Je tiens à dire aujourd’hui que je suis revenue dans mon pays 16 ans après cette tragédie qui a eu lieu dans ce pays. Je sais très bien qu’il y a eu un génocide et des crimes contre l’humanité. Par conséquent, à mon retour, après 16 ans dans un pays où de telles atrocités ont eu lieu en mon absence, ma conscience m’obligeait de passer d’abord par l’endroit qui conserve la mémoire de ces actes odieux. J’avais besoin de voir cet endroit et de me rendre compte de l’ampleur de ces tragiques évènements.
Les fleurs que j’ai apportées sont un signe de reconnaissance des membres du parti FDU-INKINGI et de son Comité Exécutif. Ils m’ont dit de passer par ici et de vous réaffirmer que ce que nous souhaitons, c’est de travailler ensemble, afin de nous assurer qu’une telle tragédie ne se reproduira plus. C’est l’une des raisons pour lesquelles les FDU-INKINGI ont décidé de rentrer au pays pacifiquement, sans recourir à la violence alors que beaucoup de gens pensent que la solution aux problèmes du Rwanda est le recours à la lutte armée. Nous ne croyons en aucun cas que verser le sang résout les problèmes. Quiconque verse le sang, il en sera victime.
Par conséquent, au sein des FDU-INKINGI, nous souhaitons que nous tous, Rwandais, puissions travailler ensemble, unir nos différentes idées, de sorte que la tragédie qui a frappé notre nation ne puisse jamais se reproduire. Il est clair que le chemin de la réconciliation a un long chemin à parcourir. Il a un long chemin à parcourir parce que, si on considère le nombre de personnes qui ont été tuées dans ce pays, ce n’est pas quelque chose que l’on peut passer outre rapidement. Par ailleurs, en analysant de près la situation, on se rend compte qu’il n’y a pas de stratégies politiques fortes qui doivent aider le peuple rwandais à atteindre une véritable réconciliation. A titre d’exemple, si l’on passe en revue ce mémorial, on se rend compte qu’il ne se limite qu’aux victimes du génocide contre les Tutsis. Il est tout à fait évident que les crimes contre l’humanité commis contre les Hutus sont totalement ignorés. Les Hutus qui ont perdu les leurs souffrent aussi et se demandent: «Quand est-ce que nos morts seront aussi commémorés»?
Pour que nous puissions parvenir à une véritable réconciliation, nous devons faire preuve d’empathie avec la souffrance de tout un chacun. Il est important que les Hutus qui se sont rendus coupables de massacres contre les Tutsis soient punis. Il est également important que ceux qui ont tués les Hutus comprennent qu’ils doivent répondre de leurs actes ignobles. En outre, il est important que le peuple rwandais, toutes ethnies confondues, comprenne que nous devons nous unir, nous respecter les uns les autres, et construire ensemble notre pays dans la paix.
Ainsi, l’objet de notre retour au pays est d’examiner les voies et moyens de commencer ensemble ce long processus de réconciliation et de trouver un moyen de bannir à jamais l’injustice afin que nous puissions tous, peuple rwandais, vivre ensemble en pleine liberté dans notre pays.