Ce 17/3/2025, Kigali a rendu publique sa décision de rompre ses relations diplomatiques avec la Belgique. Ce coup de gueule de Paul Kagame intervient à peine quelques jours après l’annonce surprise par le président de l’Angola des négociations directes entre la RDC et le M23 prévues pour le 18/3/2025 à Luanda.

De même, cette décision de Kigali intervient le jour annoncé pour la réunion des ministres des Affaires étrangères des organisations de l’EAC et de la SADC ayant à l’ordre du jour comment assurer la paix à l’Est de la RDC. Mais aussi après le meeting incendiaire de Paul Kagame à Kigali le 16/3/2025 dans lequel il a proféré des accusations mensongères, des insultes et des menaces à la Belgique.

Enfin le coup de sang de Paul Kagame a été rendu public en même temps que l’annonce des sanctions prises par les 27 pays de l’UE contre les proches du dictateur rwandais.

Antécédents entre la Belgique et le régime du FPR de Paul Kagame au Rwanda

Outre que la Belgique fut une puissance coloniale des trois pays que sont la RDC, le Rwanda et le Burundi qu’elle a administrés pendant plus de 40 ans sous l’entité “Congo belge et Ruanda -Urundi”, en ce qui concerne le Rwanda ce fut encore sous la tutelle belge lui confiée par les Nations Unies que la monarchie féodale Tutsi fut abolie par une Révolution sociale et populaire en 1959.

Mais trente ans plus tard, alors que le Rwanda était devenu une République sous un régime démocratique, certaines classes politiques en Belgique, au pouvoir ou de l’opposition, ont estimé qu’il fallait dédommager les monarchistes tutsi qui avaient été chassés du pouvoir par la majorité hutu en 1990, en réinstaurant un régime de leur obédience au Rwanda. Ceci est apparu et démontré par nombreux actes ou positions pris par la Belgique depuis la fin des années 1980 après la création du FPR . On peut ainsi relever que:

A l’invasion du Rwanda par les éléments de l’armée de l’Ouganda en 1990, la Belgique fut en première ligne pour faire admettre que ceux qui envahissaient le Rwanda étaient des réfugiés qui rentraient en armes dans leur pays et non des militaires de l’armée ougandaise.

L’attitude et le rôle de la Belgique pendant la guerre de conquête du FPR de Paul Kagame durant la période de 1990-1993 furent déterminants quant à l’issue de la guerre. En effet, de part son expertise que le monde lui reconnaissait pour avoir été la puissance coloniale du Rwanda, la voix de la Belgique était prépondérante quand il faillait faire pression sur le régime du président Habyarimana pour céder face au FPR de Paul Kagame. Ainsi c’est la Belgique qui fut à la base et a été la marraine de l’alliance entre le groupe armé FPR et les partis d’opposition à Habyarimana qui a abouti à un pacte signé à Bruxelles début juin 1992.

Après l’Accord de paix entre le Rwanda et le FPR signé à Arusha en Tanzanie en aout 1993 et qui prévoyait le partage du pouvoir dans un gouvernement et un parlement à base élargie au FPR mais surtout l’intégration des deux armées (APR et FAR), la Belgique devait jouer un rôle essentiel dans l’implémentation de cet accord qui malheureusement n’a jamais été appliqué. Ainsi elle a fourni le contingent le plus important dans la force des Nations Unies qui devait comme des Caques bleus, rester neutre et faire appliquer et respecter les termes de cet accord. Mais curieusement les soldats du contingent belge des 2 bataillons provenant du Régiment para-commando étaient briefés dans leurs casernes de Flawinne ou Diest avant de les embarquer pour Kigali, comme quoi ils allaient être envoyés au Rwanda, pays que beaucoup de ces jeunes ne connaissaient pas, soi-disant pour y chasser un dictateur nommé Juvénal Habyarimana et aider à vaincre son armée dénommée les FAR. Certains en témoignent maintenant et avec regrets.

La Belgique a joué et joue encore (mais jusqu’à quand?) un rôle-clé depuis 1994 dans la consolidation du tout nouveau régime illégitime car à l’époque considéré par la population conquise comme “étranger”.

Ainsi c’est la Belgique, qui fut en première ligne pour casser ou faire la chasse à toute opposition possible au régime du FPR surtout une opposition armée. De part son expertise, la Belgique a suggérer aux autres puissances occidentales pourtant “démocratiques” de fermer les yeux sur les violations des droits de l’Homme et des crimes du régime de Kagame. Enfin elle a été (ou est encore?) championne dans le lobbying pour le financement direct et sans conditions presque à 100% du budget national du régime

Si donc il y a un pays ou une puissance dans ce monde que le régime du FPR de Paul Kagame devrait adorer ou au moins éternellement remercier pour son apport dans la reprise du pouvoir des descendants des anciens féodaux au Rwanda, l’équivalent de la restauration de la monarchie féodale abolie en 1959, c’est bien le royaume de Belgique. Mais Paul Kagame et donc son parti-état FPR ne sont point rationnels.

Comment Paul Kagame perçoit-il la Belgique ?

Après 30 ans de pouvoir absolu au Rwanda et d’impunité dans la région et par les grandes puissances et organisations internationales, Paul Kagame en est arrivé à réduire la Belgique à sa taille géographique en considérant comme ayant quasiment la même superficie et le même nombre d’habitants, celle-ci qui n’a pas plus de ressources naturelles que son Rwanda mais qui a moins de lobbies qui influencent les décideurs du monde que lui, il peut s’en passer et même l’humilier comme il l’a fait pour la France beaucoup plus grande et puissante que la Belgique. Mais il ignore que la seule expertise de la Belgique en ce qui concerne ces anciennes colonies vaut plus que les lobbyings que Paul Kagame paie en millions de dollars pour influencer les décideurs du monde. Le cas de la France des Sarkozy ou de Macron dans le dossier du Rwanda ne peut être brandi comme leçon à inculquer à la Belgique qu’il considère comme le maillon faible de la chaine des pays occidentaux et donc sur lequel il peut appuyer à tout moment pour la casser à sa faveur.

Cas de la France dans lequel son chantage a marché et marche toujours

Comme ce chantage lui a réussi en France en 2006, Paul Kagame compte en user pour amener les pays européens à s’agenouiller devant lui! En effet quand un juge français a inculpé certains de ses proches pour l’attentat terroriste du 06 avril 1994 dans lequel ont péri deux chefs d’Etat hutu, signal ayant déclenché un génocide au Rwanda et d’où il tire la légitimité de son pouvoir, le même dictateur a rompu les relations diplomatiques avec la France et a banni la langue française au Rwanda. Sans tarder Nicolas Sarkozy, qui venait d’être président après Jacques Chirac, est allé demander pardon à Kagame à Kigali au nom de la France en avouant avoir « participé au génocide ». Après quoi Paul Kagame a rétabli ces relations. Bien plus quelques années plus tard, tout fraichement élu, le jeune Emmanuel Macron est allé lui aussi s’agenouiller devant Kagame ; il lui a même offert en cadeau la direction de l »OIF basée à Paris. C’est ainsi que le Rwanda de Kagame, pays dans lequel la langue française est bannie et qui a rejoint le Commonwealth, préside l’Organisation des pays francophones depuis 8 ans! Il attend donc que la Belgique imite la France et vienne s’incliner devant lui.

Qu’en sera-t-il en ce qui concerne le Royaume de Belgique?

Dans un Etat fédéral comme la Belgique en plus un royaume au système parlementaire, on voit mal quel responsable oserait aller s’auto-flageller devant Kagame au nom de la Belgique! Même le Roi des belges, ne pourrait l’oser surtout qu’il n’a pas de pouvoir politique comme les présidents en France.

Notre avis est donc que Paul Kagame, par usure et folie du pouvoir, se goure en croyant que un politicien quelconque belge se résoudrait à aller s’agenouiller devant lui à Kigali comme l’ont fait Nicolas Sarkozy et Emmanuel Macron pour qu’il rétablisse les relations diplomatiques. Et encore mois que les citoyens ordinaires belges vont pâtir et perdre quelque chose de cette rupture jusqu’à faire pression sur leur gouvernement pour tout faire afin que Kagame accepte de rétablir ces relations. De toutes les façons les personnalités belges qui sont des inconditionnelles de Paul Kagame ont automatiquement la nationalité rwandaise que leur offre Paul Kagame et il leur est facile de gérer leurs intérêts au Rwanda en toutes circonstances. Nous vous épargnons la liste dans laquelle on note des anciens parlementaires, ministres, des avocats, des journalistes, des hommes d’affaires,…, belges que Paul Kagame a offert la nationalité rwandaise.

Les belges ne devraient donc pas paniquer tout comme les rwandais du FPR ne devraient pas eux aussi jubiler du fait que Paul Kagame, dans un mouvement d’humeur, a pris cette intempestive décision. Tout dépendra de l’évolution de la situation politico-diplomatique à l’Est de la RDC car la situation militaire échappe depuis quelques temps à la RDC envahie et occupée par les troupes de Paul Kagame avec son M23 et sans moyens de les repousser.

Attendons le début de ces négociations directes entre le RDC militairement affaiblie et le M23 de Paul Kagame triomphant qui auraient du débutent ce 18 mars 2025 à Luanda, mais dont le M23 a claqué la porte prétextant que des sanctions prises par l’UE constitue une entrave à ces négociations. Si négociation il y avait, cela nous aurait permis d’en savoir davantage le menu et les exigences de chaque partie.

Source: Echos d’Afrique

Photo: Le président rwandais Paul Kagame et le ministre belge des Affaires étrangères Maxime Prévot

La Belgique réitère son appel à des sanctions contre le Rwanda (@directnewsofficiel4630, 21.02.2025)