L’avocat ivoirien Rodrigue Dadjé et son homologue québécois John Philpot, tous deux spécialistes de la justice internationale, ont prononcé ensemble, à Montréal, une conférence au cours de laquelle ils ont vivement critiqué la justice internationale, et en particulier la Cour pénale internationale, un tribunal créé par le Statut de Rome en 2002 et généreusement financé entre autres par le Canada. Leurs critiques ont trouvé un écho favorable parmi le public présent. Lors de la période de questions qui a suivi la conférence, Africains et Québécois ont dénoncé à l’unanimité la partialité et le caractère politique d’un système qui vise les pays africains de manière disproportionnée.

D’entrée de jeu, le modérateur de la conférence, le professeur Aziz Fall, a précisé que, « sur dix affaires actuellement à la CPI, neuf visent des Africains. Il ne faut donc pas s’étonner que trois pays africains, le Burundi, l’Afrique du Sud et la Gambie, se soient retirés du Statut de Rome, chacun ayant toutefois un contexte qui lui est propre. »

« Par exemple, dans le cas du Burundi, explique John Philpot, la CPI a décidé d’entreprendre une enquête sans même en informer le gouvernement, qui doit défendre le pays contre des attaques terroristes venues du Rwanda, alors que des médias et des ONG comme Amnistie Internationale accusent injustement et sans preuve les autorités burundaises de violer les droits de la personne. »

« La justice internationale est née avec le Tribunal de Nuremberg, où l’humanité a affirmé que le crime d’agression était le plus grave de tous et que beaucoup d’autres crimes en découlaient » rappelle Me Philpot. « Pourtant, le crime d’agression n’existe pas dans le Statut de Rome. Celui qui déclenche une guerre ne risque pas d’être poursuivi par la CPI. C’est complètement insensé! Si la CPI était un tribunal sérieux, il y aurait de nouveaux visages parmi les accusés : Bush, Blair, Obama, Trump, Sarkozy, Macron. Les tribunaux internationaux sont des instruments de domination et de néocolonialisme. La CPI devrait tout simplement disparaitre. »

S’agissant de la partialité de la CPI, Rodrigue Dadjé renchérit : « Ce tribunal a été créé supposément pour défendre les victimes. Pourtant, le Statut de Rome ne permet pas aux victimes de porter plainte. La procureure de la CPI, Fatou Bensouda, a le pouvoir discrétionnaire d’enquêter ou non. Pourquoi la procureure ne fait-elle pas enquête lorsque les États-Unis bombardent sciemment un hôpital de Médecins Sans Frontières en Afghanistan et qu’il y a une abondance d’éléments incriminants? Les enquêtes de la CPI ont nettement des motifs politiques et elles visent des pays dont les richesses sont convoitées par certains États membres permanents du club de sorciers que l’on appelle communément le Conseil de sécurité des Nations Unies. »

Rodrigue Dadjé est outré de constater que « la procureure de la CPI ne semble pas s’émouvoir le moins du monde du massacre de milliers d’Ivoiriens par la rébellion au service d’Alassane Ouattara. Pourtant, selon les critères de l’antériorité, de la quantité et de la gravité, les crimes des pro-Ouattara mériteraient amplement de faire l’objet d’une procédure pénale avant les crimes hypothétiques des pro-Gbagbo. La CPI s’intéresse à des individus qui auraient apparemment détruit des bâtiments au Mali, mais ne fait aucun cas des meurtres de masse commis depuis 2002 dans l’Ouest de la Côte d’Ivoire. Elle se comporte comme un bandit qui a l’onction des grandes puissances. »

Par ailleurs, la CPI réclame inexplicablement l’extradition de Simone Gbagbo, ex-première dame de Côte d’Ivoire, dont Me Dadjé assure la défense. La CPI veut ouvrir une procédure contre Mme Gbagbo pour les mêmes crimes qui lui ont déjà valu un procès en Côte d’Ivoire et pour lesquels elle a été acquittée. « La CPI s’ennuie tellement qu’elle veut poursuivre des personnes qui ont déjà subi un procès, lance Me Dadjé. Le Statut de Rome est un contrat de dupe. Le but de la CPI n’est pas de faire respecter le droit. Les États africains doivent se réveiller et se doter d’un système judiciaire qui rendra la CPI inutile. »

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Jean-Hilaire Yapi, président
Congrès Ivoirien du Canada
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