Lettre ouverte à la mission française d’information sur le Rwanda 

Monsieur le Président,

Mesdames, Messieurs les Membres de la Mission,

Votre Mission d’information sur le Rwanda entame la phase de la rédaction de son rapport. Celui-ci est attendu et sera reçu avec effroi s’il ne se contente que de reprendre -en les officialisant- un certain nombre de rumeurs, d’arguments de propagande, d’éléments de fond de commerce en faveur du régime, de mensonges, de contredits et d’omissions qui entourent jusqu’à maintenant le drame rwandais; avec soulagement par contre, s’il parvient à apporter la lumière sur une série de zones d’ombre qui émaillent les rapports précédents, notamment les différents rapports de l’ONU sur base desquels la résolution 955 (1994) du Conseil de Sécurité portant création du Tribunal Pénal Internacional pour le Rwanda a été adoptée, et le rapport de la commission d’enquête du Sénat de Belgique (décembre 1997):

* Le fait de guerre;
* L’attentat contre l’avion présidentiel (le 6 avril 1994);
* La non-poursuite des presumes coupables de crimes graves faisant partie du FPR-INKOTANYI/APR.

L’association SOS Rwanda-Burundi souhaite plein succès à votre Mission. Il y aura succès si votre travail sert à faire avancer la justice en faveur de toutes les victimes, indépendamment de leur appartenance ethnique ou de leurs sensibilités politiques et/ou sociales.

Votre travail et ses conclusions engageront à leur insu la vie de millions de Rwandais pour les générations à venir. Comme il est dit plus haut, on n’accuse pas un peuple de génocide sans avoir le courage d’aller jusqu’au bout de la vérité. L’orientation qu’ont prise les auditions permet d’espérer qu’un pas sera fait dans la recherche objective de cette vérité:

* La vérité sur les victimes.
* La vérité sur les coupables de tous bords.
* La vérité sur les causes, les mobiles et les circonstances de ces tueries d’une intensité et d’une brutalité jamais égalées.
* La vérité sur les responsabilités rwandaises et étrangères et leurs conséquences.

Quelques points méritent toutefois une attention particulière:

1. Les missions de l’ONU au Rwanda

a. la MINUOR
b. la MINUAR
c. l’Opération Turquoise

2. La France accusée de soutien aux régimes dits « hutu »

3. Réécriture de l’histoire du Rwanda et manipulation de l’opinion internationale

4. Les zones d’ombre dans les rapports d’enquête précédents

a. les victimes
b. la non-prise en considération du fait de la guerre
c. les commanditaires de l’assassinat des Présidents Habyarimana et Ntaryamira d. la non-poursuite des membres du FPR-INKOTANYI / APR soupçonnés d’avoir prémédité et commis des crimes contre l’humanité qui sont de la compétence du Tribunal Pénal Internacional pour le Rwanda

5. Justice et réconciliation

1. LES MISSIONS DE L’ONU AU RWANDA

a. La MINUOR

La MINUOR a été créée par la Résolution 846 adoptée le 22 juin 1993 par le Conseil de Sécurité. Basée à Kabale en Uganda, elle avait pour mission de surveiller la frontière commune entre les deux pays, afin que le FPR-INKOTANYI n’utilise l’Uganda comme base arrière pour ses approvisionnements en hommes et en munitions. Le général canadien Roméo Dallaire prit le commandement de cette unité forte de 85 personnes.

La mission de la MINUOR fut handicapée par le lobbying fait par l’Uganda et certains pays par intérêts géostratégiques, comme la suite l’a montré, ainsi qu’à cause de l’incapacité et la partialité de leurs dirigeants. En effet, la Résolution portant sa création stipulait entre autres que, dans sa tâche de surveillance de la frontière entre l’Uganda et le Rwanda, le trafic humain (human traffic) ne serait pas entravé. L’argument avancé pour soutenir cette disposition était le souci de ne pas pénaliser les populations frontalières dans leurs échanges quotidiens. Cela revenait ni plus ni moins à autoriser les rebelles du FPR-INKOTANYI et leurs recrues à faire des va-et-vient de part et d’autre de la frontière sans être inquiétés. En effet, depuis octobre 1990, date de l’attaque du FPR, la population rwandaise frontalière avait fui. Du côté Ugandais, la population s’était éloignée en craignant les débordements des tirs croisés. La résolution officialisait ainsi les échanges entre le FPR-INKOTANYI basé au Rwanda et l’Uganda.

Avec des effectifs réduits, la MINUOR ne pouvait contrôler une frontière longue de plus de 200 kilomètres dans un relief très accidenté. La conséquence en est que jusqu’en mars 1994, seuls deux postes d’observation, celui de Gatuna et de Cyanika, étaient opérationnels. Les rebelles évitaient donc ces deux postes et empruntaient les passages nombreux laissés libres sur toute la bande frontalière et desservis par des pistes carrossables. Rien d’étonnant donc que la MINUOR ait conclu n’avoir rien vu qui pouvait impliquer l’Uganda dans la guerre contre le Rwanda.

Entre-temps le Général Dallaire qui, de l’avis de son attaché de presse: «connaissait bien le FPR puisqu’il avait établi son quartier général à Kabale, au sud de l’Uganda, et que l’approvisionnement du Front passait par là», 1, effectua une mission au Rwanda en vue d’évaluer les besoins logistiques pour la mise en place d’une force de maintien de la paix au Rwanda. La MINUAR fut ainsi instituée par la Résolution 872 du 5 octobre 1993 du Conseil de Sécurité des Nations Unies, mais sans saisir toute la dimension du conflit, notamment à cause du rapport tronqué de la MINUOR. Le Général canadien Roméo Dallaire fut nommé commandant en chef de la MINUAR qui devait superviser également la MINUOR.

b. La MINUAR

Le 17 novembre 1993 fut inauguré officiellement le Quartier Général de la MINUAR à Kigali. Le lendemain 18 novembre, tous les élus du MRND de la sous-préfecture de Kirambo (zone démilitarisée sous l’autorité de la MINUAR mais sous contrôle de facto du FPR) furent massacrés avec les membres de leurs familles (environs 50 personnes)2. Dallaire promit une enquête dont les résultats n’ont jamais été publiés, malgré l’insistance de tous les acteurs politiques rwandais qui voulaient couper court à la suspicion. Il se refusa à le faire, pour ne pas «aggraver la situation déjà tendue»3. L’opinion publique rwandaise, dans sa grande majorité, l’accusa, à tort ou à raison, de partialité et de collusion avec le FPR sur qui pesaient de fortes présomptions dans ces massacres. De fait, aucun des candidats présentés par ce Front n’avait été élu.

A titre de rappel, les Accords signés à Kinihira (commune Cyungo, préfecture de Byumba), entre le Gouvernement rwandais d’alors et le FPR, avaient établi une zone démilitarisée et y prévoyaient les élections des autorités locales. Les élections dans cette zone constituaient pour les parties concernées un test fort de démocratie. Le FPR-INKOTANYI n’avait jamais évolué en parti politique et avait refusé cette évolution. Même après sa victoire, le FPR-INKOTANYI ne semble pas prêt à se constituer en parti politique. Il est dès lors légitime et pertinent de se poser la question de savoir comment et pourquoi le FPR-INKOTANYI a accepté de participer aux élections impliquant les partis politiques agréés. Ce comportement du FPR-INKOTANYI constitue dans son chef un indice assez significatif de sa négation de la démocratie. Il aurait préféré la solution radicale contre les élus à l’acceptation des résultats du scrutin.

D’autres massacres du genre ont suivi. Citons notamment l’assassinat d’une dizaine d’enfants dans le parc des Birunga, l’assassinat d’une dizaine d’écoliers tués à la grenade dans la commune de Taba (Préfecture de Gitarama), l’assassinat du Directeur de l’usine à thé Cyohoha-Rukeri (en commune Cyungo – Préfecture de Byumba) et de ses proches collaborateurs … Dallaire promettait chaque fois de rendre publics les rapports d’enquête, mais rien ne fut fait. Sa présomption de collusion avec le FPR-INKOTANYI ne faisait que s’accroître et sa neutralité était mise de plus en plus à rude épreuve.

Aujourd’hui, l’on peut affirmer que la neutralité du Général Dallaire était un leurre. En effet, le journaliste de la MINUAR, Nshimiyimana Vénuste, est affirmatif quand il écrit: «Au mois de janvier 1994, le Général Dallaire aurait déjà dû être remplacé. Mais c’était sans compter sur un de ses amis, le directeur exécutif de la MINUAR, le Dr Kabia Abdul, un homme apprécié aux Nations-Unies et qui bénéficiait de l’appui d’un haut responsable à New York. A des collègues canadiens venus en inspection, il alla jusqu’à dire: « Si on me remplace, je demanderai à mon successeur d’aider ces jeunes combattants du FPR, si gentils et disciplinés, alors que les gouvemementaux sont brutaux et arrogants»4.

Des casques bleus de la MINUAR, à l’instar de leurs chefs, ont trempé dans des affaires indignes de leurs fonctions:

* On les a vus arracher l’effigie du Président Habyarimana à des passants et la piétiner haineusement.

* Dans leurs smocks, ils ont pris de gros cailloux et sont allés les lancer sur l’habitation d’un certain Barayagwiza Jean-Bosco, un des cadres du parti CDR.

* La fille de l’ex-chef d’Etat-major fut arrêtée à un point de contrôle et les 4 roues de sa voiture furent trouées à coups de baïonnette par les casques bleus.

* On les a vus faire entrer de force, à la cérémonie de prestation de serment, des candidats députés non admis par les Accords d’Arusha.

La liste de ces méfaits peut encore être allongée. Ces comportements regrettables répercutés largement par la RTLM avaient une influence néfaste sur la vision que la population se faisait de la neutralité et de la moralité de la MINUAR

Dans la même période, des assassinats de quelques leaders politiques, comme par hasard hutu, se multiplièrent. C’est le cas notamment de:

* Emmanuel Gapyisi, personnalité de premier plan du MDR et fondateur du Forum Paix et Démocratie;

* Félicien Gatabazi, Secrétaire Général du PSD et Ministre des travaux Publics;

* Fidéle Rwambuka, membre du comité central du MRND;

* Martin Bucyana, Président du Parti CDR.

* … 5

Le FPR-INKOTANYI était pointé du doigt, mais le Général Dallaire se taisait. Pourtant, au mois de mars 1994, nous dit encore Nshimiyimana Vénuste, le Représentant Spécial du Secrétaire Général des Nations Unies montre au Général Dallaire un document prêt à être faxé à New-York. Le Général l’annote avant de l’envoyer. «Dans ses commentaires, il s’opposait à la modification du mandat de la MINUAR et disait contrôler la situation»6.

Ces incidents et assassinats à répétition non élucidés et non sanctionnés, opérés dans les principaux partis politiques, n’ont-ils pas constitué autant de tests confortant leurs auteurs dans l’idée que l’assassinat même du Chef de l’Etat pouvait se faire dans la stricte impunité et sans que le peuple ne réagisse? La MINUAR n’a-t-elle pas fortement contribué à asseoir le FPR-INKOTANYI dans ses convictions criminelles?

Le général Dallaire croit aujourd’hui se faire dédouaner par le fameux fax envoyé á New York et qui transmettait les informations sur les caches d’armes recueillies auprès du fameux informateur «Jean Pierre» qu’une enquête sérieuse devrait pouvoir identifier 7. N’est-il pas étonnant qu’on accuse tout un peuple de crimes aussi graves que le génocide, sur base d’un témoignage d’un personnage aussi nébuleux que ce Jean-Pierre?

Le cas du fameux informateur «Jean-Pierre» n’a cessé d’intriguer plus d’un. Voici ce que l’association SOS Rwanda-Burundi notait à son sujet8:

«Ce témoín clef du génocide devraít être identifié et au moins être entendu par la Commission au besoin par le biais d’une commission rogatoire. Il va de la vie de tout un peuple accusé de génocide. La Commission d’enquête du Sénat pour le Rwanda devrait pouvoir se porter garante de la crédibilité du témoin et de la véracité de ses dépositions. Comment la Commission peut-elle fonder son intime conviction sur les déclarations d’un seul témoin hypothétique et qui, par-dessus le marché, na jamais fait l’objet d’une quelconque audition? Testis unus, testis nullus.

En effet Faustin TWAGIRAMUNGU, Premier Ministre désigné dans les accords d’Arusha, a bien affirmé devant la Commission (COM-R, 1-64) que c’est lui qui a présenté cet informateur à la MINUAR. Il ajoute: « Il faut se poser la question de la crédibilité de Jean-Pierre et de ses niveaux de prise de décisions et de participation ». Comment alors expliquer que l’on se contente des informations de ce seul indicateur douteux de surcroit et jamais entendu, si l’on maintient que le génocide avait été préparé à grande échelle, en y impliquant toutes les couches de la société rwandaise: armée, clergé, fonctionnaires centraux et territoriaux, coopérants, jeunesse, femmes et même les enfants. Peut-il y avoir à aucun moment, un secret aussi bien partagé et bien gardé? Le coronel MARCHAL avait peut être raison de conseiller au Général DALLAIRE d’évaluer la crédibilité de « Jean Pierre » l’informateur (Com-R 1-9).»

Dans la mesure ou ce Jean-Pierre serait une réalité et non un montage, l’association renouvelle sa demande que cet informateur de premier plan puisse impérativement être entendu par votre Mission et soumise à une confrontation de sources contradictoires.

Mais c’est sans savoir que le général Dallaire aie transmis une information tronquée, il aurait dû également préciser que le FPR-INKOTANYI se préparait à tuer le Président et à lancer l’assaut sur la capitale par le biais de ses hommes infiltrés et disséminés à Kigali comme sur tout le territoire national. En effet, Kagame avait averti la MINUAR, par le biais du Représentant Spécial Roger Booh Booh, qu’il voulait tuer le Président Habyarimana; le lieutenant Nees, chargé du renseignement à la MINUAR, a déclaré devant la Commission Parlementaire Belge que le FPR-INKOTANYI avait introduit dans la capitale Kigali des armes et des hommes ce que ne lui permettaient pas les Accords d’Arusha. Deux semaines avant l’assassinat du Président Habyarimana, le Général Dallaire se rend à Mulindi. Il prend le Général Kagame dans un hélicoptère des Nations Unies et ils survolent ensemble la capitale Kigali. L’idée serait que le Général Dallaire voulait faire rencontrer le Président Habyarimana et le Général Kagame9. Or, le Général Dallaire était chargé des questions militaires, le rôle politique étant du domaine de Roger Booh Booh. Pourquoi alors cette initiative du général Dallaire, laquelle n’entrait pas dans ses compétences? En quoi le survol de Kigali par Kagame pouvait-il le décider à rencontrer Habyarimana? Ne s’agirait-il pas ni plus ni moins d’un vol de reconnaissance pour l’offensive en préparation sur la capitale?

Quand des hostilités furent reprises dans la capitale avec l’assassinat du Président Habyarimana, le Général Dallaire déclare sur toutes les radios étrangères, dont RFI, que la prise de la capitale nécessitera beaucoup de bombes. Kigali est aussitôt arrosé de pluies de bombes comme si la MINUAR participait à la stratégie de la conquête de la capitale. Il est important de noter cependant que les mouvements hostiles du FPR/INKOTANYI, de Mulindi et de la zone démilitarisé vers la capitale, avait commencé bien avant l’attentat contre l’avion présidentiel. Ce phénomène attesté par de très nombreuses sources convergentes, écarte la thèse que le FPR-INKOTANYI serait intervenu pour arrêter les massacres. Bien au contraire, il accrédite la thèse selon laquelle le FPR/INKOTANYI était bien au courant de la catastrophe qui allait s’abattre sur le Rwanda, à moins d’avoir monté lui-même ce scénario. Un tel constat conforte plutôt la thèse que le FPR-INKOTANYI aurait monté ou participé à la création de ce vide institutionnel pour pouvoir s’emparer facilement du pouvoir. Dans lequel cas, le FPR-INKOTANYI serait le déclencheur et le responsable logique de l’attentat contre l’avion présidentiel et de ses conséquences regrettables.

Un tel vide rappelle étrangement le vide institutionnel créé le 21 octobre 1993 par le coup d’état qui a coûté la vie au Hutu Melchior Ndadaye premier président démocratiquement élu au Burundi. Beaucoup y ont vu également la main du FPR-INKOTANYl en alliance avec l’UPRONA. Comment en effet expliquer la présence, comme fortuite, de Paul Kagame et de cent militaires du FPR-INKOTANYI à Bujumbura le jour même de ce coup d’état?

Plutôt que de secourir une population civile réduite à la merci de criminels de tous bords (ce qui relevait du mandat explicite de la mission de l’ONU), la MINUAR a préféré répondre positivement à l’ultimatum du général Kagame, sommant toutes les forces étrangères de quitter le territoire rwandais sous peine d’être considérées comme ennemies.

Après la prise du pouvoir par le FPR, la MINUAR a assisté impassible à toutes les horreurs et violations massives des droits de la personne commises par le FPR/INKOTANYI. Paradoxalement la MINUAR n’a pas lever le petit doigt quand:

* Des populations civiles déplacées, 12.000 personnes selon certaines sources, ont été froidement exécutées dans une école secondaire de la capitale (Collège St André) en avril-mai 1994.

* Des dizaines de milliers de personnes qui avaient rejoint de gré ou de force la zone occupée par le FPR-INKOTANYI tout au long de son avancée entre 1991 et fin 1994 à Byumba et à Ruhengeri, ont été sommairement exécutées ou déportées vers l’Uganda. On n’a aucune trace de ces populations déportées, à ce jour.

* De nombreuses personnes ont été sommairement exécutées, notamment á l’école agri-vétérinaire de Kabutare et dans l’arboretum de Ruhande aux environs de l’université (Préfecture de Butare). Ceci a fait dire à de nombreux observateurs que la MINUAR ne voulait pas savoir10.

* Plusieurs milliers de civils ont été sélectivement assassinés par le FPR/INKOTANYI à l’ETO de Kicukiro et au stade Amahoro alors sous protection de la MINUAR (entre avril et juillet 1994).

* Des camps de crémation ont été créés à divers endroits du Rwanda notamment au parc national de l’Akagera sans la moindre dénonciation de la part de la MINUAR11.

* Les massacres de Kibeho (perpétrés en avril 1995 par le FPR/INKOTANYI et annoncés par eux des semaines à l’avance) ont eu lieu sous les yeux de la MINUAR. Ces massacres avaient déjà commencé dans les multiples camps de déplacés de populations civiles qui craignaient pour leur vie dans la préfecture de Gikongoro. Ils ont continué dans le stade de Butare où les rescapés de Kibeho avaient été rassemblés.

* Les prisonniers de guerre aux mains du FPR, contrairement à ceux du Gouvernement, n’ont jamais été remis (1993) 12.

* D’après de nombreux témoignages concordants de rescapés hutu des massacres de Kibeho, la MINUAR a assisté impassible aux massacres de Hutu. Elle a même participé à l’élimination d’enfants ou les ont livrés aux équipes de tueurs tutsi, spécialement ceux massés sur la rivière Akavuguto. Les soldats de la MINUAR ont empêché plusieurs réfugiés hutu de fuir pour les orienter vers les tueurs tutsi. Ils en sont même arrivés à livrer les munitions aux militaires du FPR, leur servant d’appui logistique. A ce sujet, le témoignage de Philippe Partial, un agent de CARITAS, serait déterminant: c’est lui qui a précédé les populations du camp de Ruramba pour les avertir de ne pas se rendre au camp de Kibeho où les Hutu se faisaient massacrer en masse13. Ces accusations très accablantes, jamais prises en considération, doivent faire l’objet d’une investigation pour vérifier leur bien fondé. Si ces faits se révélaient exacts, des mesures sévères s’imposeraient.

Dans le débat sur la crise des Grands Lacs en général et sur le drame du Rwanda en particulier il est grand temps qu’on entende enfin d’autres sources jusqu’ici reléguées ou réduites au silence par ceux qui s’accommodent des thèses construites par le régime de Kigali et ses sponsors. Parmi ces sources se trouvent des réfugiés rescapés du génocide des camps du Zaïre (1996-1997), des humanitaires, des missionnaires, des militants des droits de l’homme, des témoins occulaires14

Eu égard à ce qui précéde:

* Au mieux, la mission de la MINUAR a été un échec, au pire une complicité dans le drame du Rwanda et, partant, de toute la région des Grands-Lacs.

* Bien des zones d’ombre subsistent. Une enquête à dimension internationale indépendante et approfondie s’impose.

c. L’opération Turquoise

L’opération Turquoise a été créée pour combler le vide consécutif à l’immobilisme de la communauté internationale face au drame du peuple rwandais pendant une période d’événements troubles susceptibles d’hypothéquer la compréhension correcte de sa mission. La MINUAR 1 venait d’être affaiblie et démotivée par le retrait du contingent belge, suite à une décision unilatérale de la Belgique provoquée par l’assassinat des dix soldats15. Face aux difficultés de réunir une force des 5.500 hommes nécessaires à la MINUAR 2, l’ONU a autorisé en accord avec la France, par sa Résolution 929 du 22/06/1994, la mission Turquoise, considérée comme une opération strictement humanitaire.

La France envisageait une intervention humanitaire avec ses principaux partenaires africains et européens dans le but de «protéger les groupes menacés d’extermination». La participation de la France à cette opération multinationale était subordonnée aux conditions suivantes:

1 . L’autorisation de l’ONU

2. La limitation dans le temps, au maximum à plusieurs semaines, jusqu’à la mise en place du dispositif de la MINUAR 2, plus tard chassée par Kagame;

3. Le positionnement des forces françaises à proximité de la frontière, et non sur le territoire du Rwanda;

4. La limitation des opérations à des actions humanitaires et en aucun cas à des opérations au coeur du Rwanda;

5. L’accord d’autres pays prêts à fournir des contingents pour aider les forces françaises16.

Fidèle à ses engagements, la France a établi le quartier général de ses soldats de la paix et humanitaires à la frontière avec le Zaïre. L’opération «était limitée à une période de deux mois». Tout de suite après le feu vert de l’ONU, l’intervention française à caractère humanitaire s’est déployée sur le terrain afin «de proteger les populations civiles menacées pour permettre l’intervention des organisations humanitaires».

L’intervention française a permis de sauver et de proteger plus de la moitié de la population rwandaise acculée à l’anéantissement par noyade dans le lac Kivu par l’avancée meurtrière du FPR-INKOTANYI. L’autre moitié avait fui vers le Nord ou vers la Tanzanie. Elle a sécurisé aussi bien les Hutu que les Tutsi notamment les 8.000 Tutsi (seuls cités en exemple par la presse) de Nyarushishi protégés jusque là par l’armée gouvernementale (FAR), et tous ceux qui avaient trouvé refuge dans cette zone humanitaire. L’intervention s’est réalisée dans le cadre du mandat reçu de l’ONU.

On peut conclure avec Jean-Claude Willame que «l’opération Turquoise est une opération réussie bien que tardive et à haut risque»17. Cette conviction a été corroborée, devant votre mission, par Herman Cohen, ancien sous-secrétaire d’état américain aux affaires africaines. Plutôt que de diaboliser la France, si toutes les autres puissances avaient contribué à cette force ou avaient réalisé des interventions similaires, on ne devrait pas déplorer aujourd’hui un nombre aussi astronomique de victimes, toutes ethnies confondues.

2. LA FRANCE ACCUSEE DE SOUTIEN AUX REGIMES DITS HUTU

Bon nombre de chercheurs avancent que la France a soutenu le régime qu’ils appellent «hutu» du Rwanda. Cette idée est même véhiculée dans des livres par des historiens qui «réécrivent l’histoire». La Mission risque d’adopter ce langage qui est tout aussi faux qu’erroné et mal intentionné. D’entrée de jeu, il est permis de se demander en quoi la coopération militaire de la France avec un pays souverain pourrait paraître choquante ou anormale. Ceux qui en font une critique devraient plutôt se poser eux-mêmes cette question.

Tout d’abord si on se référe aux statistiques de l’aide au développement, ce n’est pas la France qui vient en tête au Rwanda; elle se classe au 16ième rang, loin derrière l’Allemagne… (Dialogue nr. 192 p. 113). Ensuite si on considère la coopération militaire depuis l’indépendance, la France ne vient pas non plus en tête: des pays comme les USA et surtout la Belgique, ont consacré un budget non négligeable à la formation des Forces Armées Rwandaises. En 1990, les militaires français et belges sont intervenus au Rwanda. Les Français y sont restés jusqu’à leur remplacement par la MINUAR après la signature de l’Accord d’Arusha. Autour du 06 avril 1994, il y avait plus de 400 marines américains à Bujumbura avec hélicoptères de combat et autres équipements militaires>18 et le Général américain Voukovitch était à Kigali aux environs du 06 avril 1994. Que faisaient-ils là, tous? La Mission devrait exploiter cette piste.

L’idée sous-jacente d’exclusion des Tutsi par les régimes républicains dit abusivemen Hutu par certains n’est nullement confirmée, ni par les faits, ni par les statistiques. Selon les différents recensements qui ont émaillé l’histoire de ce pays depuis la colonisation allemande, la tutelle belge, et la République jusqu’en 1991, le Rwanda est composé de 83% à 90% de Hutu, de 16% à 9% de Tutsi et de 1 % de Twa. Si l’on prend le domaine de l’éducation, les Tutsi étaient 60,9 % dans les écoles secondaires en 1956, alors qu’ils ne formaient en ce temps-là que 16,59% de la population19 comme s’il y avait un mérite lié à une ethnie. En 1972, durant la présidence du Hutu feu-Kayibanda Grégoire, ils étaient, selon le professeur belge Filip Reyntjens, 19,7 % dans les écoles secondaires, alors qu’ils ne formaient que 14% de la population. Le professeur ajoute, «les institutions d’enseignement secondaire et supérieur comptaient souvent près de 50% d’enseignants et étudiants tutsi … 120 tutsi (ou 46%) sur 260 éléves au Groupe scolaire de Butare et 200 tutsi (ou 40%) sur 500 étudiants à I’Universíté Nationale en 1972, pour ne citer qu ces deux exemples»20. Dans la haute administration, dans la magistrature et dans la Fonction Publique, les tutsi étaient bien représentés. Ainsi par exemple, en 1989, il avait 19,4 % de fonctionnaires tutsi au Ministère du Plan; 19,1% au Ministère de la Santé, 17,6 % au Ministère du commerce… 21. Dans le domaine des affaires, ils s’étaient même taillé la part du lion.

3. REECRITURE DE L’HISTOIRE ET MANIPULATION DE L’OPINION INTERNATIONALE

Certains historiens comme Bernard Lugan22, répètent à volonté le discours tutsi du FPR INKOTANYI et accréditent la thèse d’un «génocide des Tutsi» depuis 1959. Sur leur traces, le professeur B. Debré, fort certainement de sa qualité d’ancien ministre français de la coopération, parle de «génocides rwandais». Devant cette surenchère naïve o volontariste de «réécriture de l’histoire du Rwanda», une mise au point sur la Révolution sociale rwandaise de 1959 s’impose.

Le systéme féodal tutsi dit «Ubuhake», vieux de plus de 400 ans était institutionnalisé et dominé par une lignée royale disposant d’un pouvoir absolu sur les personnes et le biens, y inclus le droit de vie et de mort. Ce fait suffirait à lui seul à expliquer la pertinence de la révolution rwandaise de 1959. Déjà au début des années 50, même les Tutsi scolarisés avaient remis en cause le système féodal institutionnalisant, la propriété exclusive du roi sur toutes les terres et pâturages (système dit «Ubuhake»), la succession aux postes de commandement par héritage et non par le mérite ou la concurrence… En 1957 les Hutu revendiqueront ouvertement, dans une note sur l’aspect social du problème racial indigène au Rwanda -note appelée par la suite «Le manifeste des Bahutu»23-, l’égalité des droits et la participation équitable aux postes de commandement et de gestion administrative du pays. Le manifeste rejette la chosification extrême du Hutu en général et du Tutsi pauvre en particulier, le système de mensonge et de clientélisme, la réduction des Hutu à des objets taillables et corvéables à merci, l’exclusion radicale des Hutu à tout poste de responsabilité, etc. Devant la résistance des Tutsi détenteurs du pouvoir aux changements, les Hutu revendiquent le droit à la propriété, à l’expression ainsi que tous les autres droits définis par la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et mis en pratique par un exercice voulu par un peuple régi par un régime démocratique. 24

La Révolution rwandaise (1959-1961) 25 est cet ensemble de mouvements sociaux et politiques ayant pour acteur tout le peuple rwandais et visant l’instauration d’un régime démocratique au Rwanda, conformément au Manifeste dit des Bahutu. L’occasion fut la vague des indépendances africaines des années 1950. La minorité tutsi au pouvoir exigeait l’indépendance immédiate. Les leaders de la masse populaire, majoritairement hutu à plus de 90%, exigeaient quant à eux une émancipation préalable de cette masse afin de lui éviter de retomber sous la férule de la minorité privilégiée à laquelle l’indépendance allait forcément être octroyée.

La tension Tutsi-Hutu atteint son paroxysme en 1959 lorsque la minorité, dont le pouvoir était legitimé par la tutelle, commença à agresser la majorité dans le but manifeste de l’intimider ou de la provoquer pour la réprimer anticipativement. C’est à cette époque que date l’agression contre Mbonyumutwa Dominique, l’un des grands leaders de la masse populaire et un des rares Hutu élevés au rang de sous-chefs par la volonté de la puissance tutélaire dans le cadre du plan décennal 1950-1960. C’est d’ailleurs cet incident malheureux qui fut le détonateur de la révolte des Hutu qui entraina la Révolution sociale rwandaise. Voici comment Jean-Paul Harroy, gouverneur du Ruanda-Urundi, décrit le plan de l’UNAR, parti monarchiste tutsi: «… Puisque l’affrontement armé entre Tutsi tradítionalistes et Hutu progressistes est devenu maintenant concevable. Provoquons sans tarder une « révolution », afin de nous créer une possibilité de contre-révolution, foudroyante, au cours de laquelle la Tutelle [belgel, étant débordée, nous aurons l’occasion de liquider physiquement tous les leaders hutu -soigneusement répertoriés- et de réaliser dans les régions choisies -Astrida- assez massacres de populations paysannes pour qu’il ne soit plus question de réactions hutu avant l’indépendance… ni après. (N.B. L’UPRONA [parti frère de l’UNAR au Burundi] reprit le même plan et le réalisa au Burundi à la Pentecôte 1972, alors qu’il n’y avait plus de tutelle (belge) pour le faire échouer. Toussaint rwandaise, Pentecôte rundi)»26. Ce plan de massacre au Burundi fit plus de 400.000 morts Hutu, sélectionnés et massacrés par l’armée burundaise (1972). Un tel scénario s’était déjà produit en 1965 et se reproduira régulièrement au Burundi, notamment les massacres de Ntega-Marangara en 1988 et novembre 1991 à Bujumbura. Les historiens qui réécrivent l’histoire du Rwanda en qualifiant les événements du Rwanda de génocides de Tutsi ne semblent pas être informés de ces massacres sélectifs et à grande échelle contre la population hutu au Burundi. A moins qu’ils ne le fassent sciemment et délibérément.

Un autre témoignage de première main est celui de Jean R. Hubert, Docteur en droit, alors substitut du Roi des Belges au Rwanda en 1959-1961: «Malgré les provocations, l’agacement, le mépris de la part des féodaux vis-à-vis de cette soi-disante révolte des Bahutu, la colère de ceux-ci ne fera que 13 morts tous accidentels … Dans aucun cas les hutu n’ont commis d’assassinat et froidement prémédité la mort de leurs victimes». Ce magistrat poursuit: «Les Hutu allaient se rendre compte qu’on ne s’attaque pas impunément aux privilèges féodaux. Les Hutu n’attendirent pas longtemps pour voir « l’étendard sanglant de la tyrannie » se lever contre eux»27. Sur un total de 74 tués officiellement recensés par la Tutelle entre le 1 novembre 59 et le 31 mai 1961 (date de l’amnistie proclamé par l’ONU), 61 étaient des Hutu victimes des assassinats commandités par les Tutsi.

Le caractère «bon enfant de la Révolution hutu» contrastait avec la contre-révolution sangrante tutsi. Ce que les Tutsi rentrés actuellement de l’exil au Rwanda confirment. «Mes parents, qui avaient quitté le pays en 1959 m’avaient toujours raconté que c’est très poliment que les paysans hutu les avaient amenés à la frontière en disant que, le lendemain, sur ordre venant d’en haut, ils allaient brûler leurs huttes»28.

Parler de génocide des Tutsi commis par les Hutu en 1959-1961 relève de la déformation de la vérité et des faits, en vue de manipuler l’opinion internationale.

Par contre, la contre-révolution tutsi se poursuivra au lendemain de l’indépendance le 1 juillet 1962. Structurés en mouvement puissamment armé opérant pratiquement sur les quatre frontières du Rwanda, les «INYENZI»29 (Nom de guerre que ces combattants de l’UNAR se sont donnés eux-mêmes, soit l’acronyme de « Ingangurarugo ziyemeje kuba Ingenzi ») sémeront particulièrement la terreur, la désolation et la mort dans les populations civiles du nord et du sud du pays, frontalières avec l’Uganda et le Burundi.

Les représailles feront des victimes dans les rangs des Tutsi, des Hutu et même de étrangers soupçonnés à tort ou à raison d’être complices de plus d’une quarantaine de raids meurtriers que les lnyenzi ont lancés contre la jeune république et les population civiles jusqu’en 1967. Le cas de la région de Bugesera que les Inyenzi ont attaquée à partir du Burundi et occupée pendant un mois jusqu’à la porte de Kigali est resté célèbre.

Faut-il encore rappeler que ce sont les Tutsi qui ont commencé les tueries des Hutu? La liste des leaders hutu victimes des Inyenzi est longue. Les archives juridiques de la Tutelle en fournissent des témoignages éloquents sur les noms des victimes célebres: les assassinats atroces30 de Kanyaruka, Renzaho, Secyugu, Kayuku et autres personnalités… Toutes ces provocations déclenchèrent une réaction d’autodéfense de la population. Cette partie de l’histoire du Rwanda doit être traitée, en tenant compte du climat socio-politique du moment et des motivations profondes qui ont été à la base de la révolution sociale de 1959. Analyser cette partie de l’histoire à posteriori en parallèle avec les événements survenus au Rwanda ces dernières années n’est rien d’autre qu’une réécriture de l’histoire.

L’histoire récente du Rwanda doit être analysée en tenant compte de son contexte régional et international, pas seulement sur le plan socio-politique interne, mais aussi sur le plan économique et géopolitique. La situation actuelle de l’ex-Zaïre en est un exemple éloquent.

S’agissant du «génocide» de 1994, parmi les signes de sa préparation, l’on a cité notamment «les médias du génocide» dont le fameux journal KANGURA, la fondation de la milice Interahamwe et le «rapport sur la violation des Droits de I’homme au Rwanda» produit en 1993.

L’ex-ministre français de la coopération, le professeur Bernard DEBRE, a affirmé dans son livre, «Le retour du Mwami», que le journal Kangura a été fondé par Agathe Kanziga, l’épouse de feu-Président Habyarimana pour en confier la gestion à Ngeze Hassan31. Cependant des informations de plus en plus concordantes laissent apparaître que Kangura a été mis en place par Valens Kajeguhakwa (grand financier du FPR) et financé tout le long de la guerre par le général Kagame. Ngeze Hassan comme Robert Kajuga, responsable national des lnterahamwe, avaient été infiltrés au MRND par le FPR32. Rappelons que Kajeguhakwa avait fondé, en 1990, le journal KANGUKA avec deux journalistes: Rwabukwisi Vincent et Ngeze Hassan, à l’époque cordonnier. Quelques temps après, les deux journalistes «se brouillent»; Ngeze fonde KANGURA et Rwabukwisi reste avec KANGUKA. Celui-ci est idéologiquement l’opposé de Kangura et se caractérise par des articles d’un extrémisme sans nom. On les attribue aux extrémistes hutu. La stratégie était de montrer que les Hutu en voulaient aux Tutsi. Cette ingénieuse idée est l’oeuvre du Général Kagame.

Nous nous trouvons devant des éléments aussi troublants que convergents:

* Kagame a constitué une 5ième colonne en implantant des brigades combattantes exclusivement tutsi et en infiltrant des hommes et des armes33 (provenant de l’Uganda) après la signature des Accords d’Arusha. L’on se souviendra par exemple de l’incident des jeunes de Gatonde arrétés sur la route vers Mulindi (1993). L’on se souviendra en outre que des jeunes du PSD (Parti Social-Démocrate) étaient envoyés à Mulindi pour une formation militaire puis renvoyés sur leurs collines. De manière générale, des jeunes, presqu’exclusivement tutsi, furent recrutés dans tout le pays pour recevoir une formation idéologique et militaire au sein du FPR-INKOTANYI et constituer les brigades clandestines du FPR déversées en masse sur les collines, ce qui a créé un grand malaise dans la grande majorité de la population et le sentiment d’être trahis par ceux-là même que la population avaient toujours considérés en frères et amis34. La présence de ces jeunes sur les collines est attestée également par Tito Rutaremara, idéologue du FPR: «Fin 87, 36 cellules du Front avaient été constituées à l’intéríeur du pays-même»35.

* Kagame est impliqué dans l’assassinat du Président Habyarimana, selon les hypothèse les plus plausibles.

* Kagame a mis son armée en marche le matin du 6 avril36, avant l’attentat contre l’avion présidentiel. Cette affirmation de Bernard Debré est corroborée par d’autres sources rwandaises et étrangères.

Dans cette hypothèse, le FPR-INKOTANYI et Kagame portent une très lourde responsabilité dans les événements terribles postérieurs à l’assassinat du président Habyarimana, comme l’a souligné le professeur Filip Reyntjens dans son intervention devant le Tribunal Pénal Internacional pour le Rwanda à Arusha. Cela étant vérifié, n’est-on pas obligé de revoir ce qui est qualifié aujourd’hui de «génocide des Tutsi et massacres des Hutu modérés»?

De même, selon le Professeur Gérard Prunier, les Interahamwe ont été notamment fondés par Gasana Anastase, ancien idéologue du MRND et actuel ministre des Affaires étrangères du gouvernement du FPR, et entraînés indirectement par les Français. Ils n’ont pas été fondés pour le fait de guerre. Prunier dit textuellement: «les Interahamwe constituaient une milice politique et pas militaire. La majorité d’entre eux n’avait d’ailleurs pas reçu d’entraînement militaire. Cette milice a été créée avant le génocide et à un moment où il n’était pas encore conçu. L’actuel ministre des affaires étrangères rwandais est d’ailleurs un ancien fondateur des Interahamwe. Il voudrait bien qu’on oublie cela, mais son choix antérieur constitue, pour le gouvemement rwandais, un moyen de pression». Cette information montre encore une fois que les preuves de préparation du génocide sont sujettes à caution.

La France a été accusée d’avoir entrainé sans le savoir les jeunesses du MRND alors qu’elle était supposée entrainer les officiers et sous-officiers de l’armée . Cet acharnement contre la France ne se justifie pas, puisque d’autres pays contribuaient au même moment à d’autres projets similaires de coopération bilatérale, et de bonne foi. C’est le cas notamment de la Belgique qui formait les officiers des FAR à l’Ecole supérieure militaire et les commandos au centre d’instruction de Bigogwe; et les Allemands qui avaient formé des éléments de la garde présidentielle et financé la construction de l’Ecole du MRND où devaient se former notamment les cadres de la jeunesse de ce parti.

Le «Rapport de la Commission lnternationale d’Enquête sur les Violations des Droits de l’homme au Rwanda depuis le 1er octobre 1990» publié en mars 1993, consideré par certains comme un document de référence, a été l’objet de vives critiques39.

Non seulement la plupart des ses experts ne connaissaient pas ou connaissaient peu le Rwanda, mais également la Commission n’avait pas de termes de référence, ce qui lui a permis de faire ce que bon lui semblait. La conséquence fut que le rapport déplore ne pas avoir pu enquêter suffisamment dans la zone occupée par le FPR-INKOTANYI (14 jours dans la zone gouvernementale, deux heures seulement dans la zone occupée par le FPR); les rares témoins entendus l’ont été en présence des officiers du FPR. Aujourd’hui l’on sait que le FPR-INKOTANYI a organisé la déportation de plusieurs dizaines de milliers de personnes aussi bien au Rwanda qu’en dehors de ses frontières, et que les populations étaient déplacées pour être éliminées derrière les lignes du FPR40. Human Rights Watch parle de déplacement de plusieurs centaines de personnes en Uganda41 (Human Rights Watch, Qui a armé le Rwanda? dans LES DOSSIERS DU GRIP, Bruxelles 1994, p.16); le rapport n’en a rien dit, peut-être à dessein comme la Commission a évité également d’interroger les déplacés de guerre pourtant nombreux dans la zone gouvernementale et qui avaient été témoins des exactions du FPR-INKOTANYI sur des populations civiles.

Quant aux victimes, il est ahurissant de voir les images montrées sur des télévisions européennes où un enquêteur mesurait le fémur d’un squelette dans la commune Kinigi et concluait que la fosse contenait des cadavres des Tutsi vu la longueur des membres. Lors de son invasion de Ruhengeri en 1991, le FPR-INKOTANYI avait tué beaucoup de personnes dans cette commune. La publication du rapport a été un prétexte pour le FPR-INKOTANYI de faire une nouvelle descente dans la commune de Kinigi au cours de laquelle Gasana Thaddée, bourgmestre de cette commune, fut assassiné. Les victimes ont été transformées en bourreaux.

Le rapport évoque l’existence des escadrons de la mort, selon des informations d’un certain Afrika Janvier; celui-ci est aujourd’hui en exil et il ne cache pas la manipulation dont il a été l’objet.

Le gouvernement rwandais, dirigé alors par l’opposant politique Nsengiyaremye Dismas, a désapprouvé le rapport; le Président Habyarimana qui avait été mis en cause dans le rapport a porté plainte contre les membres de la Commission d’enquête; ceux-ci ont commencé à demander à leurs amis rwandais des éléments de défense. Sur quelle base avaient-ils alors rédigé leur rapport? Monsieur Jean Carbonare, un des enquêteurs, a été aujourd’hui recompensé: il est conseiller de l’homme fort de Kigali au Rwanda. D’autres membres de son équipe ont été décorés par Kigali pour des «services rendus». L’intervention de Monsieur Eric Gillet devant la Mission devrait être considérée en tenant compte de ces nouveaux éléments.

La publication de ce rapport, de par sa tendance partisane et manipulée, a été un des premiers éléments à avoir attisé la haine et la bipolarisation interethnique et ce, jusqu’au sein même des partis politiques. Y compris les alliés traditionnels du FPR. L’assassinat du président burundais Melchior Ndadaye, ourdi avec la main invisible du FPR-INKOTANYI et l’Uganda, a renforcé la suspicion entre les ethnies.

4. LES ZONES D’OMBRES DANS LES RAPPORTS DES ENQUETES PRECEDENTES

a. Les victimes

« Quand on parle du génocide rwandais, la population de Byumba ne pense qu’à celui des Hutu de cette région par les troupes du FPR. C’est celui auquel elle a assisté dès l’avancée des troupes du FPR. Les massacres sélectifs et systématiques et les différentes techniques de torture infligées aux populations civiles de Byumba, mais aussi de Ruhengeri, entre 1990 et 1994 avaient jeté les survivants sur les routes de l’exode. En 1994, on estimait à environ un million les déplacés de guerre qui étaient entassés dans des camps de fortune de Nyacyonga aux portes de la capitale Kigali et dans les préfectures de Byumba, Kigali et Ruhengeri. Leurs témoignages faisaient état de massacres systématiques de civils hutu, de femmes éventrées, d’hommes castrés, d’enfants morts la tête fracassée, etc. Ces témoignages auraient pu rester « incroyables »‘ si on ne les avait pas entendus durant le génocide rwandais d’avril à juin 1994 et pendant celui des réfugiés rwandais au Congo-Zaïre depuis octobre 1996 jusqu’à présent!

Pendant tout son parcours pour la conquête du pouvoir, le FPR s’est rendu coupable de massacres systématiques de populations civiles hutu dans les préfectures de Byumba, Kibungo, Kigali, Butare et Gitarama. Dans la seule préfecture de Gitarama, 18.000 victimes ont été recensées nommément pour les trois premiers mois du régime du FPR. Rassemblés dans des simulacres de réunions, les gens étaient triés par groupes ethniques, et les Hutu systématiquement éliminés. Les cadavres ont été brûlés, jetés dans des rivières ou encore entassés dans des charniers ».

Le CLIIR continue42:

« Pour parter de chiffres, grâce au Recensement de toute la population de 1991, on peut estimer à 7.831.663 habitants la population du Rwanda avant avril 1994, hormis les réfugiés tutsi qui vivaient dans les pays voisins du Rwanda ou ailleurs dans le monde. En novembre 1995, le Ministère rwandais de la Réhabilitation et de l’Intégration sociale, en collaboration avec le HCR, chiffrait la population à 5.304.060 habitants, y compris les anciens réfugiés rapatriés estimés à 800.000. On arrive à 4.504.060 habitants permanents d’avril 1994. A la même date, on dénombrait 1.793.403 réfugiés rwandais dans les camps au Zaïre, au Burundi et en Tanzanie, ainsi que 77.317 personnes qui étaient rentrées dans le courant de l’année 1995. La population disparue ou décédée était alors estimée à: 7.831.663-(4.504.060+1.793.403+77.317) = 1.456.883 personnes.

Si les victimes du génocide d’avril à juillet 1994 sont estimées entre 500.000 et 800.000 personnes, à qui imputer les personnes manquantes (entre 656.883 et 956.883) si ce n’est au Général Kagame, à son armée et à sa milice tutsi? »

Nkiko Nsengimana, un des promoteurs du Projet NOUER est encore plus explicite: «Nous arrêtions à 1.500.000 le nombre total des victimes de l’hécatombe rwandaise. Aujourd’hui, il faut réviser les chiffres à la hausse. En effet, nous n’avions pas encore pris connaissance du rapport de décembre 1994 du ministère de l’intérieur rwandais, division du recensement de la population, qui évaluait le nombre total de morts à 2.101.250 victimes. Nous n’avions pas pris en compte entre autres les 100.000 morts de choléra dans les camps de Goma dans l’ex-Zaïre, les plus de 150.000 disparus dans les camps de déplacés intérieurs dont au moins 8.000 personnes pour le seul camp de Kibeho après son attaque au mortier par le FPR. Nous n’avions pas encore intégré les personnes mortes dans les conflits fonciers en milieu rural surtout à Kibungo et Kigali rural. En outre les massacres n’avaient pas encore atteint les préfectures du nord du pays. La seule préfecture de Gisenyi totaliserait aujourd’hui entre 150.000 et 250.000 morts. Enfin, les 580.0000 morts ou disparus depuis octobre 96 lors de l’attaque à l’arme lourde des camps des réfugiés dans l’ex-Zaire. Nous sommes en face d’un cataclysme dans lequel près de 40% de la population rwandaise a péri, soit 3.150.000 vies humaínes sacrifiées à l’autel de l’extrême intolérance qui s’est abattue sur le Rwanda. C’est très loin des 800.000 morts souvent annoncés par la presse dominante. Ces terribles chiffres sont pourtant connus et sont volontairement tus par la Communauté internationale qui refuse de voir l’extrême détresse dans laquelle les rwandais vivent»43.

Rappelons que, sur le nombre des personnes massacrées en RDC, toute la vérité n’est pas encore connue et celle qui est connue n’a pas été officialisée en totalité. En effet, suite aux entraves répétées des autorités de la RDC, l’ONU fut contrainte de rappeler ses enquêteurs et le Conseil de Sécurité a dilué le rapport produit par son équipe en y expurgeant les éléments concluant au génocide des hutu par les armées de Kagame et de Kabila44.

La campagne médiatique qui consiste à ne relever que les victimes tutsi et à gonfler indéfiniment leur nombre procede d’une intoxication délibérée. Cette intoxication consiste à prendre des victimes hutu du FPR-INKOTAYI pour des victimes tutsi des Interahamwe. De nombreuses pièces sont là pour prouver cette intoxication. A titre de rappel, le recensement de 1991 donne la composition de la population rwandaise comme suit:

Population residente selon la nationalité, l’ethnie, le sexe et la préfecture

Une enquête sérieuse devrait tenir compte de tous ces chiffres afin d’apprécier correctement le nombre des victimes dans le conflit politique et interethnique du Rwanda et de son prolongement en République Démocratique du Congo. Cette enquête devrait mettre fin à la globalisation de la culpabilité du peuple hutu et à la victimisation aveugle du peuple tutsi. La cohabitation pacifique entre les deux peuples y gagnerait s’il y avait condamnation de tous les bourreaux hutu et tutsi et exigence de justice pour toutes les victimes sans distinction d’ethnies.

Aujourd’hui, les Rwandais des deux bords affichent leur volonté de voir arrêter ce raisonnement préjudiciable tendant à catégoriser les Rwandais selon leurs ethnies en «bourreaux» et en «victimes». Les différentes ethnies n’arrivent plus à cacher la peur de voir disparaître toute la population rwandaise suite aux aventures guerrières hasardeuses dans lesquelles les ont entrainé le FPR-INKOTANYI et ses chefs et leurs rêves expansionnistes. Les Rwandais ne cachent plus qu’ils se portaient mieux du temps de Habyarimana et qu’ils s’entendaient bien malgré tout. Ils en arrivent même à regretter la sécurité, la prospérité et la position sociale qu’ils occupaient à tous les niveaux au Rwanda avant la malheureuse aventure du FPR-INKOTANYI qui les aura entrainés vers un suicide collectif. Ne voit-on pas arriver maintenant dans nos pays occidentaux des réfugiés des deux ethnies. Les derniers mois ce sont surtout des personnes qu’on croyait proche du régime FPR-INKOTANYI de Kigali qui demandent l’asile politique. Que craignent-ils dans leur pays?

b. La non-prise en considération du fait de guerre

En vertu de la stratégie du «fight and talk» qui avait réussi à la guérilla de l’Ugandais Yoweri Kaguta Museveni, la guerre portée contre le Rwanda à partir de l’Uganda le 1 octobre 1990 a revêtu plusieurs visages et s’est déroulée en plusieurs étapes.

Nous citerons ici, à titre d’exemples, des illustrations tirées de la période du 1 au 31 octobre 1990 et de la période de novembre 90 à février 1993:

Période du 1 au 31 octobre 1990:

Cette période correspond à une agression pure et simple de la NRA (armée Ugandaise) contre le Rwanda. Le fait que le fer de lance était constitué de militaires de carrière Ugandais d’origine tutsi rwandaise ne lui enlève pas ce caractère d’agression. Et quelles que soient les justifications avancées, le choix de la violence suprême (la guerre) pour régler la question des réfugiés rwandais a semé indubitablement les germes de l’escalade de la violence. L’agression de l’armée Ugandaise a torpillé la question des réfugiés rwandais qui venait de trouver un cadre de règlement pacifique. Et d’ailleurs comment des réfugiés de l’ONU pouvaient-ils lever une armée, au mépris de la Convention de l’ONU de 1951 et celle de l’OUA de 1969 sur les Réfugiés?

Période de novembre 90 á février 1993:

L’agression boutée hors du Rwanda le 31/10/1990 s’est transformée en guérilla. Mais le soutien de l’Uganda n’a pas cessé pour autant. Cette période s’est caractérisée par les actes de banditisme et d’extrême violence contre les populations civiles frontalières avec l’Uganda, exacerbant chaque jour davantage la logique de violence interethnique.

Le fonctionnement de plus en plus amélioré de Radio Muhabura (radio du FPR-INKOTANYI émettant du Burundi) contribuera à étendre la guerre sur tout le pays au-delá des zones de front. Trois ans d’émissions appelleront à leur tour la riposte de la radio RTLM. La guerre entrait ainsi dans une phase psychologique créant irrémédiablement les condítions d’une guerre civile généralisée. Le multipartisme et la crise économique en seront de précieux ferments.

On notera particulièrement que le recrutement par le FPR, l’entrainement militaire et le renvoi dans leurs communes d’origine des jeunes rwandais de l’intérieur presque exclusivement tutsi pour constituer des brigades clandestines d’avant-garde du FPR, contribuera à ethniser de plus en plus la guerre tout en créant le syndrome de l’ennemi invisible et omniprésent à la fois.

L’offensive du FPR-INKOTANYI du 8 février 1993 fit des milliers de morts et un million de personnes fuirent leurs biens pour échapper aux atrocités du FPR. Cette offensive se termina par la signatura de l’accord d’Arusha offrant au FPR-INKOTANYI la capitale, Kigali, sur un plateau d’argent. Un contingent du FPR-INKOTANY] fera triomphalement son entrée dans la capitale sous l’escorte belge de la MINUAR, en décembre 1993. Cette offensive de février 1993 se terminera également par la victoire morale et diplomatique du FPR-INKOTANYI sur la France. En effet, l’entrée á Kigali du contingent officiel de 600 hommes (en réalité il y en aura jusqu’à 4.000 à la veille de l’assaut final du 6 avril 1994) était conditionnée au départ, par la petite porte, du dernier détachement militaire français au Rwanda.

On connait la suite; trois mois après, en avril 1994, le complot d’assassiner le président Habyarimana, consideré comme le dernier rempart à la prise du pouvoir total par le FPR, était réalisé. Des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants furent victimes d’atrocités innommables dans les deux camps belligérants.

Au-delà des règlements de comptes franco-français, on ne voit pas très bien le fondement moral des accusations portées contre la France. Sa présence d’octobre 90 à décembre 93, avait empêché au FPR-INKOTANYI et à ses sponsors de réaliser leur agenda caché. Un grand homme comme François Mitterand ne l’avait-il pas compris? Trois mois après le départ du dernier détachement militaire français, la catastrophe ne s’est-elle pas abattue sur le Rwanda?

c. Les commanditaires de l’assassinat des Présidents Habyarimana et Ntaryamira et de leurs suites

Concernant l’assassinat des Présidents rwandais et burundais, une série d’hypothèses est avancée par plusieurs personnes. Mais aucune d’entre elles n’est jusqu’à présent confirmée de manière irréfutable:

* Filip Reyntjens dans son livre: «Rwanda. Trois jours qui ont fait basculer l’histoire»46, donne les hypothèses suivantes:
– éléments du régime et de l’armée avec le concours d’une puissance étrangère;
– coup d’état démocratique ayant mal tourné;
– filière burundaise;
– FPR-INKOTANYI avec le concours d’éléments étrangers;

* Colette Braeckman parle de la piste française (le journal belge Le SOIR, 17 juin 1995);

* Le journal belge LA DERNIERE HEURE du 07 au 08/10/1995 soutient celle d’un pays africain à l’aide des missiles acheminés à partir d’un pays d’Europe;

* L’ancien colonel belge Christian Tavernier affirme la thàse des mercenaires israéliens au service du FPR-INKOTANYI (Télétexte, VRT, du 21/04/1988, p. 143);

* Dans le cadre des investigations qu’il a effectuées à ce sujet, l’auditeur militaire émérite belge, Van Winsen, affirme qu’il peut personnellement formuler douze ou quatorze hypothèses (Rapport de la Commission d’enquête parlementaire belge concernant les événements du Rwanda, 6 décembre 1997, p. 399);

* L’abbé André Sibomana47 rapporte, sans privilégier l’une ou l’autre, deux hypothèses qui s’affrontent, basées sur l’enquête menée par la presse:
– extrémistes hutu qui ont voulu se débarrasser d’un président génant;
– FPR-INKOTANYI qui n’avait pas intérêt à ce que les accords d’Arusha soient appliqués;
Les deux théses sont étayées d’arguments valables et crédibles. Aucune n’est assortie de preuves irréfutables.

* François-Xavier Nsanzuwera, ancien Procureur de la République au Parquet de Kigali, actuellement en fuite, privilégie l’hypothèse «d’une action conjuguée des extrémistes du FPR-INKOTANYI et des hutu modérés» ayant obtenu le bénéfice d’une «aide technique extérieure nécessaire». Il a la pleine conviction que «certaines personnes le savent, peut-être au sein de la MINUAR» (Sénat de Belgique, COM-R 1-32, p.324).

* Pour le chercheur français Gérard Prunier, cet assassinat est l’oeuvre des extrémistes hutu (déclaration sur Radio France lnternationale du 01/07/1998 à 7h30 heures de Paris; suite à son audition, la veille, par la Mission d’information sur le Rwanda).

* Selon la thèse du professeur Bernard Debré, ancien ministre français de la coopération, devant la Mission d’lnformation sur le Rwanda, l’assassinat du Président Habyarimana est l’oeuvre du FPR-INKOTANYI par l’Uganda et les USA interposés;

* L’ancien ministre de la Défense nationale du Rwanda, Mr James Gasana, a démontré lors de son audition devant votre Mission que les FAR n’avaient ni les capacites techniques ni les capacites matérielles de manipuler des missiles; par contre, il a ajouté que le FPR-INKOTANYI avait ce genre de missiles et qu’il les a déjà utilisés pour abattre les hélicoptères des FAR. Dans un de ses rapports de sécurité alors qu’il était encore ministre de la défense nationale au Rwanda, il dit: «Deux officiers supérieurs égyptiens, un américain et un Ugandais ont été arrêtés ces derniers jours à l’aéroport d’Orlando, aux USA, au moment où ils s’apprêtaient à embarquer pour l’Uganda de façon illicite une cargaison d’armes (missiles anti-tank et lance-missiles) d’une valeur de 18 mios de dollars américains. Le capitaine Ugandais arrêté dans le coup est BISANGWA Innocent, Adjoint du secrétaire particulier de Museveni et beau-frère de feu le major Bayingana du FPR. Une telle fraude montre clairement que ces armes étaient destinées au FPR, puisque l’Uganda en tant que pays pouvait passer par les voies autorisées pour l’acquisition de ces armes»48.

* L’ex-patron de sécurité zaïrois et ex-PDG de la GECAMINES Commerciale, André Atundu Liongo49, a informé Mobutu du plan macabre de l’assassiner s’il participait au sommet de DAR-ES-SALAAM lequel a été fatal à ses homologues rwandais Habyarimana et burundais Ntaryamira.

Ce qui est ahurissant et grave, c’est que personne, ni l’ancien Gouvernement, ni l’actuel, ni les puissances étrangères ayant intervenu au Rwanda, ni les Nations Unies, ne veulent mener l’enquête sur cet attentat.

Les rumeurs et les spéculations vont bon train. Elles sont alimentées alors que les observateurs et les analystes s’accordent pour affirmer que «une telle enquête (..) est la seule possibilité que l’on ait de confirmer ou d’infirmer une ou plusieurs hypothèses avancées. En effet si nous avions connaissance des données relatives à l’assassinat du président, nous pourrions donner une idée et une interprétation plus claires des événements postérieurs, tant pour ce qui est de l’assassinat des casques bleus que pour ce qui est du génocide. C’est en effet l’attentat contre l’avion présidentiel qui a constitué l’amorce de ces événements ultérieurs» (Rapport commission beige, p. 400). C’est donc dans un souci de vérité et d’objectivité que la Commission du Sénat de Belgique recommande de mener une enquête internationale sur l’assassinat des présidents du Burundi et du Rwanda en avril 1994 (recommandation 52 p. 731)

Que la Mission s’informe sur ce qui s’est passé à Dar-Es-Salaam le jour de l’attentat; elle se rendra bien compte que le Président Habyarimana a été attiré dans un traquenard. D’après des témoins ayant assisté à ce sommet de la mort, tout a été fait pour que Habyarimana arrive à Kjgali pendant la nuit: Museveni, qui avait pourtant convoqué la réunion, est arrivé avec un retard inhabituel; à son arrivée il a prononcé un discours fleuve qui n’avait rien à faire avec le sujet du jour; le Président tanzanien Mr. Mwinyi a improvisé une réception à la fin de la réunion en attendant la signature du communiqué conjoint qui se faisait attendre; Habyarimana s’est résolu à rentrer sans signer ce communiqué. A son arrivée à l’aéroport, le communiqué lui fut soumis pour encore le retarder. Cela terminé, son avion était encore dans le parking, ce qui a pris encore du temps pour le ramener et le chauffer; et il semble que protocolairement cela ne se fait pas: quand un président va embarquer, il trouve son avion tout prêt et tout près; les personnalités presentes à Arusha ne se sont pas gênées pour accompagner le Président à l’aéroport dont le Secrétaire Général de l’OUA, ce qui, parait-il, est aussi inhabituel dans les usages diplomatiques.

Pour mettre fin aux spéculations, la Mission devrait lancer une initiative ou provoquer l’organisation d’une enquête pour identifier les commanditaires et les assassins du Président Habyarimana. La genèse du génocide, qui reste objet à de nombreuses controverses, serait peut-être mieux circonscrite en sachant tous les tenants et les aboutissants de cette catastrophe qui permet aujourd’hui au Gouvernement de Kigali de mettre à mort plusieurs milliers de personnes dans l’impunité la plus totale, avec le silence complice de la communauté internationale. La France y gagnerait car elle est mise en cause dans cet attentat dans lequel trois de ses ressortissants ont trouvé la mort.

d. Non-poursuite des membres du FPR-INKOTANYI / APR soupconnés d’avoir prémédité et commis des crimes contre l’humanité qui sont de la compétence du Tribunal Pénal Internacional pour le Rwanda

Force est de constater que, jusqu’à présent, le TPIR semble s’intéresser exclusivement aux personnes appartenant au groupe ethnique hutu présumées avoir commis des crimes graves contre des membres du groupe ethnique tutsi. Les rapports des organisations internacionales et des organisations des droits de l’homme sont formels quant à l’implication de ces derniers dans des crimes et des actes de génocide en l’encontre des populations hutu et twa. Voir à ce sujet le document du 7 juin 1998 que l’association SOS RWANDA-BURUNDI vous a fait parvenir.

5. JUSTICE ET RECONCILIATION

Avant le contact du Rwanda avec le monde occidental, la justice était assurée par les chefs de clans. L’objectif de cette justice était plutôt la conciliation, l’harmonie au sein du groupe que le châtiment du coupable. L’organisation structurée de l’état a permis aux autorités politiques de l’époque d’exercer à la fois les fonctions politiques, judiciaires et administratives. De cette manière le Mwami et les chefs aplanissaient également des différents entre les membres du groupe. Une infraction même grave pouvait déboucher sur un règlement à l’amiable.

L’institution des juridictions d’inspiration occidentale vers le début du 20è siècle n’a pas enlevé aux autorités politiques leurs fonctions judiciaires. Le Mwami et les chefs ont continué à s’occuper, en matière pénale, des infractions bénignes. Les infractions graves qualifiées de délits ou de crimes ressortissaient à la compétence des juridictions d’inspiration européenne. Ces dernières étaient appelées à appliquer la loi pénale écrite.

Dans ces deux systèmes dualistes, certaines personnes, selon leur rang social, leur richesse ou leur fonction, pouvaient échapper à la justice. C’est le phénomène de l’impunité. L’on se souviendra par exemple du Coup d’état de Rucunshu (1896) dont les actes graves d’attentat à la vie d’autrui n’ont pas fait objet de poursuites.

Mais l’injustice était dans le système lui-même dans la mesure où seule la minorité tutsie avait accès de père en fils à ces fonctions politiques, administratives et judiciaires. C’est contre cette injustice structurelle que la masse opprimée majoritairement hutu à plus de 95 % s’est révoltée.

La révolution sociale de 1959, comme la révolution française de 1789 a permis pour la 1ère fois l’instauration d’une démocratie élective basée sur le principe universal de séparation des pouvoirs. La contre-révolution s’est accompagnée, des faits répréhensibles dont les auteurs (les anciens dignitaires féodaux) ont obtenu le bénéfice de l’amnistie leur accordée sur insistance de l’ONU (mai 1961). Avec l’avènement de la république, toute une infrastructure et un système judiciaire basés sur des principes modernes internationalement reconnus furent opérationnels.

La guerre a éclaté le 1er octobre 1990. Elle a fait beaucoup de victimes innocentes parmi les populations civiles, toutes ethnies confondues. Beaucoup de rapports dénoncent et stigmatisent les infractions graves commises, parfois de sang froid, par les deux parties en conflit (Rapport préliminaire des experts des Nations Unies, Rapports Degni Segui, rapports de diverses organisations humanitaires et de défense des droits de I’homme…). Selon ces rapports, les deux parties en conflit ont commis des faits pouvant être poursuivis devant les juridictions sous les qualifications de crime de génocide, crimes contre l’humanité, crimes de guerre et crimes contre la paix. Ces rapports sont à I’origine de la création du TPIR par la résolution 955 (1994) du 8 novembre 1994 du Conseil de Sécurité.

Les responsables actuels du Rwanda se sont rendus coupables de ces crimes graves et ignobles. Il est dès lors regrettable de constater que seuls les membres des vaincus fassent l’objet de poursuites. Ceux qui appartiennent au FPR-INKOTANYI / APR se comportent comme des justiciers alors qu’ils devraient plutôt répondre des infractions graves qu’ils ont commises.

Lors de la reprise des hostilités le 06 avril 1994, les forces des Nations Unies -la MINUAR- étaient stationnées au Rwanda. Elles étaient chargées entre autres de la sécuríté de la ville de Kigali et des populations civiles. Elles ont assisté comme impuissantes à la perpétration des crimes les plus ignobles contre les populations qu’elles avaient mission et devoir moral de proteger. Elles sont en outre convaincues que les deux parties en conflit ont commis des crimes de la compétence du TPIR. Pourtant, ni les Nations Unies, ni l’ancien gouvernement rwandais, ni l’actuel, ni les puissances étatiques dont la présence était signalée au Rwanda notamment pour protéger leurs ressortissants, personne ne veut et ne souhaite mener une enquête sur la mort des présidents rwandais et burundais, Juvénal Habyarimana et Cyprien Ntaryamira. Le résultat de l’enquête sur l’attentat contre l’avion des deux présidents permettrait de comprendre et de trouver des explications aux événements postérieurs. Il permettrait également de confirmer ou d’infirmer l’une ou l’autre hypothèse avancée. L’attitude de la communauté internationale face à la crise du Rwanda ne peut-elle pas être interprétée comme un refus délibéré de trouver une solution adéquate et appropriée? Comment demander à des Rwandais de comprendre que beaucoup parmi eux soient condamnés de crimes contre l’humanité pour non-assistance à personnes en danger alors que nombreux sont les occidentaux et les militaires des Nations-Unies qui ont manqué à ce devoir sans qu’ils soient poursuivis alors qu’ils avaient la possibilité et les moyens de sauver les populations en péril? La justice des vainqueurs adoptée aussi bien par la «justice» rwandaise et le TPIR que par certains milieux médiatiques et politico-diplomatiques suffit-elle à justifier le droit qu’auraient de nombreux coupables africains et occidentaux à ne pas être poursuivis pour des motifs bien plus graves que la non-assistance à personnes en danger.

Suite à ces événements ayant fait des millions de victimes, toutes ethnies confondues, les autorités actuelles rwandaises, responsables de la situation que vit le Rwanda, se comportent en conquérants. Elles accumulent crimes sur crimes. Les prisons se remplissent sans discontinuer, les populations civiles fuient le pays ou disparaissent, les exécutions sommaires et extrajudiciaires sont légion au Rwanda, les viols se succédent, l’emprisonnement à perpétuité et les condamnations à la peine de mort suivie d’exécution spectacle immédiate au mépris des garanties judiciaires élémentaires sont monnaie courante, etc.

Fort de l’appui et du silence de la Communauté internationale, les dirigeants du Rwanda ont fait des incursions au Zaïre (actuel RDC) ont attaqué pour détruire les camps de réfugiés, pourchassé et massacré une partie importante de ceux-ci dans les forêts inhospitalières. Leurs guerres d’agression répétées contre les pays voisins constituent une menace à la paix et à la sécurité régionale et internationale. Les analystes et les chercheurs ont conclu à la commission des actes de crimes contre l’humanité et même de génocide dans le chef des troupes rwandaises et des rebelles de Kabila (Rapports Garreton). La mission d’enquête des Nations Unies mise en place à cet effet n’a pas pu travailler en toute indépendance. La commission d’enquête a été empéchée de travailler et a dû quitter précipitamment la RDC. La mission d’observateurs des droits de l’homme des Nations Unies au Rwanda a d’abord été restreinte dans ses activités puis finalement chassée»50; … comme par hasard au même moment?

La commission d’enquête sur les crimes commis contre les réfugiés hutu dans l’Est du Zaïre a continué son travail à New York. Les conclusions de cette commission devraient inciter le Parlement français à demander l’extension de la compétence du TPIR à ces événements du Zaïre (RDC) et aux crimes commis au Rwanda jusqu’à maintenant.

Seul le jugement sans complaisance des coupables de tous bords permettrait l’amorce d’une réconciliation des rwandais. Le recours à la complémentarité des systèmes judiciaires importé et traditionnel non contentieux conduirait aisément à cette réconciliation et semble une voie obligée et salutaire pour les rwandais. Le système traditionnel comporte indubitablement des atouts dont on peut et doit profiter à l’image de la «Commission Vérité et Réconciliation» sud-africaine. La justice doit être égale et favorable pour tous. Une infraction aussi grave que le crime contre la paix, le crime de guerre, le crime contre l’humanité et le crime de génocide n’a jamais été et ne sera jamais une cause d’excuse péremptoire encore moins de justification à sa propre impunité.

CONCLUSION

Les problèmes de la région des Grands lacs en général et du Rwanda en particulier sont très complexes. Il faut un grand courage pour les attaquer. La France est un pays qui a, dans son histoire, produit des hommes politiques d’une grande ténacité et d’une lucidité remarquable.

En reconnaissant l’agression de l’Uganda contre le Rwanda en octobre 1990 et en réagissant d’une façon conséquente, la France a été le seul pays à soutenir une population engagée dans un processus démocratique, conformément à la Conférence de la Baule. Cette présence de la France, a permis de sauvegarder la souveraineté d’un pays sans défense (le Rwanda ne disposait que d’une armée de 5.000 hommes au déclenchement de la guerre en octobre 1990). Cette présence était transparente contrairement aux autres puissances qui soutenaient en sous-main les agresseurs.

Même si la France avait eu d’autres motivations, sa présence aux côtés du Gouvernement jusqu’en 1993, a limité le nombre de victimes à 2.000, alors que dans la zone occupée par le FPR-INKOTANYI on déplorait un génocide qui à ce moment avait déjà fait plus de 400.000 morts et avait poussé plus d’un million de civils à évacuer.

Les accords d’Arusha, forgés artificiellement dans les antichambres de Bruxelles et de New-York et imposés à la population rwandaise, ont abouti au retrait de la France du Rwanda et à l’installation d’une MINUAR (Force militaire des Nations-Unies) incapable d’exécuter, dans l’impartialité et dans la sérénité, un mandat déjà défaillant dans sa conception.

Le départ de la France a permis la réalisation de l’agenda caché de l’agresseur. En assassinant le seul responsable rwandais issu des accords d’Arusha, le FPR-INKOTANYI a precipité le pays dans le chaos. Seule la France a eu le courage de voler au secours d’une population menacée d’extermination. Son Opération Turquoise a permis de sauver des millions des vies humaines.

Les organismes internationaux, agissant comme apprentis sorciers dans le domaine de la prévention des conflits, ont une grande responsabilité dans le drame du Rwanda. Il est grand temps d’imposer un code de conduite morale à ces différents organismes internationaux. La domination de ces organismes par un seul pays, qui pense pouvoir gérer le monde en ne regardant que ses intérêts économiques et géostratégiques et qui, en plus, se permet de ne pas verser ses contributions au fonctionnement des Nations Unies, risque d’hypothéquer la paix et la sécurité mondiale.

L’Europe, berceau de la pensée démocratique et humaniste, a le droit et l’obligation d’imposer les principes universels de droit humanitaire, libérés de toute forme de mercantilisme. Des institutions naissantes, comme la Cour Pénale lnternationale, méritent d’être soutenues indépendamment des puissances qui leur seraient hostiles.

La paix dans la Région des Grands Lac d’Afrique dépendra du courage avec lequel la recherche objective de la vérité sera abordée. Ainsi est-il à espérer que votre mission d’information sur le Rwanda dépassera les bornes de l’enquête limitée au seul rôle de la France dans un débat franco-français. Le peuple rwandais espère de la France le secours en éclaircissant les zones d’ombres qui damnent tout processus vers une paix durable dans la région des Grands Lacs d’Afrique. On n’accuse pas un peuple de génocide sans avoir eu le courage d’aller au bout de la vérité.

NOTES:

1. Vénuste Nshimiyimana, Prélude du génocide rwandais, Editions Quorwn sprl, Ottignies/Louvain-La-Neuve 1995, p.66.

2. Il faut rappeler que ce n’était pas la première fois que les populations civiles hutu subissaient un supplice d’une telle barbarie de la part des éléments du FPR. Déjà, au lendemain de l’attaque du 1 octobre 1990, le FPR-INKOTANYI avait utilisé des techniques qui consistaient en des tortures cruelles allant jusqu’à éventrer des femmes enceintes et piler dans des mortiers les foetus retirés des seins des femmes suppliciées. Quant aux hommes, on leur fracassait la tête après les avoir châtrés ligotés les bras derrière le dos selon la technique ancienne tres douloureuse de l’Akandoyi (importée de l’Uganda). Pour de plus amples informations nous référons aux témoignages contenu dans:
* Solidaire Rwanda,
Le non dit sur les massacres au Rwanda, trois dossiers, Bukavu 1994-1995.
* Filip Reyntjens et Serge Desouter,
Rwanda: les violations des droits de l’homme par le FPR/APR, plaidoyer pour une enquête approfondie, Université d’Anvers, juin 1995.

3. Vénuste Nshimiyimana, op. cit., p.66.

4. Vénuste Nshimiyimana, op. cit., p. 66.

5. Une liste beaucoup plus longue de ces assassinats politiques est reprise dans: André Guichaoua, Les crises politiques au Burundi et au Rwanda (1993-1994), Université des Sciences et Technologies de Lille, 1995.

6. Vénuste Nshimiyimana, op. cit., p. 67.

7. La personne même de Jean-Pierre est fortement controversée et devrait être identifiée. Il y a autant de Jean-Pierre que de personnes qui en parlent. Par ailleurs, le fax parle de caches d’armes sans jamais les identifier. Quelles informations precises avons-nous aujourd’hui sur ce Jean-Pierre et sur ces caches d’armes? La MINUAR qui en avait les moyens et le mandat aurait-elle dressé un procès-verbal de saisie ou de constat?

8. SOS Rwanda-Burundi, Lecture critique des comptes rendus analytiques des auditions de la commission d’enquête pour le Rwanda du Sénat belge, Buzet, 26 décembre 1997.

9. Vénuste Nshimiyimana, idem p. 68.

10. Voir le document de Filip Reyntjens, Sujets d’inquiétude au mois d’octobre 1994.

11. Ces fours crématoires ont été signalés par
* Libération 27102/1996
* La Tribune du Réfugiés mai-juin 1996
* Témoignage devant le camera du journaliste canadien Ivan Patry dans
« Après le génocide nous nous sentons trahis », 1996.
* Sunday Time Express 1996

12. Aujourd’hui, dans les accords de Victoria Falls (7/09/98), le Rwanda veut bien récupérer ses prisonniers de guerre faits par Kabila en R.D.C., mais prétend ne pas être impliquer dans les conflits opposants les « rebelles » au pouvoir de Kabila.

13. Solidaire-Rwanda asbl, Le non-dit sur les massacres au Rwanda, Dossier nº 3, juillet 1995. Les dossiers nºs 1 et 2 avaient déjà parlé de la participation de la MINUAR à l’action dévastatrice du FPR, notamment au stade Amahoro et à l’ETO (Ecole Technique Officielle de Kicukiro).

14. Ces témoins n’osent pas témoinger de peur de:
* Ne plus pouvoir retourner au Rwanda
* Perdre leur emploi dans une institution internationale
* Voir massacrer leur famille par le FPR-INKOTANYI

15. Rappelons à ce qui conceme les soldats belges assassinés au Rwanda, que certaines sources bien documentées parlent de 11, de 13, voire de 16 soldats belges trouvés à la morgue du Centre Hospitalier de Kigali: la question reste donc à élucider.

16. Jean-Claude Willame, L’ONU au Rwanda (1993-1995), Bruxelles, Editions Labor; Maisonneuve et Larose, 1996, p. 101

17. C. Willame, op. cit., p. 107.

18. Informafion donné par le coronel Marchal lors d’une conférence à Bruxelles et confirmé par des coopérants, témoins oculaires à Bujumbura. L’après-midi du 6 avril 1994, il y avait un mouvement anormal de militaires à Bujumbura.

19. Théodore Hanf et al., Education et Développement au Rwanda, München, Weltforum Verslag, 1974, p.140.

20. Filip Reyntjens, Pouvoir et Droit au Rwanda. Droit Public et Evolution Politique, 1916-1973, Tervuren, Musée Royale de l’Afrique Centrale, 1985, pp. 502-503.

21. Les chiffres mentionnés dans les rapports officiels sont sous-estimés du fait que de nombreux personnes corrompaient l’état civil pour obtenir la mention Hutu sur leurs documents officiels.
* Ministère de la Fonction Publique,
Rapport annuel 1989, p. 125 repris par le journal canadien L’AGORA, juin 1995.
* MINEPRISEC,
Dynamique de l’équilibre ethnique et régional dans les écoles secondaires au Rwanda, Kigali, 1986.
* EPN,
Interaction entre les structures géo-socio-politique du Rwanda et de l’enseignement Secondaire, Butare, 1981.

22. Bernard Lugan, Histoire du Rwanda, Editions Bertillat, 1997.

23. L’intitulé exact du docunent est: «Note sur l’aspect social du problème racial indigène au Rwanda» daté du 24 mars 1957.

24. Voir F. Nkundabagenzi, Rwanda Politique, Centre de Recherche et d’Information Socio-Politique, Bruxelles, 1961.

25. Le premier novembre 1959, le sous-chef Dominique Mbonyumutwa, un des grands leaders de la masse populaire hutu fut agressé par une bande d’une douzaine de jeunes Tutsi de l’UNAR. Cette agression, survenue dans un moment d’extrême tension, fut ressentie comme le signal d’un plan d’attaque contre le peuple et ses leaders. Le 3 novembre 1959, l’insurrection populaire fut déclenchée à Ndiza dans le fief dudit sous-chef et s’étendit petit á petit sur tout le pays. Des changements substantieis, notamment la proclamation de la République le 28 janvier 1961, decida l’ONU à organiser, le 25 septembre 1961, un référendum (Kamarampaka) pour départager définitivement les tenants de la monarchie et ceux de la République. Cette date marque la fin de la féodalité.

26. Harroy Jean-Paul, Rwanda: De la féodalité à la démocratie, 1955-1962, Académie des Sciences d’Outre-mer, Editions Hayez, Bruxelles, Paris, 1984, p.291-298.

27. Hubert Jean-R., La Toussaint rwandaise, mémoire présenté à la séance du 17 février 1964 au Musée Royal de Tervuren, Belgique, p.33.

28. Témoignage recueilli à Kigali par la jounuliste belge C. Braeckman, Le Soir du vendredi 14 août 1998, p.6.

29. INYENZI= «Ingangurarugo ziyemeje kuba ingenzi» selon les affirmations de Ngurumbe lui-même, fondateur et chef des Inyenzi, actuellement conseiller militaire de Paul Kagame. Cf. Interview in Kanguka nº 52 du 12/02/1992.

30. Extraits des dossiers judiciaires de certaines victimes: Kanyaruka: «Le médecin requis constata que la victime avait reçu 53 coups de lance, 9 coups de machette et un coup de couteau, que si les coups de lance étaient tous superficiels, leur nombre élevé avait coopéré par le choc traumatique à la mort; que plusieurs coups de machette étaient en soi mortels, un très large, à la cuisse gauche, long de 20 cm et profond de 7 à 10 cm, un au tibia gauche avec fracture, deux coups de machette à l’épaule, d’autre à l’omoplate, au cou, sectionnant tous les muscles jusqu’aux vertébres cervicales, deux coups de machette dans la région occipitale de la tête ayant entraîné fracture du crâne». Pour Secyugu: «Arrivés près de l’habitation (de M. Secyugu), les assaillants l’encerclent puis, soudainement et de concert, commencèrent à casser les carreaux et à fracturer les portes, puis pénétrèrent de tous côtés dans la demeure. SECYUGU se réfugie avec son épouse près d’une armoire. Mais RWEVU tira brutalement sur lui et l’abattit d’un coup de lance à la poitrine … La femme de la victime s’enfuit, mais put encore apercevoir que se fut NZAKAMWITA qui enfonça l’arrière du crâne de la victime avec le dos de sa hache.(RMP 17.180). Cité in: MINAFFET, Toute la vérité sur le terrorisme « Inyenzi » au Rwanda, p. 5.

Ces assassins avaient entre autres pour noms: Hormisdas MBANDA, condamné à mort, François RUKEBA, Gaspard MUSANA, Félicien KAMBANDA,….. condamnés à 15 ans de prison. A part MBANDA et un certain HARELINKA, tous les autres assassins, pourtant régulièrement jugés et condamnés par la Tutelle, furent relâchés sur décision impératíve de l’ONU pour leur permettre de jouer plein jeu de la démocratie avant le Référendum et les élections législatives du 25 septembre 1961.

31. Bernard Debré, Le retour du Mwami. La vraie histoire des génocides rwandais, Editions Ramsay, Paris, 1998, p. 107.

32. Nkiko Nsengimana, Lettre ouverte, op. cit., p. 6.

33. Lieutenant Nees, audition devant la Commission sénatoriale belge.

34. Voir SOLIDAIRE-RWANDA, Le non-dit sur les massacres au Rwanda, Dossier nº 2, décembre 1994.

35. Tito Rutaremara cité par François MISSER in Vers un nouveau Rwanda? Entretiens avec Paul Kagame, Editions Luc Pire, Editions Karthala, 1995, p. 155.

36. Bernard Debré, op. cit., p. 119.

37. Gérard Prunier, Audition devant le Sénat belge, le 11 juin 1997 (COM-R 1-75).

38. Gérard Prunier, Audition devant le Sénat belge, le 11 juin 1997 (COM-R 1-75).

39. Parmi ces critiques, il convient de relever celles de Madame Violette Alarie-Gendron, Directrice Générale de l’Institut de Développement Nord-Sud (IDNS), intitulés « Commentaires apportés aux rapports sur la violation des droits de l’homme au Rwanda », La Pocatière (Québec) Canada, GOR 1ZO, mars 1997, 20 pages.

40. Les 3 dossiers de SOLIDAIRE-RWANDA asbl rapportent plusieurs témoignages selon lesquels le FPR-INKOTANYI a déporté des population entières, eliminé des milliers de personnes qui se mettaient sous sa protection, notamment à partir du stade Amahoro à Kigali (avril 1994), alors gardé par la MINUAR.

41. Human Rights Watch, Qui a armé le Rwanda? in LES DOSSIERS DU GRIP, Bruxelles, 1994, p. 16.

42. Centre de Lutte contre l’Impunité et l’Injustice au Rwanda, Mémorandum adressé le 20 janvier 1998 aux Parlementaires européens à l’occasion de la visite du Général Paul Kagame, janvier 1998.

43. Nkiko Nsengimana, Pour une démocratie de concordance et citoyenne, Projet NOUER, «Nouvelle Espérance pour le Rwanda», Lausanne, juillet 1998.

44. Rapport de l’Equipe d’enquête du Secrétaire Général sur les violations graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire en République Démocratique du Congo, du 29 juin 1998. Commission Internationale Non-Gouvemementale sur les violations massives des droits humains en République Démocratise du Congo (Ex-Zaire) 1996-1997. Ce rapport préparé par le Centre International des Droits de la Personne et du Développement Démocratique (CIDPDD – Montréal, Canada) et par l’Association Africaine pour le Défense des droits de l’homme en République Démocratique du Congo (ASADHO-Kinshasa) confirme les actes de génocide sur la population hutu en Ex-Zaïre.

45. Recensement général de la population et de l’habitat au 15 août 1991, Service National de Recensement KIGALI.

46. Filip Reyntjens, Trois jours qui ont fait basculer l’histoire, Institut Africain CEDAF, Bruxelles, Editions L’Harmattan, Paris, 1995, pp. 44-46.

47. André Sibomana, Gardons espoir pour le Rwanda, Desclée De Brouwer, Paris, 1997, pp. 90-91.

48. Rapport de sécurité du 11 septembre 1992 signé par James Gasana alors ministre de la Défense nationale du Rwanda, cité par Nkiko Nsengimana dans sa «Lettre ouverte» du 27 février 1998 et adressée au Président rwandais Pasteur Bizimungu et au Vice-Président le Général-Major Paul Kagame, p. 10.

49. Jeune Afrique nº 1925 du 25/11 au 01/12/1997, p. 10.

50. Rapporteur spécial de l’ONU pour les Droits de l’Homme: René DEGNI-SEGUI (Côte d’Ivoire) démis de ses fonctions le 18 avril 1997 suite à la demande des autorités rwandaises et après approbation «par consensus» de la Commission des Droits de l’homme des Nations Unies réunie en session à Genéve. Il devrait être remplacé par un «délégué» travaillant désormais sous la responsabilité des autorités rwandaises. (GUICHAOUA ANDRE, Gouvemements, représentation politique, principaux corps d’Etat, institutions de la société civile au Burundi et au Rwanda dès 1987).

Mr. Roberto Garreton, rapporteur spécial de l’ONU pour les Droits de l’Homme en R.D.C. a été écarté de la même façon par le gouvemement de Kabila sans protestation international. Pourquoi?