et l’Europe doivent « désarmer la raison armée » qu’ils ont dans leurs structures et leurs esprits.
La Russie doit arrêter la guerre et venir à la table des négociations. L’Ukraine doit sauver son peuple et résoudre la situation, ce qui n’implique pas de faire partie de l’OTAN, d’avoir des bases militaires et des laboratoires biologiques et chimiques sous la tutelle du Département d’État américain, ce qui expose sa complicité; et doit cesser de massacrer les provinces séparatistes du Donbass qui subissent la violence de l’Ukraine depuis huit ans. Il n’y a pas d’innocents dans la guerre, tout le monde est responsable. La violence amène plus de violence, pas une solution au conflit.
Je vous rappelle le tribun Pilate, qui s’est cyniquement lavé les mains ensanglantées des victimes innocentes, et qui a demandé: « Qu’est-ce que la Vérité? », malgré les tentatives de tuer la Vérité. Un ancien proverbe dit: « La nuit la plus noire est celle où l’aube se lève ». Encore et encore la lumière surgit et renaît dans la prière et l’esprit, nous ne perdons pas l’espoir en la vie, un autre monde est possible. Dieu nous a fait don de la liberté, les êtres humains sont responsables de l’usage et de l’abus que nous en faisons.