Note introductive d’Alain de Brouwer à la lettre ouverte du 25.08.2021 du Général Augustin Ndindiliyimana en réponse aux récentes déclarations du Cardinal Antoine Kambanda
Le 7 octobre 2021
Un nombre important de membres de notre commission « Afrique centrale » des Rencontres pour la Paix ont tenu à exprimer « leur profonde perplexité* » suite aux déclarations du Cardinal Antoine KAMBANDA, archevêque de Kigali, au quotidien catholique français « La Croix » (édition du 3 juin 2021) au lendemain du discours de « réconciliation » du Président Emmanuel MACRON.
C’est pourquoi nous avons voulu exprimer, sous forme d’un courrier interne adressé au Nonce Apostolique auprès de l’UE, notre crainte de voir la tête de l’Église rwandaise tourner le dos « à son rôle naturel de médiateur et de semeur de paix et d’espérance, en se laissant inféoder à un pouvoir partisan et exclusif* ».
Nous avons donc voulu approfondir notre réflexion sur ce qu’a été réellement « l’engagement de l’Église à tous les niveaux de la crise rwandaise » et l’attente d’une population toujours en deuil.
Un grand témoin empreint d’esprit d’ouverture et de dialogue nous aide à mieux connaître le contexte du drame rwandais, en s’adressant personnellement dans une lettre ouverte au Cardinal rwandais.
Ce témoin, le général Augustin NDINDILIYIMANA, a été un acteur de premier plan des événements politiques, sociaux et sécuritaires du Rwanda. Il a été appelé à différentes reprises à siéger au sein du Conseil des ministres**. Chargé de missions de paix, il a participé à la préparation des négociations et à plusieurs rencontres de travail avec les anciens rebelles, en vue d’assurer une bonne intégration des militaires de l’APR au sein des FAR.
Il a collaboré étroitement avec les responsables de la MINUAR à la mise en application du protocole de consignation des armes dans Kigali (ou la « KWSA »).
Immédiatement après l’attentat contre l’avion du Président HABYARIMANA, il rassembla les hauts officiers dirigeant les FAR, comprenant les Colonels Théoneste BAGOSORA et Léonidas RUSATIRA, ainsi que le Commandant de la force onusienne, le Général DALLAIRE. Avec le Colonel MARCHAL, Commandant de la zone « KWSA », ils ont décidé de la mise en place de patrouilles mixtes et de la prise de contrôle des lieux vitaux de la capitale, tels que le siège de Radio Rwanda et les habitations des dirigeants politiques chargés de la mise en place du gouvernement à base élargie au FPR. Ils ont encore décidé d’une rencontre en pleine nuit du 6 avril 1994 avec le Représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU au Rwanda, Jacques-Roger BOOH BOOH, chef politique de la MINUAR, pour s’accorder sur les mesures urgentes à adopter, de nature à sauver l’accord de paix et la poursuite de l’action de la mission de la force de l’ONU.
Cette rencontre s’est conclue sur l’invitation des dirigeants du MRND à procéder au remplacement du Président HABYARIMANA, mais aussi sur l’urgente nécessité de réunir le corps diplomatique concerné et les dirigeants de la MINUAR chez l’Ambassadeur américain David RAWSON.
Pour des raisons non clarifiées, aucun diplomate ni responsable de la MINUAR ne se présenta à cette réunion essentielle.
Enfin, Augustin NDIDILIYIMANA assuma la présidence du « Comité militaire de crise ». Il a supplié l’Ambassadeur Johan SWINNEN, à la veille de son départ le 12 avril, d’obtenir que la Belgique et ses troupes restent au Rwanda et ne suivent pas la panique ambiante et le retrait brutal du monde diplomatique et de la coopération internationale présent à Kigali. Il a fait ce qu’il a pu avec le peu de gendarmes disponibles pour sauver les vies humaines. Il a participé à toutes les démarches entreprises par le commandement des FAR pour obtenir un retour au cessez-le-feu de la part du FPR, hélas sans y parvenir.
Dernier point à rappeler ici : Augustin NDINDILIYIMANA qui avait obtenu le statut de réfugié en Belgique, a été arrêté et a subi une longue période de détention préventive à la prison d’Arusha entre 2000 et 2011, avant d’être blanchi de toutes les accusations du Procureur et acquitté devant la chambre d’appel du TPIR le 11 février 2014.
Nous vous présentons ci-joint le texte de la lettre du 25 août 2021 d’Augustin NDINDILIYIMANA au Cardinal Antoine KAMBANDA.
Cette vingtaine de pages constituent à la fois une réponse constructive à l’interview du Cardinal et un nouvel appel à la réconciliation.
Les principales têtes de chapitre de ce document sont :
- La guerre entreprise sous plusieurs formes par les réfugiés Tutsi participa aux tensions interethniques au sein de la population. (page 4)
- Les solutions pour empêcher la poursuite de la guerre : le rôle de la France (page 6).
- Habyarimana a-t-il mené une politique de persécution des Tutsi pris pour des Ibyitso ? (page 8)
- Les Tutsi ont-ils été visés par le terrorisme et les assassinats dont on accusait le Président Habyarimana ? (page 8)
- Le FPR empêcha la Force de maintien de la paix (la Minuar) d’accomplir sa mission. (page 10)
- Le génocide dans les objectifs du FPR. (page 13)
- Des hommes d’Église ont participé au plan du FPR. Ils incitèrent à la haine et appelèrent au meurtre. (page 15)
- L’attentat aérien du 6 avril 1994, élément déclencheur du génocide. (page 17)
- La persécution d’une catégorie de Rwandais et l’obstruction à la recherche de la vérité. (page 18)
La démarche effectuée ici par Augustin NDINDILIYIMANA ne manquera pas d’alimenter la renaissance d’un Rwanda pacifié au cœur de l’Afrique des Grands Lacs. Et cela à travers un authentique processus de réconciliation nationale, dans lequel tous les Rwandais puissent se reconnaître, y compris la diaspora disséminée dans le monde.
Je vous souhaite une bonne réception et vous prie d’agréer mes salutations les meilleures.
[Signé]
Alain DE BROUWER***
*Cfr. Lettre du 22.06.2021 d’Alain DE BROUWER au Nonce Apostolique auprès de l’Union européenne, Mgr Aldo GIORDANO, et réponse du 23.08.2021 de ce dernier.
** le 02 février 1982, Augustin NDINDILIYIMANA est nommé ministre de la Jeunesse, des sports et du mouvement associatif.
Le 09 juillet 1990, il reste ministre dans le gouvernement à la tête des transports et des communications.
Le 04 février 1991, il devient ministre à la présidence responsable des questions de défense et de sécurité nationale.
Sous le gouvernement de Sylvestre NSANZIMANA en janvier 1992, A. NDINDILIYIMANA est nommé ministre de la Défense. Il deviendra chef d’état-major de la gendarmerie sous le gouvernement multipartite mis en place le 16 avril 1992.
*** A. DE BROUWER, ancien conseiller politique de l’IDC, a été témoin de contexte présenté au TPIR à Arusha en 2008 par la Défense d’A. NDINDILYIMANA.
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LETTRE OUVERTE A MONSIEUR LE CARDINAL ANTOINE KAMBANDA
Le 25 Août 2021
Objet : Réactions suite à l’interview du Cardinal Antoine Kambanda et appel à la réconciliation.
Monsieur le Cardinal,
L’interview que vous avez accordée au journal La Croix le 3 juin 2021, suite au discours du Président Français Emmanuel Macron en visite au Rwanda, a interpellé plus d’un Rwandais et particulièrement des chrétiens. Vous déployez certes des efforts pour la réconciliation et il est bien de votre devoir de le faire. Ce travail ardu demande cependant d’être à l’écoute pour comprendre et discerner la vérité à travers la situation très complexe à l’époque du drame rwandais. Ancien ministre à la Présidence de la République chargé des questions relatives à la défense et à la sécurité et Chef d’État-major de la Gendarmerie, je crois pouvoir apporter ma contribution en tant qu’acteur et observateur concernant la politique de la France au Rwanda du temps du Président Habyarimana et sur l’Église en cette période trouble en tant que fidèle de l’Église catholique.
À travers cette lettre, ma démarche personnelle ne vise pas une défense à tout prix du régime de la seconde République incarnée par le Président Juvénal Habyarimana, ni même un rejet a priori des critiques et contestations des diverses oppositions, y compris celles des milieux FPR et dissidents. Ma modeste contribution ambitionne seulement d’arriver à participer, au-delà des discours propagandistes et des plaidoyers pro domo, à des échanges sincères et des dialogues constructifs dans le respect d’autrui.
Le génocide des Tutsi est très sensible. Quiconque aborde les sujets ayant trait à ces événements douloureux en dehors de la lecture de l’histoire présentée par le pouvoir de Kigali est accusé de négationnisme. Nous en tenons pour preuve notamment la lettre du Président du Sénat Monsieur Augustin Iyamuremye à son homologue français Monsieur Gérard Larcher Président du Sénat à l’occasion d’un colloque organisé au Sénat français sur le thème de « l’Afrique des Grands Lacs : 60 ans de tragique instabilité ». Iyamuremye y fait part entre autres de « son profond souci quant à cette liberté d’expression, reconnue aux négationnistes du génocide perpétré contre les Tutsi, tout en regrettant des actes de distorsion de l’histoire ainsi que les manœuvres de propagation de l’idéologie de haine anti tutsi. Ce colloque est une mise en cause des résolutions de l’ONU, ainsi que des décisions rendues par le Tribunal Pénal International sur le Rwanda qui confirme sans équivoque le génocide commis contre les Tutsi en 1994 » [1]
Personne ne peut nier les meurtres de Tutsi qui ont été, à la suite d’un constat judicaire, définitivement qualifiés de génocide par le Tribunal Pénal International pour le Rwanda. Ceci ne doit toutefois pas empêcher de discuter le contexte, l’environnement ainsi que l’ensemble des responsabilités qui ont entouré ces meurtres, surtout lorsque les accusations de participation et de complicité fusent de partout. C’est même un droit pour tout accusé, de mettre à l’épreuve les éléments juridiques de la qualification pénale des faits qui lui sont reprochés, sans que cela ne soit assimilé à du négationnisme ou du révisionnisme.
Que certains Français dont le Président Emmanuel Macron aient un devoir : « celui de regarder l’histoire en face et reconnaître la part de souffrance qu’elle a infligée au peuple rwandais » au point de demander pardon à la rwandaise comme vous dites, cela n’est pas notre sujet. L’Histoire que nous connaissons au sujet de notre pays nous a été enseignée par l’Abbé Alexis Kagame un grand chercheur Tutsi[2], nous avons connu la révolution de 1959 et servi sous les deux Républiques. Nous n’avons connu la présence française remarquée au Rwanda que pendant la guerre qui a débuté en 1990. Depuis 1962, la République Rwandaise a subi plusieurs attaques des réfugiés. Les dernières ont eu lieu en 1967. À cette époque plusieurs unités de la Garde Nationale étaient commandées par les officiers et sous-officiers belges. Les réfugiés ont crié au génocide en 1964. Monsieur Antoine Nyetera un Tutsi de la famille royale ancien secrétaire de l’Abbé Alexis Kagame expliqua aux juges du TPIR cette situation de 1964 : « Les membres de l’UNAR[3] de l’extérieur se sont précipités pour aller aux Nations Unies dire qu’il y a eu génocide. L’Ambassadeur haïtien Max Dorsinville, a sillonné le territoire pendant trois semaines et a apporté un rapport au Conseil de Sécurité. Donc Max Dorsinvile a dit en substance qu’il y a eu des meurtres politiques pour certaines personnes mais que les Tutsi n’étaient pas ciblés comme tels. Au cours de sa mission, bien sûr qu’il a rencontré des Hutu, des Tutsi, des autorités locales et des commerçants »[4].
Le gouvernement entreprenait des actions de sensibilisation en Europe pour que les pays occidentaux œuvrent à la stabilité du pays. Le ministre Anastase Makuza dans sa tournée disait notamment : « C’est ici que la perspective d’avenir devrait préoccuper encore davantage tout homme de bonne volonté épris de justice, de paix et de solidarité humaine. Car, si l’opinion publique étrangère a été trompée au point d’être davantage sensibilisée par les regrettables conséquences d’un terrorisme organisé que tout honnête homme devrait condamner l’effet en excusant sa cause, cela risque de préparer un avenir encore plus sombre, car en excusant le terrorisme on l’encourage et cet encouragement l’incite à se renouveler et sa répétition ne peut produire que les méfaits que nous déplorons tous[5] ».
Nyetera rappela aussi que le gouvernement signa avec la délégation de l’UNAR représentant les réfugiés à l’extérieur du pays des accords devant une délégation des Nations Unies pour le retour des réfugiés. « Cette délégation était conduite par une demoiselle du Libéria, Mademoiselle Angribroos, l’UNAR était bien représentée. La délégation rwandaise a accepté sans condition et leur a donné des postes ministériels, de préfets, etc… Ils ont signé devant cette commission des Nations Unies. Je signale qu’aucun n’est rentré, malgré cette promesse solennelle devant le Représentant des Nations Unies. Aucun n’est rentré, parce qu’ils ne voulaient pas rentrer sans le pouvoir»[6].
En 1967, les pays voisins ont pris les dispositions conformément aux conventions internationales en matière des réfugiés. Ils n’ont plus permis les attaques à partir de leur territoire.
En 1982, le problème des réfugiés rwandais resurgit suite à la guerre entre le Président Milton Obote de l’Ouganda et son opposant monsieur Yoweli Museveni. Le Président Obote reprochant aux réfugiés rwandais de renforcer la rébellion de Museveni. En guise de représailles, il chassa des Rwandophones hors de son territoire. Les négociations entre le Rwanda et l’Ouganda eurent lieu. Les deux parties convinrent qu’il y aurait une mission de « screening » pour séparer les réfugiés rwandais « bona fide » des sujets rwandophones mais non réfugiés. Les réfugiés rwandais qui le souhaitent seraient réinstallés au Rwanda et les rwandophones ougandais seraient repris par le gouvernement ougandais. La partie rwandaise honora ses engagements et les réfugiés rwandais furent installés à Kibungo dans la région de Nasho. Les rwandophones identifiés comme ougandais furent repris par l’Ouganda.
Arrivé au pouvoir en 1986, le Président Yoweli Museveni souleva le problème des réfugiés rwandais dans son pays. Le problème fut étudié par les commissions composées de Délégués Rwandais, Ougandais et du Haut-Commissariat aux Réfugiés. Un accord fut signé en 1989 avec la bénédiction du HCR. L’accord prévoyait un recensement de tous les réfugiés qui souhaitaient retourner volontairement au Rwanda. Pour se faire, il était prévu une visite au Rwanda (facts checking) pour se rendre compte des conditions d’accueil au Rwanda et prendre la décision en connaissance de cause. Suite à l’opposition farouche des leaders des réfugiés; (des tensions ont eu lieu dans les settlements de Kasese, Oruchinga et Nakivaale), la visite n’aura jamais lieu, jusqu’à l’attaque du pays le 1er octobre 1990.
Cette guerre que certains ont qualifiée d’agression par l’Ouganda, d’autres de guerre civile ou encore de guerre régionale, était de toute évidence une guerre entre fils et filles d’une même nation qui ne peut mener qu’à des dégâts humains irréparables qui cimentent la haine et incitent à la vengeance ; alors que les prémices d’un règlement pacifique du problème des réfugiés étaient réunies.
La France, la Belgique, les USA et des pays africains se sont opposés à ce désastre et ont pris beaucoup d’initiatives pour résoudre le conflit par les négociations. Cela a été souligné par le Président français dans son discours.
A la question du journaliste : Que pensez-vous du discours d’Emmanuel Macron ?
Vous répondez : Nous n’avons pas de problème avec les Français mais avec la politique de la France dans notre pays du temps d’Habyarimana. Cela provoquait des tensions entre nos deux peuples. Le discours d’Emmanuel Macron a clarifié ce point en reconnaissant le rôle de ses prédécesseurs auprès de ceux qui nous ont persécutés ».
Il vous souviendra que peu avant la visite du Pape, les évêques ont envoyé aux fidèles plusieurs lettres pastorales notamment sur l’unité dans le Christ. Certains prêtres Tutsi ont réagi par une lettre en dénonçant l’hypocrisie mettant en exergue les conflits ethniques dans les communautés religieuses et la politique d’équilibre prônée par le Président Habyarimana[7]. Les messages des évêques étaient préparés par une commission composée de prêtres et de laïcs[8]. Sur le plan politique nous étions encore à l’époque des partis uniques en Afrique et tous les Rwandais nous étions membres du parti politique du Président Habyarimana, le MRND qui prêchait la paix, l’unité et le développement. La commission sociale dirigée par Mgr Vincent Nsengiyumva et dont je faisais partie, comprenait entre autres membres, le Père jésuite Chrysologue Mahame de l’ethnie Tutsi et Madame Gaudence Nyirasafari. Partout dans le pays les prêtres et les religieux faisaient partie des commissions de développement dans les communes. En 1989, Mgr Vincent Nsengiyumva avait démissionné du MRND.
L’implication de l’Église catholique dans la politique intérieure du pays peut être discutable. Surtout que cette implication n’empêchait pas la critique, en témoigne cette lettre des prêtres Tutsi citée plus haut, dont les auteurs n’ont pas été inquiétés à l’époque. Serait-ce possible aujourd’hui sous le régime du FPR ?
En 1987 déjà, on demandait le changement et une ouverture démocratique. Rappelez-vous le discours du Président Habyarimana à La Baule et l’exigence du Président Mitterrand. Dans ce contexte particulier, des prêtres principalement Tutsi ont profité de la tribune offerte par la visite du Pape pour dire tout le mal qu’ils pensaient de la politique d’équilibre et des relations entre l’État et l’Église. Cette intervention, au moment où on attendait le retour pacifique des réfugiés Tutsi, fut interprétée comme un choix de l’option de la guerre et le rejet des solutions préconisées par les commissions ad hoc chargées de résoudre pacifiquement les problèmes des réfugiés. Les prêtres Tutsi mettaient le Pape devant le fait accompli de l’attaque et attendaient de lui peut-être sa phrase mémorable de « N’ayez pas peur ». Le Prêtre polonais curé de ma paroisse de Kansi auteur du livre « C’est toi Emma », évoque cette situation d’une guerre en préparation. « Durant la visite papale, le Rwanda était déjà menacé par une agression potentielle extérieure mais on s’abstint cependant de rendre publique cette affaire »[9]. C’est donc plutôt des prêtres qui créaient des tensions dans certains milieux.
1. La guerre entreprise sous plusieurs formes par les réfugiés Tutsi participa aux tensions interethniques au sein de la population.
En 1991, ministre à la Présidence, je suis intervenu aux côtés du ministre de l’Intérieur et du Développement Communal monsieur Faustin Munyazesa pour la pacification quand il y a eu des tués parmi les Bagogwe suite à l’attaque et la libération des prisonniers à Ruhengeri. La population avait réagi en représailles et au motif que les jeunes Bagogwe avaient rejoint le FPR. Cette population jurait ne jamais se laisser massacrer par ces gens. Il leur fut expliqué les lois qui protègent la vie de tout citoyen et les commandements de Dieu. Que l’autorité était là pour les protéger. Le bourgmestre qui avait rassemblé la population quant à lui demandait des armes pour renforcer sa police. Les réfugiés Bagogwe qui se trouvaient à l’Université de Mudenge ont dit qu’ils n’avaient aucune responsabilité dans le départ de leurs enfants. Il leur fut conseillé de coopérer avec les autorités qui doivent assurer leur protection. Dans son rapport le ministre de l’Intérieur et du Développement Communal souligne le fait qu’avant la guerre les Bagogwe et la population Hutu s’entendaient bien[10]. Il est présomptueux de dire que les autorités n’ont rien fait pour calmer la situation. Lors des massacres de Kibilira, le Président était lui-même intervenu[11].
En mars 1992, les Tutsi furent attaqués au Bugesera. Le Parquet de Kigali mena des enquêtes sur ces violences. Le procureur François Nsanzuwera a noté la psychose de la peur existante dans la population. Il écrit dans son livre : « Nous interrogeons sur place des paysans hutu…. les Hutu ont devancé leurs voisins Tutsi pour qu’ils ne les massacrent pas …ils ont miné les champs des Hutu ».[12]
Le procureur Nsanzuwera, prit des mesures contre les meneurs de ces troubles. Dans sa lettre du 18 mars 1992, il demandait l’annulation de la libération provisoire d’un certain Gahima François président du parti PL au Bugesera et du journaliste Ngeze Hassan[13]. La gendarmerie arrêta environ 500 présumés coupables qui malheureusement furent relâchés par le parquet.
En 1993, les Bagogwe et les Tutsi furent attaqués dans les préfectures de Ruhengeri, Gisenyi et Kibuye. Les présumés coupables furent arrêtés et mis en prison; les responsables administratifs défaillants furent sanctionnés[14]. Suite à ces massacres, le FPR déclara qu’il s’agissait d’un génocide. La commission internationale d’enquête sur les violations des droits de l’homme invitée par le gouvernement ne trouva aucune preuve pour affirmer qu’il y avait eu génocide. Elle ne trouva pas non plus de preuve des escadrons de la mort dont on accusait le Président Habyarimana[15].
Le 7 avril 1994, après l’attentat contre le président Habyarimana, la quasi vacance de pouvoir (l’assassinat du chef de l’État et du chef d’état-major de l’armée entre autres) a fait que des bandes de criminels se sont livrées aux représailles[16]. La reprise généralisée des hostilités, entrainant une marée humaine de déplacés qui racontait sur leur passage les horreurs de la guerre comme une trainée de poudre, faisait monter les tensions ethniques. Du fait que les gens savaient que le FPR avait organisé des brigades clandestines partout dans le pays, certains parmi les Hutu pensaient qu’à l’arrivée du FPR, leurs voisins Tutsi se joindraient à lui et à ses brigades pour les massacrer, d’où la réaction de tuer avant d’être tué. Des bandes de criminels ont profité de cette situation chaotique pour se livrer à des pillages et des massacres pas forcément à caractère ethnique.
Tout cela n’exclut pas que certaines personnes à certains endroits, ayant une certaine influence sur la population aient pu inciter à l’attaque des Tutsi. C’est ce que Jean Hatzfeld dans son enquête sur les tueurs a décrit : « Léopold (le tueur), en avril 1994, comme presque tous ses semblables Hutu, il s’inscrivit au parti de Juvénal Habyarimana sans conviction. Mais, dans l’heure qui suit la nouvelle de l’attentat contre l’avion présidentiel, très excité, il rejoint les premiers rassemblements des Hutu qui se forment et d’emblée il trouve sa place au centre pour hurler à la vengeance. Naturellement, lorsque débutent les massacres, il s’élance à la tête d’un groupe, sur le marché de Nyamata…. »[17].
Le témoin du Procureur, GFR de la commune de Nyaruhengeri, rapporte : « Brièvement, je peux vous dire que certaines personnes étaient contentes et d’autres étaient tristes et c’est cette catégorie de gens qui était triste qui s’est révoltée par la suite et a tué ceux qui avaient manifesté de la joie à l’annonce de la mort du Président ….. j’ai appris la mort du Président Habyarimana …ensuite j’ai commencé à voir arriver dans ma commune une foule de personnes en provenance de Kigali qui disaient qu’elles fuyaient la guerre [18] ».
Quand j’ai posé moi-même la question dans cette commune, pourquoi des gens avaient tué leurs voisins Tutsi, ils me répondaient : Les Tutsi nous ont quitté et sont allés à Kansi rejoindre les réfugiés venus d’ailleurs dans le but de revenir ensemble nous tuer ».
Le Curé de ma paroisse de Kansi, un Père missionnaire polonais présent pendant les événements dramatiques refusa de dire la messe pour cette population comprenant des criminels. « Comme un refrain, on répétait ces mots : Padri, c’est ainsi la guerre. Si nous ne les avions pas tués, ce sont eux qui aujourd’hui nous tueraient »[19].
Ce même prêtre s’est rendu au village de Madame Agathe Uwilingiyimana, la Première ministre dans la même commune de Nyaruhengeri, « Contrairement aux prédictions, les gens du village la traitaient comme une traîtresse et se réjouissaient de son assassinat parce que selon eux, cela lui était dû ».[20]
Ce prêtre engagé dans la déstabilisation du régime ne pouvait qu’être déconcerté par la tournure des événements suite à la guerre et à l’attentat aérien[21]. Il reconnait que le bourgmestre n’avait aucune autorité sur les tueurs et que c’est lui qui l’a sauvé avec sa famille. « Le Bourgmestre Kabeza avait peur de rester parce qu’il savait qu’il serait accusé d’avoir organisé le génocide. Mais qu’aurait-il pu faire lorsque les bandits interahamwe l’avait projeté à genoux parce qu’il refusait de mettre le feu aux maisons ? Louis (le prêtre) l’aida à fuir en le conduisant avec ses biens en direction de Kigembe ».[22] L’épouse du bourgmestre de l’ethnie Tutsi m’a écrit une lettre me racontant ses malheurs dans la forêt du Zaïre (le FPR tua son mari sous ses yeux). Elle devait venir témoigner pour moi à Arusha. Mais le procureur la détourna en faisant une requête pour qu’elle soit aussi son témoin. La Chambre lui donna raison mais il ne la fit pas comparaître. Il l’aurait même déplacée et installée dans un autre pays.
Quoi qu’on en dise, la guerre fut la dynamique de la peur, de la haine et de la vengeance. Le professeur Reyntjens écrit dans son livre intitulé le génocide des Tutsi : « Nous observons qu’aucune étude n’a été consacrée au déroulement de la guerre, toute l’attention des chercheurs ayant été focalisée sur le génocide ».
Plusieurs sont du même avis que lui : À la question posée par un des juges s’il y aurait eu génocide s’il n’y avait pas eu de guerre, ma réponse a été qu’à mon avis, il n’y aurait pas eu de génocide s’il n’y avait pas eu de guerre, et que dans ce sens le FPR était politiquement coresponsable du génocide ».[23]
Le professeur Filip Reyntjens et tous ceux qui analysent et trouvent que le contexte du drame est tout autre que celui présenté par le FPR sont considérés comme révisionnistes ou négationnistes. Mais ils s’en défendent pertinemment.[24]
2. Les solutions pour empêcher la poursuite de la guerre : le rôle de la France.
En décembre 1991, monsieur Paul Dijoud, Directeur des Affaires Africaines et malgaches au ministère des Affaires Etrangères de France vint demander au Président Habyarimana de démocratiser le pays. Présent à cette audience, j’ai noté la question du Président : comment mener la guerre des armes et en même temps la lutte démocratique ? Monsieur Dijoud lui promit que la France l’aiderait à mettre fin à la guerre et ramener la paix.
En Février 1992, les Français et les Américains trouvaient qu’il était temps que le gouvernement et le FPR entrent en contact pour négocier. L’Ambassadeur de France à Kigali vint dire au Président Habyarimana d’entrer en contact avec le FPR pour l’informer de l’état d’avancement de la démocratisation et les mesures prises pour l’accueil des réfugiés[25]. J’ai conduit la délégation devant rencontrer le FPR dans cette mission. Les discussions eurent lieu à Harare au Zimbabwe sous les auspices des USA représentés par l’Ambassadeur David Rawson.
Du 29 mai au 2 juin 1992, l’opposition rencontra le FPR à Bruxelles. Ils se mirent d’accord sur une stratégie de « Renverser le régime par la destruction de l’appareil dictatorial par la guerre d’un côté et la politique de l’autre »[26].
La France est intervenue immédiatement après la rencontre de Bruxelles pour ramener les antagonistes sur la voie de la paix. En effet, le 7 juin 1992, l’opposition, le FPR et le MRND furent réunis à Paris et convaincus d’aller à Arusha négocier les accords de paix et de partage du pouvoir.
En février 1993, le FPR en violation du cessez-le feu mena une attaque jusqu’à quelques kilomètres de Kigali. La France et les USA intervinrent énergiquement pour que le FPR retourne sur ses positions antérieures. Avant que le FPR ne retourne sur ses positions, l’État-major de l’armée qui venait d’acquérir des pièces d’artillerie achetées en France demanda aux instructeurs français d’entrainer nos militaires sur la zone occupée par le FPR dans le but d’avoir un appui feu pour reconquérir le terrain perdu mais Paris s’y opposa[27].
Comme le FPR entreprenait une grande campagne contre la France, le gouvernement rwandais prit position et précisa la politique en matière de coopération militaire avec la France en ces termes :
« Pour ce qui est de la présence des militaires français, ils ont rappelé que ceux-ci qui sont dans notre pays répondent à l’accord de coopération signé en 1975 entre le Gouvernement Rwandais et le Gouvernement Français. Il n’y a, par conséquent, pas de raisons de mettre en cause cette présence qui est régulière et conforme aux accords que le Rwanda, pays souverain, a signé avec un pays ami. Cette présence non seulement contribue à assurer la sécurité des coopérants Français et des autres étrangers mais constitue aussi un soutien au processus démocratique en cours dans le pays ».[28]
Le gouvernement rwandais et le Front patriotique signaient le 7 mars 1993 un communiqué pour rétablir et consolider le cessez-le feu dans lequel il devait y avoir le retrait des forces étrangères et leur remplacement par une force internationale neutre organisée dans le cadre de l’OUA et des Nations Unies.[29]
Au mois de juin 1993, j’ai conduit la délégation dans laquelle les partis politiques étaient représentés pour négocier avec le FPR un accord sur la gestion de la zone abandonnée par le FPR ou Zone démilitarisée. Le FPR exigea des élections dans cette zone. En dépit de cet accord, le FPR maintint une présence à peine cachée. Les élus du MRND furent assassinés et la population quitta à nouveau ses biens.
En août 1993, les accords de paix furent signés. Le mois suivant je faisais partie de la délégation conduite par Madame la Première ministre Agathe Uwilingiyimana qui s’est rendue à Mulindi pour inviter le FPR à composer une délégation commune devant se rendre à l’ONU pour demander de dépêcher la Force de maintien de la paix. C’est cette force qui prit la relève pour garantir la paix. La France, avait accompli sa mission. Le flambeau fut passé à la Force de l’ONU. Le conflit historique de pouvoir entre les Hutu et les Tutsi était résolu : Les deux peuples dont vous parlez.
3. Habyarimana a-t-il mené une politique de persécution des Tutsi pris pour des Ibyitso?
Habyarimana fut accusé par certains d’avoir fait procéder aux arrestations des « Ibyitso ou complices » suite aux tirs de la nuit du 4 au 5 octobre 1990. Effectivement cet acte a fait resurgir le démon du régionalisme et des problèmes ethniques. Cette action va dans le même sens, nous semble-t-il, que votre accusation des militaires français qui faisaient des contrôles sur les barrages. Encore une fois le pays était en guerre contre la menace de la cinquième colonne qui était une réalité. Valens Kajeguhakwa, Tito Rutaremara et Jacques Bihozagara en ont beaucoup parlé. Ce n’était pas une fiction. Il y a eu des commissions de triage et des jugements des personnes arrêtées. Certains parmi les inculpés ont fait des aveux. Il y a eu certes des abus dans les arrestations. Mais, arrivé au pouvoir, le FPR a eu les mêmes réflexes sur les « ibyitso » lors des infiltrations. Il a même fait pire. Vous savez certainement comment les gens étaient traités notamment dans les régions de Gisenyi et de Ruhengeri à l’exemple des massacres dans les grottes de Kanama dans Gisenyi. Comment se fait-il que l’Église n’ait pas soutenu le dossier du Juge Espagnol qui cherchait à lever le voile sur les assassinats des prêtres de son pays et sur d’autres cas d’ecclésiastiques et religieux tués?
4. Les Tutsi ont-ils été visés par le terrorisme et les assassinats dont on accusait le Président Habyarimana?
Habyarimana et son entourage ont sciemment fait l’objet d’accusations d’entretenir des escadrons de la mort et de planifier un génocide en collaboration avec les Français. C’est après la publication de l’ordonnance du Juge Bruguière en novembre 2006 sur les présumés coupables de l’attentat aérien et l’émission des mandats d’arrêt en février 2008, du juge espagnol Femando Andreu Merelles contre des militaires du Front Patriotique Rwandais pour leur implication dans le génocide et les crimes contre l’humanité commis au Rwanda, que le gouvernement rwandais mit en place une Commission nationale indépendante chargée de rassembler les preuves montrant l’implication de l’État français dans le génocide perpétré au Rwanda en 1994 (commission Mucyo). Dans le rapport de la commission, la coopération de la France avec la gendarmerie fut ciblée. L’objectif poursuivi était de mettre en doute les conclusions des enquêtes de la gendarmerie sur les assassinats et attentats terroristes commis par le FPR. Les enquêtes menées par des experts gendarmes français en collaboration avec nos gendarmes du Centre de Recherche Criminel et de Documentation (CRCD) ont établi l’implication du FPR. Des membres du FPR ont d’ailleurs témoigné et confirmé que les vagues d’attentats étaient effectivement l’œuvre du FPR. La Commission s’est acharnée contre le CRCD et sur le Colonel français Michel Robardey jusqu’à les accuser, d’avoir fiché lesTutsi sans aucune preuve. Nos enquêtes ont établi aussi que les propagandistes accusateurs de Habyarimana étaient des agents du FPR. L’informateur principal des experts enquêteurs sur les escadrons de la mort[30], un certain Afrika Janvier fut démasqué et mis en prison mais fut porté disparu. Sa disparition fit couler beaucoup d’encre de la part des associations de défense des droits de l’homme, soulignant le fait qu’il était le témoin clé sur les escadrons de la mort dont il faisait partie et l’implication de l’entourage du Président Habyarimana[31].
Le journal Umurava écrit que « Amnesty International a demandé aux autorités de libérer inconditionnellement Janvier Afrika emprisonné pour outrages à la dignité du Chef de l’État alors que tout le monde sait qu’il a été arrêté parce qu’il a révélé les secrets du clan. »[32]
L’association Kanyarwanda des droits de l’homme en date du 5 mars 1993 écrit sur la disparition de Janvier Afrika (guteza ubwega) en faisant état des motifs d’accusation de Janvier Afrika. « Il est considéré comme le témoin contre les autorités, avec en tête le Président Habyarimana, accusées d’être les organisateurs des assassinats et des massacres dont les Bagogwe furent victimes ».
Finalement en novembre 1994, Afrika Janvier signait de sa main un document avec un certain Ndikumana Vincent du Journal Isibo stipulant que : « Afrika Janvier a pu s’échapper de la prison le 28 février 1993 sous la protection du FPR. Qu’il était logé dans la famille de la tante du général Kagame Paul, chez le nommé Ruterandongozi Alexandre[33].
Habyarimana fut accusé faussement d’entretenir les escadrons de la mort qui ont tué le Frère des Écoles chrétiennes, un Canadien du nom de Cardinal, l’Italienne mademoiselle Locatelli, le Colonel Stanislas Mayuya, Emmanuel Gapysi, Félicien Gatabazi et Martin Bucyana. La Gendarmerie a mené des enquêtes et conclu sur l’implication du FPR dans ces assassinats. Les dossiers concernant le Colonel Mayuya et les étrangers étaient aussi dans les mains du Procureur général Alphonse Marie Nkubito. Celui-ci, en date du 29 novembre 1996 et en présence de Faustin Twagiramungu et de l’Adjudant belge René Henrard, nous expliqua comment le FPR avait exigé d’avoir ces dossiers qui l’impliquaient. Le Capitaine Christophe Hakizabera du FPR avait déjà déclaré que l’assassinat du Colonel Mayuya avait été commandité par le FPR. La Commission Duclert et même les enquêtes des avocats américains ne sont plus revenues sur ces assassinats et actes terroristes commis par le FPR.
Le rapport dit Duclert n’a pas pris en considération les déclarations du général Jean Varret. Celui-ci accuse le Chef d’État-major de la Gendarmerie d’avoir demandé des mitrailleuses pour exterminer les Tutsi. Son collaborateur le Colonel Michel Robardey explique qu’il s’agit d’une personne aigrie parce qu’il a été viré en 1993 de son poste de chef de la mission militaire de coopération et qu’il ne cesse de répéter ce que lui aurait dit le Colonel Rwagafilita en 1990. Le Colonel Robardey affirme lui avoir rappelé qu’il travaillait sous ses ordres avec les moyens qu’il lui donnait mais il a tout oublié dit-il. Il sied de rappeler qu’en 1992, le colonel Rwagafilita n’était plus à la gendarmerie. En quelle qualité aurait-il alors demandé des armes aux général Varret ?
Il en va de même des notes d’un certain Capitaine gendarme Ildephonse Munyaneza évoqués par des avocats américains dans un rapport d’enquête commandé par le gouvernement rwandais. Il est question d’une réunion au cours de laquelle il est fait état des gendarmes qui rançonnaient la population sur les barrages. La réunion et les propos sont inconnus de toutes les personnes citées. Le chef du service de renseignement à l’État-major, le major Jean Baptiste Nsanzimfura dont dépendait l’officier en question trouve ces notes bizarres.
La gendarmerie rwandaise et les coopérants français ont accompli au mieux leur mission. Les FAR ont accepté les accords de paix. Le pays n’a plus commandé les moyens de combat, le protocole de consignation des armes signé par le ministre de la Défense Augustin Bizimana, le Général Paul Kagame et le Général Dallaire était respecté par les FAR et le programme d’intégration des Forces du FPR et de celles du gouvernement était en cours. Le pays était engagé dans le système démocratique dans lequel les Tutsi avaient leur place. Plusieurs attestent la sincérité du Président dans les accords de paix. James GASANA écrit « Je ne doute pas que le Président Habyarimana voulait la réussite des Accords. Je n’ai pas vu qu’il apportait des freins à la réussite des Accords»[34]. Les diplomates dont celui des USA et de la Belgique sont venus le confirmer au TPIR.
Le Colonel Marchal rapporte que lors de son entretien avec le Président Habyarimana en date du 31 janvier 1994, il lui déclara que : « La réussite de la MINUAR, c’est aussi la réussite du peuple rwandais. »[35]
Sur les relations du Président Habyarimana avec les Tutsi, Faustin Twagiramungu traduit l’opinion de beaucoup de Rwandais ainsi : « Habyarimana n’a jamais été accusé d’être l’ennemi des Tutsi, en faveur desquels il avait fait son coup d’état et pour lesquels il a ouvert le secteur privé où ils étaient devenus prospères. »[36]. Le ministre James Gasana a donné beaucoup d’éléments de preuves que Habyarimana avait des bonnes relations avec les Tutsi. On se souvient qu’au début de la guerre, une trentaine de fonctionnaires Tutsi ont soutenu Habyarimana par leur lettre demandant au Président Museveni d’arrêter la guerre[37]. Monsieur Kajeguhukwa Valens, homme de confiance de Habyarimana parle de ses entrées faciles dans la famille Habyarimana. Il dit qu’il avait infiltré la forteresse de l’ennemi pour pouvoir mieux la détruire[38]. C’est plutôt Habyarimana qui était harcelé et menacé. Et comme le dit si bien l’officier de renseignement de la Minuar le Capitaine Claeys, Habyarimana était la pièce maîtresse des accords de paix.
A la question de l’avocat de la défense ; « d’après vos renseignements, au moment précis entre votre arrivée et votre départ, le Président Habyarimana constituait un verrou de sécurité à cette bombe à retardement qu’était la situation politique au Rwanda où il y avait une forte tension entre les pro-FPR et les pro-gouvernementaux? », le capitaine a répondu :
« Pour moi, le Président représentait la personne qui avait signé les Accords d’Arusha. C’était en cette qualité-là qu’il devait être considéré ; il est partie impliquée dans l’exécution de ces Accords de paix, il est censé suivre les Accords signés. C’était donc le ciment dans le processus de paix »[39].
5. Le FPR empêcha la Force de maintien de la paix (la Minuar) d’accomplir sa mission.
Le Président Emmanuel Macron a bien raison et sa position est fondamentale quand il dit : « À Arusha, en août 1993, la France pensait, aux côtés des Africains, avoir arraché la paix. Ses responsables, ses diplomates, y avaient œuvré, persuadés que le compromis et le partage du pouvoir pouvaient prévaloir. Ses efforts étaient louables et courageux. Mais ils ont été balayés par une mécanique génocidaire qui ne voulait aucune entrave à sa monstrueuse planification ».
Le Général Paul Kagame et ses hommes ont mis les bâtons dans les roues de la Minuar. Le commandant de la force, le Général Dallaire fut manipulé et les casques bleus furent infiltrés. Le Général Paul Kagame mit en œuvre son plan de guerre. C’est bien en tout cela que se trouve la monstrueuse planification ayant conduit à la mécanique génocidaire.
Le Colonel Luc Marchal fait état « d’une radicalisation grandissante du FPR, perceptible. TOUT est sujet à discussion. Les incidents entre le Front et la MINUAR se multiplient. Tout est prétexte à confrontation comme si le FPR tentait de se faire une idée de la limite où il peut aller [40]». Le FPR est allé jusqu’à imposer l’axe d’atterrissage des avions à l’aéroport de Kanombe.
Le Général Dallaire fut tellement focalisé sur la planification du génocide dans le chef du Président Habyarimana qu’il n’était pas conscient que le véritable plan était devant lui. Ainsi, au cours d’un entretien le 2 avril 1994 à Mulindi avec Paul Kagame, ce dernier s’ingénie à cacher les mouvements des troupes de l’APR et esquive les questions cruciales concernant ses violations du cessez-le-feu dans la zone démilitarisée, il se contente de s’inquiéter à propos de l’admission de la CDR et du PDI au sein du parlement de transition. Le général Dallaire en reste là, mais il note l’attitude distante de Paul Kagame et sa vision: « J’ai regardé son visage. Jamais, je ne l’avais jamais vu aussi sombre. Il a seulement ajouté que nous étions à la veille d’un cataclysme et qu’une fois enclenché, aucun moyen ne permettrait de le contrôler »[41]
Plus tard, fin avril 1994, lors d’une rencontre à Mulindi avec le chef de l’APR, le Général Dallaire écrit encore après avoir évoqué les menaces pesant sur toute intervention de la Minuar face à l’offensive de l’APR sur Kigali et l’accès de l’aide humanitaire, : « nous avons commencé à discuter de la situation de la bataille elle-même, et j’ai étendu ma carte militaire entre lui et moi sur le sol… Il a terminé la discussion de ses plans militaires de façon brutale et a détourné la conversation sur les négociations d’Arusha, qui devaient commencer le matin suivant… Au cours de notre entretien, j’ai demandé pourquoi il ne sautait pas directement à la gorge de ses ennemis à Kigali. Il a complètement ignoré les implications allant de pair avec ma question. Il savait très bien que chaque jour de bataille dans la périphérie de Kigali entraînait la mort des Tutsi qui se trouvaient derrière les lignes de l’AGR »[42]
Le Général Dallaire était obnubilé par le plan machiavélique des « Amasasu » de Habyarimana, à savoir « L’Alliance des Militaires Agacés par les Séculaires Actes Sournois des Unaristes » et cela de telle sorte qu’il n’agissait pas en priorité sur le Général Kagame. Interrogé sur une lettre non signée qu’il déposait comme preuve du plan machiavélique de Habyarimana lors de sa déposition devant le TPIR du 19 janvier 2004, Dallaire répond : « Cette lettre du 3 décembre 1993 confirmait une information que nous avons reçue du Représentant résident du PNUD, Monsieur Amadou Ly du Sénégal qui nous a été d’un très grand secours dans l’évolution de la mission, puisqu’il était dans le pays depuis trois ans ».
Le spectre de l’Amasasu (une balle en kinyarwanda) et l’ombre du colonel BAGOSORA poursuivaient le travail de sape, introduisant même le doute dans les démarches internationales en faveur d’un rapprochement urgent entre le MRND et le MDR, les deux formations républicaines les plus importantes. On se reporte ici à la lettre du 20.01.1993 de l’IDC au Secrétaire général du MRND et au plaidoyer du Ministre français délégué à la Coopération du développement Marcel DEBARGE pour un » front commun » en février 1993, après l’offensive sanglante de l’APR sur Ruhengeri[43].
Ces démarches étaient développées grâce à un nouveau rassemblement très prometteur, « le Forum Paix et Démocratie », lancée par Emmanuel GAPYISI, président du MDR en préfecture de Gikongoro, et Stanislas MBONAMPEKA.
Le coup de grâce porté au « Forum Paix et Démocratie » fut l’assassinat de Gapyisi le 18 mai 1993.
L’assassinat du leader du PSD Félicien Gatabazi en février 1994, vint terminer le cycle de l’élimination systématique des élites politiques clés, en attendant l’assassinat du Président Habyarimana suivant le probable plan intitulé « L’environnement actuel et l’avenir de l’organisation, Scenario IV » dans lequel le FPR prévoyait la prise totale du pouvoir en se servant des Accords d’Arusha comme tremplin pour éloigner par la violence s’il le faillait le Président Habyarimana et tout son entourage huit mois après la signature des accords de paix.[44]
Le spectre des « Amasasu » revenait dans l’actualité puisqu’il fut la cause de la démission surprise du ministre de la défense, James Gasana et sa fuite du pays.
Il écrit dans sa lettre de démission « en raison des menaces persistantes et des actions de sabotage dont je fais l’objet dans mes fonctions. Ces menaces qui me placent, ainsi que ma famille, dans une situation d’insécurité permanente sont l’œuvre d’un groupe politico-militaire anonyme qui se donne pour nom AMASASU ».[45]
Madame Van Hevel de l’Ambassade de Belgique à Kigali « fait un exposé très vivant de la situation qu’elle a vécue au Rwanda. La lettre du 03 décembre (1993) de l’AMASASU considérée comme un pamphlet au moment même, a acquis toute son importance peu après. Le meurtre de Gatabazi constitua le deuxième test à l’égard de l’organisation internationale, la Minuar. Cette-fois ci, il est incontestable qu’il y a une préparation (e.a les listes). Elle se souvient qu’au moment de la chute de l’appareil présidentiel, certains noms ont été mis en avant (Serubuga, Rwagafilita, Baransalitse, Buregeya…) »[46]
Le sénégalais Amadou Ly, Représentant du PNUD au Rwanda était un des principaux conseillers et informateur du général Dallaire. Cette même personne influença probablement son compatriote Bacré Waly Ndiaye rapporteur de l’ONU sur les violations des droits de l’homme quand celui-ci est venu de sa propre initiative au Rwanda après le dépôt du rapport de la commission internationale et pour refaire l’enquête et confirmer qu’il y avait eu génocide en 1993[47].
Deux autres Sénégalais veillaient aussi sur le Général à savoir son officier de renseignement le Capitaine Amadou Deme et son aide de camp le Capitaine Faye[48].
Toutefois, le capitaine Deme a finalement épinglé la lourde responsabilité des chefs de l’APR dans le blocage systématique de la coopération avec la Minuar et notamment en violant massivement le cessez-le-feu et dans le rejet de toute trêve proposée afin de permettre aux FAR et à la Gendarmerie de mettre fin aux massacres et au génocide et de rétablir au plus vite la sécurisation de la partie gouvernementale.
Le capitaine Deme a pu accéder immédiatement au site du crash de l’avion présidentiel le 6 avril 1994 et recueillir sur place les premiers indices de l’attentat accablants pour l’APR.[49]
En fin de compte, le plan machiavélique et les Amasasu n’étaient qu’une machination du FPR et ses associés. Le ministre de la Justice qui à l’époque était Procureur général a expliqué à l’auditeur militaire belge Monsieur Nicolas Van Winsen l’origine de cette affabulation macabre. « Le ministre (Nkubito) connaît cette lettre, elle a été rédigée par le pouvoir politique (opposition Faustin Twagiramungu) et tapée par le frère (actuellement décédé) de Nkubito. Il s’agit d’une certaine manipulation pour voir comment la Minuar peut réagir »[50].
Le Général Dallaire fut perturbé par le plan du génocide qui lui a été communiqué par Turatsinze. Il envoya à l’ONU un télégramme le 11 janvier 1994 faisant état des caches d’armes et du plan d’extermination des Tutsi. Ce télégramme fut utilisé par la commission du Sénat belge et par le Procureur du TPIR, mais il n’a pas été retrouvé dans les archives de l’ONU[51]. L’informateur Jean-Pierre Turatsinze, ce responsable des « Interahamwe » en préfecture de Kigali après avoir accompli sa mission d’intoxication, rejoignit ses maîtres à Mulindi[52]. De là, il disparut de la circulation, alors qu’il aurait été un témoin clé devant les juridictions statuant sur le génocide.
Le Commandant en chef de la mission, le Général Dallaire fut aveuglé par les plus gros mensonges du FPR sur Habyarimana qu’il compare à un diable à qui il a serré la main (titre de son livre). Dallaire fut dévié de sa mission comme le rapporte le Représentant de Secrétaire général de l’ONU Monsieur Jacques-Roger Booh Booh. Celui-ci parle des dérives du Général Dallaire[53].
6. Le génocide dans les objectifs du FPR.
Le FPR a fait planer le spectre du génocide dans son communiqué du 8 février 1993. Après son attaque, il fit cette déclaration : « les troupes françaises continuent de soutenir l’intransigeance du Président Habyarimana contre un règlement négocié. Nous rappelons à la communauté internationale que ces troupes françaises en plus de la participation à l’effort de guerre du président, forment les agents de sécurité responsables du génocide qui a lieu au Rwanda. C’est sur ce fond de génocide, de rejet du règlement négocié du conflit et la présence des troupes françaises dans notre pays que les hostilités ont repris ».[54] Le FPR parle d’un génocide qui n’a pas encore eu lieu !
Le ministre de la Défense James Gasana précise « L’objectif de la nouvelle offensive du FPR était donc d’atteindre Kigali et prendre le pouvoir. Il comptait sur l’abandon de Habyarimana par la communauté internationale, car il a fait coïncider son attaque avec la sortie du rapport de la commission internationale d’enquête déjà cité. Il s’attendait à ce que cette commission conclut sur le génocide des Bagogwe, ce qui aurait alors donné une justification morale à sa prise de pouvoir et permis de faire couper tout appui diplomatique et militaire au gouvernement ».[55]
Le 12 avril 1994, le FPR pensait avoir gagné la guerre. Le Représentant du Secrétaire Général de l’ONU monsieur Booh Booh écrit à Kofi Annan « 12 April was reasonable successful day for APF. The government has packed in and left Kigali towards the South. RPF troops entered Kigali from all directions, also from de South»[56]. A cette même date, la porte-parole du FPR Mme Christine Umutoni à Kampala annonçait que le FPR attendait les ordres de Mulindi pour prendre Kigali.[57] Les services de renseignement de la Minuar rapportent : « Le FPR déclarait avoir une force de loin supérieure aux FAR. Il disait avoir 2400 militaires dans la capitale et attendait que l’évacuation des étrangers soit terminée pour prendre le contrôle de la ville. Il a même déclaré qu’il pensait pouvoir atteindre cet objectif dans la journée de mercredi. Le commandant de la MINUAR, le Général Dallaire, estime que les FAR n’ont aucune chance de l’emporter sur le FPR ».[58]
C’est dans ces circonstances que le Général Paul Kagame donna l’ultimatum de 48 heures aux forces étrangères pour qu’elles quittent le pays. Il refusa toutes les démarches pour un cessez-le feu.
Le 13 avril 1994, par la voie de son représentant à Bruxelles monsieur Claude Dusaidi, le FPR déclara qu’il y avait eu génocide et demandait à l’ONU la création d’un tribunal pour juger les génocidaires[59].
Le Rapporteur spécial des Nations Unies monsieur Degni Ségui mena l’enquête et l’importance de son travail fut ressortie lors de son témoignage à la commission sénatoriale belge. Le Président de la commission le rappela: « C’est en votre qualité d’expert en matière des droits de l’homme que nous souhaitons vous entendre. Vos cinq rapports sur le Rwanda ont d’ailleurs servi au Conseil de sécurité pour dresser son propre rapport ».
M.Degni Ségui : – « …J’attire toutefois votre attention sur le fait que je n’ai pas personnellement vu ces événements. J’ai recueilli des témoignages…
Mme Dua : « si j’interprète bien vos déclarations, vous avez donc enquêté et n’avez rien trouvé ?
Degni Ségui : Il faut se rendre compte qu’en situation de guerre nous n’avons pas la latitude nécessaire. Je me suis basé sur des témoignages et des documents mais je n’ai pas pu intervenir sur le terrain ».
… Le véritable problème consiste à savoir s’il y a eu un double génocide. J’ai recueilli des déclarations qui font part de 350.000 hutu tués…
Les différents actes commis par le FPR sont expliqués par la vengeance de punir les génocidaires. Il m’est donc difficile de me prononcer » [60].
Monsieur Degni Ségui laisse ainsi entendre que le FPR aurait fait un génocide à l’encontre des Hutu, génocide que plusieurs chercheurs aujourd’hui affirment avoir bien eu lieu.
Quant à celui des Tutsi, le Général Kagame avoua les avoir volontairement sacrifiés, lorsqu’au cours d’une réunion le 7 mai 1994 à Byumba avec le Général Dallaire, venu lui exposer ses soucis de respect des sites protégés de la MINUAR et de neutralisation de l’aéroport dans la perspective de l’arrivée d’un renfort de casques bleus, il n’hésitait pas à déclarer à ce dernier : « Cette guerre sera la cause de bien des sacrifices. Si les réfugiés doivent être sacrifiés pour la bonne cause, on considérera qu’ils étaient inclus dans ce sacrifice »[61] .
7. Des hommes d’Église ont participé au plan du FPR. Ils incitèrent à la haine et appelèrent au meurtre.
Des prêtres et des religieux surtout des Tutsi se sont engagés dans la lutte aux côté du FPR d’abord par leur refus de l’unité dans le Christ et dans le MRND pour la chercher aux côtés des chefs des réfugiés Tutsi. Le recruteur du FPR Mr Valens Kajeguhakwa parle dans son livre : « Rwanda : De la terre de paix à la terre de sang. Et après ? » des missions qu’il leur confia. Il y expose son habileté dans le travail de sape qu’il a su opérer au profit de la guerre du FPR pour la conquête du pouvoir. Un de ses objectifs était de s’appuyer sur le clergé catholique notamment d’origine Tutsi pour semer les divisions et la subversion au Rwanda, en vue de détruire le régime du Président Habyarimana[62].
Le Curé de Kicukiro, le Père Peters prit part à la guerre subversive en diabolisant le Président Habyarimana affirmant en 1992 qu’il y avait un génocide. Il écrivait ainsi à ses concitoyens en Belgique en mars 1992 « J’ajoute à cela le génocide en cours. Les bandes du parti unique ont déjà tué des milliers de Tutsi sur l’ordre du Président Habyarimana Juvénal, un vrai monstre. Maintenant encore, malgré les insistances des ambassadeurs, les bandes du parti, aidées par l’Armée et la Gendarmerie massacrent dans la province du Bugesera…. Or, ces « Nazis » nouveaux du genre ont tout en main : la presse, radio, police sans oublier la sinistre « sécurité » ….
….Qu’a fait l’Église : Aujourd’hui ; l’archevêque fait des appels pour aider les réfugiés des régions du Nord, mais jamais l’Église n’a fait quoi que ce soit pour les centaines de milliers de réfugiés Tutsi qui traînaient à l’étranger depuis trente ans»[63].
Le prêtre polonais curé de Kansi renchérit : « Mgr Nsengiyumva ne dit rien et même soutient le MRND. L’Église allait payer le prix ». Mgr Vincent Nsengiyumva n’avait-il pas démissionné du poste de président de la commission sociale du MRND ? Qu’aurait-il pu faire contre la décision d’attaquer le pays plutôt que de rentrer pacifiquement ?
Le Nonce Apostolique Mgr Giuseppe Bertello, pour lequel le Père Peters faisait des traductions des écrits en Kinyarwanda aurait déclaré que « la mort des trois évêques n’était qu’un incident de parcours anodin…que l’archevêque de Kigali méritait la mort[64] ».
Le Père Peters curé de Kicukiro, avec le FPR, détourna de leur mission les membres de la Force de maintien de la paix. Le commandant du détachement belge de la Minuar hébergé à Kicukiro rapporta comment ce prêtre les initia à leur mission : « … à la réunion, vers le 16 mars 1994 et en discutant avec lui (le Père Peters) qui avait une excellente connaissance de la région parce qu’il vivait depuis de nombreuses années et qu’il s’était opposé dès 1991 par des sermons, à la politique du Président et à la politique menée dans le pays depuis 1991. Ce Père m’avait fait une situation globale de ce qui se passait dans les environs en m’expliquant que la fameuse liberté pour chacun de montrer son opinion par exemple en affichant son appartenance à un parti était limitée aux gens du MRND et de la CDR, les deux partis présidentiels »[65].
Le Colonel Marchal témoigna sur le comportement de ce prêtre : « pour avoir eu des contacts avec ce prêtre en question, je peux témoigner que c’est un prêtre qui avait des idées bien engagées. Il ne se contentait pas de prêcher la bonne parole, la parole du Seigneur, mais, dans ce qu’il exprimait comme sentiment, il n’y avait pas que des sentiments chrétiens. Il y avait des sentiments que je pouvais caractériser comme politiques à l’égard du régime — enfin, ou à l’égard des autorités gouvernementales. C’est sa responsabilité, mais à l’une ou l’autre reprise, j’ai quand même été moi-même un peu interpellé par un certain sentiment d’agressivité de cet ecclésiastique à l’égard des autorités en place »[66].
Ces hommes d’Église appelaient à la haine et au meurtre de leurs évêques et du Président Habyarimana particulièrement.
Dans cette même tonalité de violence, le 14 mars 2004 sur RFI, Paul Kagame déclarait : « je m’en fous complètement de la mort de Habyarimana ; je m’en contrefiche. Je ne vais pas perdre mon temps à chercher comment on l’a tué ou qui l’a tué ; je me fous pas mal de tout ça. Pourquoi ce foin autour de l’avion, autour de Habyarimana ? Habyarimana était un tueur, c’était un génocidaire, un dictateur. A la limite on peut se demander ce qui est arrivé à l’avion mais sûrement pas d’avoir pitié de Habyarimana ».
La propagande du Père Peters a fait que certains parmi les casques bleus belges ont collaboré avec le FPR comme le déclara le major Podevjin à la commission sénatoriale belge : « Nous étions pro FPR » dit-il. Ce prêtre a créé la méfiance chez les casques bleus vis-à-vis de la gendarmerie à laquelle on refusa de confier la sécurité des réfugiés de l’ETO. La mort de ces réfugiés qu’on dit avoir été tués, lui incombe en quelque sorte. En outre, devraient être poursuivis ceux qui ont entraîné le Lieutenant Lotin et son peloton dans une mission suspecte sur les lieux proches de l’attentat aérien. C’est sur base de ce constat accusateur que le Lieutenant Lotin et ses hommes furent tués.
Monsieur le Cardinal,
Il est vrai que l’Église à toutes les époques n’a pas toujours perçu le danger dans ses relations avec le pouvoir mais il y avait toujours cette volonté de travailler ensemble pour le bien-être spirituel et matériel de la même personne, à la fois fidèle de l’Église et citoyen de l’État.
Malgré ses faiblesses, l’Église avait toujours été au-dessus de la mêlée. Elle faisait entendre sa voix à travers ses organes de presse le journal Kinyamateka et la revue Dialogue. L’Église exprimait son indignation face aux problèmes du moment et aux abus résultant de l’exercice du pouvoir par l’État. Vous êtes sans ignorer ce qui est arrivé au Père Guy Theunis rédacteur de Dialogue et à l’Abbé André Sibomana de Kinyamateka quand ils ont voulu faire la même chose sous le régime du FPR. Ils furent traités de génocidaires, le premier fut mis en prison et l’autre maltraité. Après la prise du pouvoir par le FPR, certains parmi les hommes d’Église ont choisi la revue Golias, dont vous connaissez les tendances, pour s’exprimer et attaquer les membres de l’Église, en tête les évêques.
J’ai pu noter quelques faits sur le rôle de l’Église pendant la guerre. En 1991, je fus invité dans le presbyterium du diocèse de Kigali pour informer les curés autour de leur évêque sur l’état de la situation dans la zone des combats où se trouvait encore la population. Ils ont exprimé leurs inquiétudes sur les arrestations suite aux tirs de la nuit du 4 au 5 octobre 1990. Ils m’ont demandé de le dire au Président Habyarimana[67]. En 1992, j’ai tenu une réunion à Rukomo avec le Représentant des Pères missionnaires d’Afrique le Père Vleugels, le curé de la paroisse de Rukomo, le Père Otto Mayer, le Représentant de Mgr Ruzindana de Byumba pour examiner la situation des déplacés de guerre pour l’assistance de la gendarmerie dans la lutte contre les pillages. Dans le contexte de la guerre et de la démocratisation, l’Église a entrepris des démarches pour la médiation au sein des partis politiques[68], elle a secouru les réfugiés.
À Kabgayi depuis le mois d’avril 1994, les évêques ont réussi avec les gendarmes à assurer la sécurité des réfugiés toutes les ethnies confondues. Quand le FPR est arrivé à Gitarama, les gendarmes ont demandé aux évêques de fuir parce qu’ils n’étaient plus à même de les protéger. Les évêques n’ont pas voulu abandonner les réfugiés qui étaient là sous leur protection. N’avez-vous pas entendu l’homélie de Mgr Vincent Nsengiyumva réfugié à Kabgayi fustigeant les actes de vengeance? Il disait « Nyabuneka, baca umugani ngo ingoma idahora iba ari igicuma. Itegeko ly’Imana n’aya bantu atubuza kwica, muhagalike kwica inzirakarengane ».
Le Père Blanchard a témoigné de la collaboration avec la gendarmerie pour la pacification d’abord et puis pour les opérations de secours aux personnes menacées à Nyamirambo d’avril à juin 1994[69].
À Cyangugu, l’évêque accompagné de gendarmes a pu sauver des prêtres, des religieux et des religieuses dans les paroisses. Les militaires de l’opération turquoise avec les gendarmes ont protégé les Tutsi du camp de Nyarushishi. Ils ont procédé au désarmement des interahamwe sur la route de Cyangugu[70]. À Cyangugu le Major gendarme Augustin Cyiza rassembla tous les gendarmes qui ont fait mouvement vers le Sud et ils furent tous intégrés dans l’APR.
Vous avez peut-être entendu parler de la disparition de cet officier militant défenseur des droits de l’homme et des autres disparitions qui se font. Pensez-vous que ces faits ne devraient-ils pas être dénoncés ?
8. L’attentat aérien du 6 avril 1994, élément déclencheur du génocide.
En mars 1994, Radio Rwanda anima un débat entre les hauts responsables de la sécurité dans Kigali, à savoir le Préfet, le Sous-préfet, le Procureur de Kigali, le Commandant de gendarmerie du groupement Kigali et le Bourgmestre de la Commune de Kicukiro. Ces personnes se sont accordées sur la situation trouble et tendue parmi les habitants. Cette même situation se retrouvait mutatis mutandis dans l’ensemble du pays et que c’est le FPR qui tirait les ficelles[71]. De toute évidence, l’assassinat du Président Habyarimana devint la goutte d’eau qui fit déborder le vase. Tous les experts, les enquêteurs et témoins présents sur le terrain reconnaissent que l’attentat a mis le feu aux poudres. Le Professeur Reyntjens qui a fait beaucoup d’enquêtes sur le dossier rwandais l’affirme: « l’attentat a été l’étincelle. Ceux qui ont descendu cet avion, savaient très bien quelles seraient les conséquences de cet attentat et, dans ce cas, porteraient une responsabilité juridique, et je ne dis pas politique, maintenant, mais juridique, dans le génocide. Parce que sachant très bien quelle serait la conséquence, ils auraient déclenché un génocide”[72].
André Guichaoua expert du TPIR déclarait le 5 novembre 1997, devant la Chambre II: « Très certainement, le déclenchement des événements avec l’assassinat est certainement un acte décisif qui, à partir de ce moment-là, rendait certainement fatale la suite des événements…. je crois que ceux qui en ont pris l’initiative ont effectivement placé les enchères à un niveau très élevé, c’est-à-dire que la mobilisation politique échappait, en tout cas à une large partie de la classe politique, qui n’était plus en mesure de peser sur les événements ou de maîtriser les forces que l’on libérait avec cet assassinat »[73]..
Celui qui a abattu l’avion a une grande responsabilité et c’est à juste titre que le Procureur du TPIR Madame Carla Del Ponte, souligna cette nécessaire connaissance des auteurs de l’attentat pour connaître l’histoire du génocide « It would be within her juridiction to investigate the downing of the plane if we have evidence or concrete suspicion that the assassination of the President was an act related to genocide. If this is the case the investigation will be reopened… I have no information, no document, nothing. I read about it for the first time in Canadian press. If it is the RPF that shot down the plane, the story of genocide must be rewritten ». Il faut se rappeler que Carla Del Ponte fut écartée du TPIR au moment où elle s’apprêtait à lancer des mandats d’arrêt contre certains criminels du FPR.
Comment apprécier « la mesure du génocide des Tutsi » sans savoir celui qui a commis l’acte déclencheur ? Notez que des lourds soupçons pèsent sur le Général Kagame outre qu’il a fait lui-même l’aveu.
Monsieur Degni Ségui reconnut l’impact de l’assassinat du Président Habyarimana « L’attaque de l’avion constitue le nœud gordien du génocide ». Il donna une indication sur le pourquoi du refus de mener des enquêtes sérieuses sur l’assassinat du Président Habyarimana. Il dit : « Je n’ai pas de réponse à la question de savoir qui l’a tué j’invoque l’interférence entre les puissances qui ont laissé faire alors que tout présageait ce qui allait arriver »[74].
L’ancien Président français Nicolas Sarkozy, à l’occasion de sa visite à Kigali en février 2010, reconnaissait une erreur d’appréciation.
9. La persécution d’une catégorie de Rwandais et l’obstruction à la recherche de la vérité.
Le FPR a promulgué des lois-supports du génocide, dont la loi organique sur la liste des génocidaires de la première catégorie[75]et la loi sur la procédure d’aveu et de plaidoyer de culpabilité [76]. Des prisonniers et d’autres personnes furent mobilisés pour accuser les présumés responsables. Le témoin CBP 99 parmi tant d’autres, rapporte comment il fut amené à confectionner les aveux des prisonniers. « Lors d’une séance de sensibilisation qui avait été organisée par le procureur général près la cour d’appel de Ruhengeri, en la personne de Monsieur Karugarama Tharcisse. Il dit alors que les autorités ont la conviction que ce ne sont pas eux (les membres de la population) qui ont commis le génocide ; qu’ils ont la conviction qu’ils ont été induits dans le crime de génocide par les autorités politiques, militaires, religieuses, et qu’eux, pratiquement, ils n’ont rien à faire dans les prisons, et que pour rentrer, ils leur demandent une chose, c’est de pouvoir charger, en termes d’accusations, ces autorités politiques, civiles, militaires, religieuses qui ont planifié, pratiquement, le génocide »[77].
Devenu ministre de la justice, Karugarama fit tout son possible pour gêner le travail du TPIR par l’ingérence et le boycott des procès. L’analyse critique sur le Tribunal International pour le Rwanda par André Sirois, juriste canadien engagé par le Bureau du Procureur du TPIR,en dit long.[78]
Les listes de personnes à poursuivre restent des armes pour faire la chasse à l’homme qui se trouve à l’extérieur du pays et critique le régime. A la question : Des ONG internationales reprochent à Paul Kagame de violer les droits de l’homme dans son pays. Vous répondez : « Ceux qui disent cela n’ont pas pris la mesure du génocide contre les Tutsi. Il y a des forces à l’extérieur du pays notamment de la diaspora qui en sont restées à l’idéologie de 1994. Et elles ont des relais au sein même de notre société. Ces forces poussent à la division, soufflent l’esprit de violence dans un pays qui a connu massivement la plus extrême des violences. Ce qu’à l’extérieur on appelle opposition politique, à l’intérieur nous savons que c’est un paravent pour ceux qui veulent ethniser le débat, soulever une communauté contre une autre et terrifier les victimes du génocide ». N’est-ce pas le même discours que celui des autorités politiques qui diabolisent une certaine diaspora pour ne pas l’écouter dans ce qu’elle dit de vrai sur la gouvernance du pays ?
Non seulement on fait un procès d’intention mais aussi on érige des barrières à quiconque cherche à lever le voile sur les mensonges à propos des événements de 1994 et sur le génocide. La preuve en est aussi le fait que le gouvernement rwandais sabote systématiquement toute tentative de relocalisation des prisonniers Hutu acquittés par le TPIR. Certains sont ainsi bloqués à Arusha depuis des dizaines d’années alors que leurs familles ont des papiers en règle dans des pays occidentaux. Il s’agit d’une stratégie d’enfermement des preuves vivantes d’un génocide non planifié par la partie gouvernementale pour ainsi continuer à soutenir les éléments de preuves d’une planification qui ont été battus en brèche dans des débats contradictoires devant les juges du TPIR[79].
Cette politique de persécution va plus loin puisqu’elle porte aussi sur les descendants des réfugiés suivant la doctrine du Général Kabarebe qui exhortait les jeunes du FPR à se préparer contre les enfants des réfugiés qui ont la chance de faire des études car pour lui, ils présentent déjà une menace[80]
Vous affirmez que « Kagame a arrêté le génocide lui et lui seul » allant jusqu’à l’absoudre de toute responsabilité dans d’autres crimes pourtant bien documentés dans des rapports très crédibles tels le Mapping Report que vous critiquez. Il faut plutôt reconnaître qu’il a mis fin à la guerre par la victoire militaire. Le Général Paul Kagame l’a préparée avec ses conseillers, avec ces hommes d’Église comme le Père Peters et d’autres ecclésiastiques qui ont mené des actions lourdes de responsabilités, en intoxiquant l’opinion et en participant à l’effort de guerre. Ils ont amené le Général Kagame et ses sponsors à faire des choix qui se sont avérés catastrophiques pour les Rwandais. Cette guerre aux conséquences incalculables n’était pas justifiée. Une guerre sans laquelle le génocide n’aurait pas eu lieu.
Le génocide et les crimes de guerre sur la population ne peuvent pas être justifiés par la vengeance ou la poursuite des génocidaires. Comme la vengeance du Président Habyarimana, la peur qu’à l’arrivée du FPR les voisins Tutsi se joindraient au FPR et à ses brigades ne peuvent justifier les massacres d’innocents.
L’identification des auteurs et de leurs responsabilités exactes, tant pour le génocide des Tutsi que pour celui des Hutu mais aussi pour les autres crimes permettra de rétablir la vérité et réconcilier les Rwandais.
Vous faites donc une erreur en ne pensant qu’à la seule réparation envers les seules victimes Tutsi, les droits des Hutu ne dépendant que de cela. Cette politique fait des Hutu des otages et des victimes expiatoires.
En tant que fils de l’Église catholique qui a eu le bonheur d’être défendu à Arusha par un évêque Tutsi, je rends hommage à toutes ces personnes qui risquent leur vie en proclamant la vérité. La bonne mesure du génocide devrait être d’abord chrétienne et humaine. La perte d’une personne chère crée la souffrance. Alors faut-il nous disputer les morts plutôt que de construire la vie de tous les gens qui souffrent la perte des leurs? Les Chrétiens doivent-ils oublier leurs pasteurs évêques, prêtres et religieux assassinés à cause de leur ethnie?
Monsieur le Cardinal, mon intention n’est pas de polémiquer. Mais de vous demander de remettre l’Église au milieu du village. De remettre les événements tragiques qui ont endeuillé le Rwanda et qui continuent à certains égards, dans leur véritable contexte. Nous sommes nombreux parmi vos fidèles de l’Église catholique qui vous prient de nous guider sur le chemin de la réconciliation basée sur la vérité et la justice. Nous vous demandons de condamner le crime quel que soit son auteur et d’aider la justice dans l’examen des cas de ceux qui ont empêché la force de l’ONU d’exécuter sa mission, spécialement suite à l’assassinat des casques bleus suspectés de participation à l’attentat aérien.
Je ne doute pas que l’Esprit de lumière nous guidera tous sur le chemin de la Vérité et de la Vie.
Veuillez agréer, Monsieur le Cardinal, l’expression de ma très haute considération.
[Signé]
Augustin Ndindiliyimana
Général Major, Ancien ministre et Ancien Chef d’État-major de la Gendarmerie Nationale.
Copie pour Info à
Monseigneur Aldo GIORDANO, Nonce Apostolique auprès de l’UE
Monseigneur Augustine Kasujja Nonce Apostolique auprès du Royaume de Belgique
Monsieur Vincent Van Quickenborne Ministre de la Justice du gouvernement fédéral de Belgique
Aux membres de la Commission Afrique Centrale des Rencontres pour la Paix
Le journal La Croix.
Maître Christopher Black et Maître Vincent Lurquin.
NOTES
[1] Lettre du Président du Sénat Augustin Iyamuremye. Lettre N° 0345 du 06 mars 2020.
[2] L’Abbé Alexis Kagame a écrit beaucoup de livres sur le Rwanda dont un abrégé d’Ethno-Histoire du Rwanda. Il fut membre de l’Académie Rwandaise de Culture, Membre de l’Institut pour la Recherche scientifique en Afrique Centrale, membre du comité scientifique Internationale pour la rédaction d’une histoire générale de l’Afrique (UNESCO).
[3] UNAR/ Union Nationale Rwandaise, parti politique dont les membres étaient principalement des Tutsi.
[4] Déposition Nyetera du 01 juin 07 dans l’affaire Ndindiliyimana et alii devant la Chambre II du TPIR
[5] Conférence de Makuza 3 mars 1964 à Paris suite aux troubles survenus au Rwanda provoqués par l’attaque des Inyenzi en décembre 1963. Monsieur Charles Uyisenga reprit ses idées sous le titre « A la recherche d’un remède efficace pour l’élimination définitive du terrorisme » Voir la Relève du 12 au 28 février 1991. Exhibit N°35 affaire Ndindiliyimana et alii.
[6] Déposition de Nyetera du 30 mai2007 dans l’affaire Ndindiliyimana et alii devant la Chambre II du TPIR.
[7] Voir la lettre du 30 avril 1990 signée par les prêtres de Nyundo : Augustin Ntagara, Callixte Kalisa, J.Baptiste Hategeka, Fabien Rwakareke, Aloys Nzaramba. Doc du TPIR K05049955-K0504959.
[8] Témoignages d’un prêtre et d’une femme laïque membre de la commission de préparation des messages des évêques adressés aux fidèles. Voir la note faite par l’un d’eux.
[9] Père Jacek WALIGORSKI « C’est toi Emma ? Ni wowe Emma ? » Copyright by Secrétariat pour les Missions-Province du Christ-Roi-Société de l’Apostolat Catholique, Zabki 2014.p 201.
[10]Le mémorandum du ministre de l’intérieur et du développement communal daté 04/08/91 donne les informations détaillées. Document TPIR N° K0502973….
[11] Le ministre James Gasana rappelle que le Président donna des instructions claires au ministre de l’Intérieur Jean Marie Vianney Mugemana : un sous-préfet et un bourgmestre furent arrêtés. Cfr. James Gasana op cit. p 66.
[12] Nsanzuwera « La Magistrature dans l’étau du pouvoir exécutif » Ed Cladho, Kigali Novembre 1993.
[13] Kujurira Nsanzuwera yandikiye Grefiye w’urukiko rw’ambere rw’iremezo rwa Kigali 18 mars 1992 Doc L0020384 du TPIR. Ngeze sera libéré sur l’intervention de l’Ambassade des USA, voir sa lettre de remerciement déposé en preuve dans le procès Ndindiliyimana et alii.
[14] Voir le rapport de la commission dirigée par Augustin Iyamuremye. La gendarmerie est citée en exemple pour ses actions malgré les moyens limités. Doc K0503327- K0503349
[15] Voir la déclaration signée conjointement par le Président Habyarimana et le Premier ministre Nsengiyaremye le 7 mars 1993 Doc K0220842 du TPIR. Voir le rapport de la commission interministérielle dirigée par Mathieu Ngirira sur l’analyse du rapport de la commission internationale Doc K0504205-K0504215. Voir le rapport de la commission nationale indépendante dirigée par Augustin Iyamuremye Doc K0503327- K0503349. Le rapport Iyamuremye souligna le bon travail accompli par la Gendarmerie. Cet extrait a été déposé en preuve.
[16] Voir document Contribution des FAR à la Recherche de la vérité sur le drame rwandais (Doc. TPIR Exhibit DK 81 Défense Gratien Kabiligi).
[17] Jean Hatzfeld « Stratégie des antilopes » Ed. Seuil 2007, p 32
[18] Témoin GFR dans l’affaire Ndindiliyimana et alii transcrit 29 mars 2005.
[19] Père Jacek Waligorski « C’est toi Emma » p 255.
[20] Père Jacek Waligorski « C’est toi Emma » p 222
[21] Ce prêtre avait créé un journal « Umushyikirano » dont l’objectif était de dénoncer les inégalités sociales.
[22] Le Jacek Waligorski op cit p 270.
[23] Procès d’intention et faux–fuyant au sujet du Rwanda. Mise au point publiée en septembre 1998 par Filip Reyntjens.
[24] Professeur Reyntjens « procès d’intention et faux-fuyant au sujet du Rwanda ; Une mise au point septembre 1998 ».
[25] Les Chefs d’État et de gouvernement avaient entériné les décisions de la commission sur les problèmes des réfugiés lors de leur conférence à Dar-Es-Salaam du 19 février 1991.
[26] Voir propos de Pasteur Bizimungu à Colette Braeckman et lettre de Justin Mugenzi du 31.05.1992 déposée en preuve dans l’affaire Ndindiliyimana et alii Exhibit N°348
[27] Voir la lettre du Chef d’État-major FAR au Ministre de la Défense du 22 juin 1992 (appui feu et la coopération française).
[28] Communiqué de presse du cabinet du Président le 02 mars 1993 signé Ruhigira Enoch.
[29] Voir communiqué du 7 mars 1993 sur le retrait des troupes étrangères.
[30] Le professeur Filip Reyntjens et le Sénateur belge monsieur De Kuipers se réfèrent à Afrika Janvier.
[31] Voir le journal Umurava-magazine N° 17 mai 1993
L’Association Kanyarwanda des droits de l’homme en date du 5 mars 1994 écrit sur la disparition d’Afrika Janvier (guteza ubwega).
[32] Journal Umurava-magazine N° 17 mai 1993.
[33] Lettre manuscrite datée du 11 novembre 1994, adressée au Conseil de Sécurité et signée par deux journalistes Afrika Janvier du journal Umurava et Vincent Ndikumana du journal Isibo. Doc K005866 à K005876.
[34] Le ministre de la Défense James Gasana témoigna à plusieurs occasions de l’engagement du Président Habyarimana pour la réussite des accords de paix. Il l’écrit dans son livre « Rwanda : Du Parti-État à l’État-Garnison » p 171-172, p 218-219
[35] Voir Luc Marchal, in Rwanda : La descente aux enfers, Éditions Labor, page 192.
[36] Voir Dialogue n° 206, septembre-octobre 1998, page 14.
[37] Voir Lettre des fonctionnaires Tutsi la Relève N° 148 du 16 au 22 novembre 1990
[38] Kajeguhakwa Valens: Rwanda, de la Terre de paix à la terre de sang et après? Paris, aux éditions Remi Perrin, p 164 et p 219.
[39] Déposition du Colonel Claeys dans affaire Ndindiliyimana et alii transcrit du 17 octobre 2005.
[40] Les situations de conflit entre la MINUAR et le FPR sont relatées par le Colonel Luc Marchal, Rwanda : la descente aux enfers p 102, 106, 112 etc.
[41] Roméo Dallaire, “J’ai serré la main du diable”, pp. 278-279.
[42] Roméo Dallaire : “J’ai serré la main du diable”, p. 413-414.
[43] C’est à tort que Madame Alison Des Forges y ait trouvé une tentative de faire éclater l’opposition démocratique cfr « Aucun témoin ne doit survivre. Le génocide au Rwanda » éditions Karthala 1999, pages 135 à 137
[44] André Guichaoua : “Les Crises Politiques au Burundi et au Rwanda”, pages 656-658.
[45] Voir lettre de démission du ministre Gasana James du 20 juillet 1993. Doc K0365895
[46] Voir le rapport de l’auditeur militaire Mr Van Winsen. « Mission de l’équipe judiciaire au Rwanda » le 21 décembre 1994 Doc K0075614
[47] Commission du Sénat belge audition de Monsieur Ndiaye du 16 avril 1997.
[48] D’autres Sénégalais déjà engagés dans le dossier rwandais depuis 1991, joueront des rôles importants au niveau du Tribunal Pénal International pour le Rwanda. Le premier Président du TPIR le Sénégalais Laity Kama en 1991 prit part à la formation des magistrats rwandais dans un séminaire sur les droits de l’homme, il élabora en collaboration avec le Procureur général Alphonse Marie Nkubito, un document sur la Justice au Rwanda. Laity Kama comptait sur l’aveu de culpabilité de Kambanda pour établir la planification du génocide mais celui-ci se rétracta. Le greffier du TPIR Monsieur Adama Dieng aussi Sénégalais s’impliqua dans le dossier rwandais depuis 1991 en tant que Représentant de l’association des juristes. Il avait attiré l’attention du Président Habyarimana sur les violations des droits de l’homme. Au TPIR, il était au même diapason que le Procureur Jallow (Sénégambie) qui remplaça Carla Del Ponte. L’intervention d’Adama Dieng sur Afrique Matin (RFI) le 27 juin 2007 fut très remarquée « Eh bien, comme l’a signalé le Procureur, l’assassinat, le crash de l’avion du Président Habyarimana n’entre pas dans le cadre du mandat du Tribunal ».
[49] Cfr Robin PHILPOT in « Rwanda, crimes, mensonges et étouffement de la vérité », éditions « Les intouchables », Québec 2007, pages 91 à 107.
[50] Voir le rapport de l’auditeur militaire Mr Nicolas Van Winsen. « Mission de l’équipe judiciaire au Rwanda » le 21 décembre 1994 K0075614
[51] Le télégramme du 11 janvier n’existe pas dans les archives de l’ONU. Un exemplaire plus ou moins semblable trouvé est une fabrication du Colonel Connaughton de l’armée britannique. C’est Mr Ralph Zacklin legal councel à l’ONU qui a donné ces informations. Les deux fax furent déposés en preuve Exhibit D67 A et D 67B. Le télégramme du 11 janvier fut retiré des archives peut-être parce qu’il renferme d’autres informations compromettantes. Il en serait de même de la boite noire de l’avion du Président Habyarimana que Dallaire affirme avoir envoyé à Kofi Annan.
[52] Voir témoignage de l’épouse de Jean Pierre Turatsinze aux enquêteurs du TPIR en date du 3 avril 2003, Doc K0272531.
[53]Le livre « Le patron de Dallaire parle » du Dr. Jacques-Roger Booh Booh, Ancien Représentant Spécial du Secrétaire Général de l’ONU au Rwanda, Chef de Mission de la MINUAR.
[54] Communiqué de presse du FPR du 8 février 1993 « resumption of hostilities in Rwanda » par Th Rudasingwa.
[55] Gasana James : « Du parti-État à l’État-garnison » p. 183
[56]-Service de renseignement belge et de la sécurité Doc K0082772 Exhibit N° D 49
[57] Doc service général de renseignement et de sécurité Doc K00082772 Exhibit D 496
[58] Service Renseignement belge et de la sécurité Doc K0082776 du TPIR.
[59] Exhibit du procureur N° 106 du 07 décembre 2007 et N° 186 du 22 janvier 2008.
[60] Sénat de Belgique COM-R 1-82 ; Session Ordinaire 1996-1997. Compte rendu des auditions, mardi le 17 juin 1997. Audition de M. DEGNI- SEGUI p 760-765.
[61] Roméo Dallaire : “J’ai serré la main du diable”, p. 451.
[62] Valens Kajeguhakwa, dans “Rwanda: De la terre de paix à la terre de sang. Et après ? », pp.216-217. Dans une lettre datée du 30 novembre 1993, l’Ambassadeur du Rwanda à Bujumbura à l’époque, Sylvestre Uwibajije informait le gouvernement rwandais des recrutements des combattants pour le FPR par l’Abbé Rutazibwa Privat ordonné par le Pape. ASBL Solidaire Rwanda. L’agenda de l’Abbé Ntagara trouvé par le service de renseignement intérieur indiquait les cotisations et les noms.
[63] Voir cette lettre du Père Peters à ses amis de Belgique en mars 1992 dans les archives du Procureur sous la cote K 0504286-K0 504287.
[64] Le message des consacrés adressé à Mgr Giuseppe Bertello du 18 février 1995; Cfr. documents KA 01-4236- KA 01-4237 du Procureur du TPIR
[65] Déposition du Capitaine Lemaire le 30 septembre 1997 dans l’affaire Ndindiliyimana et alii
[66] Déposition du colonel Marchal le 17 janvier 2008 dans l’affaire Ndindiliyimana et alii
[67] C’est le Premier ministre Sylvestre Nsanzimana qui résolut ces problèmes par des mesures d’amnistie générale.
[68] La Commission de concertation politique sous le multipartisme comprenait le Représentant de l’Église catholique en la personne de Mgr Thaddée Nsengiyumva,
[69] Voir les déclarations du Père Blanchard aux enquêteurs du TPIR, sa déposition dans le procès Bagosora et alii et son témoignage dans la revue « Dialogue ».
[70] Voir le documentaire sur l’opération turquoise où la Major gendarme Nzabonimpa avec les militaires de l’opération turquoise sont en train de désarmer les gens.
[71] Lettre ouverte adressée au Premier ministre de Belgique Alexander De Croo par moi-même le 29 mars 2021.
[72] Affaire Rutaganda : Transcrits d’Audience du 24/11/1997, pp 114-115.
[73] Affaire Kayishema et Ruzindana : transcrit de l’audience du 5/11/1997, pp 156-157.
[74] Voir l’audition de Degni Ségui par la Commission d’enquête parlementaire belge en date du 17 juin 1997.
[75] La publication de la liste de la première catégorie des génocidaires prescrite par l’article 9 de la loi organique N° 8/96 du 30 août 1996 (J.O N°17 du 01/09/96) K003428.
[76]La loi sur l’organisation des poursuites des infractions constitutives du crime de génocide ou de crime contre l’humanité commis à partir d’octobre 1990. Exhibit D 22 déposé dans l’affaire Ndindiliyimana et alii et considéré comme une loi incitative à la délation.
[77] Déposition du témoin CBP 99 du 3 mars 2008 p 48-52 dans l’affaire Ndindiliyimana et alli.
[78] Les malheureux débuts du Tribunal International pour le Rwanda Mondialisation.ca.13 octobre 2014.
http://www.mondialisation.ca/les-mauvais-débuts-du-tribunal-international-pour-le-Rwanda
[79] Les listes des personnes à exécuter et la formation des Interahamwe comme preuve de planification ont été plaidées et écartées dans les procès dont celui de Bagosora et alii notamment par la déposition en preuve des observations du Général Ndindiliyimana sur le livre d’Alison Des Forges « Aucun témoin ne doit survivre ». Les discours du Président Sindikubwabo et du Premier ministre Kambanda ont été démontés dans le procès Affaire N° ICTR 99-50T particulièrement par la défense de Justin Mugenzi.
[80] http://www.musabyimana.net/20200122-rwanda-le-general-kabarebe-preche-la-haine-contre-les-jeunes-refugies-hutu/