Après la longue liste d’assassinats, de disparitions et d’emprisonnements arbitraires d’opposants et critiques du régime rwandais, il y a de sérieuses inquiétudes quant à la sécurité et l’intégrité des leaders de l’opposition Victoire Ingabire et Bernard Ntaganda, qui ont été récemment harcelés une fois de plus par une arrestation et des perquisitions à domicile[1].
Au moment où nous écrivons ces lignes, nous avons appris que Mme Ingabire a reçu une nouvelle convocation de la police pour l' »interroger » le 17 juin. Ses proches craignent que lors de l’un de ces interrogatoires, sa vie soit en grave danger. Les Rwandais ont l’habitude de voir leurs dirigeants « se suicider » en garde à vue[2], comme cela est arrivé récemment à l’artiste et militant de la paix Kizito Mihigo.
Ingabire et Ntaganda ont passé de longues années en prison pour avoir critiqué le gouvernement actuel et pour avoir promu la réconciliation et la paix dans le pays. Tous deux ont subi le meurtre et la disparition de collègues et de collaborateurs du parti. Tous deux ont été témoins du meurtre, de la disparition forcée et de la détention arbitraire de militants des droits de l’homme, de journalistes et d’opposants politiques. Mais tous deux sont fermement engagés en faveur d’une paix durable au Rwanda et dans le reste de la région des Grands Lacs, c’est pourquoi ils sont respectés et soutenus par la population, y compris dans les pays voisins. En 2016, le Parlement européen a publié une résolution exprimant son inquiétude concernant le processus judiciaire de V. Ingabire[3], qui a finalement été libérée en 2018 et a reçu le prix des droits de l’homme de l’Association Pro Droits de l’Homme de l’Espagne en 2019.
Samedi dernier, le 13 juin, la police a fait irruption dans la maison de Victoire Ingabire et Bernard Ntaganda[4], et a mené une perquisition qui a duré presque toute la journée. Ils ont fouillé leurs ordinateurs, leurs téléphones portables et toutes sortes de matériel informatique, les laissant au secret avec leurs proches, qui n’ont pu découvrir ce qu’ils étaient devenus que le lendemain matin.
Les autorités responsables affirment avoir reçu des informations selon lesquelles les opposants collaborent avec des groupes armés qui se préparent à attaquer leur gouvernement. Nous considérons ces excuses comme une mise en accusation chronique des opposants. Des accusations qui finissent toujours par être dénoncées comme des machinations policières du régime. Dans la région, Ingabire et Ntaganda sont reconnus comme des leaders de la non-violence et ne demandent que l’ouverture démocratique et pacifique de l’espace politique rwandais.
Le gouvernement rwandais dirigé par Paul Kagame, connu comme le boucher des Grands Lacs, a commis les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité les plus atroces non seulement au Rwanda, mais dans toute cette région, si sensible à ses riches ressources minérales. Salués par beaucoup comme les libérateurs du Rwanda après le génocide de 1994, de multiples éléments de preuve, aujourd’hui impossibles à cacher, suggèrent qu’ils sont en fait les principaux responsables de cette atrocité.
Depuis la fin de la guerre qui a culminé avec le fameux génocide de 1994, le FPR de Kagame s’est maintenu au pouvoir à partir duquel il a semé la terreur, déstabilisé et pillé toute la région, en particulier la partie orientale de la RDC, comme en témoignent les nombreux rapports de chercheuses[5] et chercheurs[6] respectés, dont l’ONU[7].
Les 55 entités du Réseau d’Entités pour le Développement Solidaire-REDES, ainsi que l’Antenne Afrique-Europe Foi et Justice de Madrid, dénoncent le harcèlement auquel le régime du Rwanda soumet les dirigeants de l’opposition dans le pays. Avec eux, nous exigeons que la communauté internationale cesse de fermer les yeux sur ces crimes.
[1] https://www.dw.com/fr/rwanda-victoire-ingabire-d%C3%A9nonce-%C3%A0-nouveau-des-intimidations-du-r%C3%A9gime/a-53815035?maca=fr-Twitter-sharing
[2] https://umoya.org/2020/02/28/kizito-mihigo-ruanda-asesinato-politico/
[3] https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/RC-8-2016-1061_ES.html
[4] http://www.rfi.fr/fr/afrique/20200613-rwanda-ennuis-victoire-ingabire-perquisition-domicile?ref=tw
[5] https://l-hora.org/?p=7995&lang=es
[6] https://umoya.org/2014/04/16/legados-michael-hourigan-y-el-tribunal-penal-internacional-para-ruanda/
[7] https://umoya.org/2016/05/31/paul-kagame-y-los-informes-de-la-onu/
Source: REDES-AEFJN